- il y a 4 heures
Dans les bonnes années, la France produit 3 % de l’huile d’olive qu’elle consomme. Alexis Muñoz, fondateur de la marque Huiles d’olive 18:1, a lancé le programme Nectar, afin de redynamiser la filière dans le respect de l’environnement, des producteurs et des consommateurs.
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00:00L'invité de ce Smart Impact c'est Alexis Munoz, bonjour, bienvenue, vous êtes le président de
00:12première matière fondateur de la marque d'huile d'olive 18.1, enfin 18.2.1 d'ailleurs, il est un
00:18peu surprenant ce nom, qu'est-ce qu'il veut dire ? Oui, on vient d'en parler en effet, 18.2.1
00:22a été, c'est un nom que nous avons souhaité donner, inspiré de la formule simplifiée de
00:27l'huile d'olive, un des principaux acides gras libres de l'huile d'olive. J'ai, pour
00:32la petite anecdote, passé beaucoup de temps en chercher mon nom comme tout créateur d'entreprise,
00:36je les ai trouvés tous aussi nuls les uns que les autres et puis je suis tombé sur une
00:39analyse physico-chimique de mes huiles d'olive un jour par hasard, j'ai trouvé ça sympa,
00:44donner du sens. Et c'est un nom qui intrigue en plus, donc ça fonctionne plutôt bien.
00:48Il y a des enfants qui arrivent de piloter des avions, de venir, je n'en sais rien, joueurs
00:53de tennis professionnels, pompiers, et vous, vous vouliez faire pousser des arbres ? C'est
00:57une vocation très très précoce en quelque sorte ?
01:02C'est en tout cas une passion que j'ai nourrie, une vocation, on va dire, on va appeler ça
01:07comme ça, c'est une passion que j'ai nourrie, un peu comme une pelote, vous savez, que l'on
01:12déroule. C'est au gré des rencontres, c'est au gré de nos âges, de l'évolution de la
01:17vie. Mais j'ai toujours été fasciné par le produit de l'huile d'olive, par sa couleur,
01:21son anctuosité, sa texture. J'aime beaucoup cet arbre, comme beaucoup de gens évidemment,
01:27mais qui traverse un petit peu les siècles malgré les maladies, malgré les tremblements
01:31de terre, malgré les guerres. J'aime beaucoup la simplicité de son produit, son jus, l'huile
01:36d'olive, qui finalement peut être accessible au plus grand nombre quand on voit les pays
01:42producteurs, autant des gens d'un niveau social très très bas comme des gens dans
01:47les grandes villes, peuvent y avoir accès.
01:49La France, j'ai été surpris par ce chiffre, la France ne produit que 3% de l'huile d'olive
01:54qu'elle consomme. Déjà, ce constat, comment on l'explique, comment vous l'expliquez ?
02:00C'est une très bonne année, elle produit 3%, c'est-à-dire que...
02:03Une très bonne année ?
02:03Une très bonne année, oui, c'est ça. D'abord, dans un premier temps, l'huile d'olive
02:06est un produit qui a un capital de sympathie fort, donc en France, on en consomme de plus
02:11en plus. Je me rappelle avoir vu des chiffres moyens en France, c'était 3-4 litres et encore
02:1710 ans par personne et par an. Je crois qu'on est aux alentours de 7, donc on voit bien
02:20que la consommation augmente. Ensuite, après la Seconde Guerre mondiale, il y a eu le fameux
02:26grand remembrement dans lequel on décide, à juste titre, de planter de la légumineuse,
02:30de la céréale pour alimenter les familles. Il fallait bien faire manger les enfants et
02:34les autres. Du vignoble parce qu'on considérait que pour travailler, les travailleurs de la
02:39reconstruction avaient besoin de leur petit litron. Et donc, sans exagérer, on a quand même
02:43beaucoup recentré sur de la grande culture, qui représente une grande partie de l'agriculture
02:48française, le vignoble, en délaissant pas mal l'élevage traditionnel, le maraîchage
02:54et l'arboriculture. Donc l'olivier a, en plus d'un gène en 1956, le peu qu'il y avait
03:00a quasiment été décimé. Et aujourd'hui, il n'existe que par quelques petits châteaux
03:04ici et là, quelques petites productions de Provence qui subsistent et qui vendent plutôt
03:08de l'alotourisme que de l'huile d'olivier. Mais est-ce qu'on peut inverser la tendance
03:12ou en tout cas rééquilibrer en quelque sorte ? Je sais que vous oeuvrez à ça, à redynamiser
03:19cette filière oligole. On peut tout imaginer. On peut tout refaire, pas que dans l'olivier.
