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00:007h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin l'économiste spécialiste de l'épargne, Philippe Crevel.
00:07Bonjour Philippe Crevel.
00:09Bonjour.
00:09Bienvenue sur Europe 1. Question avec vous ce matin sur notre protection sociale, le fameux modèle social français.
00:15Comment se porte-t-il ? Est-il menacé par la crise de surendettement du pays qui est diagnostiquée aujourd'hui par François Bayrou ?
00:22Ce modèle social pour lequel la France, on le sait, dépense sans compter.
00:26Chaque année, 30 à 33% du PIB, c'est-à-dire la richesse nationale créée, record mondial.
00:32Et clairement, le consensus n'est pas aux économies.
00:35Le discours, c'est toujours majoritairement, Philippe Crevel, touche pas à ma sécu, touche pas à ma retraite.
00:40C'est vrai que les Français sont extrêmement attachés à leur modèle de protection sociale.
00:45Il y a donc des facteurs, on va dire, automatiques d'augmentation des dépenses.
00:50Il y a évidemment en matière de retraite, le vieillissement démographique.
00:53Il y a en matière de santé, toujours le fait que la population est de plus en plus âgée et que les nouveaux traitements coûtent de plus en plus cher.
01:01Et puis, en matière de logement, on connaît les problèmes qu'ont les Français pour se loger.
01:05Donc, on a évidemment besoin des APL, des aides personnelles au logement, de la construction d'HLM, etc.
01:12Donc, c'est toujours plus de dépenses publiques.
01:15Et il est très difficile, surtout, de faire des économies, de remettre en cause ce qui a été décidé hier ou avant-hier.
01:22Et donc, on a un phénomène d'ajout et non pas de rationalisation des dépenses sociales.
01:27Ce qui aboutit évidemment au système actuel avec un déficit important qui, si on ne fait rien, évidemment, est amené à augmenter compte tenu de tout ce que je viens de dire.
01:36Voilà, ce déficit, rien que pour la sécurité sociale, pour la branche maladie, il est de 22 milliards.
01:41C'est quand même considérable.
01:43Et ce qu'il faut dire aussi, Philippe Crevel, aux auditeurs d'Europe 1, c'est qu'aujourd'hui, il faut sortir du mythe que la protection sociale,
01:49elle est financée uniquement par les cotisations de ceux qui travaillent.
01:52Ça n'est pas vrai.
01:53Aujourd'hui, la sécu, elle va emprunter de l'argent sur les marchés, comme le fait l'État pour se financer.
01:59Alors, la sécurité sociale est en déficit, une vingtaine de milliards d'euros pour la santé, une dizaine de milliards d'euros pour les retraites.
02:06Alors, rapporté au montant des dépenses, on est à plus de 1000 milliards d'euros de dépenses pour tout ce qui est protection sociale.
02:14Mais c'est vrai qu'on est logiquement sur de la dépense courante, ce n'est pas de l'investissement.
02:19Et il était initialement prévu qu'on ne puisse pas financer par l'emprunt la sécurité sociale.
02:24Et puis, on l'a admis, évidemment, face aux circonstances.
02:27Et donc, aujourd'hui, comme l'État, la sécurité sociale est forcée d'emprunter.
02:33Alors, c'est un mécanisme un peu complexe.
02:34On passe par la caisse d'amortissement de la dette sociale.
02:37La CAES.
02:37Et c'est vrai qu'aujourd'hui, on finance en partie par emprunt la sécurité sociale, ce qui n'était pas prévu au départ.
02:44Par ailleurs, vous avez dit que ce sont les cotisations du travail, essentiellement, qui financent la sécurité sociale.
02:49Et la CSG, Contribution Sociale Généralisée, qui a été institue en 1991.
02:53Il y a également quelques impôts qui financent également la sécurité sociale.
02:55Ah bah oui, quelques impôts. Il y en a même beaucoup.
02:57C'est une cinquantaine, je crois.
02:59Et alors, il y a aussi tout ce que l'État verse aussi directement dans les budgets de la protection sociale
03:05pour, en quelque sorte, maintenir cette illusion de la soutenabilité financière du système.
03:12Philippe Crevel, on en est quand même là aujourd'hui.
03:15Alors, les relations entre l'État et la sécurité sociale sont extrêmement complexes.
03:19Parce que quand l'État, le gouvernement, décide, par exemple, des exonérations de charges sociales,
03:24évidemment, c'est un manque à gagner pour la sécurité sociale.
03:27Parce qu'il n'y a pas de cotisation.
03:28Et l'État compense, donc, ce manque à gagner.
