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Créé à la suite des accords de Paris, en 2016, le Label ISR certifie les investissements socialement et écologiquement responsables. Dix ans plus tard, Michèle Pappalardo, présidente du comité du label, revient sur l’impact qu’il a eu sur la transparence dans la finance.
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00:00L'invité de ce Smart Impact c'est Michel Papalardo, bonjour, heureux de vous retrouver sur ce plateau dans cette émission, vous êtes la présidente du comité du label ISR, vous avez été présidente de l'ADEME, directrice de cabinet de deux ministres de l'environnement, et puis alors vous étiez aussi, vous suiviez de près les discussions qui ont abouti aux accords de Paris il y a 10 ans, vous étiez notamment dans toutes les consultations citoyennes, on les fête là, on fait la signature le 12 des 100.
00:30Quel bilan vous en faites ? Est-ce que vous voyez le verre à moitié vide ou à moitié plein aujourd'hui ?
00:34Comme tous les verres, ou alors c'est que ça déborde, c'est pas bon non plus, non non, les 10 ans plus tard, il y a eu une dynamique, il s'est passé plein de choses depuis, moi j'ai quand même toujours en tête qu'à l'époque on partait sur un plus 4 degrés en 2100,
00:56bon là c'est clair qu'on va pas être à un plus 1,5, mais on est plutôt entre 2,5 et 2,8, et ça fait quand même une très très très très grosse différence, il faut pas s'arrêter là.
01:05Parce que chaque dixième de degré pèse de plus en plus lourd, il faut le rappeler.
01:08Exactement, tous les dixièmes de degré sont importants, et là c'est pas des dixièmes de degré, c'est des degrés entiers.
01:12Donc on a lancé une dynamique, bon après il y a des hauts, des bas, c'est classique, sur le sujet label ISR, le gros plus des accords c'était le fait d'indiquer spécifiquement,
01:28je crois que c'était la première fois, que la finance devait participer à cette démarche de transition écologique, de transition écologique,
01:37et donc ça a été vraiment un déclencheur en fait, sur beaucoup de choses, et pour la création du label, puisque le label a été créé en 2016, sur la base de cette...
01:49Il n'y aurait pas eu de label ISR s'il n'y avait pas eu les accords de Pays, ou peut-être un peu plus tard.
01:53Oui c'est ça, on ne peut pas réécrire l'histoire, mais c'est clair que ça a été quand même le détonateur de beaucoup de choses en matière de finances durables,
02:03en commençant par le début, c'est-à-dire d'abord de la transparence, puisqu'on ne partait de rien quand même, et c'est d'ailleurs ce qu'on disait il y a encore quelques temps,
02:12c'est que le label n'avait pas forcément été en avance au moment où il a été créé, puis après il n'avait pas forcément suffisamment évolué, parce que la finance durable, elle avait évolué.
02:19Donc vous le faites évoluer régulièrement.
02:22Mais c'est vraiment le déclencheur, il se trouve là.
02:25Quelques chiffres, 195 sociétés de gestion, 1174 fonds labellisés, 773 milliards d'euros d'encours, avec une importance que vous évoquez souvent de la pédagogie.
02:39Comment faire comprendre déjà ce... de quoi on parle ? L'investissement socialement responsable, ça veut dire quoi ?
02:46Oui, ce n'est pas forcément tout à fait évident. C'est pour ça d'ailleurs qu'on a fait une campagne de communication, on n'en avait pas fait depuis trois ans,
02:53puisqu'on était en train de revoir le référentiel, donc c'était difficile de faire de la communication sur... on est en train de travailler.
02:58Par contre, on en a fait à la rentrée, en septembre-octobre, justement pour au moins éveiller la curiosité, que les gens comprennent qu'en fait, avec leur épargne,
03:08ils peuvent faire des choses qui correspondent, si ça les intéresse bien entendu, qui correspondent à leur démarche d'essayer d'être dans la transition écologique,
03:21d'avoir à la fois des démarches d'environnement, de social et de gouvernance, et d'essayer de faire passer ça avec des mots relativement simples.
03:30C'est pour ça que notre slogan, c'était « Changer le monde et pas vos ambitions ».
03:38Voilà, c'est ça.
03:39Bon slogan.
03:39En travaillant avec votre épargne, ce qui n'est pas forcément que les uns et les autres ont en tête, et ensuite c'est d'essayer de les aider surtout,
03:47de leur dire « Bon ben voilà, vous n'avez pas besoin de lire plein de documentations. »
03:53Est-ce que vous, avec cette campagne, vous avez ciblé une génération plutôt qu'une autre, non ?
03:58Non, on a essayé, alors on a essayé avec les différents vecteurs, bien sûr, de cibler, alors il y avait des vecteurs entre guillemets pour les jeunes,
04:05des vecteurs pour les moins jeunes, il y avait de la presse écrite, il y avait beaucoup de vidéos, il y avait des réseaux sociaux, etc.