03:24C'est une question d'abord, en effet, d'entrepreneuriat, d'entreprise, peut-être aussi d'avoir
03:29une vision, une stratégie. Donc c'est ce que nous faisons, vous avez raison, sur Nectar,
03:33oléiculture et génératrice. C'est un programme, c'est ça, qui s'appelle Nectar ?
03:37C'est une entreprise qui porte un programme avec des objectifs, telle une entreprise
03:41qui, si je devais synthétiser un petit peu, doit lier l'entrepreneuriat, l'économie,
03:48l'écologie et le sociétal. Comment est-ce que je fais une agriculture durable,
03:52vertueuse, ancrée dans le vivant ? Comment je peux créer de l'excellence en huile d'olive
03:57et comment je peux la rendre accessible au plus grand nombre ? C'est-à-dire que si nous considérons
04:01qu'aujourd'hui, un Français gagne en moyenne, je crois, 1800 ou 1900 euros,
04:06me semble-t-il, est-ce qu'il a aujourd'hui la possibilité d'acheter une huile d'olive
04:10à 40-45 euros le litre dans une épicerie fine ? Et donc aujourd'hui, il achète de l'huile
04:14d'olive dans les supermarchés, qui est origine UE, non UE. Donc je vous laisse imaginer
04:18ce qu'il y a dans les bouteilles. Donc nous avons véritablement cette ambition-là et ça demande
04:24évidemment des moyens, des moyens financiers, des sols propices, une stratégie, des compétences
04:33et nous sommes en train de remettre tout ça autour de la table pour pouvoir mener à bien
04:37notre projet. Et alors, si on prend, est-ce qu'on est déjà dans le concret ? C'est-à-dire
04:40qu'est-ce qu'il y a déjà des oliviers qui ont été plantés ? Sur quel type de sol ? Voilà,
04:47quel choix vous faites ? Le choix géographique qui a été fait est autour de Carcassonne,
04:53pour des questions pédoclimatiques. Je me suis basé sur le travail de chercheur,
04:57notamment des agrométéorologues, un chercheur de Paul Sabatier à Toulouse aussi qui m'a
05:02donné pas mal de fils à retordre et de travail qu'il avait fait sur l'aspect climatique
05:07avec une projection sur 50 et 100 ans. Et on voyait bien que l'oléiculture a toujours
05:12été très bien en France autour du bassin méditerranéen. La limite de la culture de l'olivier
05:16se trouvait entre Narbonne et Carcassonne, donc on dira l'ésignan, le Minervois. Et avec
05:22la projection future climatique, on se sent très à l'aise de remonter vers Toulouse
05:27sans arriver à la Garonne. Mais en tout cas, ce bassin-là est propice. Donc nous avons
05:31choisi cet endroit pour le faire. Et nous avons déjà, depuis 2023, planté deux plantations,
05:38deux fois 100 hectares bruts d'oliviers. Ça suppose trouver des terrains, souvent des
05:44friches ou des gens qui partent à la retraite. Ça tombe bien. Malheureusement, il y en a beaucoup
05:48en France. Ensuite, travailler l'itinéraire technique qui chez nous est quand même assez
05:53établi. Et ensuite, créer nos olivier sur un mode régénératif. Ça veut dire que nous
05:57déployons une biodiversité très importante autour de nos oliviers.
