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  • il y a 24 minutes
À travers un témoignage rare et intime, elle brise le silence sur l'omerta autour des abus sexuels dans l'Église. L'ancienne ministre Roselyne Bachelot révèle tous ses secrets d'enfance dans « Une omerta française » (Éd. Plon). Elle est l'invitée de Marc-Olivier Fogiel dans RTL Matin.
Regardez Face à Fogiel du 14 octobre 2025.

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Transcription
00:00Plus. RTL Matin. Thomas Soto.
00:05Il est 8h18, face à Fogiel, l'interview de Marc-Olivier Fogiel.
00:08Ce matin, vous recevez Roselyne Bachelot.
00:10On la connaît comme ancienne ministre, comme sociétaire des grosses têtes.
00:13Ce matin, elle est venue avec son stylo, puisqu'elle sort jeudi un livre qui va beaucoup faire réagir.
00:17Une omerta française, secret d'enfance.
00:19Livre dans lequel Roselyne Bachelot dénonce notamment les violences sexuelles cachées dans les institutions religieuses.
00:24Bonjour Roselyne Bachelot.
00:26Bonjour Marc-Olivier Fogiel.
00:27Merci d'être sur RTL. On va parler du livre dans un instant. Thomas le disait.
00:30Ancienne ministre, pour commencer, quand vous voyez votre famille politique, la droite, se déchirer comme elle se déchire aujourd'hui, ça vous inspire quoi ?
00:38Je pense que c'est une phrase fameuse et j'ai envie de leur dire, de Gaulle, réveille-toi, ils sont devenus fous.
00:46C'est devant le spectacle qu'ils offrent, je suis partagé entre le chagrin, le dégoût et la totale incompréhension.
00:55Voir la famille dont je suis issue, même si je ne suis plus adhérente depuis 2012, c'est un chagrin, c'est un vrai chagrin.
01:05L'union des droites jusqu'à l'extrême droite, un chagrin fort j'imagine pour vous ?
01:09C'est ce contre quoi je me suis battu depuis que je suis dans la politique et voir le reniement des idées.
01:19Pensez n'importe comment, disait le philosophe autrichien Grilparzer, procure toujours des satisfactions immédiates.
01:26Quand les choses se tranchent, il leur faudra supporter l'insupportable.
01:30Et Bruno Retailleau, c'est lui qui porte la responsabilité ?
01:33C'est une stupéfaction. Bruno Retailleau, c'est quelqu'un avec qui j'ai fait campagne dans les pays de la Loire.
01:38Lui en Vendée, moi en Maine-et-Loire. Je ne comprends pas ce qui se passe.
01:43Pour moi, nous avions bien des points de débat entre nous, mais c'était quelqu'un que je respectais et il a franchi les lignes.
01:52Vous le mettez au passé. Vous débutez votre livre, Roselyne Bachelot, en disant que vous avez longtemps hésité à l'écrire et à vous lire en vous-comprendant.
02:00Vous n'allez pas du tout vous faire des amis avec ce livre.
02:02Je n'essaie pas de me faire des amis, j'essaie de défendre. Je veux défendre les enfants.
02:07Et véritablement, d'ailleurs, dans ce débat politique qui nous anime en ce moment, on ne parle pas des vrais problèmes.
02:14J'ai regardé la composition du gouvernement, il n'y a pas de ministre à la protection de l'enfance.
02:20Il y a des vrais problèmes dans ce pays.
02:22Et je dénonce ces crimes, ça a été douloureux pour moi, parce que l'église catholique, elle m'a apporté énormément de choses.
02:30Et l'église catholique, vous en parliez avec l'ancien archevêque de Paris, vous la considériez, lui dites-vous, comme une organisation criminelle.
02:38Oui, bien sûr, parce qu'elle a protégé des prédateurs, elle a couvert des crimes, et ce n'est pas des choses isolées.
02:48Mais la SIAS, la commission qui a été créée par l'église catholique pour repérer les crimes sexuels de l'église, estime qu'il y a plus de 200 000 majeurs vivants
02:59qui ont été victimes de crimes sexuels dans l'église, ce n'est pas un phénomène isolé.
