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  • il y a 2 mois
Menaces de mort visant une magistrate, critiques sur la sévérité de la peine et demandes de grâce présidentielle : les attaques visant l'institution judiciaire se multiplient depuis la condamnation de Nicolas Sarkozy par le tribunal correctionnel de Paris dans l'affaire du présumé financement lybien de sa campagne de 2007. Jean-François Bohnert, procureur de la République financier et chef du Parquet national financier (PNF), y répond dans RTL Matin.
Regardez L'invité RTL de 7h40 avec Thomas Sotto du 29 septembre 2025.

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Transcription
00:00L'invité d'RTL Matin c'est donc le procureur du parquet national financier Jean-François Bonnert.
00:08Bonjour et bienvenue sur RTL Jean-François Bonnert.
00:10Bonjour Thomas Soto.
00:11On va bien sûr parler de ce jugement qui envoie Nicolas Sarkozy en prison
00:14et c'est peu de dire qu'on attend la toute première réaction du PNF que vous représentez.
00:18Mais pour commencer, je voudrais qu'on se dise quelques mots de ce qui arrive à la juge
00:21qui a présidé le tribunal correctionnel lors de ce procès, Nathalie Gavarino.
00:25Elle est menacée de mort, le parquet de Paris a d'ailleurs ouvert deux enquêtes.
00:28J'imagine que ça ne laisse pas le procureur que vous êtes indifférent.
00:32Bien sûr Thomas Soto.
00:34Ce qui s'est passé ces dernières heures, ces derniers jours,
00:37après le rendu du délibéré, est proprement insupportable et inadmissible.
00:42A qui la faute ?
00:43Ça a été rappelé, permettez-moi quand même de le souligner,
00:45ça a été rappelé par le président de la République,
00:48ça a été rappelé par le garde des Sceaux,
00:50ça a été rappelé par le conseil supérieur de la magistrature.
00:54On est en train de marcher sur la tête.
00:55Quand on vient critiquer avec violence et menace de mort un tribunal,
01:01c'est l'état de droit qui est menacé.
01:03Et souvenons-nous, l'état de droit, c'est le socle de la démocratie.
01:07Je peux vous le dire, à cette heure, je suis sûr
01:10que Montesquieu est en train de se retourner dans sa tombe.
01:13La démocratie est en danger aujourd'hui ?
01:14Oui, dès lors que l'on s'en prend de façon aussi véhémente,
01:19aussi violente à la justice.
01:22Que l'on ne soit pas d'accord avec une décision,
01:24c'est arrivé combien de fois dans le passé ?
01:26Et ça arrivera encore.
01:28Les décisions sont critiquables.
01:30C'est le débat public, on est là pour s'en parler.
01:33Mais dès lors qu'on franchit ce pas, là, on va trop loin.
01:36Alors, on est clair, on est net, on est sans aucune ambiguïté.
01:39Rien ne justifie les attaques et les menaces contre un magistrat.
01:42Mais sur le fond, cette juge, dont l'entourage de Nicolas Sarkozy
01:45répète qu'elle a manifesté contre lui quand il était président de la République,
01:49était-elle la bonne personne pour éviter toute suspicion ?
01:52Écoutez, quand on lit les 400 pages du jugement,
01:57quand on fait un petit retour, un arrêt sur image sur le procès,
02:01qui a duré 4 mois,
02:02qui a été conduit de façon totalement fluide,
02:07en respectant scrupuleusement l'égalité des armes,
02:11vraiment, je ne vois pas matière à critiquer le travail
02:15et le comportement des magistrats du siège.
02:17Vous avez lu les 400 pages du jugement.
02:19J'imagine aussi que vous avez lu ce week-end l'interview de Nicolas Sarkozy dans le JDD.
02:23Toutes les limites de l'état de droit ont été violées, a dit l'ancien président.
02:27Cette décision constitue-t-elle, monsieur le procureur, un viol de l'état de droit ?
02:31Comment recevez-vous ces mots ?
02:33Eh bien, je m'en étonne.
02:35D'abord, évidemment, une personne qui est condamnée,
02:38qui est lourdement condamnée,
02:39a évidemment le droit de réagir.
02:42C'est humain et c'est tout à fait normal.
02:44Viol de l'état de droit, on n'est pas dans la simple réaction.
02:46Là, on va, je pense, un peu trop loin
02:48parce qu'il faut se souvenir,
02:50et ça, monsieur Sarkozy ne le dit pas,
02:52c'est qu'avant d'en arriver au jugement
02:55qui a été rendu la semaine dernière,
02:56il n'y a pas moins d'une centaine de magistrats
03:00qui s'est penché sur le dossier du financement libyen de sa campagne.
03:05Je rappellerai qu'à l'initiative, notamment,
03:07de Nicolas Sarkozy et de sa défense,
03:10il n'y a eu pas moins de 22 décisions de la Cour d'appel
03:13et 15 décisions de la Cour de cassation
03:16qui ont toutes validé le cheminement
03:19qui a conduit au jugement qui a été rendu la semaine dernière.
03:21Donc, il n'y a pas d'injustice ?
