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  • il y a 3 mois
Peimane Ghaleh-Marzban, président du tribunal judiciaire de Paris est l'invité de Benjamin Duhamel. Il revient sur les menaces reçues par la magistrate qui a prononcé une peine de cinq ans de prison contre l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, suscitant la colère de ses soutiens. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-lundi-29-septembre-2025-1130494

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Transcription
00:00France Inter, la grande matinale.
00:037h48, Benjamin Duhamel, votre invité, est le président du tribunal judiciaire de Paris.
00:10Bonjour Payman Gallet-Marsban.
00:11Bonjour M. Duhamel.
00:12Merci d'être avec nous ce matin sur France Inter.
00:14Vous occupez l'un des plus hauts postes de la justice française,
00:17dans un moment où cette justice est sous le feu des critiques,
00:19après la condamnation de Nicolas Sarkozy à 5 ans de prison pour association de malfaiteurs
00:23dans l'affaire dite libyenne, avec mandat de dépôt différé et exécution provisoire.
00:28Ce qui veut donc dire qu'il ira en prison, des critiques et même des menaces,
00:32puisque deux enquêtes ont été ouvertes après des messages menaçants
00:34visant la présidente du tribunal correctionnel qui a condamné l'ancien président.
00:38On va revenir dans un instant aux interrogations suscitées par cette décision.
00:42Mais d'abord, ce sont ces menaces de mort contre la présidente,
00:45sous votre autorité, qui vous poussent à prendre la parole ce matin ?
00:49Merci de me donner la parole.
00:50Ce qui se passe dans notre pays aujourd'hui est grave.
00:54C'est une véritable dérive dans notre démocratie.
00:56concevait qu'une magistrate qui a statué dans une collégialité trois magistrats
01:02à l'issue des débats dont tout le monde a salué la qualité,
01:06même les avocats de Nicolas Sarkozy,
01:08et qu'après un délibéré qui a été rendu minutieusement avec un jugement de 400 pages
01:13et où j'ai le document de travail à cette issue,
01:16eh bien aujourd'hui, cette magistrate fait l'objet de menaces de mort.
01:20On a dit qu'une décision de justice était une atteinte à l'état de droit.
01:24Non, ce qui est une atteinte à l'état de droit,
01:26ce sont des menaces contre les juges.
01:28C'est inacceptable et ça devrait être un électrochoc dans notre pays.
01:32On entend votre colère ce matin.
01:34Vous citiez cette phrase, effectivement, de Nicolas Sarkozy,
01:36qui parle de la haine des magistrats,
01:38dénonce des pratiques contraires à l'état de droit.
01:40Vous considérez qu'il y a une responsabilité de ce personnel politique
01:46quand il utilise ses mots et quand on voit ensuite les menaces
01:49dont cette magistrate fait l'objet ?
01:52En démocratie, la liberté d'expression permet de critiquer une décision de justice.
01:56Oui, on a le droit de critiquer une décision de justice.
01:58Vous avez le droit de dire qu'une décision aurait dû être motivée autrement
02:01et que la peine est inadéquate.
02:02En revanche, il y a deux limites.
02:04C'est ce qu'on appelle le discrédit ou l'opprobre jeté sur une décision de justice.
02:08Discréditer un juge, c'est une atteinte à l'état de droit.
02:12Et par ailleurs, ce qui est intolérable,
02:14c'est lorsqu'on en arrive à des menaces de mort.
02:17Et concevez, M. Duhamel, que c'est la deuxième fois en un an
02:21que nous sommes dans cette situation-là,
02:23puisque ce fut la même chose dans l'affaire des assistants parlementaires
02:26du Rassemblement National.
02:27Ça devrait interroger l'ensemble des citoyens.
02:29Je voudrais vous soumettre trois interrogations
02:31suscitées par cette décision de justice.
02:33Il y a d'abord la question du mandat de dépôt avec exécution provisoire,
02:35c'est-à-dire que malgré l'appel Nicolas Sarkozy,
02:37ira en prison.