06:01Alors justement, je veux bien qu'on rentre un peu dans le détail si on parle d'agriculture
06:05régénérative ou d'agroécologie. Concrètement, pour votre métier, producteur d'olivier, ça
06:11change quoi ? Ça change tout. Nous sommes en train de créer quelque chose qui existait
06:16avant nous. Donc je suis un tout petit créateur. Je ne fais que remettre en place des choses
06:21qui ont été cassées. Simplement, nous avons cassé des chaînes de prédation, par exemple.
06:26Un des ravageurs de l'olivier, c'est la mouche de l'olive. Comme il y en a une dans le raisin,
06:32comme il y en a une dans les pêches et ainsi de suite. Vous avez deux façons, trois façons
06:35de traiter. La chimique, on ne va pas y rentrer dedans. La biologique, avec de l'argile
06:41blanche, du kaolin. Vous blanchissez l'arbre pour leurrer la mouche. Ou la nature. Nous
06:46avons opté pour la troisième. Donc nous essayons de remettre des oiseaux, des chauves-souris.
06:51On remet tout ce qu'il faut pour que le vivant, par exemple les oiseaux, 60% des oiseaux
06:56ont disparu en 30 ans, pour que le vivant se réapproprie nos agricultures à nous.
07:01Ok, donc là aussi, on essaie d'être le plus concret possible, c'est-à-dire quoi, planter
07:05des arbres, des haies autour de vos oliviers, c'est ça ?
07:09Oui, c'est ça. C'est planter des haies diversifiées. Donc vous allez recréer des
07:13buissons faits d'aiglantiers, d'amandiers sauvages, de genets, de muriers, ainsi de
07:19suite, qui sont des lieux de non-prédation des oiseaux et des corridors de passage. Nous
07:25allons travailler sur des couverts végétaux, qui sont des couverts médifères très
07:28souvent, qui permettent de développer la circulation des pollens. Nous allons créer des
07:33mares, des mares qui sont des havres de diversité, dans lesquelles un ensemble des animaux se
07:39prédatent, vivent entre eux. Et nous allons recréer pas mal de nichoirs en travaillant
07:43sur la probabilité. Prenons un exemple de la première ferme, Baudrigues, le domaine
07:47de Baudrigues, qui est aux portes de Carcassonne. Nous avons mis 450 nichoirs fabriqués dans
07:52une ESAT juste à côté. Probablement que seuls 10% seront pris par les oiseaux, mais c'est
07:58parce qu'on en remet beaucoup qu'on se donne la chance de revoir des oiseaux dans nos fermes.
08:02Et qu'est-ce que ça change sur la qualité des sols, tout ce que vous nous décrivez ?
08:07Là aussi, tout. Vous avez d'un côté une agriculture qu'on vient de développer pendant
08:1240 ans, 40-50 ans, qui a minéralisé nos sols et tué toute possibilité de vie inférieure,
08:19de ce que vous voyez. On voit bien d'ailleurs que si on ne met pas d'engrais, de stimulants
08:23racinaires et autres, il n'y a rien qui pousse. Et nous, nous travaillons sur un sol vivant.
08:28Donc, un sol vivant, c'est un sol qui est fait de racines qui nécrosent dans des couverts
08:32végétaux et qui amandent le sol naturellement et qui apportent de l'eau, puisque les racines
08:37sont faites d'eau à 90%. C'est des vers de terre et des coléoptères et autres bactéries
08:41qui sont, comme nous les êtres humains, faites à plus de 70% d'eau, qui aussi s'autoprédatent,
08:46meurent, donc réamandent le sol, donc réhumidifient le sol. Donc, ça change tout.
08:50C'est que nous avons un sol dynamique, un sol qui reçoit probablement n'importe quelle culture
08:55et peut la faire vivre à terme seul.
08:58Est-ce que ça veut dire forcément que vous produisez une huile d'olive haut de gamme
09:03plus chère ?
