00:00Alors, je crois qu'il y a un lien entre les deux, parce que, refusant l'autocritique, il doit trouver des explications extérieures pour sa chute, mais ce n'est pas le seul élément.
00:08Emmanuel Macron, donc c'était mardi, a rassemblé autour de lui, à l'Élysée, plusieurs experts de la régulation des réseaux sociaux, avec cette idée qu'il faut les réguler.
00:17Alors, je précise tout de suite, la critique des réseaux sociaux, en tant que telle, c'est une critique légitime.
00:22Emmanuel Macron ne se trompe pas sur tout lorsqu'il dit, par exemple, que ça crée de l'addiction,
00:26lorsqu'il constate qu'ils sont si nombreux dans la jeune génération, et pas seulement à passer leur vie devant un écran, aujourd'hui.
00:32L'alcool aussi crée de l'addiction, on ne supprime pas l'alcool.
00:35Oui, oui, oui, il y a des choses plus agréables que l'autre dans la vie, cela dit.
00:38Mais il n'y a pas de suppression pour l'alcool, vous avez raison.
00:41Socialisme crée de l'addiction.
00:43Ah oui, il n'y a pas de...
00:43Socialisme crée de l'addiction.
00:45Donc, Emmanuel Macron note qu'il y a des problèmes réels avec les réseaux sociaux,
00:48donc ça, on peut être d'accord avec le fait qu'il pose une question de civilisation aujourd'hui.
00:52Très rapidement, cela dit, il bascule, et on comprend que le problème principal pour les réseaux sociaux, pour lui, il est politique.
01:00Il est politique parce que les réseaux sociaux viendraient bouleverser le champ informationnel,
01:05viendraient bouleverser les termes même du débat public,
01:08et on le comprend assez rapidement, les réseaux sociaux feraient en sorte que le débat public échapperait au pouvoir,
01:14que le débat public échapperait plus particulièrement à la caste, aujourd'hui, au pouvoir, que j'aime appeler l'extrême-centre.
01:21Alors, que reproche-t-il aux réseaux sociaux?
01:23Il dit d'abord et avant tout, les plus jeunes aujourd'hui, mais pas que,
01:27s'informent davantage sur les réseaux sociaux que sur les médias traditionnels.
01:31Et il y voit un problème.
01:33Il y voit un problème, pourquoi?
01:35Parce qu'il nous dit que les faits qui apparaissent sur les réseaux sociaux ne sont pas correctement hiérarchisés,
01:40ne sont pas correctement filtrés, ne sont pas correctement racontés, ne sont pas correctement sélectionnés.
01:46Et il utilise ce mot qui est très important, il dit que les faits qu'on a sur les réseaux sociaux ne sont pas sélectionnés par des journalistes
01:54dont c'est le métier de sélectionner correctement ces faits.
01:57Cette phrase est probablement la plus importante de tout ce qu'il a dit parce qu'il nous rappelle une chose,
02:02le travail médiatique consiste effectivement à distinguer dans l'infinité des faits, pour exemple,
02:09lesquels on met de l'avant, comment on les explique, comment on les met en lien les uns les autres,
02:12et on constate donc que pour le président de la République, certains faits dont on ne contestera pas la réalité
02:17ne devraient pas être dans l'espace public parce que ces faits-là viendraient déstructurer le débat public.
02:23Et on comprend tout le procès ici fait à Twitter, tout le procès fait à d'autres réseaux sociaux
02:29qui mettent de l'avant des faits qui étaient autrefois laissés de côté par les médias traditionnels.
02:34Donc il nous dit, le journaliste a une fonction de sélection des faits, mais à partir de quel filtre?
02:39Il nous explique par ailleurs que ces médias qui font ça sont des médias indépendants.
02:43On y reviendra dans un instant, c'est un peu étonnant.
02:46Par ailleurs, il nous dit, c'est une machine à détruire la démocratie aujourd'hui, les réseaux sociaux,
02:50et là il nous refait le coup de la tenaille identitaire, mais à version 2025.
02:55Il dit, sur Twitter, sur X, vous avez des contenus d'extrême droite pour l'essentiel,
03:00c'est l'international réactionnaire, son patron s'en est mêlé.
03:03Donc il nous dit, Twitter, aujourd'hui, qui joue un grand rôle dans la structuration de l'espace public,
03:07X, c'est le lieu de l'extrême droite banalisée.
03:10Et il dit, de l'autre côté, sur TikTok, eh bien c'est l'empire du salafisme très rapidement.
03:15Donc il y aurait une double, c'est la tenaille identitaire, c'est un argument qui est prisé par l'extrême centre,
03:20sur le vote, nous devons nous sauver de ces deux menaces.
03:24De l'or que faire, puisque tout semblerait échapper au pouvoir,
03:27parce que le débat public semblerait échapper aux dirigeants,
03:29il faut, je cite la formule, elle est forte,
03:32reprendre le contrôle de notre vie démocratique et informationnelle.
03:37La question que je pose, c'est qui doit reprendre le contrôle exactement?
03:40Les citoyens dans leur ensemble?
03:42Ils y sont déjà avec les réseaux sociaux.
03:44Les médias du service public?
03:46Le pouvoir lui-même?
03:48La présidence de la République?
03:49Une commission de censeurs qui serait responsable de nous dire
03:52quels sont les faits qui sont importants,
03:54quels sont les faits qui doivent être laissés de côté?
03:56Et il nous dit, on a déjà, avec le texte européen, le DSA, oui, je crois,
04:00il nous dit, on a déjà commencé à construire l'appareillage juridique
04:04pour être capable de lutter contre ces réseaux sociaux,
04:06pour reprendre le contrôle.
