00:46Mais beaucoup d'animaux asymptomatiques, beaucoup de difficultés qui font que c'est une maladie qui a été jusqu'à présent assez difficile à entraver.
00:55Mais quels sont les symptômes pour les animaux ?
00:59Alors si on a une forme vraiment typique comme dans les livres, on aura une vache qui va avoir plusieurs nodules au niveau de sa peau.
01:07Ce qui rend le diagnostic clinique assez facile.
01:09Mais le gros souci de cette maladie, c'est qu'il y a une proportion vraiment non négligeable d'animaux qui seront asymptomatiques, qui seront porteurs du virus.
01:16Mais pour lequel on ne pourra pas faire un diagnostic clinique simple et pour lequel ce sera vraiment difficile d'aller détecter le virus.
01:24Mais quelles sont les conséquences pour l'animal qui est contaminé et qui a des symptômes, qui a développé véritablement la maladie avec des symptômes ?
01:35Alors là, ça va dépendre vraiment de la forme que va prendre la maladie.
01:38De manière générale, de la mortalité est possible, ça dépend vraiment des mesures de gestion et de en quelle mesure on laisse circuler la maladie.
01:47Actuellement, on est plus sur une mortalité autour de 1 à 2 %, mais dans d'autres pays où la maladie, on la laisse circuler sans faire ce qui est fait actuellement en France,
01:56et bien le taux de létalité peut grimper jusqu'à 10-15%.
02:00Et ce qui va se passer, c'est que les vaches vont avoir de la fièvre, peuvent avoir des œdèmes au niveau des membres, des difficultés à se déplacer, des difficultés à manger et finir par mourir.
02:10Que l'on comprenne bien, le risque pour l'homme est nul. La transmission est possible ou pas ?
02:17Là, on est sur un risque qui est totalement nul.
02:19C'est vraiment une maladie qui n'est pas zoonotique, c'est-à-dire qu'elle ne peut pas être transmise de l'animal à l'être humain.
02:24On est vraiment sur un sujet de santé animale au sens strict.
02:28Voilà, donc même si on mange de la viande contaminée, l'homme ne risque pas d'être contaminé par ce virus.
02:33Aucun risque.
02:34Alors pourquoi, je vous pose la question, pourquoi faut-il abattre tous ces cheptels ?
02:40Est-ce qu'on ne peut pas circonscrire, isoler les bêtes malades et les laisser les accompagner, les laisser mourir de leurs morts ?
02:49Donc là, la France est dans une logique, et c'est tout à fait compréhensible, d'éradication de la maladie.
02:54C'est-à-dire que le but est vraiment d'éviter qu'elle s'installe et d'éviter qu'elle se propage.
02:59Donc pourquoi est-ce qu'on fait de l'abattage comme ça ?
03:03Eh bien parce que ça permet de supprimer toutes les sources possibles de virus,
03:10sachant que je vous l'ai dit, il y a beaucoup d'animaux qui sont asymptomatiques.
03:13En plus de ça, on a une phase d'incubation qui peut durer plusieurs semaines,
03:17et donc si on fait un abattage total au niveau des foyers où la maladie est présente,
03:22et qu'en périphérie, on vaccine pour éviter que la maladie diffuse en tâche d'huile à partir du foyer,
03:28sous réserve qu'on n'a pas de mouvements illicites d'animaux,
03:32en dehors de la zone contaminée, vers des zones indemnes,
03:36c'est impossible que la maladie continue de se propager.
03:39Et d'ailleurs, c'est une stratégie qui a été plutôt gagnante dans tous les autres pays voisins
03:45qui ont appliqué cette stratégie de abattage total,
03:49couplet de la vaccination, en périphérie des foyers.
03:52Quels pays ont pratiqué cela ?
03:55Est-ce que l'on sait comment nos voisins ont réagi justement à cette contamination ?
04:00Par exemple, l'Espagne a eu des foyers il y a de ça quelques mois,
04:05et cette stratégie a été totalement gagnante.
04:07Et je me permets de rebondir là-dessus,
04:08on a un autre pays européen, non pas de l'UE, mais de l'Europe, qui est l'Albanie,
04:13qui, il y a quelques années, a laissé la maladie circuler sans faire d'abattage total,
04:18et ça a été économiquement une catastrophe.
