- il y a 11 mois
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00:00Arnaud Benedetti, politologue et rédacteur en chef de la Revue Politique et Parlementaire, est avec nous dans ce studio.
00:04Bonsoir Arnaud et Nathan Devers, écrivain et philosophe.
00:08Bonsoir Nathan. Quelle actualité ce soir ? C'est une émission un peu spéciale.
00:12Nous ne parlons évidemment que de ce nouveau gouvernement dont on ne voit pas encore le profil exact.
00:19Pourquoi ? Parce qu'il devait être annoncé. Alors on nous a dit d'abord ce matin.
00:23Et puis à la mi-journée, et puis ce soir, et puis finalement on nous dit il n'y aura pas de gouvernement avant demain.
00:27Il y a des noms qui posent problème. On n'arrive pas à se mettre d'accord.
00:30François Bayrou et Emmanuel Macron se sont parlé plusieurs fois dans la journée.
00:33Ils devraient se voir d'ailleurs ce soir à l'Elysée.
00:36Plusieurs noms qui posent problème, je vous le disais.
00:39Il y avait Bertrand notamment, le président LR des Hauts-de-France, car François Bayrou redoute un peu la réaction du RN.
00:45On avait Mathieu Vallée, il y a un instant, porte-parole du Rassemblement National,
00:48effectivement, qui n'a pas dit des choses très aimables à propos de Xavier Bertrand.
00:53Voilà la situation ce soir.
00:55Va-t-on, pardon, je suis désolé, mais emmerder les Français à Noël ?
01:01On les a en papaouté pour les vacances d'été.
01:04Pour les Jeux Olympiques maintenant, c'est les fêtes de fin d'année.
01:08C'est le but, vous dites Nathan Devers ? Non mais sans blague.
01:10Non mais franchement, on ne va pas annoncer un gouvernement demain ?
01:13Si ? C'est le jour de deuil national pour Mayotte.
01:18A priori, on nous dit qu'on devrait annoncer potentiellement, je dis bien potentiellement, un gouvernement pour demain.
01:25Le jour de deuil national pour Mayotte.
01:27Tout est possible aujourd'hui, on est vraiment dans une séquence politique qui est tout à fait hors norme depuis quelques mois.
01:32Je rappelle quand même que François Bayrou, le jour où il a été nommé, ne devait plus être nommé,
01:38et une demi-heure après qu'on annonce qu'il ne serait pas nommé, il a été nommé.
01:42Donc tout devient absolument possible aujourd'hui dans cette phase politique.
01:48Oui, mais c'est difficile de constituer ce gouvernement.
01:51Parce que tout simplement, on voit bien qu'il y a des ajustements, des réglages de dernière minute,
01:56il y a une relation entre le Président de la République et le Premier ministre qui est quand même compliquée.
01:59On voit bien, vous avez parlé Xavier Bertrand, mais il y a un problème sur le quai d'Orsay.
02:02Il y a un problème sur le quai d'Orsay, parce que M. Bayrou veut confirmer Jean-Noël Barraud qui est membre du MoDem.
02:09Et apparemment, d'après ce que l'on comprend, M. Darmanin se verrait bien au quai d'Orsay et aurait plutôt les faveurs du Président de la République.
02:18Donc là, on est dans une situation qui est une situation, j'allais dire, de cohabitation qui ne dit pas son nom.
02:23En l'occurrence, entre un Premier ministre et un Président de la République sur ce que l'on appelle un des domaines,
02:27si ce n'est réservé, mais partagé en tout cas, du Président de la République avec le Premier ministre, les affaires étrangères.
02:32On a un sujet aussi sur le périmètre de Bercy.
02:35Parce que, souvenez-vous, sous Michel Barnier, le ministre du Budget, M. Saint-Martin, était directement rattaché à Matignon.
02:45Est-ce qu'aujourd'hui, M. Bayrou veut la même configuration ?
02:49Probablement, mais peut-être que le Président de la République n'y est pas forcément favorable.
02:54Il y a aussi cette question, et puis il y a cette dernière question qui vient d'apparaître, la nomination éventuelle de M. Bertrand.
02:59Moi, j'avais cru comprendre que le RN n'en faisait pas un casus belli.
03:03Si, je peux vous dire que Mathieu Vallée ne disait pas ça tout à l'heure, il y a quelques instants.
