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00:00Il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le procureur de la République de Marseille, Nicolas Besson.
00:07Bonjour Nicolas Besson.
00:08Bonjour.
00:08Bienvenue sur Europe 1, procureur, je rappelle vous êtes donc le chef du parquet de la Cour d'appel de Marseille,
00:12vous y dirigez aussi l'activité de la police judiciaire, vous y êtes en poste depuis deux ans,
00:17vous avez aussi dirigé ce qu'on appelle la Grasse, c'est l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués,
00:24autrement dit la lutte contre le crime organisé et le narcotrafic, on peut dire que vous connaissez bien.
00:29On reparle beaucoup de Marseille depuis l'assassinat la semaine dernière du frère Damien Kessassi,
00:34possible crime d'avertissement, c'est ainsi que vous l'avez décrit.
00:38Où est-ce qu'on en est ce matin de l'enquête Nicolas Besson, est-ce qu'on peut en parler ?
00:42Alors, la Junalco, la juridiction parisienne, s'est saisie du dossier il y a quelques jours.
00:49Ce sont pour les affaires de grandes envergures.
00:51Exactement, et donc il m'est difficile évidemment de vous en parler,
00:56c'est Mme Bécuot, la procureure de Paris, qui pourra vous en parler.
01:00Toujours est-il que les premiers constats que nous avions faits sont effectivement l'hypothèse privilégiée,
01:07celle d'un crime d'avertissement, puisque ce jeune homme était totalement inconnu des services de police, de justice,
01:17il souhaitait devenir policier,
01:19et son frère est quelqu'un qui est très impliqué dans la vie associative pour lutter contre le narcotrafic.
01:27Donc, avec la prudence d'usage, naturellement, c'est l'hypothèse privilégiée.
01:31Et il se trouve que le commanditaire présumé serait un certain Mamine,
01:35réputé être l'un des chefs de la DZ Mafia.
01:38Alors, leur BQO, patron de la Junalco, a déploré que ces infos aient circulé dans la presse,
01:42mais, bon, c'est ainsi, il est donc suspecté, cet homme d'une trentaine d'années,
01:46d'avoir organisé la chose depuis la prison de Bourg-en-Bresse,
01:50qu'il a quitté il y a trois jours de cela, pour être transféré à Condé-sur-Sarthe,
01:53dans ses quartiers de lutte contre la criminalité organisée,
01:56ses quartiers de haute sécurité, c'est ainsi qu'on les appelle.
01:59Il n'était donc pas, cet homme, l'un des chefs présumés de la DZ Mafia,
02:02dans la liste des 100 narcotrafiquants les plus dangereux,
02:04c'est ce que l'on en déduit, Nicolas Besson.
02:05Alors, premier point, il est très fortement hasardeux à trois ou quatre jours,
02:11à une semaine de cet assassinat, de désigner des personnes,
02:14et en tout cas, rien dans l'enquête que j'avais à l'époque
02:18ne désignait telle ou telle personne.
02:22S'agissant des quartiers de lutte contre la criminalité organisée,
02:26je trouve véritablement remarquable ce qu'a fait Gérald Darmanin en temps record.
02:33Nous, magistrats marseillais, mais également tous les magistrats spécialisés
02:37dans la lutte contre la criminalité organisée,
02:39réclamions ce type d'établissement,
02:42parce que nous avions constaté que des personnes détenues
02:46continuaient leur trafic, pouvoir commanditer des assassinats,
02:49ce qui est totalement inadmissible et incompréhensible
02:54pour notre population, tout à fait légitimement.
02:56Et vraiment, vous dites que ça vend dans le vieil,
02:58qu'on est sur Sartre, ça fonctionne, ça marche ?
02:59Ça fonctionne remarquablement bien, parce que ça les entrave,
03:04ça les empêche de communiquer, ça leur limite très fortement
03:08leur pouvoir de nuisance.
03:11Et nous en avons besoin, évidemment, compte tenu de la typologie
03:14de notre criminalité dans le sud de la France.
03:16Et le ministre de la Justice a annoncé hier la création prochaine
03:20de deux établissements à Aix et à Valence.
03:23Tout cela va dans le bon sens, c'est-à-dire que nous devons
03:26avoir une approche systémique de la problématique
03:29et la situation carcérale en est une.
03:32Et un des leviers d'action pour lutter contre ce phénomène.
