Une enquête du Monde montre que des données publicitaires permettent de suivre au mètre près des personnels sensibles : militaires, agents du renseignement, policiers d'élite ou cadres de l'armement. Regardez Le monde en marche avec William Galibert du 11 décembre 2025.
00:00Le Monde en Marche avec vous William Galibert. Bonjour William.
00:06Bonjour.
00:07Et ce matin cette enquête qui montre comment nos espions, nos soldats et nos policiers d'élite ont pu être tracés à partir de leur téléphone portable.
00:14Et oui, il y a des lieux que l'on pensait inaccessibles, des profils que l'on croyait hors d'atteinte, protégés par le secret, par les procédures, par les précautions, et puis non.
00:25De l'Elysée au pavillon de la Lanterne où le couple Macron passe ses week-ends, des sous-marins nucléaires de l'Île-Longue aux avions rafales de la base de Saint-Dizier,
00:35des locaux de la DGSE à ceux de la DGSI, du GIGN ou de la Garde républicaine, des ministères jusqu'aux centrales nucléaires et aux prisons.
00:43On découvre dans une enquête publiée par le journal Le Monde comment des données téléphoniques publicitaires permettent de tracer au maître près des militaires,
00:52des agents du renseignement, des policiers d'élite, des cadres dans l'industrie de l'armement ou des surveillants de prison,
00:58partout sur leur lieu de travail, mais aussi jusqu'à leur domicile personnel, avec toutes les questions que ça pose en matière de sécurité nationale.
01:06Je lis Le Monde.
01:07La faute incombe à une industrie publicitaire boulimique, opaque, hors de contrôle, qui extrait chaque jour des smartphones,
01:15des milliards de données personnelles et notamment des déplacements précis, avant de les revendre.
01:20A moins d'une hygiène numérique à toute épreuve, il est difficile de lui échapper.
01:24Alors comment ont fait les journalistes qui ont enquêté ?
01:26Ils ont tout simplement acheté, légalement, une base de données géante, un fichier proposé par un courtier en données personnelles,
01:35comme on achèterait un stock de pièces détachées.
01:37A l'intérieur, plus de 16 millions d'identifiants publicitaires et un milliard de points de géolocalisation.
01:45Juste parce qu'on clique parfois un peu vite sur son téléphone, parce que derrière chaque oui,
01:50chaque application qu'on ouvre sans vraiment lire, chaque bannière qu'on valide parce qu'on est un peu pressé,
01:54il y a cet identifiant publicitaire qui se met au travail.
01:58Il suit le téléphone, il note la position, il envoie l'information à une régie, la régie l'envoie à un courtier,
02:05le courtier la revend au plus offrant.
02:07Alors dans le détail, par exemple, en rate de Brest, sur l'île longue, on voit un téléphone apparaître encore et encore
02:14sur les parkings de la base où dorment nos sous-marins nucléaires.
02:17On suit son trajet, ensuite jusqu'à une petite maison du Finistère, chez lui,
02:21mais aussi jusqu'au supermarché ou chez le médecin.
02:25Le quotidien d'un militaire chargé de la dissuasion nucléaire,
02:28transformé en simple série de points colorés sur un écran.
02:31Et puis il y a aussi la sécurité présidentielle, William.
02:34Oui, un téléphone apparaît à l'Elysée.
02:36On le retrouve ensuite à Villacoublé, l'aéroport militaire qui sert au déplacement du chef de l'État
02:41ou encore dans un hôtel de Honfleur ou sur les planches de Deauville
02:45pour un déplacement, cette fois privé, de Brigitte et Emmanuel Macron.
02:49Mis bout à bout, ces points décilent d'un profil très clair,
02:52celui d'un membre de l'équipe chargée de la protection du président.
02:55Une personne dont l'identité doit rester invisible, mais dont le téléphone est beaucoup trop bavard.
03:00Il y a enfin l'ombre portée sur l'industrie de défense.
03:04Thales, Naval Group, KNDS, ces entreprises qui fabriquent ce que la France a de plus stratégique.
03:09Là aussi, on peut pister leur cadre.
03:11On réussit même à connaître leur pizzeria ou leur traiteur libanais préféré.
03:16Et c'est la même chose pour des surveillants pénitentiaires qu'on s'est déjà très menacés.
03:19Je lis le monde.
03:21Là encore, les enjeux sont d'autant plus importants qu'il est trivial et relativement peu onéreux
03:26pour un service de renseignement hostile ou pour un groupe issu de la criminalité organisée
03:31de se procurer ces données, parfois mises à jour toutes les 15 minutes.
03:35L'Elysée n'a pas donné suite aux sollicitations du journal.
03:40Thales a surprendre le sujet très au sérieux.
03:42EDF parle de sensibilisation de ses collaborateurs.
03:45KNDS qui fabrique les canons César reconnaît l'importance du problème.
03:50Le ministère des Armées évoque des recommandations à ses effectifs,
03:53des réponses standards qui ne lèvent pas les inquiétudes
03:57parce que les données, elles, continuent de circuler.
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