03:06J'ai bien entendu Mathieu Vallée, mais j'avais écouté M. Chenu, il y a quelques jours, qui disait que c'était certes pas sa tasse de thé, M. Bertrand,
03:13mais qu'il n'userait pas d'une censure vis-à-vis de M. Bertrand.
03:16Sauf qu'on parle de M. Bertrand comme garde des Sceaux, peut-être que là, en effet, ça pose problème pour le RN.
03:21Alors, Nathan Devers, analyste de la situation, ce soir, vous venez d'arriver aussi dans ce studio.
03:26Bon, je crois que les Français en ont marre, en fait. On est lassés.
03:30La situation, moi, je la formulerais autrement, enfin, depuis un autre point de vue.
03:37On a eu un drame absolu à Mayotte. Mayotte en ruine, avec des morts innombrables.
03:43On a une France avec une dette qui est en train d'abyssal, avec tous les risques économiques et financiers que cela présente pour les années à venir.
03:56On a un monde qui est plus chaotique que jamais. Un Donald Trump qui revient à la maison blanche.
04:01Une alliance qui est en train de se construire, un nouveau monde, en quelque sorte, entre les identitaires populistes de partout.
04:09On a des conflits qu'on n'arrive même plus à compter. On a l'Ukraine, on a le Proche-Orient, etc.
04:14Mais nous pouvons être rassurés parce que nous avons une classe politique.
04:18Et les attentats. Les attentats qui s'est passé au marché de Noël en Allemagne et cette période de fête qui est extrêmement délicate.
04:27Mais nous pouvons être rassurés parce que nous avons une classe politique qui est au rendez-vous de la prochaine élection présidentielle et qui ne pense qu'à ça.
04:35Mais il a raison, Nathan Devers.
04:37Je crois que ce décalage est vraiment flagrant.
04:42Dans ce cas expliqué très précisément, Arnaud, je crois qu'on peut dire que tous les enjeux pour M. Darmanin, pour M. Bayrou, pour M. Wauquiez, pour M. Retailleau, pour les uns et les autres,
04:53c'est de se dire, pour Mme Le Pen, comment vais-je faire pour aligner mes pions de la meilleure manière, de telle sorte que je puisse gagner les prochaines élections présidentielles, anticipées ou non.
05:02Alors, ils ont le droit d'avoir ce genre de problématiques si ça les amuse, comme ils étaient obsédés la dernière fois, juste après les élections législatives, par les élections de la vice-présidente de l'Assemblée Nationale, des casters, etc.
05:13Donc se distribuer les logements de fonction, les voitures avec le ping-pong, etc.
05:18Mais si vous voulez, je suis désolé, je fais exprès d'être démagogue.
05:20Mais parce que dans cette situation, c'est la classe politique, quasiment dans son ensemble, qui se comporte avec la plus grande démagogie.
05:26Il y a eu des élections législatives avec un record de participation depuis des décennies.
05:30Les Français ont dit qu'ils étaient avides de politique, c'est-à-dire de changement politique, d'affrontement politique, de débat politique, d'intérêt général.
05:37Et on a une classe politique qui n'est vraiment pas à la hauteur, qui n'est vraiment pas au rendez-vous de l'histoire, je dirais, toute force politique confondue.
05:44Une classe politique qui n'est pas au rendez-vous de l'histoire.
05:46Bonsoir Jean Garrigue, vous êtes historien, président du comité d'histoire parlementaire, auteur de « Jours heureux quand les Français rêvaient ensemble ».
05:54On avait envie de vous entendre, évidemment, ce soir, d'abord pour que vous nous apportiez votre regard d'historien sur la situation que nous vivons,
06:02qui, me semble-t-il, et je parle sous votre contrôle, est une situation inédite.
06:08Oui, totalement, en tout cas sous la Vème République.
06:10Ça pourrait ressembler à des choses qui ont pu se passer sous la IIIème ou sous la IVème, mais sous la Vème République, c'est complètement inédit.
06:18D'abord, parce qu'on a un paysage politique inédit, avec une assemblée qui est coupée en trois, et trois partis quasiment inconscigables,
06:27et donc parce que notre culture de la Vème République nous empêche de faire ce qu'il faudrait, justement, c'est de s'adapter à cette situation tout à fait inhabituelle,
06:38et je souscris totalement à ce que je viens d'entendre sur cette incapacité de nos responsables politiques,
06:46tous partis et confondus d'ailleurs, à se mettre au niveau de la situation.
