00:00On revient en France à présent après la mort d'un jeune homme à la prison de Bois-d'Arcy dans les Yvelines sous les coups de son voisin de cellule.
00:08Les prisonniers accablent la maison d'arrêt.
00:1020 détenus ont même fait un recours en justice en urgence pour dénoncer l'insécurité dans leur centre pénitentiaire.
00:15Une requête rejetée.
00:17La justice estime qu'il ne s'agit pas d'une situation d'urgence.
00:20Pour autant, le juge enjoint la prison à prendre des mesures comme garantir aux personnes détenues un accès à des douches présentant une température de distribution d'eau acceptable par exemple.
00:31Bonjour Paul Conge.
00:32Merci de nous avoir rejoints, journaliste au service police-justice de BFM TV.
00:36Alors vous vous êtes rendu il y a quelques jours dans cette prison de Bois-d'Arcy dans les Yvelines.
00:40Les tensions sont très fortes chez les détenus et ces derniers dénoncent un climat de violence.
00:47Oui exactement, ils ont déposé un référé devant la justice administrative.
00:51En fait, ils font état de deux problèmes.
00:53Le premier de ces problèmes, ce sont les violences entre détenus qui ont atteint leur pancule Milan, si j'ose dire, le 6 mai dernier.
01:01Lorsqu'un détenu s'est acharné sur son co-détenu dans sa cellule, il l'a massacré à coups de manches à balai.
01:09Ses voisins l'ont entendu agoniser pendant de longues minutes avant que les surveillants interviennent.
01:13Et l'autre aspect du problème qu'ils dénoncent, en tout cas, ce sont des violences qu'ils imputent aux gardiens, aux surveillants pénitentiaires.
01:20Et c'est vrai qu'il y a plusieurs témoignages dans ce référé qui peuvent faire froid dans le dos.
01:24Il y a notamment un de ces détenus qui explique qu'un gardien l'a tabassé, il a eu une épaule brisée.
01:30Ce surveillant d'ailleurs a été suspendu à la prison de Bois-d'Arcy.
01:34Il sera jugé d'ailleurs pour des faits de violences volontaires.
01:38Vraiment, ce climat de violences qui semble extrêmement présent au sein de la prison tient aussi à une donnée.
01:44C'est que cette prison est en état de surpopulation, un stade assez avancé puisqu'il y a plus de 200% d'occupation au sein de cette prison.
01:52C'est l'une des causes principales de ce climat délétère, la surpopulation carcérale.
01:56Oui, 1000 détenus, près de 1000 détenus pour 472 places.
02:00Cette surpopulation, elle aggrave véritablement tous les problèmes et véritablement, elle saute aux yeux aussi lorsque vous entrez au sein de cette prison
02:07puisqu'il faut imaginer, voilà, une grande tour de contrôle au centre sur quatre étages qui distribue des coursives en béton
02:13et puis ensuite ces cellules dans lesquelles des prisonniers sont entassés, souvent à trois, dans neuf mètres carrés
02:20avec une odeur de renfermée extrêmement pesante, des espaces cuisine-toilettes extrêmement réduits.
02:26Cette promiscuité qui les rend fous, beaucoup doivent prendre des somnifères, des anxiolytiques.
02:31Situation explosive donc entre détenus mais aussi vis-à-vis des gardiens et par les gardiens
02:35avec qui la relation donc est extrêmement tendue.
02:39Bonjour Charlie Assel Casanoff, merci d'être avec nous.
02:41Vous êtes avocat en droit pénitentiaire au barreau du Val-de-Marne.
02:46Le juge en l'espèce qui enjoint la prison de prendre des mesures justement ?
02:51Alors ce n'est pas la première fois qu'un juge des référés, en tout cas qu'un juge administratif
02:55critique la situation à Bois-d'Arcy puisque ça fait des années que la situation est explosive.
03:02Tout est parti d'un rapport du contrôleur général des lieux de privation et de liberté en 2022
03:06qui pointait déjà un état des lieux alarmant et qui, d'une chose rare, demandait la fin
03:12des incarcérations à Bois-d'Arcy puisqu'on était à un point déjà de non-limite.
03:17force est de constater que quelques années après, la situation malheureusement n'a toujours pas changé
03:22et la situation de surpopulation carcérale dont vous parliez il y a un instant puisqu'on est à 200%,
03:291000 détenus pour 500 places, a des conséquences très concrètes pour un certain nombre de détenus
03:34qu'on voit tous les jours avec des matelas au sol, un accès aux douches qui est de trois fois par semaine,
03:40une impossibilité de chauffer des plats et puis surtout, évidemment, une exacerbation des tensions
03:45puisque c'est une réduction de l'espace vital. On est entre 1 et 2 mètres carrés par personne détenue
03:50dans des cellules de 9 mètres carrés.