03:35Nicolas Besson, procureur de Marseille, invité d'Europe 1,
03:38je suis très content de vous avoir ce matin,
03:40parce que j'aimerais que vous nous parliez un peu
03:41de votre combat, celui que vous menez contre le narcotrafic,
03:44au quotidien.
03:45Que vous nous donniez un petit peu les grandes masses.
03:47Aujourd'hui, par exemple, vous, procureur de Marseille,
03:48vous avez combien de personnes sous votre autorité ?
03:50Et contre quoi vous vous battez ?
03:52Parce que j'ai vu ce chiffre donné hier par Gérald Darmanin.
03:54Il dit que la DZ Mafia, c'est 5 à 6 milliards d'euros
03:57d'argent liquide.
03:59Alors moi, j'entends dire que le trafic de stupéfiants en France,
04:01c'est 3 milliards et demi d'euros.
04:02Là, on aurait une organisation qui pèserait en réalité le double,
04:05Nicolas Besson.
04:06Alors, sur l'organisation,
04:09le parquet de Marseille est composé de 60 magistrats.
04:12J'ai 14 magistrats qui, c'est-à-dire plus du quart,
04:17qui sont consacrés exclusivement à la lutte contre le narcotrafic.
04:21Mais comme vous le savez, Marseille rencontre d'autres problématiques.
04:24J'ai des collègues qui travaillent sur la délinquance du quotidien,
04:27sur les violences intrafamiliales,
04:29et sur les affaires économiques et financières.
04:31Donc, ce n'est pas assez, j'imagine.
04:32Alors, le ministre, moi je dis...
04:37Vous faites avec ce que vous avez, bien sûr.
04:38Je comprends votre prudence.
04:39Voilà, on fait avec ce qu'on a, premier point.
04:41La deuxième chose, moi quand on me donne des moyens supplémentaires,
04:44j'essaie de les utiliser intelligemment.
04:46Le Gardesseau a annoncé hier 3 postes de parquetiers supplémentaires,
04:507 juges également.
04:52Je vais avoir une réflexion pour travailler sur la transversalité,
04:55pour aller les chercher à l'étranger,
04:56pour récupérer les avoirs criminels.
04:59Alors, sur les 5 à 6 milliards, je pense qu'il y a eu une confusion.
05:03Le rapport de l'OFAST, l'Office français anti-stupéfiants,
05:07chiffre, le chiffre d'affaires global,
05:10et non pas simplement de cette organisation dont vous venez de parler,
05:13a 6 ou 7 milliards.
05:15Évidemment, la DZMafia participe.
05:17Elle ne fait pas que du trafic de stupéfiants également.
05:18Elle ne fait pas que du trafic de stupéfiants,
05:20et ce n'est pas la seule organisation criminelle
05:22qui se livre au trafic de drogue.
05:24Votre regard, Nicolas Besson, aussi,
05:26sur la stratégie qui est déployée contre le narcotrafic.
05:29Laurent Nunez, ministre de l'Intérieur,
05:31s'est félicité qu'en l'espace d'un an et demi,
05:33depuis que vraiment on se met à parler du narcotrafic en France,
05:36le nombre de points de deal à Marseille était divisé par deux.
05:39On était à 160 points de deal, on serait autour de 80.
05:42C'est une réalité.
05:43La question qu'on se pose, c'est,
05:44est-ce que c'est vraiment efficace,
05:46cette stratégie de pilonnage,
05:47qui est une sorte de maintien de l'ordre public de façade,
05:50d'une certaine manière,
05:51alors que l'on sait, et c'est votre combat,
05:53que c'est le haut du spectre qu'il faut taper contre le narcotrafic ?
05:57C'est des actions qui sont complémentaires.
05:59Premier point, vous occupez le terrain,
06:01vous fragilisez les organisations criminelles
06:04en fermant, en quelque sorte,
06:06un certain nombre de points de deal.
06:07Ce n'est naturellement pas suffisant,
06:10et ça doit être un complément des enquêtes judiciaires
06:13que nous diligentons,
06:14que les juges d'instruction diligentes,
06:16avec une police judiciaire qui est très engagée.