06:51Ça s'appelle tout simplement l'intérêt général.
06:54À plusieurs reprises dans notre histoire, les hommes politiques de ce pays ont trouvé des solutions pour se mettre au niveau de l'intérêt général,
07:03que ce soit au sortir de la Seconde Guerre mondiale ou dans d'autres moments, même dans des moments où, finalement, la crise n'était pas plus aiguë qu'aujourd'hui,
07:11et malheureusement, force est de constater qu'aujourd'hui, on est dans quelque chose qui ressemble à de la tambouille de préparation de l'élection présidentielle,
07:23et ça n'est pas du tout, effectivement, à la mesure de ce que les Français pourraient attendre.
07:28Mais Jean Garrigue, historien, président du comité d'histoire parlementaire sur Europe 1, on entend ce que vous dites,
07:34effectivement, la classe politique, et vous partagez le point de vue de Nathan Devers, n'est pas à la hauteur.
07:39Certes, il y a une élection présidentielle dans la ligne de mire, mais il y en a toujours eu, Jean Garrigue.
07:44Qu'est-ce qui justifie aujourd'hui que notre classe politique ne prenne pas la mesure de ce qui nous attend ?
07:50Et bien précisément que, comme je venais de le dire, la situation que nous vivons sur le plan de l'arithmétique électorale, de rapport des forces,
08:02c'est une situation qui ressemble à ce qu'on a connu sous des républiques qui étaient des républiques parlementaires,
08:09et où le fait majoritaire n'existait pas comme il a existé depuis 1962 dans ce pays.
08:16Donc, dans une situation comme celle-ci, il faudrait mettre en place ce qu'on appelle la culture du compromis,
08:22qui, contrairement à ce qu'on entend très souvent, a existé et a été presque la norme dans toute notre histoire jusqu'à la Vème République,
08:31et même d'ailleurs à plusieurs reprises dans un camp ou dans un autre sous la Vème.
08:37C'est-à-dire que chacun puisse y mettre du sien pour essayer d'oublier pour quelques mois, voire même pour quelques années,
08:47les intérêts particuliers de tel ou tel parti, d'autant plus que les partis aujourd'hui sont des nains,
08:53qui n'existent quasiment plus dans la vie politique française.
08:57Donc, oublier les intérêts partisans qui conduisent à l'élection présidentielle pour essayer de trouver des solutions,
09:04au moins une solution transitoire, faire une solution de gouvernement qui puisse éviter la motion de censure.
09:11Et manifestement, on voit des difficultés énormes qu'une chose aussi simple, c'est-à-dire que prendre en compte l'intérêt général
09:21et donc que chacun, chacune des parties en lice, essaie de trouver véritablement une solution,
09:30c'est quelque chose d'aussi bête que ça, mais malheureusement ça se heurte.
09:37Alors, évidemment, les intérêts ne sont pas les mêmes aussi.
09:41On voit très bien qu'il y a deux forces qui sont tournées vers l'élection présidentielle.
09:46C'est d'un côté Jean-Luc Mélenchon, de l'autre côté Marine Le Pen.
09:50Là, les sondages la montrent comme une favorite incontestable.
09:56Donc, à la limite, on peut comprendre que ces deux forces-là jouent cette carte,
10:01mais de l'autre côté, vous avez tout le bloc sans prise, vous avez les républicains, vous avez les socialistes,
10:07et là, on s'attendrait peut-être à d'autres choses, à d'autres comportements politiques.
10:12Bon, alors Arnaud Benedict, si je vous voyais réagir effectivement à ce que disait Jean Garrigue...
10:15Ce que dit Jean Garrigue, comme souvent d'ailleurs, en l'occurrence.
10:17Mais la réalité, il y a une différence avec la Quatrième République, si vous voulez.
10:20On cite souvent la Quatrième République pour décrire la situation que nous vivons.
10:24La Quatrième République, si vous voulez, d'abord il y avait cette culture du compromis dont parle Jean Garrigue,
10:28mais surtout, si vous voulez, les assemblées de la Quatrième République parvenaient à constituer des majorités.
10:35C'était les coalitions gouvernementales qui étaient instables, mais on arrivait à constituer des majorités.