03:23Nicolas Sarkozy a dénoncé une injustice qui est un scandale,
03:25un jugement qui est une honte absolue
03:27et une haine, une haine qui n'a décidément aucune limite.
03:31Monsieur le procureur financier,
03:32les magistrats haïssent-ils Nicolas Sarkozy ?
03:35Nous n'avons pas de haine à exprimer.
03:37Chacun peut penser, évidemment,
03:39ce qu'il souhaite en son fort intérieur d'une situation.
03:42Mais nous, je l'ai déjà dit sur cette antenne, Thomas Soto,
03:46notre boussole, c'est le droit, c'est la règle de droit.
03:49Je vais être plus direct. Est-ce que vous, vous avez un problème personnel avec Nicolas Sarkozy ?
03:53Aucun.
03:53Est-ce que vous avez un compte à régler ?
03:55Aucun.
03:55Aucun ?
03:55Certainement pas.
03:57Certainement pas.
03:58Et je n'ai jamais eu de compte à régler avec aucun homme politique
04:01parce qu'il est vrai que dans les affaires du parquet national financier,
04:04on est en présence d'un public qui émane plutôt de la sphère politique.
04:10C'est ainsi.
04:11Ce n'est pas une volonté du parquet,
04:12c'est parce que les affaires elles-mêmes vont dans ce sens-là.
04:15Mais est-ce que vous êtes hermétique au questionnement, au trouble que provoque ce jugement ?
04:20Vous l'entendez, vous le lisez.
04:21Bien sûr.
04:22Vous le constatez.
04:22Bien sûr.
04:23Vous le partagez.
04:24Et nous avons à nous faire évidemment une opinion.
04:27Nous sommes en train de réfléchir au sein de mon parquet s'il y a lieu de faire appel.
04:33Ah, ce n'est pas décidément ?
04:34Pour l'heure, à l'instant où je vous parle, je n'ai pas fait appel.
04:38On réfléchit, nous avons dix jours.
04:40Qu'est-ce qui frappe en chez La Balance ?
04:41Eh bien, une analyse, une analyse juridique, une analyse du raisonnement qui a été tenue par le tribunal.
04:48Là, je n'irai pas davantage parce qu'on est en train de travailler.
04:52On réfléchit.
04:53Il y a à la fois la sentence qui est lourde, qui est sévère,
04:56qui est dans l'esprit de ce que nous avons requis, bien sûr.
04:59Mais il y a aussi le raisonnement juridique qui a été suivi.
05:02Et là, on y réfléchit.
05:03Et dans cette sentence, il y a aussi l'exécution provisoire,
05:06qui fait que dans quelques jours, Nicolas Sarkozy ira en prison.
05:08Et vous voyez bien que cette exécution provisoire, personne ne la comprend vraiment.
05:12Vous évoquiez Emmanuel Macron qui a réagi hier.
05:14Il a une petite phrase dans son tweet.
05:16Dans notre état de droit, la présomption d'innocence comme le droit au recours
05:19doivent toujours être préservées.
05:22On a l'impression que lui aussi prend cette distance avec l'exécution provisoire.
05:25Mais l'exécution provisoire n'interdit pas le recours.
05:28J'irai même plus loin.
05:29Le fait qu'une personne soit détenue lorsqu'elle fait appel
05:33lui donne priorité pour être jugée en appel.
05:36Et la cour d'appel va devoir, effectivement, envisager un calendrier très serré
05:41qui est favorable en tant que tel au Président de la République,
05:45qui rejoint ce que disait le Président de la République,
05:48à savoir l'effectivité du droit de recours,
05:53l'effectivité de l'appel doit être garantie.
05:55Non, non, il n'y a pas d'antinomie là.
05:56Quand vous lisez ce jugement, est-ce que vous dites que le parquet national financé s'est trompé dans ces accusations ?
06:01Ou est-ce que vous maintenez tout de A à Z ?
06:04Nous le maintenons, pourquoi ?
06:06Tout, y compris le pacte de corruption ?
06:08Mais parce que le tribunal, dans son jugement, valide ce pacte de corruption.
06:12Il dit, sous la qualification d'association de malfaiteurs,
06:16Nicolas Sarkozy a cherché à obtenir, et il l'a obtenu, un financement libyen,
06:22en contrepartie d'une reprise des relations diplomatiques avec la Libye,
06:27et de l'examen, ne l'oublions pas, de la situation d'un criminel
06:31qui a été condamné par la France, Abdallah Senoussi, pour...
06:35Donc vous n'enlevez rien ?
06:37Pardon ?
06:37Vous n'enlevez rien ?
06:38Ah non, non, non.
06:39Donc vous allez faire appel, puisque 3 des 4 délits n'ont pas été retenus ?
06:42Ça, on y réfléchit, on est en train de regarder ça,
06:45parce qu'il faut ciseler les conditions dans lesquelles on exprime l'appel.
06:50Ça, ça nécessite un petit peu, sur ce dossier, un petit peu de réflexion.
06:55Il faut se poser, il faut prendre le temps du recul.
06:57Mais encore une fois, moi, ce que je retiens,
06:59c'est l'indépendance d'analyse du tribunal.
