00:00Bonjour Anne Rosanchère, vous avez été inspirée par les premiers mots de Boilem Sansal tout juste sortie de prison.
00:06Bonjour la France, je suis de retour, on va gagner.
00:10Avant de vous dire en quoi ces mots m'ont inspiré, d'abord rappelons le contexte.
00:15Comme vous le savez, Boilem Sansal a été libéré le 12 novembre des geôles d'Alger,
00:19où il était enfermé depuis près d'un an pour avoir tenu des propos qui n'avaient pas eu l'heure de plaire au régime algérien.
00:26Le lendemain de sa libération, il a pu s'entretenir brièvement au téléphone avec son ami,
00:31lui aussi écrivain, lui aussi franco-algérien, lui aussi furieusement libre, Kamel Daoud.
00:37Dans cette conversation, publiée par Le Point, on lit bien sûr le soulagement, on lit surtout le courage.
00:43Par exemple, quand Sansal rapporte qu'encore en détention, un visiteur est venu le voir,
00:48l'enjoignant de mettre un peu d'eau dans son vin en vue de sa libération.
00:51Sansal, 81 ans, atteint d'un cancer, lui a répondu
00:55« Dans ce cas, vaut mieux me garder encore 20 ans, si je n'ai pas le droit de parler encore, alors qu'est-ce que je fais sur cette terre ? »
01:02Et puis donc, il y a cette autre phrase aussi, celle qu'il dit à Kamel Daoud quand ce dernier lui demande
01:07« De tout ce que tu m'as raconté, est-ce que tu veux que j'écrive une phrase précise ? »
01:11Sansal répond « Bonjour la France, je suis de retour, on va gagner. »
01:16Puisque vous dites que ça vous a inspiré, Anne, qu'est-ce que ça vous inspire ?
01:19De quoi parle-t-il d'abord ? Je ne crois pas prendre trop de risques en vous disant que Boilem Sansal parle des principes pour lesquels il se bat depuis toujours.
01:27Il parle, lui, l'écrivain de la liberté d'expression, lui, l'ancien physicien de la primauté du savoir sur les croyances.
01:34Il parle de la résistance aux oppressions politiques ou religieuses par la critique, par l'écriture et par l'humour.
01:41Bref, il parle de liberté avec la foi de ceux qui la défendent.
01:46Ce « on va gagner » est un cri simple qui traverse les époques, sans les comparer entre elles, bien sûr.
01:53Mais il y a quelque chose dans ces mots qui m'a fait penser au « vous allez perdre », lancé par Jean Moulin à ses bourreaux en 1943, alors que lui-même sait qu'il va mourir.
02:02Encore une fois, je ne compare pas les situations, mais le ressort, lui, est de même nature.
02:06A peine sorti des geôles où on l'a retenu pendant 12 mois à l'isolement, sans avoir pu écrire, Boilem Sansal, malade, dit « on va gagner ».
02:16Le fait qu'il associe cette foi en la liberté triomphante à sa seconde patrie, la France, devrait nous rendre très fiers.
02:24La France, hier soldat de Dieu, aujourd'hui soldat de l'humanité, sera toujours soldat de l'idéal, disait Clémenceau.
02:31Parfois, je ne suis pas sûre qu'on soit toujours digne de ces mots, mais c'est ainsi, avec la foi, elle a sa part de doute, qu'elle passe son temps à surmonter.
02:41Merci Boilem Sansal de nous le rappeler, et bienvenue chez vous.
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