10:39Le problème avec cette assemblée nationale, c'est qu'on se rend compte maintenant, depuis le mois de juillet,
10:44qu'on était capable de mettre en place une majorité qui soit une majorité cohérente et arithmétiquement suffisamment forte
10:50pour permettre à un gouvernement de s'imposer, enfin en tout cas de gouverner dans la durée.
10:54C'est bien cette situation. Et en fait, bon, on dit les Français sont révoltés ou déçus ou indifférents
11:01ou là du spectacle qu'ils donnent, mais le spectacle qu'ils donnent est aussi le produit, malheureusement,
11:06j'allais le dire, de leur vote aussi, d'une certaine manière, il ne faut jamais l'oublier.
11:10C'est les Français qui ont voté et qui, au mois de juillet dernier, ont livré cette assemblée nationale,
11:17qui est une assemblée nationale, en effet, assez impossible au regard de l'histoire de la Ve République.
11:22C'est aussi le résultat du vote des Français.
11:24Il faut passer à la 6ème République ?
11:27Non, je ne crois pas, je crois qu'à la 5ème République a plutôt bien fonctionné, c'est quand même...
11:32Peut-être qu'elle est dépassée aujourd'hui, non ?
11:34Pardon ?
11:35Enfin, je ne sais pas, Jean-Garry, c'est intéressant, est-ce que la 5ème est dépassée ?
11:38Moi, je ne crois pas.
11:39Je ne le crois pas du tout, en réalité, on aurait eu le même cas de figure sous la 3ème ou la 4ème République.
11:48Simplement, ça veut dire que, je répète, les pratiques doivent évoluer, les pratiques doivent s'adapter.
11:54C'est effectivement, comme le dit Arnaud Benedetti, c'est le vote des Français qui a effectué cette tripartition.
12:01Et moi, je n'ai pas du tout la certitude que, si une dissolution intervient en juillet 2025, comme on en parle beaucoup,
12:10je n'ai pas du tout la certitude qu'on va voir disparaître, que par un coup de baguette magique, cette tripartition,
12:17ces trois Frances, dont on voit bien qu'elles ont des comportements socio-électoraux, socio-culturels,
12:24qui sont différents les uns des autres, qui correspondent même à des classes d'âge.
12:29Vous voyez, il y a quelque chose là qui est en train de s'installer dans notre société.
12:34Et je pense que, si on veut essayer de trouver des solutions politiques face à cette tripartition,
12:41il faut que des frontières bougent à l'intérieur de ces trois coalitions, de ces trois blocs, je dirais.
12:48Et effectivement, à défaut de coalitions, il faut essayer d'aller vers des convergences, vers une manière de gouverner autrement.
12:57Alors, moi j'ai plein d'idées, plein de solutions, mais je ne suis pas le seul pour que ça évolue.
13:04Et notamment, pour sortir de ce qu'on appelle le fait majoritaire, essayer de transformer le rôle du Président de la République
13:15et le rapprocher peut-être d'abord de la lettre des institutions, qui donne au Premier ministre le pouvoir, au gouvernement,
13:23de déterminer de conduire la politique de la nation, et faire d'un Président de la République non plus un chef de majorité,
13:30comme il l'a été depuis quelques temps, comme il l'a été quasiment tout au long de la Ve République,
13:35mais véritablement un arbitre, quelqu'un qui se met hors du jeu.
13:39Et si vous regardez ce qui est en train de se passer, dans les difficultés de la composition du gouvernement Bayrou,
13:45en grande partie viennent des désaccords entre le Président de la République et le Premier ministre.
13:51Donc ça veut dire qu'il y a un certain nombre de choses qui doivent changer dans nos pratiques.
13:55Vous avez raison Jean-Gary, on va continuer d'en parler dans un instant sur Europe 1.
13:58Il est 20h16, Arthur Delaborde a de nouvelles informations à nous donner, journaliste politique d'Europe 1,
14:03justement sur ce qui est en train de se tramer en ce moment. On en parle tout de suite sur Europe 1.
14:11Attends, on a 30 secondes pour convaincre les gens de faire un don ?
14:13Ben c'est facile !
14:14Ah ouais ? Tu dirais quoi ?
14:15Ben salut, faites un don, sinon c'est chaud pour plein de gens.
14:18Hum, sérieux ?