03:05C'est ce que vous racontez dans le livre, puisque vous avez été éduqué dans les établissements catholiques,
03:11vous racontez comment votre mère, mais enfin brutalement, a des rendez-vous en tête à tête,
03:16des rencontres de cœur à cœur, avec un prêtre qui voulait organiser ça avec toutes les jeunes filles de l'établissement catholique,
03:24dans lequel vous étiez déjà.
03:25Oui, là il y a une sorte de sacralisation de la fonction sacerdotale,
03:30qui fait qu'on a mis en danger à la fois les ecclésiastiques,
03:34qui étaient chargés de l'instruction religieuse dans les établissements catholiques,
03:39mais aussi évidemment les élèves.
03:42Et ma mère a ainsi vécu un drame épouvantable,
03:46avec son ami qui a été violenté, agressé sexuellement, violé par un prêtre.
03:53Marianne, abusé par le prêtre, qui l'a visité à l'internat.
03:56Voilà, Marianne, et qui s'est suicidée en se jetant dans le puits qu'il y avait à l'intérieur du collège.
04:01Il faut dire que c'était une histoire très lourde, puisqu'elle a été abusée par ce prêtre,
04:05elle est trombée enceinte, elle s'est suicidée,
04:08et les sœurs ont sali sa mémoire en expliquant qu'elle avait perverti le prêtre,
04:11on lui refusa une sépulture.
04:14Oui, bien sûr, puisque les personnes suicidées étaient considérées comme ayant commis un péché mortel,
04:19donc n'avaient pas droit à une sépulture religieuse,
04:22et on l'a jetée dans la fosse, sans une prière et sans une cérémonie.
04:29Mais vous dites que ce n'était pas un cas particulier,
04:31puisque vous racontez ces internats où il y avait des jeunes femmes abusées,
04:34puis tombées enceintes à cause des prêtre,
04:36elles étaient parquées, leurs enfants étaient adoptés par des familles bourgeoises.
04:41La commission d'enquête sur les crimes sexuels, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale,
04:48a parfaitement décrit, par exemple, ce qui se passait dans les institutions du bon pasteur,
04:54où il y avait d'ailleurs une collusion entre l'État,
04:56qui payait des prix de journée pour des filles qu'on estimait perdues, pourquoi ?
05:00Parce qu'elles pouvaient être victimes de violences sexuelles,
05:05ou parce qu'elles faisaient preuve d'indépendance et d'un esprit de révolte.
05:11Et dans ces institutions, payer des prix de journée, on faisait travailler ces jeunes filles,
05:15et elles pouvaient faire de la broderie, de la lingerie, etc.
05:20Et on touchait leur argent qu'on ne leur donnait pas.
05:25Vous, c'était moins une, Roselyne.
05:26Si votre mère n'avait pas mis fin à ces rendez-vous que vous voulez organiser ce prêtre de cœur à cœur,
05:32en gros, c'était un prédateur.
05:33On met les gens en danger, on mettait les jeunes filles en danger.
05:37Mais il faut savoir que l'omerta, elle sévit dans tous les milieux.
05:41J'ai lutté contre ça comme ministre de la Culture,
05:44où les violences sexuelles sont importantes,
05:47comme ministre des Sports,
05:50avec que j'ai mené la première action sur la lutte contre les violences sexuelles dans le sport,
05:55avec Isabelle de Mongeau, la tennis woman,
05:58qui a été violée par son entraîneur.
06:02Les violences contre les enfants sont partout.
06:05Chaque fois qu'il y a du pouvoir, il y a des violences sur les enfants.
06:08Mais vous mettez ça au passé concernant l'Église ?
06:10Non, je ne peux pas le mettre au passé.
06:12Regardez ce qui s'est passé pendant les vacances,
06:15où l'archevêque de Toulouse a nommé comme vicaire général,
06:18c'est-à-dire numéro 2 de l'évêché,
06:20un prêtre condamné à 5 ans de prison pour violences sexuelles.
06:24La même chose en ce moment dans l'archevêché de Marseille,
06:28dans l'archevêché de Toulon.