09:06Alors, oui, c'est une très bonne question. Non. Souvent, on a choisi le bio. Dans l'ère
09:12moderne, nous avons considéré que faire du bio, c'était valoriser sa production de 50
09:16centimes en plus. Ça a créé beaucoup de désillusions, on l'a vu ces dernières années,
09:21même si là, c'est en train de repartir un petit peu. Nous, nous ne le faisons pas du tout
09:24comme ça. C'est une hygiène de vie, c'est un état d'esprit, c'est une vision. Je peux
09:27vous dire par exemple qu'à terme, ce qui n'est pas le cas de suite, j'engage beaucoup
09:32de travail mécanique, j'engage beaucoup de travail manuel, mais à terme, peut-être
09:36que ma ligne d'intrants, parce que j'utilise quand même quelques intrants, des matières
09:39organiques, la fiante de poule, je vais utiliser des oligo-éléments, on va utiliser des soutiens
09:48foliaires, naturels, mais peut-être qu'à terme, notre agriculture sera moins dépensière,
09:52moins consommatrice qu'une traditionnelle. Donc, on le fait sur un modèle, notre modèle
09:58économique, il est basé plutôt sur une quantité d'oliviers qui va nous permettre de justifier
10:02un investissement industriel pertinent, moderne et puissant, qui va nous permettre de sortir
10:07une huile d'olive à un prix qui, a priori, devra pouvoir répondre à un maximum des consommateurs
10:13français.
10:14Ce modèle d'agriculture, parce qu'on est en plein dans ce débat, il y a eu la loi Duplon
10:18qui a été votée à l'Assemblée et au Sénat il y a quelques mois. Vous dites que
10:25le modèle que vous portez, c'est le modèle d'avenir, j'ai bien compris, même si c'est
10:29refaire ce qui existait avant, sauf que vous êtes un peu minoritaire, encore aujourd'hui,
10:34même s'il y a beaucoup d'agriculteurs qui voudraient bien faire autrement, ils ne peuvent
10:37pas faire autrement.
10:38Nous sommes terriblement minoritaires, je vous dirais que des projets comme cela en
10:42France, il n'y en a pas beaucoup, j'en ai deux ou trois en tête quand même, heureusement.
10:45Mais de toute façon, le temps, je ne cherche pas à avoir raison, parce que la question n'est
10:50plus une question de raison, c'est une question simplement de subsistance, c'est une question
10:54de génération future, c'est une question de souveraineté alimentaire.
10:58Et vous voyez bien, ces dernières années, que tout s'est un peu emballé, tout s'est
11:03un peu accéléré, y compris les scientifiques ont été un peu malmenés dans leurs prévisions.
11:07Et donc, de toute façon, quand vous voyez des vagues de chaleur ou des grandes sessions
11:12de vent ou des grandes sessions d'eau, de pluie, on vient de le voir encore à Valence,
11:17en Espagne, vous êtes obligés d'avoir des sols vivants pour pouvoir faire face justement
11:21à tout ça.
11:21Donc, je crois qu'on est au bon endroit, au bon moment.
11:24Et ce que je cherche à faire, au-delà de le réaliser, c'est de le partager, de le
11:28transmettre.
11:28Donc, partager, c'est par exemple faire des événements citoyens, des plaintes tâtelons
11:33qui nous permettent, par exemple, de planter et de diversifier avec des citoyens.
11:37C'est des interventions dans les écoles agriculture, à Toulouse, par exemple, ou à Montpellier,
11:42ce qui nous permet aussi de véhiculer une autre vision, un autre espoir que ce que les
11:47parents nous peuvent donner à leurs étudiants, à leurs élèves étudiants, et ensuite transmettre.
11:52Donc, l'enjeu pour moi et pour nous, c'est de pouvoir aussi mettre en place une équipe
11:57qui, vertueuse, va pouvoir perdurer, durer et transmettre tout ce que l'on est en train
12:02de créer aujourd'hui.
12:03Merci beaucoup Alexis Munoz et à bientôt sur Bismarck for Change.
12:08J'en passe au Zoom de l'émission.
12:09On va parler des difficultés financières des associations.
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