14:19Ben oui ! Tu sais qu'une jeune femme sur 7 est victime de violences en France ?
14:22On ne peut pas rester là à rien faire.
14:23Ok, ok, mais il faut donner plus de contexte.
14:25En avant toutes, c'est une asso qui aide depuis plus de 10 ans les jeunes et les femmes à sortir de violences et à se reconstruire.
14:30Vous donnez, on agit, et ensemble, on sauve des vies.
14:34Parfait, et on redirige sur le site enavanttoutes.fr.
14:40Il est 20h17 sur Europe 1, c'est une émission spéciale que nous consacrons à la situation.
14:46Ce soir, nous n'avons pas de nouveau gouvernement, nous l'attendions, il a été annoncé toute la journée,
14:50puis retardé, puis finalement annulé, pour être reporté à demain matin au mieux.
14:55Au mieux !
14:56Non mais c'est même pas sûr que demain matin, on ait la liste du nouveau gouvernement.
15:00C'est incroyable, c'est-à-dire que ça discute, il y a des points de discorde,
15:04notamment sur des personnalités politiques, sur des postes également.
15:08Notamment Xavier Bertrand, effectivement, est une personnalité que certains voudraient bien voir rentrer au gouvernement,
15:13mais qui peut poser problème, notamment du côté du RN.
15:17Donc, nous avons besoin des lumières d'Arthur Delaborde, qui est journaliste politique à Europe 1.
15:22Alors, où en est-on ? Il est 20h17, est-ce que vous pouvez expliquer aux auditeurs d'Europe 1
15:26où nous en sommes exactement au moment où nous parlons ?
15:28Alors déjà, on attend une rencontre entre le Premier ministre et le Président,
15:32qui est probablement maintenue ce soir, mais on n'a pas plus de confirmation à ce stade.
15:38Effectivement, une annonce probable demain matin.
15:41Il faut voir qu'il y a un peu...
15:43Il y a beaucoup de probables, hein !
15:45Il y a deux différents sons de cloche, que ce soit de la part de l'Elysée ou des proches du Premier ministre.
15:52C'est vrai que jusqu'à ce soir, 18h environ, c'était plutôt Matignon qui avait la main sur la communication
15:59autour de cette composition du gouvernement.
16:01Et on a vu l'Elysée reprendre la main à 18h, puisque c'est l'entourage du Président de la République
16:06qui a fait savoir qu'il n'y aurait pas de nomination ce soir et qu'il fallait probablement patienter jusqu'à demain,
16:11alors qu'on pensait que ça ne serait pas demain, puisque c'est une journée d'hommage national aux victimes à Mayotte.
16:18Donc on en est là pour le moment.
16:20On sait qu'il y a des points de blocage, même si à Matignon, ou en tout cas dans l'entourage de François Bayrou,
16:26on a plutôt tendance à nous dire qu'en fait, pas du tout, il n'y a pas de crispation politique,
16:30mais que ce n'est que des vérifications de la haute autorité de la transparence de la vie publique
16:35qui sont en cours et qui retardent un peu l'annonce de ce calendrier.
16:38C'est vrai qu'à Matignon, on était plutôt optimiste sur l'annonce d'un gouvernement aujourd'hui.
16:42On voit donc qu'il y a une certaine reprise en main de l'Elysée et il y a ce principal point de blocage
16:47qui est donc Xavier Bertrand, Président de la région Hauts-de-France,
16:52qui est donc connu pour son engagement sur le plan local, notamment contre le Rassemblement National,
16:59que c'est une personnalité qui peut potentiellement bloquer.
17:02Or, on voit que le RN a toujours la main, puisque c'est eux qui, quelque part, conservent,
17:08vu qu'on conserve le même socle que celui qui soutenait Michel Barnier,
17:13c'est eux qui vont décider à un moment ou à un autre s'ils censurent ou non ce gouvernement Bayrou,
17:20puisque c'est quasiment joué du côté du NFP.
17:22Eux, ils sont dans une posture automatique de censure.
17:25Alors Nathan Devers, on a entendu Jean Garry, que faut-il faire ?
17:29On est dans une espèce de situation de blocage et on a un peu le sentiment ce soir qu'on prend les mêmes
17:35et qu'on recommence pour ce nouveau gouvernement.