02:38Qu'est-ce que vous répondez à ceux qui disent
02:40il n'y a pas de risque de récidive,
02:41il n'y a pas de risque de fuite.
02:42Le parquet national financier lui-même n'avait pas requis le mandat de dépôt.
02:46Alors pourquoi avoir ordonné une telle incarcération ?
02:49Alors, je voudrais tout d'abord indiquer
02:51que le mandat de dépôt est quelque chose
02:52qui est utilisé massivement dans nos juridictions
02:55et notamment pour la lutte contre la délinquance du quotidien.
02:58M. Sarkozy, juste, il faut faire un peu de droit,
03:00est condamné pour des faits d'association de malfaiteurs.
03:03C'est l'entente avec M. Guéant, Hortefeu, Tiakédine,
03:05avec l'objectif de préparer une corruption au plus haut niveau
03:09dit la décision quand il serait élu président.
03:12D'une part, le financement en provenance d'un État étranger
03:15et la contrepartie aurait été le suivi du dossier pénal de M. Sarkozy
03:19et le suivi de la situation en Libye.
03:22Le tribunal vient dire
03:23pour cette infraction
03:25dont la peine encourue est de 10 ans,
03:28je prononce 5 ans.
03:30Pourquoi je prononce 5 ans ?
03:31Parce que je constate qu'il n'y a pas eu la réalisation du pacte corruptif.
03:35C'est ce que dit le tribunal.
03:37Et le tribunal dit
03:38nous sommes sur 5 ans d'emprisonnement
03:40et s'agissant d'une infraction, d'une gravité exceptionnelle,
03:45pour assurer l'effectivité de la peine,
03:47je prononce un mandat de dépôt.
03:48Je vais plus loin.
03:49Mandat de dépôt,
03:50normalement, de manière habituelle,
03:52les menottes auraient dû être passées
03:54à la barre, à M. Sarkozy.
03:56Or, le tribunal dit
03:57nous n'allons pas le faire.
03:59Donc, vous considérez qu'il y a eu quasiment
04:00une forme de mensuétude du tribunal ?
04:02Je ne dis pas que c'est une mensuétude.
04:05Je dis juste, en lisant la décision,
04:07je suis ni pour ou contre,
04:08je suis le pédagogue de la décision.
04:10Aujourd'hui, c'est comme ça que je viens.
04:12Je dis juste que le tribunal a minutieusement
04:15précisé pourquoi il a prononcé un mandat de dépôt.
04:185 ans d'emprisonnement
04:20dans la pratique judiciaire.
04:225 ans d'emprisonnement.
04:23Eh bien, il y a très habituellement
04:25un mandat de dépôt.
04:27Et le fait d'avoir eu un mandat de dépôt
04:28à effet différé,
04:30c'est justement avoir tenu compte
04:31de la situation professionnelle
04:33de M. Sarkozy, dit la décision.
04:35Mais le principe du double degré de juridiction.
04:38On fait appel, et pour autant,
04:39il y a quand même un mandat de dépôt
04:40avec exécution provisoire.
04:41Mais, M. Duhamel,
04:43j'ai l'impression que les uns et les autres
04:45découvrent la réalité de la justice
04:47de notre pays.
04:48Mais tous les jours,
04:49va aller en comparution immédiate.
04:51Les personnes sont incarcérées
04:53alors qu'elles peuvent faire appel
04:54alors qu'elles sont dans le délit d'appel.
04:56Souvent parce qu'ils présentent
04:57un risque de trouble à l'ordre public,
04:59un risque de récidive,
05:00un risque pour la sécurité des Français.
05:01Oui, alors, ça va être un peu technique.
05:03Mais ces critères sont les critères
05:04avant le jugement.
05:06C'est le critère de l'article 144.
05:08Après le jugement,
05:09on n'est pas dans la question
05:10de la réitération
05:11ou la question des risques de pression.
05:14C'est la question
05:14de la gravité exceptionnelle des faits.