04:12Mais sinon, pas spécialement, mais vraiment en essayant justement de toucher tout le monde, ce qui fait que d'ailleurs on avait des spots pour toutes les générations,
04:21puisque l'idée c'était de s'adresser à la génération de mai 68 jusqu'à la génération aujourd'hui des réseaux sociaux.
04:28Vous dites que ce label, il peut faire de la finance un prolongement de l'engagement citoyen.
04:33Quand on dit engagement citoyen, c'est le vote, c'est aussi voter avec sa carte bancaire par exemple, ça se rejoint, on est dans la même logique ?
04:40L'idée c'est ça, c'est que dans tous nos actes de tous les jours, on peut choisir d'aller, d'avoir des gestes, des actions, des comportements qui sont favorables,
04:52on n'est jamais parfait, mais qui vont dans le sens de cette préoccupation de la démarche de développement durable,
04:58et j'insiste, c'est pas que de l'environnement, c'est aussi la dimension sociale, ou non.
05:03On ne peut pas le faire tout le temps, mais ce serait dommage quand on a cette envie-là de ne pas y penser quand on investit et quand on épargne.
05:12Avec beaucoup de labels, et donc pour ceux qui investissent, une inquiétude parfois de se dire, est-ce que je choisis le bon ?
05:19Est-ce qu'il n'y a pas du greenwashing derrière ce que je vais choisir ?
05:21On a trois labels qui sont tous très bien, surtout, il y a le label ISR qui est le plus large et le plus nombreux,
05:33il y a Greenfin, lui c'est vraiment, c'est assez simple, c'est vraiment quand on se préoccupe d'agir et de financer des actions favorables à la partie environnementale,
05:44purement environnementale, c'est vraiment des investissements dans un domaine bien précis,
05:49et puis il y a FAIR, en fait, Finansole, qui lui intègre dans les fonds une partie d'économie sociale et solidaire.
05:58Donc c'est plus, quand on est peut-être encore un peu plus social, et avec cette volonté d'aider l'économie sociale et solidaire.
06:07Oui, par rapport à d'autres secteurs, c'est quand même pas beaucoup.
06:10C'est pas si mal, c'est vrai.
06:11Vous avez ressenti l'incessibilité de retravailler le label, le référentiel du label, pourquoi ?
06:17Justement, comme je vous le disais, le label datait de 2016, donc à l'origine, on avait beaucoup à faire à la base,
06:24c'est-à-dire déjà sur la transparence, mais il ne fallait pas rester sur la transparence,
06:28c'est-à-dire qu'une fois qu'on avait pris les bonnes habitudes en matière de process, etc.,
06:31il fallait aller faire plus de résultats, pas uniquement sur la méthode.
06:36Bon, et donc c'est ce qu'on a essayé de faire avec le nouveau référentiel,
06:38il est plus exigeant, plus sélectif, avec des exclusions, avec plus de précisions sur un certain nombre de sujets,
06:48en matière de controverses, d'engagement, etc.
06:50Donc il y a des choses un peu techniques, mais qui font le sérieux de la démarche des fonds,
06:56et puis il y a des choses aussi un peu plus faciles à communiquer, à expliquer aux uns et aux autres.
07:00Donc toujours la même logique, des fonds généralistes, ESG, encore un peu plus ESG d'ailleurs,
07:08en essayant de vérifier qu'ils sont bien sur les trois domaines.
07:12Sur les trois piliers, oui.
07:13Absolument, et plus de climat, parce qu'on a considéré qu'effectivement, aujourd'hui,
07:18on ne peut pas dire qu'on fait de l'ESG si on n'a pas une forte préoccupation climat.
07:25Alors, selon ce que vous faites, bien entendu, la préoccupation sera plus ou moins forte,
07:31mais quand même, on a toutes à avoir cette préoccupation,
07:33donc on a intégré bien ça dans le logiciel.
07:35Est-ce que c'est plus difficile d'intégrer la notion de biodiversité dans un label ?
07:40Parce que j'entends souvent dans cette émission que les mesures, les métriques,
07:44pour parler de biodiversité, sont un peu plus floues forcément que pour le climat et le carbone.
07:48Oui, c'est clair.
07:51On y travaille depuis moins longtemps, déjà,
07:56et je ne sais même pas si on n'arrivera vraiment jamais à avoir quelque chose
07:59qui, dans l'esprit peut-être très rationnel des Français,
08:02qu'on pense et qu'on est content de pouvoir compter des tonnes,
08:05ou pouvoir compter de la biodiversité.
08:07On y arrive, mais est-ce que c'est forcément ça ?
08:10Donc on peut faire d'autres types d'actions, peut-être un peu plus qualitatives,
08:13mais qui se mesurent, qui se vérifient, qui se contrôlent.
08:15Enfin voilà, on peut tout à fait faire des choses intéressantes.
08:17Oui, ça ne nous interdit pas d'investir dans des entreprises qui offrent pour la biodiversité.
08:21Et puis en matière de sujet de l'eau, par exemple,
08:24vous pouvez faire beaucoup de choses, ça a forcément des conséquences sur la biodiversité.
