Dans ses interviews, Sophie de Menthon, présidente du mouvement patronal Ethic, se met dans la peau des patrons...
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00:00Guillaume Blanc-le-Oeil, bienvenue.
00:02Bienvenue, vous êtes l'homme qui me menace de me faire prendre des kilos.
00:08Vous dirigez la société Saint-Jean et on connaît bien, je crois, les ravioles Saint-Jean.
00:13Vraiment une spécificité, délicieuse petite pâte, avec d'ailleurs beaucoup de parfums,
00:20enfin des langoustines même, etc.
00:22Et très intéressant, comment est venue cette spécificité de la raviole très particulière que vous vendez ?
00:29Alors, la raviole c'est un produit ancestral, on retrouve des traces il y a plus de 500 ans.
00:35Un noble du côté de Grenoble, Laurent de Briançon, a écrit plus de 2000 alexandrins où il parle des ravioles.
00:42Donc par exemple dans le banquet des fées, les fées mangent, dégustent des ravioles dans le massif de la Chartreuse à un moment.
00:48Donc on a vraiment un produit qui est ancré dans le terroir du Dauphiné.
00:52Et la raviole du Dauphiné, qui existe aujourd'hui avec deux appellations, le label rouge et l'IGP,
00:57donc l'indication géographique protégée, reprend ses recettes ancestrales avec une pâte à base de farine de blé tendre,
01:04ce qui distingue la raviole des pâtes farcies, entre guillemets, ou plutôt italiennes, qu'on va considérer comme italiennes.
01:10Une pâte très fine à base de farine de blé tendre et une farce qui est majoritairement aromatisée au comté pour la raviole traditionnelle.
01:17Oui, vous êtes le plus gros consommateur de comté en France.
01:19Et oui, on en achète 1000 tonnes par an.
01:21Donc il y a un camion complet qui arrive chez nous chaque semaine.
01:24Et alors, question aussi intéressante, parce que c'est assez magique,
01:29vous avez un moule spécial pour faire les ravioles, si j'ai bien compris.
01:34Et ce moule, c'est un secret de fabrication.
01:36Oui, c'est un secret de fabrication.
01:37L'entreprise a été créée en 1935 par ce qu'on appelle le Père Truchet, qui a fait ce...
01:43Le Père Truchet, c'était un religieux ?
01:45Non, non, non, c'était un...
01:46C'était un roman, on l'appelait comme ça, le Père Truchet.
01:49Et il a créé le premier moule mécanisé pour fabriquer des ravioles.
01:54Avant, elles étaient faites à la main.
01:55Et il y avait des ravioleuses qui allaient de ferme en ferme, de famille en famille, faire des ravioles.
01:59Des ravioleuses ? Et ça faisait quoi, une ravioleuse ?
02:02Une ravioleuse, elle faisait des ravioles.
02:03Et comment ?
02:04À la main, donc elles déroulaient la pâte, elles faisaient la farce, elles faisaient des bandes, elles mettaient la farce dans ces bandes, elles repliaient.
02:12Et à cette époque-là, d'ailleurs, on dégustait les ravioles plutôt entre les repas, en petites quantités,
02:18parce qu'avoir de l'eau très chaude pour faire des quantités importantes de ravioles, c'était quasiment impossible au feu de bois.
02:23Et donc, c'est pour ça que finalement, la raviole s'est vraiment développée au XXe siècle, avec la mécanisation,
02:30et qui a été d'abord lancée par ce fameux monsieur Truchet,
02:33et puis que nous, on a repris, qu'on a amélioré avec nos équipes au fil du temps.
02:37Et donc, aujourd'hui, le moule à ravioles, c'est vraiment un secret de fabrication Saint-Jean particulier,
02:41qui nous permet de nous distinguer de nos concurrents avec un produit qui se détache.
02:44Et pourquoi les concurrents n'y arrivent pas ?
02:47Ils ont aussi des moules à ravioles, mais des moules qui sont un peu différents d'une autre,
02:50parce que le problème de la raviole, ou sa spécificité, c'est qu'elle est vendue en plaque,
02:54et donc on pré-détache les petits carreaux.
02:58Et donc, à la fois, il faut que les carreaux de ravioles tiennent entre eux,
03:01et en même temps soient suffisamment pré-détachés pour pouvoir facilement se détacher à la cuisson.
03:05Et alors, on les cuit en plaques ou détachés ?
03:07On les cuit en plaques, oui.
03:09Je suis une très mauvaise cuisinière, donc il faut tout le faire.
03:11Il faut une araignée, de l'eau bien chaude, frémissante, pas bouillante.
03:16Et puis, en une minute, les ravioles sont...
03:19Donc, c'était bien avant les raviolis ?
03:21C'est... En fait, quand on a voulu, il y a à peu près une quinzaine...
03:25Ravioli, c'est le mot italien pour ravioles ?