05:17Ce n'est pas la même motivation.
05:18Quand on vient dire,
05:19non, non, mais c'est important,
05:19la motivation d'un mandat de dépôt
05:21avant le jugement
05:22et après le jugement
05:23n'est pas le même
05:24en procédure pénale.
05:26Et on continue avec
05:27une autre critique
05:27sur le décalage qu'il peut y avoir
05:29entre les trois relax
05:29dont a bénéficié l'ancien président
05:31sur l'aveu du tribunal
05:32qui explique ne pas pouvoir démontrer
05:34que de l'argent libyen
05:34a été utilisé in fine
05:35dans la campagne de 2007
05:37et cette condamnation
05:38pour association de malfaiteurs,
05:40une incrimination fourre-tout,
05:42dénonce plusieurs avocats pénalistes.
05:44C'est une accusation
05:44qui a été trouvée
05:45faute de pouvoir démontrer
05:46la corruption
05:47ou le financement illégal
05:48de la campagne de 2007 ?
05:49Alors, là encore,
05:50je suis le pédagogue
05:51de la décision
05:52et je n'ai pas d'avis
05:53sur le fond du dossier.
05:55Que dit la décision ?
05:56Monsieur Sarkozy
05:57est poursuivi
05:58pour quatre infractions.
05:59Il y a trois relax
06:00et il y a une condamnation
06:01pour association de malfaiteurs.
06:03Un point de pédagogie.
06:04L'association de malfaiteurs,
06:05c'est une infraction obstacle.
06:06C'est l'idée
06:07qu'il y a des actes préparatoires
06:09d'infractions
06:10qui sont d'une telle importance
06:11qu'on va les réprimer
06:12même si l'infraction
06:14ne se réalise pas.
06:15En matière de terrorisme,
06:16vous pouvez condamner
06:17quelqu'un
06:18pour la préparation
06:19d'un attentat
06:19même si l'attentat
06:20n'a pas eu lieu.
06:21Et c'est quelque chose
06:22qui est très connu.
06:23Non, l'association de malfaiteurs
06:24ce n'est pas une infraction
06:25fourre-tout,
06:25c'est une infraction
06:26qui est précisée
06:27par la Chambre criminelle.
06:28Mais simplement,
06:29j'ai retrouvé
06:29une de vos déclarations
06:30où vous aviez qualifié
06:31le parquet national financier
06:32de bijoux.
06:33Le jugement du tribunal,
06:34c'est quand même un désaveu
06:35pour le PNF
06:36qui avait centré son enquête
06:38sur la question
06:38du financement illégal
06:39présumé de la campagne de 2007.
06:40Alors, c'est intéressant
06:42ce que vous dites
06:42parce que justement,
06:43ça montre que le tribunal
06:44a travaillé
06:45avec beaucoup de précision,
06:47avec méticulosité.
06:48Vous avez énormément
06:49de relax partiel
06:51ce qui montre
06:52que le tribunal
06:53a travaillé
06:54avec un soin
06:55très méticuleux.
06:56Alors,
06:57je vous laisse poser
06:58votre question,
06:59je sais si vous voulez.
06:59Oui, puisque le temps file
07:00et qu'on a beaucoup de questions
07:01à vous poser ce matin.
07:02Autre interrogation
07:03lancinante
07:04sur le manque
07:05d'impartialité
07:05présumée des magistrales
07:06des avocats
07:07de Nicolas Sarkozy,
07:08Jean-Michel Darrois
07:09a mis en avant
07:09le fait que la présidente
07:10du tribunal
07:11avait manifesté
07:11en 2011
07:12contre celui
07:12qui était à l'époque
07:13à l'Elysée.
07:14Est-ce que les juges
07:15ont voulu se payer,
07:15Nicolas Sarkozy ?
07:16Alors,
07:17je voudrais juste rappeler
07:18la procédure.
