00:00La suspension de la réforme des retraites sera examinée au plus tôt le 12 novembre à l'Assemblée Nationale.
00:04Raphaël Lejean, vous expliquez pourquoi c'est probablement la pire des mesures du prochain budget.
00:09Absolument, je vais vous faire la preuve par trois que c'est une bêtise sans nom cette suspension.
00:13Parce qu'on sait d'où vient le problème budgétaire de la France, il est très clair.
00:16C'est un trop faible taux d'emploi, que ce soit chez les jeunes ou les seniors.
00:20Ce qui m'emmène à mon premier point, l'exemple de la réforme d'Eric Wörth de 2010
00:26qui a repoussé l'âge de départ de 60 à 62 ans.
00:30On en a parlé dans les journaux, c'est l'Institut des politiques publiques qui a donné des résultats qui sont très clairs.
00:37Ça a été 20 à 25 points d'emploi supplémentaires chez les 60-62 ans, la réforme Wörth.
00:44Un effet massif, durable, qui a redressé le solde des retraites de plus de 5 milliards d'euros.
00:51Et contrairement à une idée reçue, ça n'a pas du tout été une bombe à retardement pour l'Unédic.
00:56Et que les emplois conservés avant 60 ans ont largement compensé les indemnisations chômage.
01:01Ils ne sont pas partis au chômage.
01:02Non, ils ont un peu augmenté entre 60 et 62.
01:05Mais grosso modo, le régime était à l'écrit.
01:07Bref, cette réforme, c'est plus de travail et moins de déficit.
01:11La deuxième preuve, ce qui n'a rien à voir, je suis allé chercher une autre idée que vous pourrez reprendre.
01:15Le MEDEF cette fois-ci, qui vient de sortir un comparateur de salaire brut net entre la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne.
01:22Ça c'est horrible.
01:23C'est passionnant. Je vous propose d'aller sur le site du MEDEF, vous verrez, vous pouvez faire vos simulateurs.
01:29C'est très parlant.
01:31J'ai pris un salaire mensuel brut de 3 000 euros, qui correspond à peu près au salaire médian net français.
01:39Pour 3 000 euros bruts, une entreprise française débourse 4 300 euros.
01:43Toutes les autres, Allemagne, Espagne, Italie, c'est moins de 4 000 euros.
01:46Donc déjà, l'entreprise paye plus pour le même salaire brut.
01:50Mais ce qui nous intéresse, c'est ce que touche le salarié in fine, en net.
01:56En France, c'est 2 310 euros.
01:58En Espagne, c'est 2 806 euros.
02:01Il y a 500 euros d'écart pour un même brut entre la France et l'Espagne.
02:06Et tous les salariés, en Allemagne, le net est supérieur.
02:09En Italie, c'est 2 724 euros.
02:11C'est pareil de partout.
02:12Mais quand même, près de 500 euros d'écart pour une même rémunération entre un Français et une Espagne.
02:16Je trouve ça dingue.
02:17La différence, c'est évidemment le coût de notre modèle social.
02:21Et notamment celui d'e-retraite, puisque c'est de très loin le plus gros morceau.
02:27Un quart du salaire brut des actifs part pour financer ce système.
02:30Et en suspendant la réforme, on va alourdir encore plus cette facture.
02:36Les entreprises auront beau augmenter les salaires, c'est l'État qui ramassera la hausse.
02:41Le troisième point, très rapidement, c'est la dépendance.
02:45Le gros sujet derrière la retraite qu'on refuse obstinément de voir.
02:49Dans 25 ans, la France va devoir accueillir 1 million de seniors supplémentaires en établissement.
02:55Il va falloir créer 56 places supplémentaires.
02:58Et il y a 800 000 emplois dans les services à la personne à recruter.
03:02Tout cela va coûter beaucoup.
03:04Et cette richesse, ces cotisations, on ne les financera qu'en travaillant plus longtemps.
03:09Pas en prolongeant une durée de vie de retraite déjà record au monde de plus de 25 ans en France.
03:15Alors oui, pour ces trois raisons, on peut parler d'une bêtise parlementaire en trois dimensions.
03:20On reparlera de toutes ces questions avec Julien Damont,
03:22qui va nous rejoindre à 7h45, sociologue et démographe passionné de sécurité sociale,
03:26qui a écrit Petite éloge de la Sécu.
03:29Merci.
03:30Merci.
03:31Merci.
03:32Merci.