17:37Oui, moi déjà je ne suis pas sûr que la situation corresponde à ce que veulent entre guillemets les Français.
17:43Non mais les Français en auront le bol du bazar !
17:45Oui bien sûr, mais en effet, aux dernières élections législatives,
17:49on se retrouve avec une situation complexe, une majorité impossible à construire,
17:53mais je ne crois pas que ce soit le message qui a été envoyé par l'électorat français au moment de ces élections.
17:58Le message, me semble-t-il, c'est qu'en effet, il y a trois Frances idéologiques,
18:02trois Frances politiques, trois projets de société, trois visions de la société
18:07qui sont différentes et entre lesquelles les ruptures sont nettes.
18:12Cependant, est-ce que cela signifie que les électeurs ont envie que les représentants de ces trois Frances
18:19ne travaillent pas les uns avec les autres ?
18:21Je n'en suis pas sûr. Je crois qu'à gauche, en effet, il y a beaucoup d'électeurs qui ont été déçus
18:26de voir que Lucie Castet ou qu'une personnalité du Nouveau Front Populaire ou de gauche n'a pas été nommée à Matignon.
18:31Mais ensuite, je ne suis pas du tout sûr qu'ils cautionnent cette méthode consistant à dire
18:36nous refusons par principe de participer à la vie gouvernementale,
18:40nous refusons de faire avancer la France dans notre direction.
18:44Les électeurs du Rassemblement National, nombreux ont été ceux qui n'ont pas été du tout satisfaits
18:49de la motion de censure qui a été déposée par Marine Le Pen contre Michel Barnier
18:56et qui l'ont fait savoir notamment chez les agriculteurs.
18:59Et la deuxième question que cela pose, c'est que je crois quand même que ce qui peut être ici assez clair,
19:03c'est que lors de ces élections législatives, le fait quand même qu'il y ait eu ce résultat-là,
19:07je ne suis pas sûr que ce serait exactement le même en juillet,
19:09c'était qu'il y avait une situation de barrage républicain.
19:12Pourquoi les Français ont-ils voté pour le Bloc Central et pour le NFP ?
19:15C'était parce qu'ils avaient massivement peur que Jordan Bardella arriva à Matignon.
19:20Et en effet, les sondeurs disaient que c'était une probabilité qui était la principale en un sens.
19:27Les gens qui ont appelé à voter par exemple pour le Nouveau Front Populaire,
19:31nombreux étaient ceux qui n'aimaient pas du tout le Nouveau Front Populaire.
19:34Je vous citerai par exemple Dominique Strauss-Kahn,
19:37il avait dit qu'il fallait voter pour le NFP et même pour LFI
19:41uniquement pour éviter que le RN ait une majorité absolue
19:44en sorte qu'ils aient une majorité relative.
19:46Ce que je veux dire par là, c'est que les Français, en tout cas de manière majoritaire,
19:50ont fait savoir qu'ils donnaient en quelque sorte une dernière chance à la classe politique
19:53avant l'arrivée potentielle du RN au pouvoir.
19:57Et c'est vrai que la classe politique, qui a quand même compris le message depuis 2002,
20:01le Front National puis le RN ne cessent de monter d'élection en élection.
20:05Lors des dernières élections, il était à deux doigts, littéralement deux doigts de Matignon
20:09et tout le monde a été surpris à 19h au soir du deuxième tour
20:13de voir qu'il n'avait pas gagné les élections.
20:15Tout le monde a été surpris.
20:16La classe politique n'est pas à la hauteur.
20:18Quand M. Bardella ou quand M. Le Pen arrivera demain à Matignon ou à l'Elysée,
20:23les mêmes qui aujourd'hui se comportent vraiment comme des personnages de séries politiques,
20:27on se croirait dans le Baron Noir si vous voulez,
20:29diront « Ah, on a reçu un message clair, c'est terrible, etc. »
20:33C'est ça, me semble-t-il, qui est problématique.
20:35Oui, il y a trois Frances qui sont différentes,
20:39mais quand même, en puisant dans la tradition du parlementarisme
20:43de la Troisième ou de la Quatrième République,
20:45il pourrait y avoir, à la fois du côté du Bloc central
20:48et à la fois du côté du Bloc de gauche,
20:50une volonté de travailler ensemble pour proposer quelque chose de plus constructif.
