00:00Et à 9h07 comme chaque matin, un sujet qui fait débat, ça fait débat, la baisse des financements à Lyon, un blocage à Paris, l'État est-il en train d'étouffer l'école privée ?
00:14Pour en parler, soyez le bienvenu Pierre-Vincent Guéret.
00:19Bonjour à vous, merci beaucoup de me recevoir.
00:21Alors vous êtes président de la Fédération Nationale des Organismes de Gestion des Établissements de l'Enseignement Catholique.
00:30J'ai envie de vous poser une toute première question pour nos auditeurs Pierre-Vincent Guéret.
00:34Que se passe-t-il concrètement aujourd'hui ? S'agit-il de cas isolés qui mettent à mal l'enseignement catholique ou c'est une tendance un peu nationale ?
00:45Vous savez, l'enseignement catholique, en fait, c'est 5000 associations que je préside, donc de bénévoles et qui bénéficient, on va dire, qui fonctionnent avec, qui font fonctionner l'établissement avec trois tiers de financement.
00:59On utilise l'argent des parents pour la restauration, c'est un premier tiers.
01:03Les frais de scolarité, les contributions des familles, c'est le deuxième.
01:06Et le troisième, c'est le financement public des collectivités locales.
01:09Et on a deux mauvaises surprises à Noël.
01:11La première, c'est que chaque année, manque à l'appel à cause de l'opacité du système de calcul qui, normalement, repose sur une égalité pure avec le financement public.
01:23Il nous manque 900 millions d'euros par an.
01:25Ça fait 450 euros par famille.
01:27Ça, dans les frais de scolarité.
01:28Ce n'est pas rien, oui.
01:30Non, ce n'est pas rien.
01:31Ce n'est pas rien.
01:32Et c'est 450 euros par famille qui manque, famille qui paye des impôts par ailleurs.
01:36Certaines collectivités ont décidé d'accentuer la surprise à Noël en réduisant encore plus les financements.
01:47Et c'est le cas de Lyon, la métropole de Lyon que vous avez évoquée.
01:50Et puis, c'est le cas de Paris sur un établissement particulier.
01:53Comment est-ce que vous l'expliquez, Pierre-Vincent Guéry ? Qu'est-ce qui se passe, en réalité ?
01:57La base du système, c'est la liberté d'enseignement.
02:01Elle est constitutionnelle.
02:02La loi Debré de 1959, elle donne une égalité de financement.
02:07Le problème, c'est que les textes d'application ne sont pas clairs.
02:10Et donc, ils ont permis, ou ils permettent à certains, de faire des économies.
02:13Ça, c'est légitime.
02:15Mais de profiter de l'opacité du texte pour faire des économies sur l'enseignement catholique.
02:19Parce que, soit ils n'aiment pas l'enseignement libre, soit on va dire que la catholicité leur pose un problème.
02:25C'est de l'idéologie ?
02:26Parce que la loi Debré, il faut le rappeler, elle est du 31 décembre 1959.
02:29Elle n'a pas instauré l'enseignement privé, l'enseignement catholique.
02:33Elle l'a, on va dire, organisé, en quelque sorte.
02:36Oui, l'enseignement catholique, il a 1 500 ans de gloire en France, dans une France chrétienne.
02:40Donc là, il est venu l'organiser et permettre l'exercice de la liberté.
02:46Et là, il y a quoi ? Un petit courant idéologique, vous diriez ?
02:50Un mauvais vent ?
02:52Dans une incompréhension des textes, il y a probablement, dans les cas que j'ai cités et dans un certain nombre d'autres,
02:59une hostilité à la liberté de l'enseignement.
03:02Donc certains sont pour le monopole de l'éducation nationale, de manière pure et dure.
03:06Et d'autres ont une conception très radicale, on va dire, de la laïcité.
03:10Et dans l'école catholique, c'est peut-être le terme catholique qui leur pose un souci.
03:15Maintenant, on n'est pas dans une attaque frontale, vous l'aurez bien senti,
03:18mais on est plutôt dans une fragilisation progressive, successive,
03:22à petits coups de béliers qui viennent faire reculer la liberté,
03:26ce qui se fait au détriment de nos 2 millions d'élèves, ce qui n'est pas rien.
03:30Je vous faisais quand même une question de journaliste à tendance politique.
03:34C'était ma spécialité.
03:37J'ai qu'à récemment encore Pierre-Vincent Guéret.
03:39Vous regardez la gestion de Paris, la gauche unie,
03:42la gestion de Lyon, qui est encore une mairie écologiste.
03:47Est-ce qu'il y a de l'idéologie ?
03:48Parce que vous disiez, vous expliquez très bien,
03:50qu'il y a une part de financement des collectivités.
03:53D'ailleurs, l'État transfère de plus en plus de responsabilités là-dessus aux collectivités locales.
03:57Vous dites que c'est lié à la nature même des pouvoirs en place ?
04:03La première chose que je dis, c'est que l'absence de réglementation précise,
04:07elle donne un résultat qui fait que selon l'endroit où vous habitez en France,
04:11vous n'avez pas la même égalité de financement.
04:13Par exemple, vous êtes à Chartres, en élémentaire, c'est 380 euros.
04:16Vous êtes à Tourcoing, c'est 920.
04:19On ne comprend pas la différence.
04:20Elle n'est pas liée à des choix véritablement idéologiques.
04:24Elle est liée à des calculs qui sont particulièrement biaisés.
04:29Maintenant, il est vrai que quand nous avons fait valoir nos droits en justice,
04:33nous retrouvons des niveaux importants.
