00:02Il est 9h50, nous sommes en direct dans la grande matinale de France Inter
00:05et ce matin ma nouvelle tête s'appelle Romain Zarazaga.
00:0828 ans et depuis lundi, triple lauréat jeune talent du Goemio.
00:13Trois fois en trois ans, donc on finit par se demander s'ils ne vont pas finir par créer une catégorie rien que pour lui.
00:18Recevoir un prix Goemio, ça équivaut à recevoir le prix Albert Londres pour un journaliste,
00:24un César pour une comédienne ou en amour, retrouver un ex mais qui a fait une thérapie.
00:28C'est le Graal, vous voyez, c'est vraiment le max.
00:31A 8 ans, au premier dîner familial qui compte, il sait déjà qu'il sera cuisinier.
00:37Romain, il vient des montagnes, Annecy exactement, mais il a choisi de poser son tablier
00:41dans un endroit où personne ne l'attendait, à Bouchemaine dans le Maine-et-Loire.
00:45Son restaurant s'appelle Lueur au pluriel et il a choisi un manoir du 18ème,
00:49mais il est tout le temps dehors, sur sa barque.
00:53Je ne sais pas si son embarcation a un petit nom, mais il vogue sur la Loire.
00:57Il regarde les oiseaux, il pêche, il observe et il choisit les plantes au bord de l'eau
01:00avec lesquelles il pourra cuisiner.
01:02C'est sa douceur de vivre dans sa campagne.
01:05Mais après, je vous rassure, il retourne en cuisine et c'est Francis Cabrel qui l'accompagne.
01:09Alors, ce n'est pas vraiment Francis sur son comptoir, vous avez compris,
01:11mais en gros, apparemment, ça l'aide à éplucher les carottes.
01:15Tout le monde parle de lui comme d'une évidence.
01:17Le public Angevin, le Goemio, les vignerons locaux, les chefs qui l'ont formé.
01:21Il vient d'ouvrir, il y a là, neuf mois, et on murmure déjà qu'une étoile Michelin serait en train de tourner autour de lui.
01:26Mais bon, je n'ose pas trop le dire.
01:28On parle d'un chef qui veut une cuisine heureuse et qui est dans notre studio.
01:31Bonjour Romain, bienvenue !
01:33Bonjour à tous, merci Macaillan.
01:34Très très content de vous recevoir, vous venez d'être sacré jeune talent de l'année 2026.
01:39Donc, il avait déjà remporté en 2023, dotation jeune talent, et 2025, grand de demain.
01:44Ça fait quoi donc à 28 ans de recevoir ça ?
01:46Tout le monde dit que vous êtes une valeur sûre, alors que vous, sur scène, quand vous faites des discours,
01:50vous continuez à dire « je ne m'y attendais pas ».
01:53C'est évidemment une grande fierté, que ce soit pour moi ou pour mes équipes, du travail accompli.
01:58Et d'avoir des prix comme ça, ça nous permet de continuer à faire notre travail correctement
02:02et de continuer à s'améliorer, surtout.
02:05Votre restaurant, il s'appelle Lueur, je le disais avec un S, c'est un manoir du 18ème.
02:09Il est inscrit à l'inventaire des monuments historiques.
02:11Il y a deux salles apparemment, donc il y a 30 couverts.
02:13Je n'y suis pas encore allée, ça se passe à Bouchemaine, le manoir du Petit Serran.
02:17Et puis, il y a une vue sur la confluence de la Loire et de la Maine.
02:21Pour les auditeurs qui n'ont jamais mis les pieds, vous dites que vous faites une cuisine heureuse et poétique.
02:25Ça veut dire quoi ?
02:26Tout simplement qu'on transmet de la joie au travers de nos assiettes.
02:29Et après, on met de la poésie à travers les gestes et à travers les mots qui sont dits en salle.
02:32On essaie de transporter nos convives.
02:35Alors, il transporte, mais ce qu'il me confiait, il est ouvert 4 jours par semaine.
02:39Déjà, il pense à son bien-être et au bien-être de son équipe.
02:42Et vous débarquez en salle.
02:44C'est-à-dire que vous n'attendez pas la fin du repas, vous allez discuter avec vos clients.
02:47Exactement. Je vais avec mon équipe de salle pour poser des assiettes au moins une fois à chaque fois sur chaque table et présenter le plat et créer du lien tout de suite avec les clients.
02:56Parce que c'est très important pour moi.
