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Personnes
Transcription
00:00Peut-on à la fois être noir et allemand ?
00:04Imaginez quelques instants, naître, grandir et vivre en Allemagne,
00:08mais ne jamais être reconnu comme vraiment allemand.
00:11C'est la réalité des afro-allemands,
00:13une réalité marquée par l'exclusion, les humiliations et l'invisibilité.
00:18Aujourd'hui, on plonge dans l'histoire occultée d'une minorité
00:22qu'on a toujours voulu effacer.
00:24Dans son ouvrage Sociologie, que vous voyez juste ici, de Juliette Smeralda,
00:28cette dernière nous montre comment les afro-allemands sont perçus comme des étrangers.
00:33Même lorsqu'ils sont nés sur le sol allemand,
00:35la question de leur appartenance est niée dès le départ.
00:39Aux pages 191 et 192, nous pouvons lire ceci.
00:42Sous le régime, les athées afro-deutsches qui ne furent pas déportées et furent stérilisées de force.
00:49Être noir en Allemagne, c'est donc non seulement être exclu de la nation,
00:53mais aussi être ciblé directement dans son existence biologique.
00:58C'est une négation totale de la citoyenneté et de l'humanité.
01:02Le rejet est si profond que même lorsqu'ils partagent langue, culture et nationalité,
01:09les afro-allemands, adés afro-deutsches, ne sont jamais vus comme allemands à part entière.
01:15Juliette mentionne encore une fois, comme je le disais dans ce même ouvrage,
01:18Michel Wright qui écrit page 386-387 de l'ouvrage La diaspora urbaine, je cite
01:25« A mon avis, l'Autriche est la seule autre nation ouest-européenne
01:29qui ne se représente absolument pas des Noirs parmi ses membres. »
01:34Ici, Smeralda révèle la logique d'exclusion raciale.
01:38On nie la possibilité même qu'un Noir puisse être membre d'une nation européenne.
01:43C'est une frontière symbolique, même lourde de conséquences,
01:47l'invisibilité politique, sociale et historique.
01:52Cette négation s'appuie sur l'obsession raciale héritée de la colonisation et du sexisme.
01:58L'idéologie de la pureté du sang a servi à maintenir les afro-allemands dans un statut d'étranger,
02:06même quand ils avaient des parents allemands.
02:07À la page 198, nous pouvons lire ceci.
02:11L'enfant métis est le fruit, la matérialité, l'incorporation de la pollution du sang arien
02:17que représente le mélange avec des noms arien.
02:21En fait, le simple fait d'exister devenait une menace symbolique pour l'imaginaire national.
02:27Ces enfants incarnaient, comme vous l'avez entendu, aux yeux des racistes, une souillure.
02:33Voilà pourquoi les afro-allemands ont souvent été réduits à un problème à gérer, plutôt qu'à des citoyens.
02:40Mais face à cette invisibilisation, il y a des voix qui se sont levées.
02:45Heureusement, des écrivains, des militants, des poètes même.
02:49L'autobiographie et la littérature ont été des armes pour exister, revendiquer et briser le silence.
02:55À la page 209, on peut lire ceci.
02:59L'histoire de vie, comme l'autobiographie, a pour but de réviser l'écriture et de compenser le manque de mémoire,
03:05de l'histoire officielle collective, de révéler aux Allemands majoritaires tout ce qui leur est caché de leur histoire.
03:12Écrire, témoigner, raconter, c'était une manière de dire « nous existons ».
03:18Nous faisons partie de l'histoire allemande.
03:21Ces textes ont permis d'arracher une reconnaissance, même partielle,
03:26mais dans une société qui refusait de voir leur humanité.
03:30L'histoire, vous l'avez compris, des afro-allemands, c'est l'histoire d'une citoyenneté refusée.
03:35On les a stérilisés, marginalisés, niés dans leur identité.
03:40Et pourtant, ils ont résisté, écrit, témoigné pour exister.
03:45Ce combat n'est pas seulement allemand, il est universel.
03:49Celui de toutes les minorités qu'on veut effacer.
03:52Alors, dites-moi en commentaire,
03:53pensez-vous que l'Europe a vraiment fait le travail de mémoire sur ses propres minorités?
04:00Merci.
04:01Merci.
04:02Merci.
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