20:55Alors, Anno Benedetti, sur l'analyse de la situation,
20:58effectivement, de cette classe politique, on ne s'en sort pas,
21:01on patauge, on n'avance pas.
21:04L'exaspération des Français, l'arrivée du RN au pouvoir.
21:08L'idée de Bayrou, parce qu'on peut parler d'échec de ce point de vue-là,
21:10c'était que Bayrou s'est imposé comme Premier ministre auprès du Président de la République
21:15en se présentant comme l'homme qui était capable d'élargir, finalement,
21:19la base parlementaire d'un futur gouvernement,
21:22c'est-à-dire d'avoir, éventuellement, une capacité à fracturer le Nouveau Front Populaire
21:27et faire venir à lui un certain nombre de personnalités du Nouveau Front Populaire
21:30pour avoir une majorité qui soit, cette fois-ci, suffisante
21:34pour permettre à un gouvernement de gouverner dans la durée.
21:36Il n'y est pas parvenu, il n'y est pas parvenu.
21:38Donc, aujourd'hui, il se retrouve, en effet, avec l'étiage qui était celui de Michel Barnier.
21:44Donc, d'où la grande difficulté qui est la sienne.
21:48Après, il me semble, si vous voulez, pour revenir sur ce que disait Nathan,
21:53c'est qu'en effet, le vrai sujet aujourd'hui, c'est le positionnement de la classe politique
21:57par rapport au Rassemblement National.
21:59Moi, je ne suis pas sûr, si vous voulez, que le Front Républicain
22:02ait été une réponse très claire par rapport à la situation politique.
22:08C'est plutôt, je veux dire, une situation qui a finalement brouillé, d'une certaine manière, les choses.
22:14Et je ne suis pas sûr que, si demain, nous devions re-voter avec de nouvelles élections législatives,
22:19le Républicain ou le Front Républicain ait la même efficience qu'il l'a eue au mois de juillet dernier.
22:28Après, clairement, il y a quand même un sujet, c'est que si demain, en effet, François Bayrou échoue,
22:35si demain, François Bayrou est renversé par une nouvelle motion de censure,
22:38on rentre véritablement dans une crise institutionnelle de la classe politique.
22:42On ne va pas arriver là-dessus.
22:43Je voudrais remercier Jean Garrigue, merci infiniment Jean Garrigue,
22:47historien et président du Comité des Histoires parlementaires,
22:49d'avoir été en direct avec nous ce grand repas.
22:51Merci de nous avoir apporté votre expertise et votre regard sur la situation ce soir.
22:56Il est 20h25, je me tourne vers vous, Arthur Delaborde, du service politique d'Europe 1,
23:00parce que vous avez une info à nous donner. Laquelle ?
23:02Oui, simplement, on confirme à l'instant qu'il n'y aura pas, a priori, de rencontres entre Emmanuel Macron et François Bayrou,
23:08ce soir, à l'Élysée, comme on pouvait le penser.
23:11Rappelons que les deux hommes ont échangé par téléphone à deux reprises aujourd'hui.
23:15Matignon nous disait que les discussions s'étaient bien passées.
23:18Ils devaient se voir, donc, physiquement à l'Élysée ce soir.
23:21Et cette réunion est donc repartie, peut-être demain matin.
23:24Mais qu'est-ce que ça veut dire, ça, Arnaud Bénédicti ? Il n'y a pas de réunion ce soir.
23:27Ça veut dire qu'on est dans la difficulté, que de toute façon, les relations...
23:30Je crois que tout le monde peut l'interpréter comme...
23:33Ça, c'est un peu tendu, quand même, entre les deux.
23:36Depuis 48 heures.
23:38Déjà, ce matin, je vous le rappelle. Et puis, à la mi-journée.
23:41Et l'annulation de cette réunion qui était prévue, en effet,
23:45montre toute la difficulté qu'il y a, déjà, à régler le tandem Bayrou-Macron.
23:50C'est ça, parce que les deux hommes, effectivement...
23:52Je pense qu'Emmanuel Macron... Attendez, pardon, Arnaud Bénédicti.
23:55Emmanuel Macron n'a pas trop apprécié, effectivement, que François Bayrou, pardonnez-moi,
23:58mais s'impose à Matignon, sous la menace.
24:01Parce que ce n'était pas du tout le choix d'Emmanuel Macron.