02:57Mais votre cuisine, je me suis dit que c'est carrément une géographie de l'assiette.
03:00Vous avez un maraîcher à un kilomètre apparemment, le pêcheur de la Loire qui vous apporte des cendres d'au moins 10 kilos, un spécialiste de la criée, une d'ailleurs spécialiste.
03:08Tout à fait, Gladys.
03:09Gladys Gérouard.
03:10Gladys qui ramène Lorient et Grandville dans la glacière. C'est de la poésie locale en fait ce que vous voulez.
03:15Complètement. Et puis je trouve qu'il n'y a pas de plus grand sens que d'amener le talent des locaux dans l'assiette.
03:21Moi, je suis juste un passeur. Et puis on rend les gens heureux avec ça et c'est très bien.
03:25Vous avez travaillé chez Trois Gros, Trois étoiles Michelin depuis 1968, au flocon de sel d'Emmanuel Renaud, Trois étoiles à Meugève.
03:32Et vous êtes aussi passé par l'on où vous étiez chef de partie sous la direction culinaire d'Éric Frechon.
03:37Donc trois maisons, trois visions quand même assez différentes, trois façons d'être chef.
03:41Qu'est-ce qu'il reste d'eux ? Je ne sais pas, une phrase, un geste ou une manière d'attaquer un service ?
03:47Alors une phrase, je dirais, une phrase de Michel Trois Gros qui est le plaisir de faire plaisir, c'est quand même l'essence de notre métier.
03:53Et puis après, de tous ces établissements, j'ai reçu plein de choses différentes.
03:57Dans un, c'était plutôt le management. Dans l'autre, la créativité.
03:59Dans un autre, c'était plutôt la gestion des équipes.
04:04Donc tout se complète formidablement.
04:05Et là, je suis heureux d'arriver comme ça maintenant.
04:08C'est impressionnant parce qu'en fait, ses parents ne sont pas du tout du sérail.
04:13On a un prototypiste et une socio-esthéticienne, c'est ça ?
04:17Exactement.
04:17Donc rien à voir avec la cuisine et sa révélation, elle s'est poursuivie à l'âge de 12 ans.
04:21Pouvez-vous raconter ce qui s'est passé ce jour-là ?
04:22À l'âge de 12 ans, je suis allé dans un restaurant à Annecy qui s'appelait Le Belvédère à l'époque, de Vincent Lugrin,
04:28pour passer un service avec lui le soir.
04:31À 12 ans.
04:33Parce que des amis de mes parents, sachant que j'étais passionné de cuisine, m'ont dit
04:36« Pour ton anniversaire, on va t'offrir ça, de passer la soirée là-bas ».
04:40Et c'était incroyable.
04:41Et ce chef m'a proposé de revenir en stage de troisième, puis après en apprentissage.
04:45Et c'est comme ça que j'ai commencé la cuisine.
04:47Oui, ils vous ont soutenu et vous avez passé votre CAP hyper jeune.
04:51C'est incroyable ce parcours.
04:52Quelques mois avant cette révélation, à 12 ans, il y a un film quand même qui est sorti.
04:55Et c'était votre coup de cœur.
04:56On écoute.
04:57Les rêves des amoureux sont comme le bon vin.
05:02Ils donnent de la joie au bien du chagrin.
05:07Ce film s'appelle Ratatouille.
05:09C'est la voix de Camille que vous entendez.
05:11Qu'est-ce qui vous touche ?
05:12Est-ce que vous vous êtes reconnue peut-être dans Rémi le rat ?
05:14Ou dans Linguini le grand maladroit ?
05:16Je ne sais pas.
05:16Ou l'idée que n'importe qui peut cuisiner même quand on n'est pas né dans une dynastie gastronomique ?
05:22Évidemment, cette phrase résonne, surtout quand personne de notre famille naît dans la restauration.
05:27Et après, ce qui me touche particulièrement dans ce dessin animé, c'est la sensibilité qu'il y a dans ce rat.
05:31Qui, dès qu'il goûte quelque chose, ressent plein de choses et on le voit par des couleurs, par des émotions.
05:38Et c'est quand même fantastique d'être connecté à ce point-là à ces émotions.
05:42Vous rêvez d'un super pouvoir.
05:43Vous me l'avez confié.
05:44Vous voudriez connaître les souvenirs olfactifs et gustatifs des gens pour cuisiner pile ce qui les touche.
05:49Donc en fait, vous cuisinez d'abord les émotions et après les ingrédients.
05:53Oui, complètement.