04:09J'aimerais rappeler, ce n'est pas un détail,
04:11que le DSA et les textes européens qui prétendent restructurer l'espace public
04:15nous disent explicitement, ils sont là pour sauver la démocratie
04:18contre les mouvements autoritaires dits d'extrême droite et ainsi de suite.
04:22Donc là, on est dans une logique où on nous dit que les médias indépendants,
04:25les médias neutres, les médias légitimes,
04:28sont des médias qui lutteraient contre l'extrême droite.
04:30Le problème, c'est que quand on voit donc qu'aujourd'hui,
04:32à peu près la moitié de la population est assimilée à l'extrême droite,
04:35on comprend donc que pour le pouvoir en place,
04:37qui s'exprime par la voix d'Emmanuel Macron,
04:39les médias légitimes sont des médias qui sont dans une croisade démocratique
04:43contre ce qu'il appelle les ennemis de la démocratie,
04:46qui sont l'extrême droite, sauf que c'est la moitié de son peuple.
04:49C'est un problème.
04:50Donc dès lors, je comprends que des médias neutres,
04:52c'est des médias qui luttent contre les vrais méchants,
04:53mais des médias qui luttent contre le pouvoir officiel
04:56sont des médias de désinformation inquiétant.
04:58Il y a quelque chose d'un peu louche là-dedans.
05:00Ce qui est certain, c'est qu'il y a une volonté de contrôle numérique,
05:03une volonté de surveillance numérique généralisée
05:05qui n'est pas nouvelle chez Emmanuel Macron,
05:08je prends la peine de le dire, en 2018.
05:10En 2018, il y avait eu la volonté déjà de nous faire une loi anti-fake news.
05:14Une loi anti-fake news qui aurait la responsabilité de dire,
05:17bon, ça c'est un fait certifié,
05:18ça c'est un fait qui n'est pas certifié,
05:20ça c'est un fait officiel, ça ce n'est pas un fait officiel.
05:22Mais quand on voit l'habitude avec laquelle le pouvoir ment aujourd'hui,
05:26parce que le pouvoir ment souvent,
05:27on commence à se dire, mais qui va contrôler les contrôleurs ?
05:31Je vois derrière tout cela une forme de prafdaïsation de l'information
05:34ou comme aurait dit Orwell,
05:36la volonté de créer un ministère de la vérité.
05:39J.D. Vance, dans son discours de Munich en février,
05:42ne s'était-il pas déjà inquiété de cela ?
05:44Mais c'était au cœur de son propos d'air.
05:46Vous noterez, parlant des informations,
05:48J.D. Vance fait un discours,
05:49plusieurs médias en parlent, mais ne le citent pas.
05:52Je me rappelle d'un journal qui disait,
05:53J.D. Vance déclare la guerre idéologique à l'Europe.
05:56Là, on cherche les déclarations dans le texte
05:57qui viendraient justifier ce titre.
05:59Oups, absent.
06:00Il fallait aller où sur les réseaux sociaux
06:02pour retrouver ce discours et en avoir une trace ?
06:04Parce que si on se fiait aux médias officiels,
06:06on savait simplement que J.D. Vance était hyper giga,
06:08vraiment méchant.
06:11Ensuite, donc, la question,
06:12c'est la question du monopole du récit public légitime.
06:15Vous connaissez la formule de Weber
06:17qui disait que l'État, c'est le monopole de la violence légitime.
06:20Aujourd'hui, la question est de savoir
06:21qui est le monopole du récit médiatique légitime.
06:24Qui peut nous dire ce qui est vrai,
06:25ce qui est faux, ce qui nous arrive ?
06:27Qui peut mettre en récit les événements de notre actualité ?
06:30Et de ce point de vue,
06:31on voit qu'il y a des prétextes utilisés
06:33pour censurer aujourd'hui
06:35la haine, la désinformation, l'ingérence étrangère,
06:37la lutte contre la pédocriminalité,
06:39la santé publique.
06:40Ces raisons se multiplient,
06:41mais dans les faits justifient une régression terrible
06:43de la liberté d'expression
06:44qui nous a un grand contraste avec ce qui se passe aux États-Unis
06:47où il y a, quoi qu'on en pense de cette société,
06:49un vrai sens de la liberté d'expression.
06:50Et on parlera dans un instant
06:51de l'intelligence artificielle avec notre invité.
06:54Peut-être dernière question, Mathieu.
06:55Emmanuel Macron ne devrait-il pas se demander
06:58pourquoi le public a déserté
07:00peu à peu les médias traditionnels ?
07:02Et c'est peut-être la question
07:03qui échappe au président de la République,
07:05aussi intelligent soit-il.
07:07Est-ce qu'il se dit que le commun et mortel
07:08a quitté les médias traditionnels
07:09en disant qu'ils sont trop objectifs, trop fiables ?
07:12C'est lâchant. J'en peux plus de ces médias
07:14objectifs qui ne nous mentent jamais.
07:17Est-ce qu'il se dit
07:18« Non, franchement, ils sont trop pluralistes.
07:20Il y a trop de points de vue diversifiés.
07:22C'est inquiétant.
07:22J'aimerais avoir une pensée plus claire,
07:24plus ferme pour me dire exactement
07:25ce que je dois penser. »
07:26Est-ce qu'il se dit de la même manière
07:28« Les médias traditionnels représentent tellement bien
07:30ce que je vis aujourd'hui
07:32que je vais m'en détourner pour aller voir ailleurs
Écris le tout premier commentaire