03:31D'ailleurs, la sécurité sociale indique souvent que la compensation n'est pas complètement à 100%.
03:35Et qu'en fait, la sécurité sociale est en droit de demander un peu plus d'argent à l'État.
03:40Mais ça, ce sont des relations extrêmement compliquées entre les deux parties.
03:44Mais, donc, c'est vrai qu'aujourd'hui, l'État, donc le contribuable national,
03:47est amené, évidemment, à financer une partie des dépenses sociales en France
03:51dans le cadre de ces relations complexes.
03:54Oui. Je le disais au début de cet entretien, Philippe Crevel,
03:56que, clairement, le consensus n'est pas aux économies.
03:59C'est vrai qu'en France, on veut prendre en charge
04:01toutes les fragilités de l'existence, de la naissance jusqu'au décès.
04:04Est-ce que vous voyez un péril sur notre modèle social,
04:07compte tenu des difficultés qu'on a et qui se profilent,
04:11d'autant plus pour l'avenir, sur la dette publique française, Philippe Crevel ?
04:15Alors, c'est vrai que de plus en plus, nous pouvons lire que le système est menacé de faillite.
04:21Je dirais que c'est complètement faux.
04:23Parce qu'on est dans un système par répartition.
04:25Ce sont les cotisations du travail qui financent, on va dire,
04:28les prestations sociales en très grande partie.
04:30Après, c'est vrai que plus le montant du déficit est important,
04:33plus la charge d'intérêt est élevée,
04:36évidemment, ça aubert, ça diminue les possibilités de financer les fameuses prestations sociales.
04:41Donc, il y a un cercle vicieux qui s'institue.
04:43On doit consacrer une part plus importante de la richesse nationale
04:46à payer les intérêts, ce qui vient en moins pour payer les retraites,
04:50pour payer la santé, pour payer la dépendance.
04:54Et donc, c'est vrai que ça va renier sur le niveau de protection sociale.
04:58En revanche, il est faux de dire que demain, il n'y aura plus du tout de retraite
05:01parce que les baby-boomers seront tout pris.
05:04Ça, c'est en revanche faux.
05:04C'est très exagéré.
05:06Vous êtes un spécialiste de l'épargne, Philippe Crevel.
05:09Vous allez publier un livre très bientôt sur le sujet.
05:12J'en donnerai le titre dans un instant.
05:13Mais je vous pose cette question parce que le journal Le Parisien
05:15fait sa une justement sur le niveau d'épargne des Français.
05:18On a 19% de taux moyen d'épargne.
05:20C'est un niveau extrêmement élevé.
05:22Et ça traduit très clairement un signe de défiance des Français,
05:25en tout cas d'inquiétude.
05:26On met de côté au cas où ça tournerait mal d'une certaine manière aujourd'hui.
05:30C'est ainsi que vous interprétez les choses, vous, Philippe Crevel.
05:33La crise de la dette, elle a aussi cet effet-là sur les Français ?
05:37Quand il y a des incertitudes, quand il y a des angoisses,
05:39et depuis 2020, on vit en fait au rythme des crises, des chocs,
05:44évidemment, ça contribue à augmenter le niveau d'épargne.
05:47Et donc, nous sommes passés de 15% avant la crise sanitaire à 19% aujourd'hui.
05:53Donc, c'est 4 points de plus.
05:54Ça, c'est vraiment pas négligeable.
05:56Il y a d'autres facteurs qui rentrent en compte.
05:58Il y a le vieillissement de la population.
06:00Donc, comme, justement, on a peur pour sa retraite, on met de l'argent de côté.
06:03Puis, les retraités qui ont un niveau de vie relativement correct en France,
06:08même s'il y a beaucoup de petites pensions, sont des épargnants.
06:11Et donc, comme il y en a de plus en plus, ça fait augmenter le taux d'épargne.
06:14Et puis, il y a un dernier facteur, c'est que les Français ne puisent pas sur leur épargne en moyenne.
06:18Je ne parle pas des plus modestes qui sont forcés de le faire.
06:21Mais on ne puise pas sur l'épargne.
06:22Donc, on capitalise.
06:23Et quand on capitalise, ça augmente automatiquement le taux d'épargne.
06:26Merci beaucoup, Philippe Crevel.
06:28D'ailleurs, votre prochain livre, il sort dans trois semaines.
06:31Il s'appelle Épargner mieux pour vivre mieux.
06:33Ce sera aux éditions Solar.
06:34Merci d'avoir été ce matin l'invité d'Europe 1 Matin.
06:37Bonne journée à vous.
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