08:28Donc il y a vraiment beaucoup de manières de travailler sur la biodiv,
08:33mais il ne faut pas essayer, me semble-t-il,
08:35d'essayer de calquer ça sur ce qu'on fait avec le climat.
08:37Et c'est parce qu'on calque qu'on se dit, oh, ce n'est pas pareil.
08:41Non, ce n'est pas la même chose, ce n'est pas pareil, ça c'est clair.
08:44Mais on va trouver des solutions.
08:45Vous disiez un peu plus d'exclusion dans ce nouveau référentiel.
08:49Oui, parce qu'on n'avait pas du tout.
08:50Donc comme ça, c'était simple, on n'avait pas d'exclusion.
08:53Et là, on a des exclusions dans tous les domaines, le S et le G.
08:58Sur le S, par exemple, on a le tabac, on a les armements non conventionnels,
09:03enfin des choses de ce genre-là.
09:04Sur la gouvernance, c'est le fait de ne pas avoir son siège social dans un paradis fiscal,
09:10ou d'être, ou de ne pas faire ce qu'il faut en matière de corruption.
09:15Enfin, voilà, des choses de ce genre-là.
09:16Et puis, sur la partie E, sujet dont on a le plus parlé, on a exclu les fossiles.
09:22Pas tous les fossiles, mais en pratique, ça revient à ça,
09:26parce que je pense qu'on n'a pas beaucoup d'entreprises qui correspondent à ce qui reste,
09:30puisqu'on a interdit le charbon, les fossiles, les hydrocarbures non conventionnels,
09:38et les hydrocarbures conventionnels quand il y a de l'augmentation de production.
09:43Donc on peut faire du fossile à condition de ne pas avoir d'augmentation de production,
09:48et ce n'est pas le cas aujourd'hui, en général, des entreprises qui sont dans le fossile.
09:52Mais comme je l'ai toujours dit, ça n'est pas ce qui était le plus difficile pour nos fonds.
09:57Bon, il y en avait qui étaient vraiment sur le sujet,
09:59et donc ceux-là, en général, ils ne se sont pas fait labelliser,
10:03mais la plupart des fonds ont déjà très très peu investi sur le fossile.
10:10Cette évolution, elle est sans fin ?
10:12C'est-à-dire que là, vous nous dites qu'on vient de travailler un référentiel,
10:14mais il va falloir continuer...
10:16Oui, parce que regardez, on avait fait en sorte, pour faciliter la vie de tout le monde,
10:22de caler notre référentiel sur les textes de la SFDR et de la CSRD.
10:26Qui sont bien en train de changer, oui.
10:29Pour ne pas reprendre, n'avoir pas inventé de définition, etc., etc.
10:33Bon, ils changent.
10:35Quand ils auront fini de changer, forcément, on s'adaptera.
10:38Et il y aura peut-être d'autres raisons de s'adapter.
10:40Mais il y a au moins celle-là, ça c'est clair.
10:42Tiens, d'un mot, cette évolution européenne,
10:45sur le bilan extra-financier, sur la compliance, etc.,
10:49vous dites finalement, il fallait le faire parce que c'était trop compliqué,
10:53ou alors on a poussé quand même le curseur trop loin dans le coup de frein.
10:56Oui, c'est ça.
10:57Comme d'habitude, on était trop loin d'un côté, on va trop loin de l'autre.
11:01C'est le balancier, quoi.
11:02Voilà, c'est ça.
11:02Et j'aime à croire que le label est bien, lui, au milieu, centré.
11:08Et c'est ce que je crains finalement, enfin on craint ou espère,
11:13c'est que la logique du label et de ce qu'on a écrit dans le label,
11:19je pense que ça a un sens pour les financiers,
11:22parce que c'est une dimension de risque, en fait, pour les financiers.
11:26Et que donc, ils vont continuer à être dans la logique de ce qu'on fait à travers le label.
11:30Donc, plus loin que ce qu'ils ont prévu, ou ce qu'on est en train de prévoir avec la SFRD.
11:37CSRD ?
11:37Voilà, les deux.
11:39Et CS3D ?
11:40Non, CS3D c'est autre chose.
11:42Quoique, la CS3D aussi, parce que dans la CS3D, il y a les plans de transition,
11:46et que nous, on a prévu des plans de transition.
11:49Et on n'a pas l'intention de revenir sur les plans de transition,
11:51c'est pas parce qu'ils ne seront pas dans un texte européen,
11:53que côté label, on ne va pas le garder.
11:55C'est un bon exemple, mais c'est vrai aussi pour les autres.
11:57Ce qu'on essayait de faire, enfin, ce qu'ils essayaient de faire avec les textes,
12:01c'était d'unifier les normes, les textes, les définitions.
12:05Bon, nous, on va garder ça.
12:07Merci beaucoup, Michel Papalardo, et à bientôt sur Be Smart for Change.
12:10On passe à notre débat.
12:11La mobilité électrique des poids lourds au programme.
12:14C'est parti.
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