06:30On voit que l'Église ne met pas en place les structures
06:37et les précautions qui permettraient de lutter contre ces violences sexuelles.
06:41Mais est-ce que vous dites aussi que l'Église, d'une certaine manière, est protégée ?
06:43Puisque dans le livre, vous racontez le lien entre l'Église et les pouvoirs politiques.
06:48Et en fait, même si l'Église est de moins en moins fidèle,
06:52elle est tout aussi puissante et elle fait de l'entrisme, d'une certaine manière.
06:56Elle a gardé une capacité d'influence qui s'amenuise,
06:59mais surtout, comme disait Gramsci,
07:01il n'y a pas de pouvoir politique sans pouvoir intellectuel.
07:06Elle a des journaux, des cercles de réflexion, radio, télévision...
07:12Les journaux, vous citez le JD News, distribué dans les hôtels,
07:15les salons de coiffure et les taxis.
07:17Clairement, vous qui avez été ministre de la Culture, les médias Bolloré vous inquiètent ?
07:20Exactement, parce que c'est le reflet de ce que j'appelle un pagano-christianisme.
07:25C'est-à-dire ?
07:26C'est-à-dire, ce sont des gens qui poussent devant des valeurs chrétiennes
07:29et qui pourtant en font totalement abstraction.
07:34Ne pas porter secours à des personnes en situation difficile,
07:40c'est ne pas respecter les lois de l'Église,
07:43c'est de les utiliser, de les instrumentaliser.
07:46Tout ça fait écho, évidemment, à l'affaire Bétaram,
07:48aux accusations contre François Bayrou,
07:50qui n'aurait pas agi à l'époque contre les violences commises dans cette institution catholique.
07:53Vous le racontez dans le livre.
07:54Je vois le Béarnet se défendre laborieusement,
07:57emporté par une logorée qui masque péniblement les failles de ses déclarations contradictoires.
08:02Il ne pouvait pas ne pas savoir.
08:03Il est finalement le reflet de centaines, pour ne pas dire de millions de personnes,
08:12d'abord qui ont un problème d'incrédulité,
08:14en se disant que ce n'est pas possible que ça se passe,
08:17de déni, parce que combattre cela,
08:20ça emporte tellement de risques,
08:23de risques politiques, de risques personnels...
08:26Donc on tourne la tête.
08:27On se convainc que ça n'existe pas.
08:29Voilà.
08:29Et on se dit que c'est plus confortable de penser que ça n'existe pas.
08:32Et vous, Roselyne, pour terminer,
08:34vous avez tourné la tête aussi pendant toutes ces années ?
08:35Vous l'écrivez aujourd'hui, et c'est fort,
08:37mais pendant toutes ces années, vous saviez, vous n'avez pas dit ?
08:40Oui, quand on est enfant, c'est extrêmement difficile.
08:44Bien sûr, non, non, je ne parle pas de personnel politique.
08:46Et puis, on a du mal à penser qu'il ne s'agit pas d'une anecdote isolée.
08:51Et puis, tout à coup, on se rend compte qu'il y a un système.
08:54Et à partir du moment où j'ai réalisé qu'il n'y avait pas d'effet isolé,
08:59qui ne condamnait pas l'ensemble des structures,
09:03bon, voilà, mais à partir du moment où on se dit, voilà, c'est ça,
09:07c'est-à-dire qu'il y a 200 000 personnes qui ont été déjà agressées,
09:12que finalement, dans une classe,
09:16un enfant sur dix est victime de violence.
09:19Dans une classe de 30 élèves,
09:21il y a trois élèves qui ont été victimes de violences sexuelles.
09:24Vous êtes toujours croyante ?
09:26Je me suis séparée de l'église, justement, à cause de cela.
09:30Merci, Roselyne Bachelot, une omerta française,
09:33secret d'enfance chez Plon.
09:35Merci, Roselyne.
09:36Cette phrase est glaçante.
09:37Chaque fois qu'il y a du pouvoir, il y a des violences contre les enfants,
09:40c'est vrai que ça fait beaucoup, beaucoup réfléchir.
09:41Merci à vous d'être venu, Roselyne Bachelot.
09:42Merci, Marc.
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