06:18Nous, notre objectif avec la police judiciaire,
06:20c'est même, au-delà de démanteler les réseaux et les trafics,
06:25c'est de travailler,
06:26changer totalement de paradigme,
06:28mais de travailler sur les organisations,
06:30et plus simplement sur l'événement,
06:32c'est-à-dire ouvrir des enquêtes
06:34sur associations de malfaiteurs criminels,
06:36désormais, depuis la loi narcotrafic,
06:38pour, en quelque sorte,
06:40les mettre hors d'état de nuire dans la globalité,
06:42y compris sur leur blanchiment,
06:43y compris sur leur volonté de corrompre,
06:46y compris leur équipe feu qui commette des assassinats.
06:49Nous avons en face de nous une contre-société,
06:51nous avons un système,
06:53nous devons combattre,
06:55de manière systémique, ces phénomènes.
06:57Est-ce que ça marche ?
06:58Est-ce que la loi narcotrafic a vraiment changé les choses ?
07:01On sait que le PNACO,
07:02au Parquet National Anticriminalité Organisée,
07:04va bientôt être créé, début janvier,
07:06mais est-ce que vous constatez déjà un changement de la donne
07:08dans votre travail au quotidien, Nicolas Besson ?
07:10Alors, nous mettons à peine en œuvre,
07:13maintenant, ces nouvelles dispositions.
07:15Ce qui est intéressant dans cette loi,
07:17elle a vu la problématique dans la globalité.
07:19Les collaborateurs de justice,
07:21associés à Vendin-le-Vieille,
07:22c'est-à-dire des conditions plus strictes,
07:24une cour d'assises spéciales prévisibilité de la condamnation,
07:27va nous permettre, naturellement, d'avancer.
07:30Et puis, il y a une nouvelle organisation,
07:33un peu sur le modèle de ce qui a été fait en matière de terrorisme,
07:36avec le Parquet National Anticriminalité Organisée.
07:39Nous réclamions cette structure.
07:42Elle va être mise en œuvre,
07:44évidemment, dans une articulation.
07:46Ils vont donner la doctrine.
07:48Il faut simplement trouver un équilibre,
07:50c'est-à-dire une information.
07:52Ils vont récupérer les dossiers plus importants,
07:55mais il ne faut pas, naturellement,
07:57assécher la compétence remarquable
08:00de la justice marseillaise
08:02qui, par la force des choses,
08:04est un peu le laboratoire de la lutte
08:05contre la criminalité organisée.
08:07Nicolas Besson, procurant de Marseille,
08:09avec nous sur Europe 1.
08:10Le maire de Marseille, Benoît Payan,
08:12a dit récemment avoir reçu 402 menaces de mort
08:15depuis le mois de septembre.
08:16Le chiffre est énorme.
08:18Hier, Laurent Dunez et Gérald Darmanin
08:20ont constaté que certains journalistes
08:22qui suivent les affaires de narcotrafic
08:23ne se sont pas rendus dans leur déplacement.
08:26Ils se sont posés la question de leur absence.
08:27Est-ce que vous y voyez un effet de la trouille ?
08:31Un effet des menaces ?
08:34Est-ce que vous-même, d'ailleurs,
08:35vous avez reçu des menaces, Nicolas Besson ?
08:38Alors, sur...
08:40Moi, je crois qu'il faut...
08:42Nous, ce que je veux dire,
08:44de manière très claire,
08:46mon parquet, les juges d'instruction,
08:49on est au travail,
08:50et c'est quelque chose
08:52qui ne doit pas rentrer en ligne de compte.
08:54En revanche, il faut être prudent,
08:56il faut être vigilant,
08:57nous nous intéressons, évidemment,
09:00à la problématique qui peut être
09:01une essayée d'infiltrer également
09:03la sphère politique.
09:05Ce qu'a subi Benoît Payan
09:07est tout à fait inadmissible.
09:10Après, pour le reste,
09:11non, on n'a pas peur,
09:12on travaille,
09:13on est là,
09:14on est payé pour ça,
09:15pour lutter contre ce phénomène.
09:17Et il ne faut pas,
09:18parce que sinon,
09:19ça serait leur donner raison,
09:21que les journalistes se taisent,
09:22que les politiques ne fassent pas leur travail,
09:26et les magistrats,
09:27donc,
09:29on continue.
09:30Merci beaucoup, Nicolas Besson,
09:32procureur de la République à Marseille,
09:34d'être venu nous voir ce matin
09:35sur l'antenne d'Europe 1.
09:36Je vous souhaite une excellente journée.
09:37Bon courage.
09:38Merci.
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