04:20C'est dans ce pays-là, par exemple, que la létalité a grimpé jusqu'à 15%,
04:24et les conséquences économiques et en bien-être animal ont vraiment été désastreuses.
04:29Mais c'est vrai qu'on pouvait se demander si on ne pouvait pas laisser l'animal
04:32acquérir une immunité en laissant vivre cette maladie.
04:37Le problème, c'est que si on fait ça,
04:40déjà, l'élevage contaminé est vraiment une source de virus,
04:43et donc la maladie, elle se transmet par les piqûres d'insectes,
04:46et même si les animaux d'élevage restent au sein de l'élevage,
04:49on ne peut pas venir empêcher les insectes piqueurs d'aller se promener
04:52dans un rayon de quelques kilomètres.
04:55Et donc, en prenant le risque de laisser des animaux qui sont des sources de virus
04:59devenir des...
05:02Je reformule.
05:03En laissant des animaux infectés être de possibles sources de contamination
05:08pour les insectes piqueurs,
05:09on prend le risque vraiment d'avoir cette diffusion de la maladie
05:12de manière totalement incontrôlée.
05:14Ce que reprochent certains éleveurs, certains agriculteurs,
05:17c'est de ne pas avoir, ce qu'ils reprochent aux autorités françaises,
05:20c'est de ne pas avoir suffisamment rapidement vacciné.
05:23Est-ce qu'il y a eu, effectivement, de ce point de vue-là,
05:27une légèreté de la part des pouvoirs publics ?
05:29Est-ce que ça aurait changé quelque chose si, dès cet été,
05:32dès les premières alertes, on avait vacciné en masse les cheptels ?
05:37Alors, non, je ne pense pas.
05:39Il y a plusieurs manières de répondre.
05:41La première manière de répondre, c'est que, d'un point de vue logistique,
05:45c'est impossible de vacciner tout le territoire.
05:48On a 15 ou 17 millions de bovins en France.
05:51Et si on mettait sur le terrain tous les vétérinaires du pays
05:54pour vacciner tout le cheptel bovin,
05:56il faudrait, pour ça, des mois et des mois.
05:58Ça, c'est une première chose.
05:59Ensuite, il y a le nombre de doses disponibles.
06:00On n'a pas 15 millions de doses disponibles.
06:03Donc, il faut vraiment prioriser les zones à vacciner.
06:06On va vacciner là où c'est le plus pertinent,
06:08donc autour des élevages, pour éviter la diffusion.
06:12On peut se demander aussi s'il n'y a pas un enjeu économique.
06:18C'est vrai que ça coûte cher, la vaccination.
06:20La valeur du cheptel pourrait baisser aussi ?
06:24Alors, l'enjeu économique, il vient du fait que si on vaccine dans une zone,
06:28cette zone perd son statut indemne de dermatose nodulaire contagieuse.
06:32Et donc, on a des restrictions au mouvement d'animaux.
06:35Et donc, en envisageant une vaccination de tout le territoire,
06:38eh bien, tout le territoire français perdrait son statut indemne.
06:43Et après, les conséquences économiques qui seraient vraiment directes
06:45pour les éleveurs seraient dramatiques.
06:47Donc, j'ai bien conscience que les conséquences de l'abattage total
06:49sont vraiment épouvantables pour les éleveurs.
06:53C'est quelque chose qui, moralement et sociétalement,
06:55est vraiment difficile à accepter.
06:56Mais malheureusement, à ce jour, c'est la seule solution,
06:59à la fois pour préserver la santé animale,
07:02donc pour éviter qu'on ait des millions de vaches qui soient malades et qui meurent,
07:07et à la fois, bien sûr, pour protéger la filière bovine
07:10et ainsi la pérennité des élevages de tout notre pays.
07:14Oui, on a entendu effectivement l'émotion des agriculteurs.
07:16C'est vrai que pour constituer un cheptel, il faut des années.
07:20Les agriculteurs sont bien évidemment attachés à leurs vaches, à leurs animaux.
07:24Et on leur demande, là, aujourd'hui, de faire un sacrifice qui n'est pas monnayable.
07:29L'indemnisation n'est pas le problème, au fond, pour eux.
07:31Je pense que c'est la pire chose qui puisse arriver à un éleveur.