04:35C'est le cas, par exemple, de Villeurbanne, qui est très proche de la métropole de Lyon,
04:39et où le même montant va être de l'ordre de 1 100 euros.
04:43Vous voyez, quand on part en justice, on remonte à des niveaux normaux.
04:47Parce que ça veut dire qu'en fait, les collectivités que vous affrontez en justice
04:52finissent par revenir à ce qu'était la règle.
04:56La justice trompe toujours la règle, et la règle est toujours 450 euros au-dessus,
05:00en moyenne, de ce qu'on a aujourd'hui.
05:02Il est possible, dans le cas de Paris ou dans le cas de la métropole de Lyon,
05:07je dis bien qu'il est possible que vous ayez, aux manœuvres, aux manettes,
05:11des personnes qui soient totalement partisanes d'une école monopolistique,
05:17publique à 100%, et particulièrement très laïque.
05:21C'est possible.
05:23Est-ce qu'au fond, il y a un risque réel, Pierre-Vincent Guéret,
05:27de fermeture d'établissements, notamment dans des zones rurales,
05:32des zones populaires ?
05:34La démographie globale en France, elle est déprimante.
05:38Elle est déprimante puisqu'on fait moins d'enfants,
05:40puisque l'école va se dépeupler progressivement.
05:42Pour l'enseignement, dans certains territoires, c'est un vrai sujet.
05:46Ce n'est pas notre souhait du tout, notre souhait est de rester partout.
05:51Après, on a 2 millions d'élèves, mais on a à peu près 1 million d'élèves
05:54sur liste d'attente.
05:55Donc si on laissait les gens libres de véritablement choisir,
05:58je ne serais absolument pas inquiet pour l'enseignement catholique.
06:01Est-ce que la pression financière qui est exercée par certaines collectivités,
06:07municipalités, etc., ne risque pas, au fond, de transformer ce qu'elle n'est pas,
06:13l'école privée, en une école réservée aux plus favoris, une école de riches ?
06:18Parce qu'il y a une espèce d'idée reçue selon laquelle c'est réservé aux familles aisées,
06:23mais non, en réalité.
06:25Non, pas du tout.
06:26Ça, c'est un prisme qui est focalisé sur 2-3 établissements symboliques,
06:29qui d'ailleurs font par ailleurs parfaitement leur boulot,
06:33et dans des territoires où il y a tout le choix.
06:35L'école catholique, elle est faite pour tout le monde,
06:38et quand je dis qu'on a des frais de scolarité,
06:40dans beaucoup d'endroits, les frais de scolarité sont parfaitement modulés
06:43en fonction de vos revenus.
06:44Donc on peut aller dans une école catholique sans avoir de gros revenus
06:48si c'est son choix.
06:49C'est ça la liberté.
06:50Le paradoxe, c'est que ceux qui réduisent les financements
06:53poussent donc à la hausse les frais de scolarité
06:55pour nous accuser ensuite d'être uniquement une école de riches.
07:00C'est là le biais et le piège de cette raréfaction volontaire des financements.
07:07Elle est un peu en dessous de la ceinture,
07:09mais c'est une réalité, et c'est pour ça que nous nous insurgeons.
07:13Par ailleurs, nous avons des familles, nous travaillons,
07:16nous payons tous des impôts,
07:18et donc nous avons une exigence légitime
07:19qui est de dire que la loi devrait s'appliquer.
07:21La loi dit égalité,
07:23et aujourd'hui on n'est pas du tout au rendez-vous de l'égalité.
07:25– Ultime question avec vous, Pierre-Vincent Guéret.
07:28Qu'est-ce que vous demandez concrètement au pouvoir public, au gouvernement ?
07:32Une loi, une autre, une clarification,
07:35une espèce de réforme, de moratoire ?
07:38Qu'est-ce que vous attendez ?
07:39– Alors on demande au gouvernement et au Parlement,
07:42alors évidemment il faudra qu'ils soient tous un peu stables,
07:45premièrement de remettre le nez dans ce grand bazar du niveau des financements
07:50qui datent un peu, et de préciser la loi Debré, premièrement,
07:55et deuxièmement de forcer les collectivités locales
07:57à rendre publiques la façon dont ils calculent le coût.
08:00Parce que je suis persuadé qu'aujourd'hui, tout ça est opaque.
08:04On a des collectivités qui vont nous réduire le financement,
08:07accrochez-vous bien, en m'expliquant que l'école n'est ouverte que 8 heures par jour.
08:11Et donc c'est un peu comme si moi je ne payais pas mon propriétaire,
08:14je ne payais pas mon loyer les jours où je ne suis pas chez moi.
08:16Et ce type d'argument, s'il était public,
08:21je pense que ça permettrait beaucoup plus rapidement
08:23de revenir à des niveaux normaux.
08:26– Donc une vraie clarification attendue de votre part.
08:29Merci à vous Pierre-Vincent Guéret, merci.
08:31Nous verrons bien dans les programmes des candidats,
08:34ça va se jouer tout ça évidemment à la prochaine présidentielle,
08:37il ne faut pas se voler la face,
08:39même si quand même il y a des municipales qui arrivent
08:41et peut-être ça peut être une question soulevée pendant les campagnes.
08:43Merci Pierre-Vincent Guéret.
08:44– C'est Noël, le joyeux Noël à vous.
08:46– Oui, joyeux Noël, bon réveillon à vous.
08:49– On est dans l'espérance.
08:50– Oui, il faut garder l'espoir.
08:53L'espérance, président de la Fédération nationale
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