07:19La procédure de récusation
07:21qui est prévue
07:22dans le code de procédure pénale
07:23et je suis certain
07:23que Maître Darrois
07:24la connaît,
07:26c'est,
07:26vous pouvez soulever
07:27la question de l'impartialité
07:29ou de l'impartialité
07:30du juge
07:30pendant les débats
07:31et jusqu'au prononcé
07:32de la décision.
07:33Donc,
07:33les avocats de M. Sarkozy
07:34jusqu'au 24.
07:35Jusqu'au 24.
07:37Jusqu'au 24.
07:37Ils pouvaient le faire avant
07:39et c'était soumis
07:40au premier président
07:40de la Cour d'appel de Paris
07:41qui aurait statué.
07:42Cette information
07:43était connue.
07:44Il y avait un article
07:45de Valeurs Actuelles
07:47qui, bien avant le procès,
07:48avait sorti cette information.
07:50Je considère,
07:50pour ma part,
07:51que faire cette sortie
07:52après la décision,
07:54c'est une discrédite.
07:54On peut manifester
07:55contre Nicolas Sarkozy
07:57en 2011
07:57et ensuite juger
07:58en toute impartialité ?
08:00Alors,
08:00je vous ai rappelé
08:01sur ce qu'était
08:02la procédure de récusation.
08:04Vous savez,
08:04en 2011,
08:05qui s'était passée,
08:06même le Conseil supérieur
08:07de la magistrature
08:08avait sorti un communiqué
08:09le 9 février 2011
08:11pour indiquer,
08:12parce que M. Sarkozy
08:13à l'époque
08:13avait indiqué
08:14que la magistrat
08:16pour une décision rendue
08:17devait faire l'objet
08:18de poursuites disciplinaires
08:19et le CSM
08:20et l'ensemble
08:21de l'institution
08:22avaient dit
08:23que cela n'était pas possible.
08:24C'était sur ce seul point.
08:26Je veux juste dire
08:26que la présidente
08:27de la formation
08:28n'a pas caché
08:29cette information
08:29et que c'est en accord
08:31avec sa hiérarchie
08:32qu'elle a statué
08:33dans le...
08:33Vous avez raison.
08:34Je défends aujourd'hui
08:35les juges
08:37du tribunal de Paris.
08:38Simplement,
08:39vous allez être installé
08:40officiellement,
08:41si je veux dire,
08:41cet après-midi,
08:42président du tribunal judiciaire
08:43de Paris.
08:43Sur la question plus globale
08:44de la façon
08:45dont certains magistrats
08:46sont visés,
08:47sans revenir au mur
08:48des cons du syndicat
08:48de la magistrature,
08:49quand il y a un an,
08:50ce même syndicat
08:51assumait, je cite,
08:52de se mobiliser
08:52contre l'accession
08:53au pouvoir
08:53de l'extrême droite.
08:54Vous voyez ensuite
08:55les attaques
08:55dont font l'objet
08:56ces magistrats.
08:57Est-ce qu'il ne faudrait
08:57pas réfléchir,
08:58et là encore,
08:58vous êtes une des grandes
08:59voix de la justice
09:00aujourd'hui,
09:00à une forme de devoir
09:01de réserve,
09:02précisément pour protéger
09:03les décisions
09:04qui sont ensuite rendues ?
09:05Moi, je comprends
09:06que les uns et les autres
09:07puissent s'interroger
09:08quand il y a
09:09l'affaire du mur des cons
09:10ou d'autres choses.
09:11Je peux le comprendre.
09:13Après,
09:13vous avez des magistrats,
09:14quel que soit leur engagement
09:16dans les organisations
09:17professionnelles,
09:18dont je peux vous assurer
09:19que quand ils rendent
09:20leurs décisions,
09:20ils le font
09:21en toute impartialité,
09:22que ce soit l'USM,
09:23l'ESM ou l'unité magistrat.
09:25Merci beaucoup,
09:26Pémane.
09:26Merci à vous de m'avoir
09:27donné la parole aujourd'hui.
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