24:03Il voulait Sébastien Lecondre.
24:05Constitutionnellement, c'est le Président de la République qui nomme le Premier ministre.
24:08Et là, c'est l'Élysée qui reprend la main, ce soir, sur la liste du gouvernement.
24:12Oui, enfin, on va voir ce qu'il en est. Parce que, vous savez, ça change toutes les dix minutes,
24:15ou toutes les quarts d'heure. Mais, en tout cas, manifestement,
24:17il y a une guerre de communication entre l'Élysée et Matignon.
24:21L'Élysée donnant l'impression, aujourd'hui, de...
24:23Enfin, en tout cas, ce soir, à l'heure où l'on parle, de reprendre l'initiative.
24:26Mais on sait qu'il y a, sur un certain nombre de postes,
24:28des, j'allais dire, des divergences entre l'Élysée et Matignon.
24:31Notamment, encore une fois, sur le Quai d'Orsay, mais pas seulement.
24:34Récemment, sur Bercy, aussi.
24:35Bon, le Quai d'Orsay, Bercy, ce sont des postes clés.
24:38Nathan Devers, effectivement, sur lesquels il va falloir se mettre d'accord.
24:42Et puis, il ne va pas falloir, effectivement, passer à côté de la plaque, cette fois-ci.
24:46Parce qu'il faut que ça avance, il faut que ça aboutisse.
24:48Il faut surtout qu'on arrive à voter un budget, non ?
24:50Oui, vous avez raison.
24:52Mais, encore une fois, si c'est pour nommer un ministre des Affaires étrangères
24:57ou un ministre à Bercy, qui va rester X semaines
25:01parce qu'il va se faire censurer d'ici quelques semaines,
25:06je ne suis pas sûr que ce soit un enjeu qui soit majeur.
25:09Et, en effet, c'est pour ça que, vraiment,
25:11moi, je parlais de la classe politique dans son ensemble
25:14et que je ne vise pas un parti en particulier.
25:16Parce qu'il y a la responsabilité du Bloc, là, aujourd'hui,
25:19qui est amené à constituer un gouvernement.
25:21Le Bloc central élargi avec ELR.
25:23Mais, surtout, il y a une deuxième responsabilité dont on a moins parlé.
25:26Mais c'est qu'on sait quand même, on voit déjà,
25:29le Rassemblement national en train d'avancer vers la censure
25:32alors que ça n'a même pas commencé.
25:33Exactement comme ils avaient fait avec Michel Barnier.
25:35C'est-à-dire, au début, à la nomination de Michel Barnier,
25:38comme de François Bayrou,
25:39ils disent, nous sommes constructifs.
25:41Nous demandons juste un peu de respect pour nos électeurs.
25:43Mais on ne va pas être là pour mettre la pagaille dans les institutions, etc.
25:47Et dès lors que le processus commence à prendre un tout petit peu de consistance,
25:50on les voit qui vont tout de suite dans les lignes rouges
25:53qu'ils ajoutent les unes aux autres.
25:54Ce que vous citiez tout à l'heure sur Xavier Bertrand,
25:56c'est, à cet égard, très éloquent.
25:58Le fait qu'en quelques jours, on passe de M. Chenu qui dise
26:01« Xavier Bertrand n'est pas une ligne rouge »
26:03à M. Vallée qui dit « Xavier Bertrand est une ligne rouge »,
26:06ça montre bien qu'ils sont à la recherche du premier prétexte
26:08pour faire tomber le gouvernement.
26:10Probablement le feront-ils,
26:12quelle que soit la personne nommée,
26:14au Quai d'Orsay ou à Bercy.
26:16On va revenir aussi dans un instant,
26:17on va réécouter les mots de Frédéric Dhabi,
26:18qui était dans ce studio tout à l'heure,
26:19parce que je voudrais qu'on dise aussi un mot de ce sondage.
26:22Sondage IFOP pour le JDD.
26:2466% des Français sont mécontents de l'action de François Bayrou
26:28depuis son arrivée à Matignon.
26:29Non mais attendez, c'est du jamais vu pour un Premier ministre.
26:32C'est du jamais vu sous la Ve République.
26:35On va en parler dans un instant,
26:36on va réécouter les mots de Frédéric Dhabi.
26:37Il est 20h29 sur Europe 1.
26:40Sous-titrage Société Radio-Canada
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