03:26Voilà, un petit peu. Il y a une quinzaine d'années, on a fait des recherches historiques sur la raviole.
03:30C'est là où on a retrouvé ces sources qui datent du XVIe siècle.
03:33Et on s'est rendu compte qu'à cette époque-là, finalement, la pâte fraîche, de manière générale,
03:38la raviole étant une sous-catégorie de la pâte fraîche,
03:41n'est pas plus développée en Italie qu'en France.
03:44Donc, on s'est dit, finalement, la France a une tradition pastière ancienne.
03:48J'apprends des mots parce que la tradition pastière, le mot pastière, je ne connaissais pas.
03:53Nous, nos salariés, ce sont des pastiers et des pastières qui fabriquent au quotidien
03:57l'ensemble des pâtes que l'on peut fabriquer, donc des ravioles, des pâtes fraîches,
04:00mais aussi des quenelles, et puis, plus dernièrement, des plats cuisinés et des sauces.
04:05Les quenelles, c'est un peu tombé en désuétude, non ?
04:06Alors, c'était un peu tombé en désuétude.
04:08C'est aussi un produit traditionnel de la gastronomie plutôt lyonnaise.
04:12Et nous, on a racheté deux fonds de commerce en 2007 qui fabriquaient des quenelles
04:17parce qu'on avait voulu aussi aller sur ce marché des produits régionaux.
04:22Parce que les quenelles, c'était quand même à la cantine.
04:24Quand j'étais petite, il y avait le genre à quenelles.
04:27C'est un peu le problème de la quenelle, c'est que c'est une image ancienne.
04:31On a eu aussi un certain nombre de sociétés qui faisaient des produits plutôt d'entrée de gamme
04:35pour la cantine scolaire, la conserve.
04:37Et puis, nous, par contre, on s'est beaucoup développé sur le frais
04:40pour devenir aujourd'hui le premier fabricant de quenelles
04:42avec un peu moins de 6 000 tonnes par an.
04:46Et on s'est plutôt développé sur...
04:47Et c'est facile à faire, c'est la quenelle ?
04:49Alors, la quenelle, c'est une...
04:50Non, mais après, à faire cuire, au le fait...
04:52Passée au four ou alors coupée en tranches, à la poêle.
04:56On a même des chefs américains qui l'ont fait cuire au four, coupée en deux
05:00et qui l'ont mangée à la façon un petit peu d'un hot dog.
05:03Voilà, donc je pense qu'aujourd'hui, l'intérêt de nos produits, même traditionnels,
05:08c'est qu'on peut les accommoder à toutes les sauces.
05:10Et on a des chefs qui sont très innovants et qui arrivent à réinventer des produits
05:14qui étaient plutôt traditionnels avec des consommations.
05:17La quenelle, c'était typiquement une sauce et puis cuite au four.
05:22Et alors donc, vous travaillez avec d'autres entreprises agroalimentaires
05:25parce que le farci de vos ravioles et de vos quenelles, vous les achetez comment, à qui ?
05:32On achète à des fournisseurs, principalement français.
05:37Par exemple, on achète 1 000 tonnes de comté à l'année sur les 18 000 tonnes.
05:41Les langoustines, par exemple.
05:42Les langoustines, c'est plus difficile de trouver des langoustines origine France décortiquées.
05:46C'est souvent le problème de ces petites tâches.
05:49Les trèches, évidemment.
05:50Mais on achète du beurre de Bresse, du Beaufort, tout un tas de bons produits de nos régions
05:56qui permettent de mettre en avant le terroir culinaire français.
06:00Et c'est ce qui nous distingue d'un fabricant pâtes italien qui, lui, va plutôt mettre en avant...
06:05Vous me disiez quelque chose de tout à fait intéressant parce que je vous disais,
06:09effectivement, les pâtes, on adore ça et que c'est difficile dans les régimes pour ne pas prendre de kilos.
06:15Mais vous me disiez fort, justement, que c'était tout un art alimentaire auquel vous réfléchissiez, effectivement,
06:22et que tout aller ensemble et que bien se nourrir était beaucoup plus compliqué que ça.
06:26Déjà, un nutritionniste, c'est 5 ans d'études.
06:29Donc, quand on résume la nutrition à 5 lettres, je pense qu'on fait un peu fausse route.
06:34On simplifie à l'excès alors qu'il faut manger équilibré.
06:38Le comté, c'est un fromage, c'est très gras si on veut.
06:41Si on ne mangeait que du comté, ce ne serait pas une bonne chose.
06:43Mais quand on mange équilibré, on peut manger de tout.
06:45Et puis, il faut essayer de se maintenir en bonne santé et donc faire des activités physiques aussi.
06:50Mais c'est plutôt ça qu'on promeut plutôt qu'une simplification à l'extrême d'un sujet qui est très complexe.
06:55C'est le mot de la fin et je vous remercie beaucoup.
06:58Merci beaucoup, Sophie.