07:02Le tribunal a fait son analyse, est arrivé au résultat qui fait aujourd'hui 400 pages,
07:07que nous sommes encore en train de décortiquer,
07:09parce que tout cela, ça se pèse au trébuchet.
07:11C'est ça l'exercice des voies de recours,
07:13et c'est ça l'application de l'état de droit.
07:16Vous persistez à penser, donc il y a eu un pacte de corruption,
07:18vous persistez à penser qu'il y a eu un financement illégal de campagne ?
07:21Oui, parce qu'on trouve effectivement 6,5 millions qui partent de Libye
07:26et qui arrivent en France, par des comptes divers,
07:28le compte de Takiédine, le compte d'Alexandre Joury.
07:33Après, il y a un mécanisme de chambre de compensation qui se fait,
07:38mais on voit bien ce financement partir de Libye
07:40et arriver en France sur les comptes des proches de Nicolas Serres.
07:44Et donc il y a eu un détournement de fonds publics aussi, pour vous ?
07:46Et là-dessus, il faut reprendre l'analyse qui a été faite par le tribunal,
07:50on le verra, nous avons notre thèse,
07:52on va se définir dans les prochains jours,
07:54et on soumettra la question à la cour d'appel.
07:56Est-ce que ça valait d'envoyer Nicolas Sarkozy en prison ?
08:00La condamnation est une chose, le mandat de dépôt en est une autre.
08:03M. Soto, quand on arrive à des peines, on va dire,
08:08de l'ordre de 5 ans d'emprisonnement et même plus,
08:11parfois déjà avant,
08:13le tribunal, en règle générale, prononce mandat de dépôt.
08:17Là, il a pris la précaution de laisser un petit peu de temps à M. Sarkozy,
08:21tout simplement parce que M. Sarkozy a toujours répondu à toutes les convocations.
08:25Ce qui n'était pas le cas.
08:26Dans vos réquisitions, vous souhaitiez le mandat de dépôt ?
08:29Ce n'était pas le sujet.
08:30Nous, ce qu'on a vu dans le dossier,
08:32c'est qu'il y avait deux personnes qui, elles, n'ont jamais répondu,
08:35ou en tout cas de façon très indifférente aux convocations,
08:37Alexandre Jury ou Aïb Nasser,
08:39et eux sont partis en détention le jour même du rendu du délibéré.
08:43Vous nous confirmez que Nicolas Sarkozy est bien convoqué le 13 octobre
08:45par le parquet national financier ?
08:47Je le confirme.
08:48C'est vous qui allez le recevoir ?
08:49Je le recevrai, bien sûr, avec mon équipe,
08:51parce que là, c'est un travail collectif,
08:53comme nous le faisons d'habitude,
08:54au parquet national financier.
08:56D'ailleurs, ça aussi, c'est une garantie pour les justiciables.
08:59C'est un travail de collégialité.
09:01Ce n'est pas une personne qui décide,
09:03c'est un ensemble de cerveaux qui se conjuguent,
09:07qui travaillent, qui réfléchissent,
09:09justement pour éviter ce côté tendancieux,
09:12ce côté éventuellement de prise de position politique.
09:15Il risque quand même de vous dire, Nicolas Sarkozy,
09:16quand il sera face à vous, l'abandon de 3 charges sur 4,
09:19c'est une grosse claque pour vous, non ?
09:20Écoutez, nous ne sommes pas en épicerie.
09:22Ce n'est pas parce qu'il y a 75% des éléments qui ne sont pas retenus.
09:26Le dernier élément qui est retenu, je le rappelle quand même,
09:28l'association de malfaiteurs, dans son cas,
09:30lui faisait encourir 10 ans d'emprisonnement.
09:33Est-ce qu'il serait incarcéré dans la foulée, le jour même, le 13 octobre ?
09:36Ça, c'est décidé ?
09:37Là, vous nous laisserez quand même la question.
09:40Tout cela va être étudié, évidemment, dans les prochains jours,
09:43le 13 octobre.
09:45D'abord, c'est à Nicolas Sarkozy que je dois cette réponse.
09:49Je la lui réserve.
09:50Dernière question.
09:51On parle beaucoup de Nicolas Sarkozy et pour cause,
09:52mais hier, Marion Maréchal a posé une question qui interpelle
09:54concernant cette fois les notes de frais d'Anne Hidalgo.
09:57Est-ce que le parquet national financier va se saisir de ce sujet-là aussi,
10:00les frais d'admission de la maire de Paris ?
10:02C'est un dossier qui est actuellement court.
10:05C'est d'ailleurs de notoriété publique,
10:07puisque nous avons eu l'occasion de répondre à des sollicitations médiatiques.
10:11Oui, nous faisons notre travail,
10:13quelle que soit l'obédience, quelle que soit la coloration politique.
10:17Ce n'est pas notre sujet.
10:19Ma boussole restera toujours le code pénal et le code de procédure pénale.
10:23Merci beaucoup, Jean-François Bonnert, d'être venu ce matin sur Etrel
10:25et pour la clarté de vos réponses.
10:27Restez avec nous dans un instant, c'est FIP.
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