05:54L'idée, c'est quand même que chaque plat soit un vecteur de joie et réveil en chacun.
05:59Que ce soit un souvenir d'enfance ou juste un bon moment.
06:02Et qu'on reparte de cette table heureux.
06:04Oui, c'est ce que vous dites.
06:05Il n'y a rien de mieux pour guérir un peu les cœurs.
06:07Mais ça vient d'où ?
06:09Est-ce que ça vous est arrivé enfant ?
06:11Ou est-ce que vous avez déjà vu, je ne sais pas, un service où un client a fondu en larmes, a complètement craqué ?
06:16Gérard Larcher, là.
06:18Il est venu chez lui, là.
06:21Je n'ai pas encore eu de pleurs en salle.
06:26Mais des gens touchaient, oui, ça arrive fréquemment.
06:28Et dans d'autres restaurants où j'étais avant, par contre, j'ai déjà eu des musiciens, par exemple, qui se sont mis à pleurer devant un fenouil.
06:34C'est vrai qu'il y a quelque chose de sensible qu'on ne peut pas expliquer.
06:39Votre toute première fois, c'était votre premier plat.
06:42Cela dit, elle est hyper coquine.
06:44Une balotine de volaille farcie au poivron, réalisée en suivant religieusement Joël Robuchon, dans Bon Appétit.
06:50Bien sûr, je me suis demandé si quelquefois vous refaisiez cette recette, histoire de vous mesurer, de voir où vous en êtes.
06:55Pas du tout, mais pourquoi pas ?
06:57Il faut que je pense à la refaire.
06:58C'est un exercice que je propose comme ça.
07:00À tout moment, je vous donne des super conseils.
07:05Je vous remercie d'être venu aujourd'hui dans le studio de France Inter.
07:07Vous allez repartir dans cette région du Mané-Loire.
07:10Qu'est-ce que vous allez cuisiner ce soir ?
07:12Ce soir, on a des champignons qui arrivent de ma région natale, de Haute-Savoie.
07:17On va retrouver des trompettes de la mort, des cèpes, un peu de pieds de mouton, qui seront caramélisés avec un petit peu de marjolaine, une herbe de notre potager qui est très aromatique.
07:25Et dessus, on va verser une sauce qui est un jus au cèpe qui a été monté au beurre et rafraîché avec un vinaigre de Pedro Jiménez.
07:31Là, c'est un vinaigre qui vient d'Espagne, qui a des petites notes oxydatives, c'est très gourmand.
07:35Et chez nous, surtout, il y a de la sauce.
07:37Donc, on y va et on redemande de la sauce si besoin.
07:39Exactement.
07:40Et je voudrais dire aussi que chez vous, il y a une brigade et vous en parlez toujours et tellement bien.
07:44Et ça fait plaisir d'entendre ça, que cette génération de chefs parle de sa brigade.
07:49Alors, on y va.
07:50Déjà, le maître d'hôtel ?
07:52Déjà, je les remercie tous et vraiment, c'est une vraie famille.
07:56Sans eux, je ne serais pas du tout là aujourd'hui et on ne pourrait pas faire le niveau qu'on sort actuellement.
08:01Ils ont vraiment pris part au projet.
08:02Donc, en salle, on a évidemment Adrien, Émilie, Théo qui est un des auditeurs les plus fidèles depuis 20 ans.
08:10Par encore !
08:11De France Inter, oui.
08:11On a aussi Nathan.
08:13En cuisine, on a mon sous-chef Rémi.
08:14On a aussi Baptiste qui est en pâtisserie avec nous et Guillaume qui est à la plonge et qui fait un travail monumental.
08:20Et je voudrais aussi saluer votre guitare avec laquelle vous jouez dans la cave à vin pour aider au vieillissement de vos bouteilles.
08:26Évidemment, évidemment.
08:29Il fait vraiment ça.
08:30Trop bien, je veux venir avec vous.
08:31Allez, on y va.
08:32Chapeau la guitare.
08:33Merci Romain Zarazaga.
08:35Donc, voilà, troisième fois Jeune talent de l'année, 2026 au Goemio et chef restaurant Lueur.
08:41Ça se passe à Bouchemaine dans la région d'Angers.
08:43Merci.
08:43Merci à vous.
08:44Merci les amis.
08:44On embrasse Théo quand même parce que sa fidélité, elle compte beaucoup pour nous.
08:49Est-ce qu'il sait que son chef veut être un rat qui chante ?
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