03:52Bonjour Anthony Macella, merci d'être avec nous, responsable Île-de-France de la CGT pénitentiaire.
03:57On parle à l'instant de l'exacerbation des tensions et des violences entre détenus
04:03mais aussi des violences de la part de certains gardiens, parfois, sur les détenus.
04:11En effet, j'entends ce qui est dit depuis tout à l'heure.
04:14Donc au sujet des violences de la part du personnel, je resterai prudent sur ce sujet
04:18comme je l'ai été lorsqu'il s'agissait des agents qui ont été victimes de violences à leur domicile.
04:24Je pense qu'une enquête est en cours et que la justice doit faire son travail.
04:27Si ces faits sont avérés, effectivement, je pense qu'ils doivent être sanctionnés
04:30parce qu'ils sont effectivement inadmissibles.
04:33Maintenant, je vais revenir sur la surpopulation carcérale.
04:35On parle de 208% pour le sang pénitentiaire de Bois-d'Arcy
04:39mais aussi 209% pour Ville-Pinte.
04:41Je vais aussi vous parler de moins 4 000 personnels sur les territoires nationaux.
04:46Donc on a moins 4 000 personnels.
04:47Comment gérer des détenus avec moins 4 000 personnels ?
04:50C'est-à-dire qu'on a un agent pour 120 à 140 détenus parfois
04:53et quand il faut tenir deux étages à soi tout seul, on double cet effectif.
04:58Donc effectivement, les prises en charge sont plus longues.
05:00Et cette promiscuité dont vous parliez, effectivement, ça provoque un climat de tension
05:04autant pour les détenus mais que pour les personnels
05:05parce que le temps pris en charge est beaucoup plus long.
05:08Aujourd'hui, les établissements pénitentiaires sont des foudrières.
05:10C'est devenu une roulette russe.
05:12Les personnels le disent eux-mêmes.
05:13On ne sait plus si quand on va ouvrir une porte, ça va être pour rendre un service
05:16à une personne détenue ou si ça va être pour gérer une intervention.
05:18– Et monsieur Masséla, est-ce que vous estimez qu'il y a aujourd'hui
05:22suffisamment de personnel pénitentiaire au sein de ces prisons qui sont surpeuplées ?
05:25– Absolument pas, absolument pas.
05:28On est à moins 4 000 personnels sur le territoire national,
05:30comme je le disais tout à l'heure.
05:32C'est énorme et le problème, c'est qu'on ouvre des nouveaux services,
05:35on donne de nouvelles missions.
05:36Mais le problème, c'est qu'il n'y a toujours qu'une seule école
05:38sur le territoire national.
05:40La formation qui est courte, mais malheureusement,
05:44on ajoute des modules de formation, ce qui fait que ça réduit
05:48malgré tout la possibilité de former les personnels.
05:51Et je vous dis, on va ouvrir de nouvelles structures,
05:54mais on sait tous comment ça va se passer.
05:56Si on ouvre de nouvelles structures, on va encore prendre sur la bête.
05:59Et ça va encore réduire l'effectif et je pense augmenter
06:02le problème de violence en détention.
06:04– Il y a la question du personnel et il y a la question des lieux
06:06qui ne sont pas faits pour accueillir autant de personnes par définition,
06:10puisque c'est une surpopulation carcérale
06:11et c'est cette promiscuité aussi qui alimente ce climat
06:16et parfois ces actes.
06:19– Eh bien, chacun peut comprendre qu'un système,
06:21quand il fonctionne à plus de 100%, est déjà en état limite.
06:24Alors à 200%, c'est toute la chaîne qui subit les conséquences.
06:30C'est un accès aux soins qui est difficile,
06:32c'est des déplacements qui sont compliqués dans les coursives
06:34et c'est évidemment des tensions qui sont exacerbées.
06:37C'est pour ça que la solution à cette surpopulation
06:40doit venir déjà du courage politique.
06:42Il faut en finir avec la logique de l'enfermement.
06:46Il y a aussi une prise de conscience au niveau judiciaire.
06:48Il faut limiter le recours à la comparution immédiate
06:50et favoriser les amonnagements de peine.
06:52Et enfin, il y a des solutions judiciaires pour les détenus
06:55qui peuvent faire valoir leurs droits et libertés fondamentaux
06:57en saisissant le juge administratif ou le juge judiciaire.
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