07:37D'ailleurs, c'est un sujet qui a été abordé dans ce super film qui est Petit Paysan.
07:42Mais malheureusement, on est vraiment sur une maladie
07:46qu'on ne peut pas se permettre de laisser s'installer dans notre pays.
07:50Vous nous lisez tout à l'heure, elle était encore inconnue en France il y a peu.
07:54Comment expliquez-vous qu'elle se soit propagée aussi rapidement,
07:57qu'elle soit passée d'Afrique jusqu'en Europe en ainsi peu de temps ?
08:04Le souci, c'est qu'on vit dans un monde qui est extrêmement connecté.
08:08On a des échanges commerciaux qui sont beaucoup plus intenses, bien sûr,
08:11qu'il y a quelques siècles.
08:13Et donc, on vit à une époque où il fait bon d'être un virus
08:15parce que ces mouvements, ces échanges commerciaux,
08:19ces mouvements de population, ces mouvements d'animaux
08:21font que ce virus peut faire de grands sauts dans l'espace.
08:28Autant les insectes piqueurs, eux, ils se promènent dans, allez, quoi,
08:31peut-être 5 kilomètres grand max autour des élevages.
08:34Mais dès lors qu'on transporte des bovins sur plusieurs centaines de kilomètres,
08:38on facilite fortement la diffusion de la maladie.
08:42Et donc, je ne peux pas vous répondre exactement
08:44qu'est-ce qui a amené précisément à l'introduction de la maladie en France,
08:48mais c'est forcément le transport d'animaux.
08:51Donc là, la ministre de l'Agriculture nous dit
08:54que le virus pourrait tuer au bas mot 1,5 million de bovins.
08:58C'est un peu les projections à l'heure actuelle du ministère de l'Agriculture.
09:02Il y a donc cette politique d'abattage, de vaccination.
09:05Vous le dites, il faut plusieurs semaines pour mettre en place cette vaccination.
09:09Il vous semble aujourd'hui encore possible de circonscrire et d'arrêter la progression de ce virus ?
09:17Je pense qu'effectivement, c'est encore possible.
09:20Mais vraiment, la clé du succès, ça va être d'éviter qu'il y ait des mouvements illicites d'animaux.
09:25Il faut vraiment que dans les zones qui sont infectées, il n'y ait absolument aucun transport d'animaux
09:30parce que c'est vraiment le transport d'animaux d'un point A vers un point B
09:34qui permet que la maladie fasse comme ça des sauts.
09:38Et c'est typiquement ce qui s'est passé au début.
09:40Quand on a eu les premiers cas en juin, c'était en Savoie.
09:44Et aujourd'hui, on a le sud de la France qui est touché.
09:47Et là, c'est clairement le transport d'animaux infectés qui en est responsable.
09:51Donc dès lors qu'il n'y a pas ces mouvements illicites,
09:53on peut encore gagner la bataille contre la maladie.
09:56Pierre Bessière, est-ce que les autorités publiques sont suffisamment réactives,
10:03entendent suffisamment rapidement les alertes qui sont émises
10:07quand une telle menace arrive sur le territoire français ?
10:12À mon sens, oui.
10:13Après, j'avoue que là, c'est devenu une grosse cacophonie.
10:16Le dialogue est un peu rompu entre les différents intervenants.
10:21Et malheureusement, je ne voyais pas plus tard qu'hier,
10:24certaines personnes qui mettent en avant, par exemple,
10:26des traitements antiviraux qu'on pourrait utiliser sur les vaches,
10:30sachant que là, ce sont des solutions qui sont totalement illusoires.
10:33Et je trouve qu'il y a certains propos qui sont tenus
10:35qui peuvent être qualifiés d'irresponsables.
10:37Mais je pense vraiment que les mesures qui ont été mises en place
10:40par le ministère sont parfaitement pertinentes et parfaitement justifiées.
10:43Je vous remercie beaucoup, Pierre Bastien,
10:45de nous avoir apporté votre réflexion sur ce qui est mis en place
10:49par le ministère de l'Agriculture.
10:51Même si on entend la colère des agriculteurs
10:54qui, eux, pensent qu'autre chose, d'autres mesures
10:56auraient pu être prises
10:58et qui sont évidemment face à la détresse du sacrifice
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