Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 2 jours
Nous vivons sous le règne de l’équilibre. Équilibre émotionnel, mental, alimentaire, professionnel : il est devenu à la fois un impératif social et un idéal personnel. Il faut être aligné, posé, stable, centré. L’époque valorise la tempérance, la régulation, la maîtrise de soi. Et tout ce qui s’en écarte est immédiatement suspect. « Instable », « incohérent », « borderline » : autant d’étiquettes qui servent à disqualifier celles et ceux qui débordent des cadres établis. Dans ce contexte, le mot « déséquilibré » a changé de statut. Il ne relève plus seulement du vocabulaire clinique. [...]

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Nous vivons sous le règne de l'équilibre.
00:10Équilibre émotionnel, mental, alimentaire, professionnel.
00:13Il est devenu à la fois un impératif social et un idéal personnel.
00:18Il faut être aligné, posé, stable, centré.
00:22L'époque valorise la tempérance, la régulation, la maîtrise de soi.
00:26Et tout ce qui s'en écarte est immédiatement suspect.
00:30Instable, incohérent, borderline, autant d'étiquettes qui servent à disqualifier celles et ceux qui débordent des cadres établis.
00:39Dans ce contexte, le mot déséquilibré a changé de statut.
00:43Il ne relève plus seulement du vocabulaire clinique, il est devenu un marqueur moral, un stigmate social.
00:50Être déséquilibré, c'est ne pas être adapté, pas conforme, pas optimisé.
00:56Ce n'est plus souffrir ou penser autrement, c'est déranger.
01:00Mais ce culte de l'équilibre cache-t-il autre chose ?
01:04Peut-être une peur plus profonde, celle du trouble, de l'incertitude, de l'imprévu.
01:09Une peur de ce qui échappe, interrompt, décentre.
01:13Une peur, en somme, de ce que le déséquilibre peut avoir de créateur.
01:17Dans l'art du déséquilibre, la philosophe Evelyne Grossman rappelle à quel point l'instabilité peut être féconde.
01:25À rebours des logiques de maîtrise et de contrôle, elle fait l'éloge de ce qui tremble, de ce qui cloche, de ce qui défie la norme.
01:33Le déséquilibre n'est pas un accident à réparer, c'est un mouvement vital, une faille par où passe le nouveau.
01:40Il désaxe, décadre, décolle les identités figées.
01:45Il ouvre des brèches où peuvent émerger d'autres formes, d'autres récits et d'autres pratiques.
01:50Ce que Grossman dit de la pensée vaut aussi pour les organisations.
01:55Dans une entreprise, le déséquilibre peut être le point de départ d'un collectif vivant.
02:01Non par l'effacement des conflits, mais par leur traversée.
02:05Ce n'est pas en lissant les divergences que l'on fait émerger de l'intelligence collective, mais en leur faisant place.
02:11L'innovation manageriale ne naît pas d'une stabilité parfaite, mais d'une mise en tension.
02:16C'est là que surgissent les lignes de fuite, les idées neuves et les gestes inattendus.
02:23Grossman y voit une force capable de fissurer l'image unifiée d'un tout pour faire place à l'émergence de formes nouvelles.
02:31L'entreprise, souvent prise dans ses routines et ses process et ses métriques, gagnerait à entendre cela.
02:39Les formes nouvelles naissent souvent du vacillement.
02:42Le déséquilibre, lui, est mouvement.
02:44Il est cette oscillation féconde entre construction et effondrement.
02:49Ce n'est pas le chaos, mais la perturbation nécessaire qui permet à un système de ne pas se fossiliser.
02:55C'est ce moment où un projet dérape, où une crise force à reconfigurer, où une intuition bouscule tout un modèle.
03:03Ce moment inconfortable, mais riche.
03:06Dans un monde saturé de langage managerial lissé et de process figé, le déséquilibre est peut-être ce qu'il reste de vivant.
03:15Non pas une faiblesse, mais une chance.
03:18La preuve non d'un échec à contrôler, mais d'une capacité à se transformer.
03:22La preuve non d'un échec à contrôler, mais d'un échec à contrôler, mais d'un échec à contrôler.
03:27Sous-titrage Société Radio-Canada
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations