- il y a 8 heures
DB - 16-11-2025
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00:00:00Le Bois Sacré
00:00:30Le Bois Sacré
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00:02:29Le Bois Sacré
00:02:59Le Bois Sacré
00:03:29Le Bois Sacré
00:03:59Le Bois Sacré
00:04:29Le Bois Sacré
00:05:00J'ai faim
00:05:01Ah, eh ben voilà, c'est pas très fort ce que tu viens de dire, hein ?
00:05:04Eh bien moi j'aime ça, tu comprends ?
00:05:06Oui, je comprends que tu m'aimes, ça me suffit
00:05:07Et toi, pourquoi m'aimes-tu ?
00:05:09Tu sais, moi je ne cherche pas
00:05:10Oh là là, ça n'est pas mon affaire
00:05:11Quand il fait beau, je ne me dis pas pourquoi fait-il beau temps
00:05:13Je vais me promener et je suis heureux
00:05:16C'est comme ça que je t'aime
00:05:17Tu n'as jamais rien regretté
00:05:18Tu n'as jamais rien regretté
00:05:19Tu n'as jamais rien regretté ?
00:05:19Non
00:05:20Souvent, j'ai peur que...
00:05:23Que quoi ?
00:05:24Que ça t'ennuie que j'écrive
00:05:25Ah non, ce qui m'ennuierait c'est d'écrire moi
00:05:27Mais du moment que tu ne m'y oblisses pas
00:05:29Et puis tu as tellement peu l'air de ce que tu es
00:05:33Il n'y a pas moins gens de lettres que toi
00:05:36Ah ben c'est bien naturel
00:05:37Oh non, oh lui
00:05:38Oh mais si, tu sais bien comment ça a commencé
00:05:39Un jour, par hasard, parce qu'il pleuvait
00:05:42J'ai fait une nouvelle
00:05:43On m'a dit que c'était bien
00:05:45J'en ai fait une plus longue
00:05:46On m'a dit que c'était un roman
00:05:47Alors j'ai continué
00:05:48Mais travaille mon amour, travaille
00:05:50Je ne suis pas jaloux de tes romans
00:05:51Ah pourtant, c'est un peu comme des enfants
00:05:54Que tu aurais eu sans moi
00:05:55Ah oui, si j'en avais eu d'autres
00:05:57De vrais enfants
00:05:58Je n'aurais pas écrit
00:06:00Je leur aurais appris à écrire
00:06:02Oui, c'est dommage
00:06:04Les enfants sont des livres qui ne finissent pas
00:06:06Dis donc, ce n'est pas ma faute
00:06:08Mais console-toi, tu m'aides beaucoup, tu sais
00:06:11En quoi ?
00:06:12Eh bien, moi je suis l'auteur de mes livres
00:06:13Mais toi tu es l'auteur de mon bonheur
00:06:15Et si tu cessais tout à coup de me rendre heureuse
00:06:17Eh bien, tous mes romans finiraient mal
00:06:19Et je serais invendable, voilà
00:06:20T'inquiète pas
00:06:23C'est bien sûr, tu ne m'as jamais trompé
00:06:26Sûr ?
00:06:28Tu as pourtant l'air bien tranquille, hein
00:06:31Je suis tranquille parce que je suis content
00:06:32Je suis content d'être content
00:06:34C'était pas temps d'être content
00:06:35Il n'y a rien de mieux
00:06:36Eh, il faut savoir
00:06:37Oui
00:06:38Qu'est-ce que c'est ?
00:06:40Madame, ce sont les livres
00:06:41Ah
00:06:41Oh là là
00:06:42Posez ça là
00:06:43Oh là là, y en a-t-il ?
00:06:46Mais dis donc
00:06:47C'est ma provision qu'on l'était
00:06:48On part toujours mardi, hein
00:06:50Ah oui, à moins que tu ne veuilles retarder
00:06:51Jamais de la vie, jamais de la vie
00:06:53Moi je suis si contente de voir des arbres
00:06:54De vrais arbres
00:06:55C'est vrai
00:06:55C'est dit pourquoi on est si rose dans les salons ?
00:06:58C'est parce qu'il n'y a pas d'arbre
00:06:59C'est vrai, tu sais
00:06:59Il y a des choses qu'on n'ose pas dire dehors
00:07:01Eh ben on va s'en payer du dehors
00:07:02On va y rester quatre mois dehors
00:07:04Plus d'agitation, plus de sortie
00:07:06Plus de réjouissance, c'est la noce
00:07:07Qu'elle m'a apporté ça là-bas
00:07:09Mais oui, mais oui
00:07:10Je vais en chercher d'autres
00:07:11Mémoire de la Duchesse de Dino
00:07:13Mémoire de la... quoi ?
00:07:15De la Marquise de Château-Renaud
00:07:17Chérie, prenez-moi une chose
00:07:19Écris tout ce que tu voudras
00:07:20Mais n'écris jamais tes mémoires
00:07:22Pourquoi ?
00:07:22Parce que j'y serais
00:07:23Et que ça m'embêterait
00:07:24D'être dans la littérature française
00:07:25À côté de tas de gens
00:07:27Que je ne connaîtrais pas
00:07:28C'est vrai, j'ai l'impression que j'aurais l'air un peu
00:07:31Qu'est-ce que c'est que ça ?
00:07:35Ça, c'est une lettre
00:07:37Oui, une lettre oubliée dans ce livre, donne-moi
00:07:39Tiens, voilà
00:07:40Mon chéri
00:07:42Ce n'est peut-être pas discret de dire cette lettre
00:07:44Non, mon chéri
00:07:45Depuis que j'ai quitté Paris
00:07:47Je ne cesse de penser à toi
00:07:48C'est une petite femme très gentille
00:07:50Qui écrit à son mari
00:07:51Nous sommes à Salamante et Karl
00:07:52Mon mari ne me quitte pas
00:07:53Ta pensée non plus
00:07:55C'est peut-être une petite femme très gentille
00:07:56Mais n'écris pas à son mari
00:07:57Ce pays est d'une poésie inouïe
00:08:00Je m'amuse follement pour essayer de t'oublier un peu
00:08:03Mais ça ne réussit pas toujours
00:08:05Car la présence constante de mon mari
00:08:07Me fait continuellement souvenir que j'ai un amant que j'aime
00:08:09Il me semble que j'ai des violettes dans le cœur
00:08:12Avant-hier, nous avons été aux îles de l'Erin
00:08:16Sur le yacht des Marshalls
00:08:18Mais figure-toi que la mer était si mauvaise
00:08:20Que nous avons dû coucher au couvent
00:08:21Nous devions repartir le lendemain matin
00:08:24Mais ce satané petit Marshall est tombé dans le lavoir
00:08:27Oh non, bon !
00:08:28Pendant ce temps-là, ce vieux sagouin de père Marshall
00:08:30Qui se promenait avec moi
00:08:31Essayait de m'embrasser dans le cou
00:08:33En me disant des horreurs
00:08:34Vous levez dégoûtant !
00:08:35C'est mon mari qui a repêché le mioche
00:08:37Il y a gagné un affreux rhume de cerveau
00:08:39Oh, pauvre type !
00:08:40Écoute-moi bien
00:08:41Tu vas déchirer ce mot aussitôt lu
00:08:43N'oublie pas que tu m'as donné ta parole d'honneur
00:08:46De détruire toutes mes lettres
00:08:47Tu me l'as juré sur la tête de ta vieille tante
00:08:49La chanoinaise de Saint-Balmont
00:08:50À bientôt, baiser, tendresse
00:08:53Qu'est-ce que tu en dis ?
00:08:56Moi, mon chéri, j'ai un avis très net
00:08:57C'est que la chanoinaise de Saint-Balmont est foutue
00:09:00Attends, attends, il n'y a pas ce scriptum
00:09:01Ah !
00:09:01J'oubliais de te dire que pour la chochotte
00:09:05Mon mari préfère les petites chinoises au volubilis
00:09:08Quoi ?
00:09:09J'oubliais de te dire que pour la chochotte
00:09:11Mon mari préfère les petites chinoises au volubilis
00:09:13Mais qu'est-ce que ça veut dire, ça ?
00:09:15Ah, c'est très original, les mémoires de la duchesse de Dino
00:09:18Oh, moi, je garde cette lettre, c'est amusant
00:09:20Monsieur Léfargette demande si Madame peut le recevoir
00:09:22En un instant
00:09:23Il vient bien souvent, notre petit voisin
00:09:25Oui, il est gentil
00:09:26Bon, moi, je file
00:09:27Nous avons au ministère de l'Agriculture à 5 heures
00:09:30Oui, une importante réunion de la commission d'Iara
00:09:33Et toi, tu sors ?
00:09:34Non, moi, j'attends Marianne de Ternay qui vient me dire au revoir
00:09:37Il faut que je finisse ce rapport pour le comité du prix des femmes de lettres
00:09:42Oh, mais il s'agit de notre prix annuel
00:09:45Et j'ai une candidate à laquelle je tiens beaucoup
00:09:46Qui est-ce ?
00:09:47Madame de Valrenais
00:09:48On peut dire que tu n'es pas jalouse, toi
00:09:50Pas jalouse ?
00:09:51Essaie un peu, hein ?
00:09:53Pas jalouse, tu verras ça
00:09:55Et pas peur
00:09:56Bonjour et au revoir, fidèles Desfargettes
00:10:01Bonjour Desfargettes
00:10:04Savez-vous que mon mari vient de me faire des observations à propos de votre assiduité ?
00:10:08Ah, ah
00:10:08C'était vraiment pas la peine
00:10:10Oh, si j'avais su ?
00:10:11Si vous aviez su, vous seriez tout de même venu
00:10:13Mais c'est vrai, chaque fois que je passe devant votre porte, je m'arrête
00:10:15C'est plus fort que moi, votre domestique vient m'ouvrir
00:10:17C'est plus fort que lui
00:10:18Enfin, j'entre, vous me recevez et je vous dis...
00:10:21Je vous aime
00:10:22Vous aimez ?
00:10:22Non, c'est vous qui me dites je vous aime
00:10:25Alors voilà, c'est dit, c'est fait, vous êtes libre à deux mains
00:10:28Non mais, vous vous moquez de moi
00:10:30À peine
00:10:31Pourtant, l'autre soir, à l'ambassade d'Angleterre, vous avez été plus encourageante
00:10:35Je me suis permis de vous dire des choses, enfin, une espèce de déclaration et vous l'avez écoutée
00:10:39Oui, avec plaisir
00:10:41Alors ?
00:10:42Et ça, pour un tas de raisons
00:10:43D'abord parce que vous êtes très gentille
00:10:45Ensuite, parce que comme vous êtes attaché au protocole, tout ce que vous pouvez me dire ne peut avoir aucune importance
00:10:51Et enfin, parce qu'il y a vraiment que les femmes honnêtes pour goûter une déclaration
00:10:56C'est tout ce que nous connaîtrons de la faute, alors nous aimons ça
00:10:58Ah
00:10:59Vous connaissez Moïse ?
00:11:01Il est à la bourse ?
00:11:02Non, dans l'histoire sainte
00:11:03Ah oui
00:11:04Eh bien, Moïse devait, par l'ordre du Seigneur, s'arrêter au seuil de l'affaire promise
00:11:09Et à cause de cela, du haut de la montagne, il la regarda avec des yeux beaucoup plus émus que ceux qui allaient y rentrer
00:11:14Voilà
00:11:15Ah oui, d'après vous, Moïse aurait été une espèce de honnête femme
00:11:19Ah oui
00:11:21Bon, bon
00:11:23Enfin, j'avais aujourd'hui une prière, deux prières à vous adresser
00:11:27Eh bien, prier, prier
00:11:28Eh bien, voilà, j'ai appris que vous aviez décerné un prix à un ouvrage paru cette année
00:11:33Oui ?
00:11:34Eh bien, je m'intéresse beaucoup à une petite femme
00:11:37Hein ?
00:11:38Une petite femme de lettres, qui écrit
00:11:40Très bien, d'ailleurs
00:11:41Alors, je me permets de vous recommander chaleureusement l'ouvrage que voici
00:11:44Petit temps, il n'est pas gros, hein ?
00:11:47Huit jours à Lisbonne, ou l'impression d'une Parisienne en Espagne
00:11:50Ah, en Espagne
00:11:52Eh bien, c'est à la Société de Géographie qui sera recommandée ce livre-là
00:11:56Oh ?
00:11:57Oui, il en a besoin
00:11:58Chez nous, il n'a aucune chance
00:11:59Oh, je suis très contrarié
00:12:02Parce que je pense que c'est une personne à qui j'avais promis de faire un petit cadeau
00:12:06Alors, je n'avais jamais espéré que le prix...
00:12:08Mais dites-donc, vous êtes un joli coco, vous !
00:12:11Ça m'avait paru tout simple, ne croyez pas, non ?
00:12:13Non, et n'ayez pas de regrets
00:12:14Et j'ai une candidate à laquelle je tiens beaucoup
00:12:17C'est l'auteur d'un très beau livre, L'amour brisé
00:12:20Je ne la connais pas, mais elle peut compter sur moi
00:12:23Et comment s'appelle-t-elle ?
00:12:24Madame de Valrenais
00:12:25Madame de Valrenais, ah bon ?
00:12:27Ah bon ? J'espère que vous accueillerez ma seconde requête
00:12:30Bien, voyons, de quoi ça dit-il ?
00:12:32Eh bien voilà, j'ai dîné avant-hier chez mon oncle, le baron des Fargettes
00:12:36L'ancien ambassadeur ?
00:12:37Oui, c'est un homme très important, il a fait des choses considérables
00:12:40C'était d'ailleurs des gaffes
00:12:41Si elles étaient considérables ?
00:12:42Elles l'étaient
00:12:43Alors, aujourd'hui, il est de l'Institut
00:12:45Et membre du conseil de la Légion d'honneur
00:12:47J'ai rencontré chez lui avant-hier un homme des plus pittoresques
00:12:51Qui est absolument fou de votre dernier roman, L'Irésistible
00:12:54Il désire beaucoup vous être présenté
00:12:56Ah, qui est-ce ?
00:12:57Le comte Zakuskine
00:12:58Zakuskine, Zakuskine, ah c'est vrai, j'ai entendu
00:13:02J'ai entendu ce nom-là, oui ?
00:13:04Oui, très connu, il est directeur de la chorégraphie
00:13:07Dans les théâtres impérieaux de Pétersbourg
00:13:08Il est venu spécialement à Paris pour préparer la saison des ballets russes
00:13:11Oh, le colonel vous amusera beaucoup
00:13:13Colonel, quel colonel ?
00:13:14Zakuskine, il est colonel
00:13:16Ah, il est colonel et maître de ballet
00:13:17Oui, oui
00:13:18Alors, je me suis permis de lui donner rendez-vous ici
00:13:20Pour vous le présenter, mais il est même très en retard
00:13:22Eh bien, je le recevrai volontiers
00:13:23Oh, merci
00:13:24Je vous m'en parle, je ne dois pas m'attarder davantage
00:13:26Je suis attendu au protocole
00:13:28Allez, allez
00:13:28Et n'oubliez pas, chère madame, que malgré vos rigueurs
00:13:31Je vous suis éperdument des mots
00:13:33Ah, justement, si, permettez-moi de vous présenter
00:13:37Le colonel comte Zakuskine, madame Margerie
00:13:40Dont vous appréciez tant les oeuvres
00:13:42Tante et tam
00:13:43Au revoir, madame Moïse
00:13:45Et vous savez, éperdument des mots
00:13:48Oh, souffrez
00:13:50Souffrez, cette petite fleurée
00:13:54Oh, c'est bien
00:13:56Si, si
00:13:57Ce n'est pas pour vous, c'est pour les pays, ça
00:13:59Il est ravissant, hein
00:14:02Cher monsieur, si vous voulez vous asseoir
00:14:06J'obéis et je m'assied sur ce divan avec grâce et reconnaissance
00:14:13Mais enfin, monsieur, vous êtes bien russe
00:14:15Si, signore
00:14:15Là, votre accent
00:14:17Ah, je comprends, je devine
00:14:18Je vais vous expliquer
00:14:19Il y avait toutefois une consul de Russie
00:14:22Très grande, très beau, toujours zivre
00:14:24Enfin, un grand seigneur
00:14:25Dans une roue beaucoup poulase
00:14:27Vivaient tous les Napolitens
00:14:29La poube et les femmes de toute l'Italie
00:14:31Comme toutes les Napolitens
00:14:33Un soir au théâtre de Sainte-Carlo
00:14:35Ils s'aperçurent
00:14:36Et sans air, un regard salgé de toutes les flammes d'Ouves-Ouves
00:14:39Et des tempêtes de l'Oural
00:14:41Et de ces regards
00:14:43Zénaki
00:14:44Comme il faut peu de choses
00:14:46Je ne sais pas
00:14:47Quelques instants après, quand j'ai été atteint de ma majorité
00:14:50Je dois opter entre l'accent russe de mon père
00:14:53Et l'accent italien de ma mère
00:14:55J'ai toujours entraîné du côté de la femme
00:14:57Alors j'ai choisi l'accent de ma mère
00:14:59C'est exquis
00:15:01C'est exquis, j'allais le dire
00:15:03Cet élément exquis
00:15:04Que je ne peux pas penser à l'idée que Zéola
00:15:06Sans épaulver une émotion
00:15:08Que c'est bête, cette sensibilité
00:15:11Ah, madame
00:15:13J'ai oublié de vous adresser une supplication instante et respectueuse
00:15:16Et bien que si cela dépend de moi
00:15:18Je vous en supplie, madame
00:15:19Qu'il ne soit jamais question d'amour entre nous
00:15:22Mais ça, monsieur
00:15:23Non, madame, non, non, ça je préviens toujours
00:15:25C'est pour moi un devoir pour éviter tant de catastrophes
00:15:29Ils arrivent, madame
00:15:31À l'objet de ma fille
00:15:32Je vous écoute
00:15:34Dites-moi, madame
00:15:36Comment me connaissez-vous ?
00:15:38Je ne comprends pas
00:15:39Qu'en d'hommes avez-vous percé à jour ?
00:15:41Je n'ai jamais eu la moindre intention de vous percer à jour
00:15:43Oh, c'est une inexpliquable prodise
00:15:45Car qu'est-ce que c'est ?
00:15:46Qu'est-ce que c'est ?
00:15:47Ça, ça, c'est mon dernier roman, l'irrésistible
00:15:49Non, madame
00:15:51C'est moi
00:15:51Quoi ?
00:15:52Dites-en peu, quel est le sous-et d'olive ?
00:15:54Eh bien, c'est l'histoire d'un homme séduisant au possible
00:15:56Justement
00:15:57Tendre, passionné, un cœur ardent, une intelligence très fine, parfaite élégance de l'esprit
00:16:01Oh, c'est prodigieux
00:16:03Il rencontre une jeune fille exquise et pauvre
00:16:05Il l'aime, il en est aimé
00:16:07Mais un soir, au moment de la prendre dans ses bras, il songe qu'il a deux fois son âge
00:16:11Alors, il se reprend
00:16:13Il s'arrange sans qu'elle le sache pour lui laisser une partie de sa fortune
00:16:16Et sans lui dire adieu, il part pour une expédition au Tibet, voilà
00:16:20Eh bien, madame, vous avez écrit là l'histoire de ma vie
00:16:23Non, c'est, il s'en faut de quelques détails infirmes
00:16:28Moi aussi, j'ai rencontré dans une cassine de ma patrie
00:16:31Une jeune fille ?
00:16:32Non, une dame, un peu forte, énorme même
00:16:35Bon, elle était riche, elle m'aimait
00:16:37J'ai fous à elle
00:16:38Elle m'aimait, elle avait de la tendresse, beaucoup de la tendresse
00:16:43Parfois, elle me prenait dans ses bras et faisait en courant les tours du jardin
00:16:47Moi aussi, une soirée que j'étais assise sur ses genoux
00:16:49J'ai pensé qu'elle avait deux fois mon âge, qu'elle pourrait être ma mère
00:16:53Moi aussi, je m'ai rasé sans qu'elle les soupe pour emporter une partie de sa fortune
00:16:57Et j'ai parti brusquement, sans lui dire adieu
00:17:00Pour entreprendre une saison
00:17:02À trouver
00:17:04Eh bien, il ne s'est pas prodigieux, l'avouez-vous
00:17:07Non, je l'avoue
00:17:08Et vous comprenez maintenant pourquoi j'ai tellement voulu vous connaître
00:17:11Et vous ne vous êtes certes pas arrêté là
00:17:13Qu'est-ce que vous dire pour ne pas être fat ?
00:17:17J'ai plaisé
00:17:18Oui, c'est assez curieux, grâce aussi à quelque part, je sens que je plais
00:17:22Oh, ce n'est pas moi, non, c'est le sable de Marat
00:17:26Ah, le sable sable
00:17:27Vous le sentez, hein ?
00:17:30Non
00:17:30Comme ça ?
00:17:35Et comme ça non plus ?
00:17:36Comme ça non plus
00:17:37Ah, c'était trans
00:17:38Car c'est en France qu'on a inventé le sable sable
00:17:41Nous ne savions pas qui nous l'avions
00:17:42Vous nous l'aviez dit, nous l'avions cru
00:17:43Et depuis, nous nous en sommes servis
00:17:45Et moi, plus que tout autre
00:17:47Car je suis plus que cela, hein ?
00:17:49Je suis cherché
00:17:50Alors ça, vous le sentez, hein ?
00:17:53Pas encore
00:17:54C'était trans
00:17:56Mon pays, ils sont, lui, des musiques berceuses
00:17:59Et des danses lassies
00:18:00Et vous êtes lassies ?
00:18:02Infiniment, c'est ce qui m'a fait réussir de l'administration
00:18:05Vous êtes un chorégraphe célèbre
00:18:07Nous, illustres, suffis
00:18:09J'ai la gloire, en effet, d'avoir inventé une tzarda
00:18:12Quisez vous demander pardon
00:18:13Porte-moi nom
00:18:14Je veux la connaître
00:18:15Mais la musique est divine
00:18:18C'est une œuvre zéniale
00:18:20Et quand je pense que tout cela est sorti de mon cerveau
00:18:24Je suis obligé de rester en admiration devant moi
00:18:26Pendant quelques instants
00:18:27Je ne vous demande pas
00:18:28Que c'est bête, que c'est bien
00:18:32C'est la fête
00:18:36Les vents glacés passent à travers les saules
00:18:42Pouillent à travers les sapins
00:18:45Pouillent à travers les chaînes
00:18:48Les œufilles passent et perdent d'amour
00:18:54Beaucoup de œufilles
00:19:02On en met tant qu'on veut
00:19:03Ça dépend de la grandeur du théâtre
00:19:05Et tout d'un coup
00:19:06Qu'est-ce que c'est le printemps ?
00:19:09Avec son cortez et des fleurs
00:19:11Des rires et des boutons
00:19:14Pas tout printemps
00:19:16Alors, les œufilles rejoignent les œufsans
00:19:23Alors, les œufsans, tout porte à la rêverie
00:19:26Ils se jettent sur elles et les possèdent
00:19:30Alors là, pas de la possession
00:19:32Et je te possède, tout me possède
00:19:34Je te possède
00:19:35Seulement, c'est tout me pas qu'on fait toujours très court
00:19:38Parce qu'il y a toujours des enfants dans la salle
00:19:41Je te possède, je te possède
00:19:43Qu'est-ce que c'est que ça ?
00:19:45Monsieur le comte Zakuskine
00:19:47Organisateur des balis russes à Paris
00:19:48Mon mari
00:19:49Oh !
00:19:50Tous mes compliments, madame
00:19:51Il est ravissant
00:19:52Souffrez, monsieur
00:19:54Souffrez
00:19:55Madame
00:19:56Puisque ma tzarda a l'heure de vous plaire
00:19:59Je vous apporterai la musique
00:20:00Je suis aussi ravie
00:20:01Messieurs
00:20:02J'ai pour vous
00:20:03Les plus vices sentiments
00:20:05Vous les sentez ?
00:20:07Oh, ben...
00:20:08Vous les sentez pas ?
00:20:08Pas tellement, non
00:20:09Comme ça
00:20:10Ah, comme ça, ça va mieux
00:20:11Ah, j'en étais sourd
00:20:12Excuse-moi, madame, au plaisir
00:20:14Messieurs
00:20:15Messieurs
00:20:16C'est pas...
00:20:17C'est...
00:20:18Non, je pense que c'est pas...
00:20:22Oh, non, petit Paul, qu'est-ce que t'es dit de ça ?
00:20:27C'est vraiment joli que ça peut donner une sacrée envie
00:20:28D'être la semaine prochaine dans notre vieux Périgord
00:20:30Où il y a du vrai ciel sur de la vraie campagne
00:20:33Oh, je t'aime bien
00:20:34Tu le sais ?
00:20:36Non
00:20:36Ah !
00:20:37Non !
00:20:38Et comme ça ?
00:20:40Oui !
00:20:40Ah, oui !
00:20:42Je reviens
00:20:44Ah, Louise !
00:20:50Louise, vous rangerez tous ces livres-là dans la malle
00:20:52Celui-là aussi, madame ?
00:20:53Oui, celui-là...
00:20:54Donnez-moi
00:20:54Ah, j'oubliais de te dire que pour la Chochotte
00:21:03Mon mari préfère les petites chinoises au volubilis
00:21:06Mais je voudrais bien comprendre, moi
00:21:08Cette dame de monde, si madame peut la recevoir
00:21:11Madame Champmorelle, mais c'est...
00:21:15Oui, faites-en entrer, faites-en entrer
00:21:17Madame, excusez-moi de me présenter ici sans être connue de vous
00:21:22Mais comment donc, madame ?
00:21:24Parlons votre nom
00:21:25Seriez-vous parente de M. Champmorelle, le directeur des beaux-arts ?
00:21:29C'est mon mari
00:21:30Je suis la directrice des beaux-arts
00:21:32Oh, je vous félicite, madame
00:21:33Il n'y a pas de quoi, madame
00:21:34Si vous voulez vous asseoir
00:21:35Merci
00:21:36J'ai besoin de vous dire que je suis de vos admiratrices
00:21:43Je ne sais comment vous remercier, madame
00:21:45En m'accordant ce que je venais vous demander
00:21:47Tout à vos ordres
00:21:48Je voudrais avoir le patronage de votre comité
00:21:50Pour une représentation de bienfaisance que nous organisons
00:21:53Il n'y aura que des amateurs au programme
00:21:55Je vous suis toute acquise, mais au profit de qui ?
00:21:58Voici, il existe, vous le savez
00:22:00Des œuvres qui s'occupent du placement des libérés de Saint-Lazare
00:22:04Des jeunes gens qui sortent des maisons de correction
00:22:07Enfin, de tous ceux dont les débuts dans la vie sont particulièrement pénibles
00:22:11Nous, nous avons voulu venir en aide à des victimes non moins intéressantes
00:22:15À qui il est presque impossible de trouver un galpin
00:22:18Qui donc ?
00:22:19Les anciens premiers prix du conservatoire
00:22:21Oh, c'est intéressant
00:22:22Alors, je peux compter sur vous ?
00:22:23Absolument
00:22:24Je ne peux vous dire à quel point je suis heureuse d'avoir fait votre connaissance
00:22:27Vous réalisez absolument l'idéal que je me faisais de vous
00:22:32Vous me comblez, madame
00:22:33J'espère bien que nous n'en resterons pas là
00:22:35Je veux que vous veniez à la direction des beaux-arbres
00:22:37Oh, mais je n'oserai jamais, moi je serai intimidée
00:22:40Oh là là, comme au seuil du bois sacré
00:22:42Du bois sacré, qu'est-ce que c'est ?
00:22:44Enfin, c'est une chose antique
00:22:46C'était un petit peu la direction des beaux-arbres de ce temps-là
00:22:49Mais c'était une vallée plantée d'orangers, de lauriers roses
00:22:53Pleines de sources, d'oiseaux
00:22:55Où se promenaient gentiment, bras-tu bras-dessous, car la critique n'était pas encore inventée
00:22:59Les poètes et les artistes, les déesses, les philosophes
00:23:03Chez nous, ce n'est pas du tout comme ça
00:23:05Oh non
00:23:06Il doit tout de même en rester quelque chose
00:23:08Je ne sais pas, moi, délire dans l'antichambre
00:23:11Oh non, il y a des parapluies
00:23:14Enfin, du reste, vous verrez, notre comité se réunit jeudi à quatre heures
00:23:17Je compte sur vous, je vous présenterai monsieur Chamborel
00:23:20Oh, pas trop effrayant, votre mari
00:23:21Mais pas du tout
00:23:22Seulement, je vous préviens, il est tantôt aigre, tantôt fade
00:23:25On dirait une salade qu'on n'a pas remueu
00:23:27C'est entendu, vous viendrez jeudi
00:23:28Oh, chère madame, je suis désolée, mais nous partons mardi pour la campagne
00:23:32Loin ?
00:23:33Oh oui, la grande campagne
00:23:34Comme vous avez de la chambre
00:23:36Les occupations de mon mari nous empêchent de nous éloigner
00:23:39Je vous plains
00:23:40Nous faisons tout de même de temps en temps une petite fugue
00:23:43Mon mari s'arrange pour qu'on élève des statues dans des endroits agréables
00:23:46Alors nous allons les inaugurer
00:23:48L'hiver dans le midi, l'été au bord de la mer
00:23:51En ce moment, il cherche quelqu'un pour l'automne
00:23:54Il a envie de biarriser
00:23:56Seulement, c'est très difficile
00:23:57Dans ces endroits-là, il n'y a pas de grands hommes, il n'y a que des baignards
00:24:00Vous êtes gentilles
00:24:01L'hiver dernier, nous avons eu beaucoup de chance
00:24:04Nous avons eu le transport des cendres du général Kergarek à Cannes
00:24:08Kergarek, c'est un général né à Cannes ?
00:24:11Ah non, non, Kergarek, il était de Brest
00:24:14Seulement, n'est-ce pas comme c'était l'hiver
00:24:15Oh, je comprends
00:24:17Nous avons fait un séjour charmant
00:24:19Nous avons passé huit jours à Monte-Karl
00:24:21Pas trop bruyant, Monte-Karl
00:24:22Oui, oui, seulement nous avons des amis qui ont un yacht
00:24:25Alors nous avons navigué, nous avons été aux îles de l'Erinse
00:24:28Oh, seulement figurez-vous, là nous avons été pris par une tempête
00:24:31Nous avons été obligés de coucher au couvent
00:24:33Tiens, ah, les Capucins ont été exquis
00:24:36Seulement, mon mari a attrapé un horrible rhume de cerveau
00:24:39En repechant le petit Marshall
00:24:41Le petit Marshall qui s'est tombé dans le Lavoie
00:24:42Madame, mais comment savez-vous ça ?
00:24:47Pendant ce temps-là, ce vieux saigouin de père Marshall
00:24:49Essayez de vous embrasser dans le cou en vous racontant des horreurs
00:24:51Mais, ça c'est effrayant
00:24:54Mais, ça c'est effrayant
00:24:55Alors, il n'y a qu'une personne qui ait pu vous raconter ça
00:24:58C'est Édouard
00:24:59Ah, il s'appelle Édouard
00:25:00Ah, comment vous ne le saviez pas ?
00:25:03Et alors ?
00:25:04Édouard est un étourneau
00:25:05Qu'est-ce que c'est ?
00:25:07Mais, oh, mais où avez-vous trouvé ça ?
00:25:10Dans le premier volume des Mémoires de la Duchesse de Dino
00:25:12De Dino, mais c'est épouvantable
00:25:15J'avais fait ce matin demander ce volume au cabinet de lecture
00:25:18Il est évident qu'Édouard l'avait pris avant moi
00:25:20Il avait oublié votre lettre, voilà
00:25:21Je suis dans un état
00:25:22Ne pas l'avoir brûlé, l'avoir laissé dans un lit
00:25:25Il lisait, il lisait
00:25:27C'est pour ça un homme bien élevé
00:25:29Oui, seulement voilà
00:25:30C'est un garçon qui a besoin d'épasser
00:25:32Oh, mon Dieu, mon Dieu
00:25:33Mais, consolez-vous, madame
00:25:35Oh, quelle catastrophe
00:25:36Et moi qui étais venue pour que vous ayez une haute idée de moi
00:25:39Calmez-vous, calmez-vous
00:25:42Oh, promettez-moi au moins que vous ne raconterez à personne
00:25:44Même pas à votre mari, même pas à votre amant
00:25:46Je n'ai pas d'amant
00:25:47Oh, vous n'avez pas d'amant et vous écrivez, comme c'est drôle
00:25:52Vous vous trouvez ?
00:25:54Oh, oui
00:25:55Oh, mais alors vous allez me mépriser
00:25:57Mais non
00:25:58Mais non, mais non
00:26:00Voulez-vous que je vous dise une chose ?
00:26:01Oui, je veux bien
00:26:02Eh bien, je vous trouve beaucoup plus sympathique que tout à l'heure
00:26:04Oui, tout à l'heure, vous aviez un je ne sais quoi de convenu, d'apprêté, là
00:26:10Et maintenant que vous avez retiré tout ça, que vous êtes telle que vous êtes, moi j'aime ça
00:26:13Moi, tout de même
00:26:14Si je suis honnête, ce n'est pas du tout par vertu ou par principe
00:26:18C'est parce que j'ai épousé l'homme que j'aime
00:26:20C'est un hasard
00:26:21Qu'est-ce qu'une honnête femme ?
00:26:23C'est une femme qui a eu de la chance
00:26:24C'est tout
00:26:25Alors moi, je suis une femme qui a eu de la déveille
00:26:29Mais voilà
00:26:30Ça me fait plaisir
00:26:31Et puis c'est tellement vrai, si vous connaissiez ma vie
00:26:34Donc j'ai tant de confiance en vous, je peux bien tout vous dire maintenant
00:26:37Mais oui, mais oui
00:26:37Eh bien voilà, j'ai eu deux aventures
00:26:40Et c'est arrivé exactement de la même manière pour la première que pour la seconde
00:26:45D'ailleurs la troisième, ça a encore été pareil
00:26:46Ça, je vous jure, à chaque fois, je n'y étais pour rien du tout
00:26:50Je me suis trouvée en présence d'un monsieur que je ne connaissais pas du tout
00:26:52J'ai eu comme un éblouissement, un bouleversement
00:26:56Un premier ménage
00:26:57C'est ça
00:26:57J'ai poussé un cri, je suis tombée sur une chaise
00:27:00Je ne savais plus ce que je disais, je ne savais plus ce qu'il disait
00:27:03Vous aviez beaucoup d'excuses
00:27:05Vous trouvez ?
00:27:06Oh, je suis contente
00:27:07Je suis très contente
00:27:08Vrai ?
00:27:09Oh oui
00:27:10Parce que je sens qu'à présent vous m'estimez
00:27:12Vous me donneriez des conseils
00:27:14Je les suivrais
00:27:15Et vous verrez comme je serais un nez
00:27:17Ce sera amusant
00:27:18Venez jeudi, venez voir ça
00:27:19Malheureusement, chère madame, je vous ai dit je ne peux pas
00:27:22Mais il y a une chose qui me ferait
00:27:24Oh malheureusement, il y a une chose qui me ferait très très plaisir
00:27:26Mais quelle ?
00:27:27Je voudrais
00:27:27Non, je ne peux pas
00:27:29Non, enfin dites donc
00:27:30C'est une question sur moi
00:27:33Pourquoi monsieur Chamorel préfère-t-il pour la chochotte les petites chinoises au volubilis ?
00:27:38Vous savez, si c'est trop intime, ne me dites rien
00:27:40Oh non, pas du tout
00:27:41Mais ces petites chinoises, ces volubilis, qu'est-ce que c'est ?
00:27:44Ce sont des crottons pour teinture
00:27:46Des crottons ?
00:27:47Oh, et la chochotte ?
00:27:49Ça c'était une petite maison qu'Édouard avait louée à Passy
00:27:52C'est là que nous nous voyons
00:27:54Oh, alors vous consultiez votre mari sur l'ameublement de la maison
00:27:58Oh ben dites donc, ça c'est fort
00:28:00Trouvez ?
00:28:01Oui peut-être
00:28:03Oui souvent, Édouard est un peu snob
00:28:05Et ça le fait beaucoup d'avoir les tentures de sa garçonnière
00:28:08Choisie par le directeur des beaux-arts
00:28:10Alors moi, vous comprenez
00:28:11Vous êtes très gentille, vous êtes charmante
00:28:14Et vous donc, vous me permettez de vous écrire ?
00:28:16Certainement
00:28:17Oh, quelle est votre adresse à la campagne ?
00:28:19Attendez, mon adresse est un peu compliqué
00:28:20Je vais vous donner une carte postale, il y a une trop jolie vue de la maison d'ailleurs
00:28:23Merci
00:28:23Je vais en chercher une dans la chambre
00:28:25Oh oui
00:28:25Madame
00:28:29Monsieur
00:28:30Madame et Margerine n'est pas là
00:28:32Oh non, elle va revenir tout de suite, monsieur
00:28:34Elle est dans ce...
00:28:36Madame, madame, qu'est-ce que c'est, madame ?
00:28:40Oh, catastrophe
00:28:40Petite madame, c'est le sarmeslave
00:28:43Oh non, c'est rien, c'est rien
00:28:44Je sais ce que c'est
00:28:46Voilà, chère madame
00:28:47Ah, chère madame
00:28:48Je me suis permis de vous apporter la tzarde à queue
00:28:51Qui avait eu l'heure de tellement vous plaire
00:28:53C'est ça
00:28:54Merci beaucoup
00:28:55Mais permettez-moi de vous présenter
00:28:57Le comte à Kouskine, madame Chamborel
00:28:59Mais c'est masse, madame
00:29:01Pauvre femme
00:29:03Voilà, chère madame
00:29:05Vous voyez, la maison est simple, mais elle a du style
00:29:07Là, derrière ces arbres, il y a la ferme
00:29:10Il y a une grande allée de chênes
00:29:11Très jolie
00:29:12Merci, bon coup
00:29:13J'ai l'air de chênes, madame Bitterlée, je suis en charge
00:29:14Oui, j'arrive dans un instant
00:29:15Eh bien, alors je vais vous quitter, chère madame
00:29:17Merci, à très bientôt, j'espère
00:29:19À très bientôt, mais n'oubliez pas vos bonnes résolutions
00:29:22Je vous jure, je ne tromperai jamais mon mari
00:29:24Plus jamais avec ce petit imbécile d'Edouard
00:29:27Madame, elle souffrira que je la mette en voiture
00:29:31Très volontiers
00:29:32Au revoir, chère madame
00:29:36Où est-ce que c'est, madame, je prends congé ?
00:29:39Oui, et bien, pas plus préliminaire
00:29:41Bonjour
00:29:47Moi, mais c'est tiens, rien, tu te savais pas à Paris
00:29:50Mais ma sœur est arrivée ce matin dans un jour
00:29:52Et quand j'ai su que Marianne venait te dire adieu, je l'ai accompagnée
00:29:55Tu vas bien ?
00:29:56Et toi, Francine ?
00:29:57J'espère
00:29:58Quel succès !
00:29:59On ne parle que de l'irrésistible dans tous les châteaux d'Onges
00:30:02Répète-lui donc ce que tu me racontais ce matin
00:30:04Nous avons donné un grand dîner au moment des carousels de Saumur
00:30:07Il y avait là le général Champlain-Dégajur
00:30:09Champlain-Dégajur
00:30:10L'auteur des règlements sur le ravitaillement des armées en campagne
00:30:13Tu en as certainement entendu parler
00:30:15Non, pas du tout
00:30:16Eh bien, on a cité ton nom
00:30:17Et il a dit
00:30:19Moi, je la lis, cette femme-là
00:30:21Je la lis jusqu'à la gauche
00:30:23Oh, mais comment s'appelle-t-il, votre général ?
00:30:25Champlain-Dégajur
00:30:26Champlain-Dégajur
00:30:27Ah, oui, il me semble, j'ai entendu ce nom-là
00:30:29Mais c'est la gloire
00:30:30Tu es traduite dans toutes les langues
00:30:31Cournée par l'académie
00:30:32Mais je me demande ce que tu pourrais avoir de plus
00:30:34Le ruban rouge
00:30:35Non, quelle folie, si, si
00:30:36Mon mari, et Dieu sait s'il est froid
00:30:38Et persuadé que ce sera décoré avant trois ans
00:30:40Non, ça non, par exemple
00:30:41Mais tu le mérites ?
00:30:42Je ne sais pas si je le mérite
00:30:42Mais il y a une chose dont je suis sûre
00:30:44C'est que je ne le demanderai jamais
00:30:45Pourquoi ?
00:30:46Parce que je trouve ridicule qu'on décore les femmes
00:30:48Ah là ?
00:30:48Mais oui, les jours d'honneur n'est pas fait pour nous
00:30:51Il n'est pas inventé pour être piqué
00:30:52Entre un jabot de dentelle et un bouquet de roses
00:30:54D'ailleurs, le rouge, le rouge, ça ne va pas avec toutes les couleurs
00:30:57Pour pouvoir porter ça, il faudra avoir une robe
00:31:00Une seule, toujours la même
00:31:01Et il n'y a pas de femmes comme ça ?
00:31:03Si, les religieuses
00:31:04Pourtant, il y a bien des femmes qui ont accepté la croix
00:31:06Le mot même n'est pas féminin
00:31:09Ah oui, l'honneur, c'est une affaire d'hommes
00:31:11Nous nous avons l'honnêteté
00:31:12C'est moins et c'est plus
00:31:14Ah, tu exagères
00:31:15Mais c'est vrai ça, je ne peux pas lire dans les journaux
00:31:16Que Mme X, Mlle Y a été nommée chevalier de la légion d'honneur
00:31:19Sans penser que c'est fiche trop pas pour elle
00:31:22Que Napoléon I a créé l'étoile des bras
00:31:24Non, laissons ce ruban-là aux hommes
00:31:26Ils n'ont que celui-là
00:31:27Et nous avons tous les ordres
00:31:29Ma lampe, le tout est là
00:31:30Mais quelle heure est-il donc ?
00:31:31Six heures, madame
00:31:32Bonne vacance
00:31:35Merci, au revoir
00:31:36Et à bientôt
00:31:38Oui, c'est ça
00:31:39Encore vous ?
00:31:48Non mais un mot, un mot urgent
00:31:49Excusez-moi, j'allais sortir
00:31:50Non, non, non, mais je suis accouru
00:31:52Parce que je viens d'apprendre une nouvelle
00:31:53Qui vous causera une grande joie
00:31:54Quoi ?
00:31:55Voilà, je suis venu le premier
00:31:56Parce que je ne voulais pas que vous l'appréciez
00:31:57Par un autre que par moi
00:31:58Mais mais quoi en fait ?
00:31:59Même pour aller plus vite
00:32:00J'ai demandé son auto au chèque du personnel
00:32:02Qui n'est pas commode
00:32:02Mais qui a épousé la belle-sœur de ma sœur
00:32:04C'est peut-être mon mot jasperé alors
00:32:05Oui, oui, oui, bref
00:32:06Eh bien voilà
00:32:07Au 14 juillet prochain
00:32:08La promotion du ministère des Beaux-Arts
00:32:11Comprendra très probablement
00:32:12Parmi les nouveaux chevaliers de la Légion d'honneur
00:32:14Un nom de femme
00:32:16Ah ?
00:32:17Oui, un nom de romancière
00:32:19Je ne vous cacherai pas
00:32:21Que je ne suis pas partisan
00:32:22De la décoration des femmes
00:32:23Enfin, pas ordinairement
00:32:25Je le disais encore tout à l'heure
00:32:26Oui, mais quand vous saurez de qui il s'agit
00:32:27Vous changerez d'avis
00:32:28Croyez ?
00:32:29J'en suis sûr
00:32:30Vous serez même rudement contente
00:32:32Eh bien, qui est ?
00:32:33Dites-moi
00:32:34Allez, dites-moi, dites-moi
00:32:35Vive, vive
00:32:35Madame de Valronay
00:32:37Ah
00:32:39Me souvenant de l'intérêt
00:32:41Que vous portez à cette âme
00:32:42J'ai voulu que vous le sachiez tout de suite
00:32:43Eh bien
00:32:44Eh bien, c'est très bien
00:32:45Comment ?
00:32:47Vous n'êtes pas plus ravie que ça ?
00:32:48Je vous dis c'est très bien
00:32:48Que voulez-vous que je vous dise de plus ?
00:32:50Je pensais de...
00:32:51Quoi ?
00:32:51Vous allez danser ?
00:32:52En tirant un feu d'artifice ?
00:32:53Non
00:32:54Vous allez vous sauter au cou ?
00:32:55Oui, plutôt
00:32:55Je ne pense pas que mon attitude envers vous ait jamais autorisé une telle inconvenance
00:32:59Ah, ce n'est pas pour dire
00:33:00Mais je m'attendais à une autre réception
00:33:02Écoutez, monsieur, moi je suis pressée, j'allais sortir
00:33:04Alors, au revoir, à bientôt
00:33:06Oh, mais c'est bon, c'est bien
00:33:07C'est bon, c'est bien
00:33:07C'est pas bon
00:33:08Je m'en vais
00:33:09Au revoir
00:33:10Bonsoir, ma petite Francine
00:33:17Bonsoir
00:33:18Qu'est-ce que tu as ?
00:33:20Oh, il y a un peu mal à la tête
00:33:21Ah, bon
00:33:22Nous avons eu une bonne séance à la commission d'Héara
00:33:24Nous avons choisi 120 poulinières pour les changer des talons
00:33:27Ah, bah c'est du propre
00:33:28Et les inspections commenceront le 14 juillet
00:33:3014 juillet, quelle date idiote
00:33:31Le ministre de l'Agriculture donne ce soir une grande réception à l'heure de la commission
00:33:34Il y aura là tous les gros bonnets
00:33:36Tu penses avec quelle allégresse je m'abstiendrai
00:33:39Ce petit crétin de défargette m'a appris une nouvelle
00:33:43Je te la donne en mille
00:33:45Quoi, qu'est-ce que c'est ?
00:33:46On va décorer une femme de lettres
00:33:48Et devine qui ?
00:33:49Toi ?
00:33:49Oh, ben ça non, par exemple
00:33:51Tu connais assez mes idées là-dessus
00:33:52Et j'y tiens plus que jamais à ces idées-là
00:33:54Oui, plus que jamais
00:33:55Non, mais devine qui a-t-on été choisir ?
00:33:58La personne à qui on pouvait le moins penser
00:34:00Mais quelle est la personne à qui tu penses le moins ?
00:34:02Bon, tu sais, moi
00:34:03Madame de Valrenais
00:34:04Ah, c'est très bien
00:34:05Ça, tu m'as dit qu'elle avait du talent
00:34:06Non, d'abord, je t'ai pas dit elle a du talent
00:34:08Je t'ai dit, voilà du talent
00:34:10Écoute
00:34:11Viviane était accoudée sur la terrasse
00:34:14Ses yeux erraient sur le paysage grandiose
00:34:16Parfumé de tradition lointaine
00:34:18Qu'elle sentait s'éveiller en elle
00:34:20En même temps que l'écho des vertus ancestrales
00:34:22Le désenchantement de son âme moderne
00:34:24Qu'est-ce que tu en dis ?
00:34:26C'est très bien, c'était patent
00:34:27C'est idiot, voyons
00:34:29Ah oui, c'est idiot
00:34:30Voilà, voilà la femme
00:34:32Voilà la femme qu'on va décorer
00:34:33Ça passe, on a même fait les bof
00:34:35Bah, oui, oh, évidemment
00:34:37Au fond, au fond, c'est une honte
00:34:40Elle s'est fait une chose pareille
00:34:41C'est même une lâcheté
00:34:42Tu sais
00:34:43C'est parfaitement une lâcheté
00:34:44Oui, oui
00:34:45On devrait empêcher ça par n'importe quel moyen
00:34:47Oui, en suscitant par exemple
00:34:50Une autre candidature
00:34:52Oui, oui
00:34:52Seulement pour cette stupide histoire de croix
00:34:55Qui oserait se fourrer dans un tel guépier
00:34:58C'est pas moi, bien sûr
00:34:59Non, non
00:35:00Non, non
00:35:01C'est très beau de dire non, non
00:35:03Mais tout à l'heure, tout à l'heure
00:35:05Quand je te dis on va décorer une femme de l'être
00:35:07Bah, tu m'as répondu toi
00:35:08Oui, oui
00:35:09Ouais, et puis d'ailleurs tout le monde l'a eu en même temps que toi cette idée
00:35:11Ah ?
00:35:12Tous nos amis
00:35:12L'Éternel
00:35:14L'Anjou
00:35:15Le Général
00:35:16Quel Général ?
00:35:19Quel Général ?
00:35:19Quel Général ?
00:35:20Bah si, voyons
00:35:20Ne faut l'heure de pas savoir
00:35:22Général Chaplin des Gajures
00:35:24Je m'entends lui parler du Général
00:35:25Tu sais bien l'auteur sur le manuel là de...
00:35:27Quel manuel ?
00:35:28Oh, du machin des choses, tu sais
00:35:30Ah oui
00:35:30Ah oui, bien sûr
00:35:32Tout ça prouve que de me présenter serait pour moi une sorte de devoir
00:35:35Mais pourquoi ?
00:35:37Oh, mais je t'en supplie, ne t'énerve pas, hein
00:35:39Ne t'énerve pas
00:35:39Ne t'énerve pas
00:35:40Bon, bien, tout le temps revient
00:35:41C'est un sujet de moi
00:35:41Tu connais assez mes idées là-dessus
00:35:43Ah oui
00:35:44Mais il est évident que si on lui donne ma croix
00:35:46Ta situation sera grotesque
00:35:48On dira dans les haras, qu'est-ce que ça cache
00:35:50Qu'est-ce que Mme Margerie a pu bien faire pour ne pas être décorée
00:35:54C'est donc une gourgandine
00:35:55Elle trompe son mari toute la journée
00:35:57Oh non, mon chéri
00:35:58Non, je ne veux pas partir du marché que tu fasses ton cocu
00:36:00Non, non, non
00:36:01Mais personne ne pensera ça dans les haras
00:36:02Non, je te connais, je te connais
00:36:04On sourirait, tu prendrais la mouche
00:36:06Des mots, un duel très grave
00:36:09Mortel peut-être
00:36:10Non, non, qu'on me laisse mon mari
00:36:12Qu'on me laisse mon mari
00:36:14Oh, mon pauvre chéri
00:36:15Va, eh bien, tout ce que tu m'as dit m'a convaincu
00:36:18Je n'hésite plus, je me présente
00:36:19Qu'est-quoi, mais tu veux que...
00:36:20Victor, Victor, Louise, Louise, Victor
00:36:23Oh, Victor, défaites les mâles, nous ne partons plus
00:36:26Non, non
00:36:26Et il y aura trois dîners la semaine prochaine
00:36:28Non, mais...
00:36:28Louise, préparez l'avis de monsieur
00:36:30Il ira ce soir au ministère
00:36:31Non, mais...
00:36:32Mon chéri aimait, mon chéri
00:36:34Que je suis contente de me voir heureux, mon chéri
00:36:37Mouah, mouah, mouah
00:36:39Oh, mon
00:36:40Nom de Dieu, de nom de Dieu, de nom de Dieu
00:36:47J'apporte les dossiers de la promotion de la Légion d'honneur
00:37:08qui sont arrivés pendant l'absence de monsieur le directeur
00:37:10Candidature intéressante
00:37:12C'est surtout la croix de femme qui sera amusante
00:37:14Alors Magnèle, mettez donc ça là, attendez
00:37:18Monsieur Vaubert, voulez-vous téléphoner confidentiellement au vice-président de la commission des douanes
00:37:27pour lui dire que j'ai vu le directeur de l'Opéra
00:37:29et que suivant son désir, mademoiselle Mirecourt passera dans le premier quadrille
00:37:35Vous téléphonerez exactement la même nouvelle au président de l'Union démocratique
00:37:40Bien, monsieur le directeur
00:37:41Dites-moi, Magnèle
00:37:43Magnèle, j'ai esquissé le discours que je dois prononcer à l'occasion d'une oeuvre dont s'occupe ma femme
00:37:50Seulement, j'ai besoin d'un renseignement, une lacune
00:37:53Rappelez-moi-nous le nom des neuf muses
00:37:56Des neuf muses ?
00:37:58Terpsicor
00:38:00Terpsicor, oui
00:38:01Taline
00:38:03Ah oui, c'est vrai, Taline
00:38:05Melpomène
00:38:07Melpomène
00:38:08Ça va fois les autres, monsieur le directeur ?
00:38:10Ah oui, vous n'en connaissez que trois
00:38:13Vous avouerez qu'il est un peu raide d'être chef de cabinet du directeur des beaux-arts
00:38:17Et de ne pas savoir le nom des neuf muses
00:38:19Je vais m'informer
00:38:20Ah non, je ne suis pas secondé
00:38:24Monsieur le directeur des monuments historiques
00:38:26Ah, bonjour mon cher ami
00:38:28Oui, je n'ai qu'un instant, vous savez, je suis tellement, tellement occupé
00:38:31Ah si, monsieur le directeur
00:38:32Monsieur Bourrache, le sénateur de Lyon, insiste pour que soit classé comme monument historique son château de Cantepi
00:38:39C'est difficile
00:38:40C'est difficile, oui
00:38:41Quel style, ce château ?
00:38:43Style radical socialiste
00:38:45Ah, oui, oui
00:38:46Et quand il était construit ?
00:38:48En 1891
00:38:49Ah oui, évidemment, ce n'est pas très récent
00:38:51Mais dites-moi, le château de Cantepi, je connais ce nom-là, moi
00:38:54Parbleu, monsieur le directeur
00:38:55C'est là qu'il y a cinq ans, l'ex-ministre des finances a été pincé avec une petite femme
00:38:59Scandale du vent
00:39:01Ah oui, oui, c'est quelque chose
00:39:03Oui, évidemment, ce n'est pas un château historique, mais enfin, c'est un château où il s'est passé des histoires
00:39:07C'est juste, monsieur le directeur
00:39:08Bon, eh bien, nous verrons ça, après tout
00:39:09Mais 880 euros, ça n'est pas hier
00:39:12Allez, au revoir, mon cher ami
00:39:13Au revoir, au revoir
00:39:14Monsieur le secrétaire général du conservatoire
00:39:21Ah, ah, bonjour, mon cher Bonnarelle
00:39:24Bonjour, monsieur le directeur
00:39:25Asseyez-vous, je vous en prie
00:39:27Merci
00:39:27Voilà, alors, mon cher Bonnarelle, voilà, vous savez que ma femme organise une représentation au profit des anciens premiers prix du conservatoire
00:39:35Le comité de ces dames se réunit ici aujourd'hui même
00:39:38Alors, avez-vous recherché le nom des anciens lauréats ?
00:39:41Je vous les apportais, monsieur le directeur
00:39:43Ah, nous avons eu du mal à les retrouver
00:39:45Les voici
00:39:46Merci bien
00:39:47Voilà, alors, autre chose
00:39:49C'est bien dans 3 semaines qu'auront lieu les concours de fin d'année
00:39:52Comédie et tragédie, parfaitement
00:39:54Très bien
00:39:54Alors, voilà, vous remettrez ceci au directeur
00:39:58Qu'est-ce que c'est ?
00:39:59C'est la liste des récompenses
00:40:00Elle a été arrêtée ce matin au Conseil des ministres
00:40:02Voilà
00:40:03Et maintenant, mon cher ami, excusez-moi, mais je suis tellement occupé et je suis fatigué
00:40:07Eh bien sûr, monsieur le directeur
00:40:09Au revoir, au revoir
00:40:11Allez, mon cher ami, rendez-moi donc un service
00:40:14J'étais en train d'écrire un discours, là, et je suis tellement surmené, vous savez, je n'ai plus beaucoup de mémoire
00:40:20Alors, rappelez-moi donc le nom des 9 muses
00:40:22Oh, mais c'est bien facile, monsieur le directeur, voyons
00:40:25Melpomène, Terpsichor, Thalie, c'est curieux, les autres m'échappent
00:40:35Ah oui, vous n'en connaissez que 3, oui, c'est embêtant, c'est toujours les mêmes
00:40:39Bon, eh bien, allez, mon cher ami, allez, allez
00:40:41Au revoir, monsieur le directeur
00:40:42Non, vraiment, je ne suis pas secondé
00:40:45Monsieur le directeur
00:40:46Oui, qu'est-ce que c'est ?
00:40:47Je me suis informé dans tous les bureaux, personne ne connaît le nom des 9 muses
00:40:51Et vous n'avez pas eu l'idée de chercher dans le Larousse ?
00:40:53Je l'avais bien pensé, mais notre Larousse n'est plus ici
00:40:56Comment ?
00:40:56On l'a fait demander hier au ministère de l'instruction publique
00:40:59Oh, c'est intolérable, ils le prennent tout le temps
00:41:02Monsieur Courret, après le Larousse, je vous appris, je veux, j'ai un Larousse ici
00:41:06Ah, monsieur Vaubère, je vous avais demandé une note sur le peintre qui sollicite la commande du plafond de la mairie de Grenelle
00:41:13La voilà, monsieur le directeur
00:41:14Ah, très bien, très bien
00:41:16Que c'est que ça, mais c'est pas une note, ça n'y a rien
00:41:19Mais il y a tous ces titres
00:41:21Ah, vous, c'était, oui, pris de Rome, de médaille
00:41:23Et ses opinions politiques, où sont-elles ?
00:41:25Vous ne lui avez pas demandé ?
00:41:27Si, monsieur le directeur, mais il m'a demandé qu'elles étaient les vôtres
00:41:29Alors, moi, je n'ai pas su quoi répondre
00:41:31Ah, très bien, très bien, monsieur, allez, monsieur, allez
00:41:33Comment voulez-vous que je prenne une décision ?
00:41:35Oh, que je suis fatigué, que je suis fatigué
00:41:39Bonjour, Jean
00:41:40Comment vous fais-tu, ma rose ?
00:41:42Oh, délicieuse
00:41:43Alors, tu n'oublieras pas ce que tu m'as promis
00:41:45Quoi, non ?
00:41:45De faire donner les palmes à ma couturière
00:41:47Oui, oui, c'est entendu
00:41:48Dis-donc, tu es prête pour le comité, oui ?
00:41:51Tout sera prêt
00:41:52J'ai envoyé le directeur des musées de province acheter quelques fleurs
00:41:55Et le chef du bureau des théâtres s'occupe des rafraîchissements
00:41:57Eh bien, bravo !
00:41:58Je suis ravie de te faire connaître, madame Marjorie
00:42:01Ça, c'est une relation charmante, distinguée
00:42:04Enfin, une femme comme nous n'en connaissons pas beaucoup
00:42:07Eh bien, c'est parfait !
00:42:08Dis-donc, mais Zacouskine, je pense qu'il ne va pas nous faire faux bon, comme hier
00:42:12C'est un joli monsieur, ton ami ?
00:42:14Comment mon ami ?
00:42:14C'est toi qui me l'as présenté il y a huit jours
00:42:16Et depuis ce temps-là, tu lui fais visiter Paris
00:42:18Dame, un étranger, je l'ai fait pour être agréable
00:42:21D'ailleurs, tu en es fou
00:42:22Non, non, non, non, mais en fait, je le trouve curieux
00:42:25Ah, il n'y a qu'une chose, par exemple, en lui, que je ne peux pas digérer
00:42:28Ok
00:42:29Oh, bon, c'est cette sacrée manie quand il arrive de m'embrasser sur la bouche
00:42:32Moi, j'ai horreur de ça, moi
00:42:33Tu as tort, c'est ce qui fait de mieux ?
00:42:35Hein ?
00:42:35Mais naturellement !
00:42:37Enfin, Léon, tu devrais savoir que dans son pays, c'est la coutume
00:42:39Quand un homme veut témoigner à un homme important
00:42:42Son respect, sa différence
00:42:44Il l'embrasse de cette façon-là
00:42:46C'est de la couleur locale
00:42:47Oui, oui, oui, c'est une sale habitude
00:42:49Par contre, ce qui est inqualifiable, c'est sa conduite d'hier soir
00:42:53Ne pas être venu dîner, s'être fait attendre toute la soirée
00:42:56S'il vient aujourd'hui, je compte lui demander quelques explications
00:42:59Non, non, non, c'est pas ça
00:43:01Il ne pourra pas te répondre
00:43:03Pourquoi ?
00:43:04Zakuskin a une aventure
00:43:06Ah ?
00:43:08Oui, imagine-toi que je l'ai rencontré tout à l'heure rue de Rivoli
00:43:10Se promenant tendrement, bras-dessus-bras-dessous
00:43:12Avec une petite femme
00:43:14Ah ?
00:43:15Petite femme de théâtre
00:43:17Oh ! Et qui est cette petite femme ?
00:43:19Oh, puis ne connaît qu'elle
00:43:20Son nom et son portrait sont dans tous les illustrés
00:43:23Je crois même l'avoir vue par ici
00:43:25Tiens, là, voilà
00:43:26Mademoiselle Viviane
00:43:28Mademoiselle Viviane
00:43:30Ah, vous voilà, chère amie
00:43:32Je vous attendais avec une impatience
00:43:34Ah, mais vous...
00:43:34Oh, que sale habitude
00:43:37Oh, là, là, là, là
00:43:39Ça porte le projet du petit divertissement
00:43:42Que nous devons danser, madame et Stamorel et moi
00:43:45De la fête, les clous
00:43:47Benjamin, on a apporté mes fleurs ?
00:43:50Oui, madame
00:43:50Le chef du bureau des musées de province
00:43:52Rentre à l'instant les bras pleins de roses
00:43:54Il y a là aussi un lot de dames charitables
00:43:57Qui viennent pour le comité
00:43:58Oh, bon, j'y vais
00:43:59Quand on laisse des dames charitables toutes ensemble
00:44:01Elles se débarcent
00:44:02Dans dix minutes, je ne retrouverai que notre réticule
00:44:05Oh, vous riez trop
00:44:06Vous restez pour le comité, mon cher comte ?
00:44:12Si je reste, mais en suis l'âme
00:44:15J'en suis l'inspiration, d'en suis la fleur
00:44:18Chacun dans les œuvres de sa réalité
00:44:20Apporte ce qu'il a
00:44:21Les riz se donnent leur argent, les pauvres donnent leur misère
00:44:25Moi, je donne mon charme
00:44:27Votre charme, il est très curieux
00:44:30Dis donc, et c'est sous quelle forme ?
00:44:32Cent mille, tenez
00:44:33Avec quelques amis également ravissants
00:44:35Nous avons fondé l'œuvre de l'illusion sentimentale
00:44:38Et ça consiste en quoi ?
00:44:40Tous les jours, après des années, pendant tout l'heure
00:44:43Nous suivons dans la rue
00:44:45Dans la rue ?
00:44:46Si
00:44:46Dans la rue ?
00:44:48Si, dans la rue
00:44:49Nous suivons dans la rue
00:44:50Les femmes qui ont passé l'âge d'être suivies
00:44:53Et elles sont heureuses
00:44:55C'est exclu, ne c'est pas ?
00:44:56Ah oui, c'est très gentil
00:44:57C'est gentil
00:44:58Si dames réclament le comte d'Agostine
00:45:01Va qu'on scule !
00:45:02Non, non, non, une fois par jour, ça suffit
00:45:07Au revoir, moi
00:45:08Qu'est-ce que c'est ? Je vous ai fait mal ?
00:45:10Oui, c'est ma bague
00:45:11Oh, superbe bague
00:45:13Qu'est-ce qu'il vous l'a donnée ?
00:45:15Femme du monde ou courtisane ?
00:45:16Vous en avez de bol ? Moi, je l'ai acheté moi-même
00:45:18Oh, c'est moins sélégant
00:45:20Je vais au comité
00:45:21Pas de la sarrité
00:45:24Monsieur le directeur, cette dame demande à vous reparler en particulier
00:45:31Ah bon ? Oh, qu'est-ce que c'est ?
00:45:33Oh, madame Paul Margerie
00:45:34Oui, comment est-elle ?
00:45:36Oh, elle m'a charmée
00:45:37Hein ?
00:45:38Madame, monsieur le directeur me demande
00:45:40Oui, oui, oui, eh bien, attendez, une seconde
00:45:42Faites l'entrée
00:45:44Madame
00:45:51Je ne vous dérange pas, monsieur le directeur
00:45:54Mon mari viendra me rejoindre tout à l'heure
00:45:56Et je serai très heureuse de vous le présenter à tous les deux
00:45:58Mille grâce, madame
00:45:59Oui, je serai déjà venu vous voir depuis plusieurs jours
00:46:02Mais j'ai su que vous étiez absent de Paris
00:46:04Oui, en effet, je présidais la société des amis de Fontainebleau
00:46:08Dont vous faites partie, certainement
00:46:10Non
00:46:10Non, alors des amis de Compiègne ?
00:46:13Non plus
00:46:13Ah non, ben c'est dommage
00:46:15Nous favorisons beaucoup ces groupements qui deviennent chaque année de plus en plus nombreux
00:46:19Oui, je sais, aujourd'hui, les hommes n'ont plus d'amis
00:46:21Mais en revanche, toutes les villes en ont
00:46:23Ah non, là vous exagérez
00:46:25Si tenez, Sanlis n'en a pas
00:46:27Et Sanlis me demande de lui en chercher
00:46:28Voulez-vous être des amis de Sanlis ?
00:46:31Pour vous faire plaisir, mais uniquement pour ça
00:46:33Merci
00:46:33Mais pourquoi ?
00:46:35Parce que moi, cher monsieur, je préfère les villes qui n'ont pas d'amis
00:46:38Oui, j'adore découvrir un coin de paysage que personne n'a jamais regardé
00:46:42Un ravin rempli de feuilles
00:46:44Un mur tout raccommodé de lierre
00:46:47Ruissons endormis qui ne cherchent pas à arriver
00:46:50Oh, mais dites donc, mais c'est délicieux
00:46:52Dans quoi est-ce ?
00:46:55Dans mon premier livre
00:46:58Vous n'êtes pas bête
00:47:00Vous êtes charmante
00:47:02Vous ne me regardez pas comme ça, vous savez, je suis assez intimidée
00:47:05Comment intimidée ?
00:47:06Mais oui, c'est la première fois que je me vois dans une administration
00:47:08Et quelle administration ?
00:47:10Ah oui, le bois sacré
00:47:11Comment ?
00:47:12Oui, j'ai su que vous aviez appelé ainsi l'administration des beaux-arts
00:47:16Oui, avec une ironie, d'ailleurs, que j'ai fort goûtée
00:47:19Mais vous voyez-vous de l'ironie, cher monsieur ?
00:47:22C'est bien ici le domaine des lettres et des arts, le rendez-vous des muses
00:47:25Ah oui, oui, oui, des muses, des neufs muses, oui
00:47:29Dali, Terpsicor, Melpomène et...
00:47:34Et ?
00:47:35Et les autres ?
00:47:37Oh, j'ai trop...
00:47:38Et vous, monsieur le directeur, vous qui présidez à leur jeu
00:47:42Vous êtes le successeur direct d'Apollon
00:47:44Apollon ?
00:47:45Oh, ben là, vous me flattez
00:47:46Croyez bien, cher madame, Capollon sera toujours très heureux de vous voir
00:47:50Et s'il le peut, de vous être agréable
00:47:53Oh, j'en suis très heureuse
00:47:54J'ai justement quelque chose à vous demander
00:47:57Ah oui, quoi d'autre ?
00:47:58Eh bien, voilà
00:47:59Vous savez que je suis l'auteur de plusieurs livres qui ont eu quelques succès
00:48:04Comment, mais des tirages, et non !
00:48:05Oh, je n'en ai pas d'orgueil
00:48:06Mon éditeur me disait l'autre jour
00:48:08C'est incroyable ce que les femmes se vendent en ce moment
00:48:11Ah, ça a toujours été un peu comme ça
00:48:13Bref, on m'a assuré que je pouvais, sans ridicule, poser ma candidature au ruban rouge
00:48:20Ah, ben, c'est une très bonne idée
00:48:23Il faut trouver
00:48:24En tout cas, c'est une très bonne idée que de le demander
00:48:26Évidemment, ce sera difficile
00:48:28Il n'y aura qu'une croix de femme dans cette promotion
00:48:31Parce que vous savez, il y a encore quelques hommes qui écrivent
00:48:34Oui, oui, sans tête
00:48:35Et pour cette croix unique, vous aurez des concurrents
00:48:39Oh, je m'en doute bien
00:48:40L'une d'elles, surtout, est très, très, très appuyée
00:48:42Madame de Valrenais
00:48:44Une personne pas très connue, mais de grand mérite
00:48:46Ou un peu provinciale, peut-être
00:48:48En tout cas, soyez assurés, chère madame, de toute ma sollicitude
00:48:51Et je dirais même d'une sympathie toute particulière
00:48:55Merci
00:48:56Merci, je le crois
00:48:58Ah, voilà un sourire qui sera dans votre dossier
00:49:01Comment, il y a des sourires dans les dossiers ?
00:49:03Oh, bon, ça n'est plein
00:49:05Il y a même quelquefois bien autre chose
00:49:07Et quoi donc ?
00:49:08Eh bien, il y a des espoirs, des souvenirs, des promesses
00:49:13Il y a même des dossiers qui n'ont pas de chemise
00:49:17Monsieur le directeur
00:49:18Oh, pardon, madame, pardon
00:49:20J'oubliais que, à votre mérite littéraire
00:49:24Vous ajoutez celui d'une femme irréprochable
00:49:27Et ça vous servira beaucoup, madame
00:49:28Beaucoup, surtout à la chancellerie
00:49:30Il ne faut pas exagérer, monsieur le directeur
00:49:33Une femme de lettre ne peut avoir tout à fait la même morale qu'une autre
00:49:36Comme c'est vrai
00:49:37Chez nous, l'imagination galope
00:49:39Et on ne peut pas toujours la laisser galoper seule
00:49:42Nous mettons dans nos romans une odeur de péché
00:49:46Qui parfois nous monte à la tête
00:49:48Tiens, tiens, tiens
00:49:49Oh, il ne faut pas croire cependant
00:49:51Tout ceci est bien, bien vénel, bien léger
00:49:53Oui, oui, oui, oui
00:49:55Évidemment, évidemment, on écoute avec l'indulgence des propos galants
00:49:59Et on ne s'en fâche pas
00:50:01Oh, mais on ne s'en fâche pas du tout
00:50:02Au contraire
00:50:04Ainsi cet été
00:50:05Ainsi ?
00:50:06Oh, non, c'est un, c'est rien
00:50:09C'est, c'est, c'est, c'est raconté
00:50:10C'est un souvenir, c'est pas intéressant
00:50:12Mais non, mais non, si, mais si, mais si
00:50:13Alors ?
00:50:14Eh bien, ainsi cet été
00:50:17Un de ces soirs aussi tendres, aussi tense, transparent
00:50:21Il y avait sur la terrasse près de moi un beau lieutenant
00:50:25Et ma foi, je ne sais pas, moi, le cœur de lune, l'occasion, l'armée, la nuit tendre
00:50:33Tout à coup un bras a saisi ma taille et je me suis sentie embrassée
00:50:37Oh là là, mais embrassée
00:50:39Comme ça ?
00:50:41Oh, oh, oh
00:50:42Madame, vous venez de gifler le directeur des beaux-arts
00:50:48Mais monsieur
00:50:48C'est une chose tellement énorme que j'éprouve le besoin de me le répéter
00:50:52Vous venez de gifler le directeur des beaux-arts
00:50:55Certes, j'ai vu beaucoup de candidats au ruban rouge
00:50:58employés pour l'obtenir les choses les plus extraordinaires
00:51:01Mais celle-là, madame, personne n'y avait encore pensé
00:51:03Vous êtes la première
00:51:04Vous venez de gifler le directeur des beaux-arts
00:51:07Vous savez que le directeur des beaux-arts s'est conduit avec moi comme jamais aucun homme ne s'est permis de le faire
00:51:10Oh, permettez, madame, vous oubliez vite
00:51:12Mais qu'est-ce que j'oublie ?
00:51:13Vous oubliez le clair de lune, le lieutenant
00:51:15C'était mon mari
00:51:15Votre mari n'est pas officiel ?
00:51:17Oui, il faisait ses 28 jours
00:51:18Ah, oui, alors très bien, madame, très bien
00:51:21C'est son droit, évidemment, ça prouve qu'il n'a aucune relation, mais enfin, c'est son droit
00:51:25Bon, oui, mais dans ce cas-là, madame, il me reste à m'excuser auprès de vous
00:51:28Je ne vous demande pas, madame
00:51:30Non, c'est moi, c'est moi qui vous demande pardon
00:51:33Non, c'est moi, madame, c'est moi
00:51:33Non, monsieur, non, c'est vrai
00:51:34Non, vous savez, j'ai essayé d'être coquette, mais voyez-vous, moi, je ne sais pas jouer à ça
00:51:38Je vous demande pardon
00:51:39Oh, madame, vous croyez que j'ai déjà tout oublié
00:51:41Et que, comme nous disons en administration, l'affaire est classée
00:51:46Il m'a quoi dans le lac ?
00:51:47Enfin, vous voilà, chère madame
00:51:49Je me suis un petit peu attardée
00:51:51Puisque c'est mon mari qui en a profité
00:51:52Je suis sûre que tu es sous le charme
00:51:54Ah oui, ça, je le suis, oui
00:51:55Venez vite, toi aussi, Léon
00:51:58Ces dames veulent te soumettre le programme de la fête
00:52:00Comment, mais ?
00:52:00Accompagne, madame Margerie, voyons
00:52:02Moi, je venais chercher le dossier
00:52:03Quel dossier ?
00:52:04Le dossier des anciens lauréats du conservatoire
00:52:05Voilà, voilà, c'est celui-là
00:52:06Merci
00:52:07Monsieur Boutin, premier prix de tragédie, 1897, dans le Cid
00:52:12Actuellement, très hageur à Verve
00:52:14Mademoiselle Pécherelle, premier prix de comédie dans Agnès
00:52:17Actuellement, sage-femme
00:52:19Frongarde, premier prix de comédie, 1899, dans Père-Dicamp
00:52:24Actuellement, aide-de-Bourreau
00:52:25Oh là là, pauvre sang
00:52:27Pardon, madame, je me suis permis d'entrer
00:52:29Oh, madame, madame, je vous ai su
00:52:34Je suis prêt, on est-il, vous, madame, c'est...
00:52:37Mais qu'est-ce qu'elle a dans, cette petite femme-là ?
00:52:43Ah, te voilà, toi, partons
00:52:50Pourquoi ?
00:52:51Parce que c'est fini, je ne serai pas décoré
00:52:52Qu'est-ce qui t'arrivé ?
00:52:53Monsieur Chamorel a été avec moi de la dernière inconvenance
00:52:56Hein ? Je vais le gifler !
00:52:57Non, c'est déjà fait, filon
00:52:59Je m'entends ça parce qu'il m'est arrivé à moi aussi
00:53:00Lui-ci m'a trouvue dans cette pièce
00:53:02J'ai trouvé une petite dame que je ne connaissais pas
00:53:04Et alors ?
00:53:05Alors elle commence une phrase
00:53:06Ça arrête pile, me regarde avec des yeux
00:53:08C'est... oui, enfin, bref
00:53:10Lâche un cri perçant
00:53:14Ah oui ! Lâche aussi tous les tabiers qu'elle tenait
00:53:16Et disparaît dans une trappe
00:53:18Comment s'appelle-t-elle ?
00:53:19Comment était-elle, cette petite dame ?
00:53:20Ah, elle est brune, petite, avec une robe en lentelle
00:53:23C'est madame Chamorel
00:53:24Non !
00:53:25C'est !
00:53:25Filon !
00:53:26Non, attends un peu !
00:53:27Mais quoi ?
00:53:28Je pensais te sauver comme ça, comme des voleurs, voyons !
00:53:30Mais tu disais que...
00:53:30Je disais, je disais, c'est possible
00:53:32Mais attends, attends, laisse-moi réfléchir
00:53:33C'est précisément parce que le maître de maison s'est maintenu avec moi
00:53:37Je l'ai mis à sa place que tu ne nous vas pas avoir l'air de l'éviter
00:53:39Mais il n'y a pas que le maître de la maison
00:53:41Il y a aussi cette extraordinaire petite bonne femme
00:53:43Qu'est-ce que tu lui reproches ?
00:53:44Eh bien, je ne suis pas faite
00:53:45Mais le regard que madame Chamorel vient de me lancer là tout à l'heure
00:53:47Signifiait clairement
00:53:48Eh bien, voilà un garçon qui n'est pas de l'autre côté de l'eau
00:53:51Tu es sûre ?
00:53:52Ah, parfaitement !
00:53:53Oh, si je vous l'aime !
00:53:55Merci
00:53:55Quoi ?
00:53:56Je suis touchée de ton idée
00:53:57J'en ai une
00:53:58Ah, je te connais, je viens, toi
00:53:59Tu te dis, je plais à cette petite directrice des beaux-arts
00:54:04Elle fait tout ce qu'elle veut de son mari
00:54:05Alors, si je suis un petit peu gentille avec elle
00:54:07Mon trou de compliments, je peux très bien lui dire
00:54:09Faites donc décorer ma femme
00:54:11Et si je sais m'y prendre, eh bien, elle me répondra
00:54:14Mais c'est la moindre des choses, Paul
00:54:16Comment elle m'appellerait Paul ?
00:54:18Mais c'est effrayant, voyons, mais où allons-nous ?
00:54:20D'abord, je ne me suis pas dit un mot de ce que tu me racontes, là
00:54:22Oh !
00:54:23Eh bien, tu aurais pensé si tu m'aimais
00:54:24Oh, ça !
00:54:25Tu es d'un joli égoïsme, toi
00:54:26Je deviens fou
00:54:27Oui, un joli égoïsme
00:54:29Oh !
00:54:29C'est toi !
00:54:31C'est toi qui m'as supplié de poser ma candidature
00:54:32C'est toi qui m'as fourré cette idée dans la tête
00:54:35Et maintenant, maintenant que je suis dans la mêlée
00:54:37Alors, tu me lâches et tu me dis, débrouille-toi
00:54:39Comment je te lâche ?
00:54:41Comment je te lâche ?
00:54:42Moi qui ai fait aujourd'hui pour toi 17 d'ici
00:54:43Donc voici la liste, tiens
00:54:45La liste avec annotation confidentielle
00:54:48Moi qui ai encore rendez-vous à 5h avec le vénérable de la loge de Clichy
00:54:51Moi qui serre la main des concierges académiciens
00:54:53Et des petites bottes de sénateurs
00:54:54Moi qui, pour renoncer le ministre
00:54:56Et passer trois soirées de suite à l'opéra
00:54:58Et on y faisait de la musique
00:55:00Moi qui, il y a trois jours, ai invité à la chasse de députés
00:55:03Qui m'ont flanqué du pont dans le derrière
00:55:04Et tu oses dire que je te lâche ?
00:55:06Oh !
00:55:06Eh bien, tout ça ne compte pas
00:55:08À compter de ce que tu pourrais faire maintenant
00:55:09Avec trois mots aimables et un sourire
00:55:11Je n'en ai plus de sourire, je les ai tous donnés
00:55:12Mais tu refuses, hein ?
00:55:14Oui, je suis fatigué
00:55:15Oh ! Si tu savais, comme j'ai sommeil
00:55:17Ah, ça c'est bien d'un homme
00:55:19Mes sœurs, mes pauvres sœurs
00:55:21Tu es si unique
00:55:22Je pense à toutes les femmes
00:55:24Qui, depuis que la décoration existe
00:55:25Se sont dévouées pour la faire obtenir à l'homme qu'elles aimaient
00:55:27Oh !
00:55:28Je pense à toutes celles qui sont venues ici
00:55:29Sous tous les régimes et dans tous les costumes
00:55:31Il en est venu avec des robes à la grecque
00:55:33Et des camées dans les cheveux
00:55:34Il en est venu avec des robes à crinoline
00:55:36Des boucles anglaises et d'imperceptibles ombrelles
00:55:38Il en est venu avec des tournures astrapontins
00:55:40Du temps de grévis
00:55:40Elles ont sollicité pendant un siècle
00:55:43Moi
00:55:43Et pas une n'a été fatiguée
00:55:45Pas une n'a eu sommeil
00:55:47Elles ont été rusées
00:55:48Tenaces
00:55:49Coquettes
00:55:50Ingénues
00:55:51Fortes
00:55:51Faibles
00:55:52Chacune selon ses moyens
00:55:53Et suivant les ministres
00:55:55Elles ont tout mis en œuvre
00:55:57Pour faire décorer leur mari
00:55:58Et aujourd'hui qu'enfin grâce au progrès
00:56:00Un mari peut faire décorer sa femme
00:56:02Et bien il refuse de marcher
00:56:03Oh !
00:56:04Alors tu veux que je marche hein ?
00:56:06C'est ça
00:56:06Mais qui le dit le don ?
00:56:07Mais tu es fou et c'est un petit peu quoi
00:56:08Alors alors quoi ?
00:56:09Oh fais donc la cour un petit peu à madame Chamorret
00:56:11Oui bah moi je ne peux pas
00:56:13Je suis désolé de te le dire
00:56:14Je ne suis pas un étail
00:56:15Je ne suis pas une baguette
00:56:17Il n'est pas permis d'être aussi belle
00:56:18Oui et je ne te laisserai pas
00:56:20Nous entraîner dans une sale histoire
00:56:22Dans une nonde un chien d'histoire
00:56:23Où nous risquerions de casser comme des enfants
00:56:25Le joli bonheur dont nous étions fait cadeau
00:56:26Je refuse
00:56:27Tu ne m'aimes pas
00:56:28Comment je ne t'aime pas
00:56:29Parce que je ne veux pas tu sais
00:56:30Non non d'ailleurs ma mère me l'avait bien dit
00:56:31Oh elle ne s'est pas trompée ma mère
00:56:33Oh je te prie de ne pas mêler ta mère
00:56:34C'est de sa l'histoire
00:56:35Elle me dégoûte ta mère
00:56:36Mais je la vénère
00:56:37Ah chère madame encore là
00:56:39Je suis très heureux de vous retrouver
00:56:40Monsieur le directeur
00:56:41Mon mari peut être sans vous être présenté
00:56:44Ah oui enchanté chère monsieur enchanté
00:56:45Vous avez en madame Marjorie
00:56:47Une femme qui vous fait honneur
00:56:49Oui
00:56:49Une femme d'un talent étonnant
00:56:52Et aussi qui a beaucoup de vivacité
00:56:55Mais oui oui oui oui
00:56:59Mais si je suis éteinte
00:57:01C'est là ce que je suis aimée
00:57:03Vous allez me demander par qui
00:57:05Mais vous
00:57:06Mais vous
00:57:06Je ne vous le dirai pas
00:57:08Les noms sont là sur mes lèvres
00:57:10Je ne vous le dirai pas
00:57:11Vous les marquez comme je plais
00:57:14Ah oui je remarque
00:57:16Marcel
00:57:17Dites-moi qui est ce monsieur
00:57:18Qui cause avec madame Marjorie
00:57:19Mais c'est ce mari
00:57:20Non
00:57:21Si
00:57:21Oh que c'est embêtant
00:57:22Pourquoi ?
00:57:23Pour rien
00:57:24Léon
00:57:25Présente-moi donc monsieur
00:57:26Ah mais comment alors
00:57:27Comment monsieur Marjorie
00:57:28Vous n'aviez pas encore rencontré ma femme
00:57:30Jamais
00:57:31Vous savez mon mari est un peu sauvage
00:57:33Cher ami
00:57:34J'espère que vous n'avez pas oublié
00:57:35Votre promesse
00:57:36Oh c'est vrai
00:57:37Léon c'est là
00:57:37Vous voudrez visiter les greniers
00:57:38De la direction des beaux-arts
00:57:40Qu'y a-t-il dans ces greniers ?
00:57:41Le musée des faux
00:57:42Comment ?
00:57:42Ah non non
00:57:43Ma femme veut dire que c'est là
00:57:44Que nous installons les tableaux
00:57:46Et les objets d'art truqués
00:57:48Achetés chaque année
00:57:49Par les services compétents
00:57:50Oh mais je veux voir ça moi
00:57:51Je suis à vos ordres
00:57:53Notre musée est le plus beau d'Europe
00:57:55Oui oui
00:57:55D'ailleurs nous y veillons
00:57:56Parce que nous ne voudrions pas
00:57:57Qu'il puisse y introduire des faux faux
00:57:59Mais alors ce seraient des vrais
00:58:01Oui
00:58:01Alors pas ici
00:58:02Tenez-moi vous montrer ça
00:58:03Je vais vous laisser
00:58:05Moi je reste je connais
00:58:06Bon très bien
00:58:07Passe par nous
00:58:08C'est des foncieuses
00:58:10Oh madame
00:58:12Non je ne peux pas
00:58:14Je suis désolé
00:58:14Moi j'ai un rendez-vous
00:58:16Ça ne m'étonne pas
00:58:17Oh madame
00:58:17C'est un rendez-vous avec un vénéral
00:58:19Elle est gentille
00:58:20Oh madame
00:58:21Je ne veux pas vous taquiner
00:58:22Je veux que vous reveniez me voir
00:58:24Si c'est madame
00:58:24J'en viendrai
00:58:25Bonjour madame
00:58:26Au revoir monsieur
00:58:27Merci
00:58:29De quoi ?
00:58:31J'ai tout compris
00:58:32Vous avez voulu la joie de rester seule ensemble pour nous réconcilier
00:58:36Oh vous avez sur vous de la finesse
00:58:38Alors demain 5h60 ?
00:58:41Non pas demain
00:58:42Pas 5h
00:58:42Pas 60
00:58:43Alors quand 60 ?
00:58:44Plus jamais 60
00:58:45Plus jamais 60 ?
00:58:46Je vous demande la permission de ricaner
00:58:49Plus jamais 60 ?
00:58:52Vous savez ce que vous ferez ?
00:58:53Surtout que j'aurai passé cette porte
00:58:55Vous vous jeterez à ces bourreaux
00:58:57Et vous écrirez
00:58:58Réviens Zakuskine
00:59:00Réviens mon amour
00:59:02Réviens mon oiseau
00:59:04Et je connais Zakuskine
00:59:06Et il reviendra à tirer d'elle
00:59:08Brigade
00:59:12Plus jamais 60
00:59:14Mais je ricane moi
00:59:15C'est très bientôt
00:59:18Pauvre ça
00:59:19Il sait qu'il a une très bonne idée
00:59:24Flûte pour l'amour
00:59:29Zut pour les oiseaux
00:59:33Je quitte l'étranger
00:59:35J'ai envie de revenir en France
00:59:37J'espère qu'il comprendra
00:59:39Là
00:59:40Benjamin
00:59:41Faites-envoyer cette lettre
00:59:42Et apportez-moi un grand verre d'eau
00:59:44Avec une goutte de porto
00:59:45Oui madame
00:59:46Quel régime
00:59:47Oh je suis énervée
00:59:48Je suis énervée
00:59:48Oh qui m'énerve celui-là avec son sourire
00:59:52C'est facile de se moquer du monde
00:59:54Quand on n'est qu'un buste
00:59:55Si je n'étais qu'un buste
00:59:56Je serais bien tranquille
00:59:57J'étais maliste
00:59:58Maliste où étais-je
00:59:59Ah ça y est
01:00:00Oh comment
01:00:01J'ai eu peur
01:00:01Vous monsieur
01:00:02Oh pardon ma mère
01:00:03J'avais oublié ici ce papier
01:00:04Je me suis permis
01:00:05Permettez-vous je vous en prie
01:00:06Permettez-vous
01:00:07Oh je m'en prie
01:00:07Oh c'est pas gentil
01:00:08Ce qui serait gentil
01:00:10Au contraire
01:00:10Ce serait de me tenir un peu compagnie
01:00:12Oh asseyez-vous là
01:00:13Bon oui
01:00:14Bon un petit moment oui
01:00:16Oh mon enfance ne fut pas heureuse
01:00:18Ah bon
01:00:19Toute petite
01:00:20Je donnais déjà mille sujets d'inquiétude à mes parents
01:00:22J'aimais rester de longues heures à ma fenêtre
01:00:25A regarder passer les gens dans la rue
01:00:28Et j'avais déjà l'impression
01:00:29Que je ne connaîtrais jamais le bonheur
01:00:32Ah
01:00:32Oh merci de la sympathie que vous m'exprimez
01:00:34Oh mettez ça là
01:00:36Un peu de porto
01:00:38Volontiers
01:00:39Nous avons depuis quinze jours
01:00:45Un temps vraiment désagréable
01:00:46Oh oui le fond de l'air est frais
01:00:47Oh oui
01:00:48Irez-vous à la montagne
01:00:52Ou à la mer cet été
01:00:53Oh
01:00:53Oh
01:00:54Nous sommes ridicules
01:00:57Oh voulez-vous que nous rangions dans un tiroir tous les chichis
01:01:01Et que nous soyons à la bonne franquette
01:01:03Oh comment mais je crois bien que je veux
01:01:06Moi je suis simple comme bonjour
01:01:08Et moi comme bonsoir
01:01:09Vrai
01:01:10Oh surtout par cette chaleur
01:01:12Je ne peux être un peu femme du monde qu'en hiver
01:01:14Moi aussi
01:01:15Ça ne m'étonne pas
01:01:16Vous avez l'air si bon garçon
01:01:18Vous avez une figure de
01:01:20Comment dire
01:01:21De distribution de prix
01:01:24Oh j'aime ça
01:01:25Quelle drôle de petite bonne femme vous faites
01:01:30Quelle drôle de petite dame
01:01:32Oh mais je ne suis pas une petite dame
01:01:34Qu'est-ce que vous êtes donc
01:01:35Oh c'est intime
01:01:37Oh et bien
01:01:38Vous ne le répéteriez pas ?
01:01:40Promis
01:01:41Et bien voilà quand j'étais petite à jour
01:01:43Mon parent m'a dit
01:01:44On te prend pour une demoiselle
01:01:46Mais on a tort
01:01:47Tu n'es pas une demoiselle
01:01:48Tu es un petit animal sauvage
01:01:51Et bien je suis ça
01:01:53Un petit animal sauvage
01:01:55Qui guette
01:01:56Qui grimpe
01:01:56Qui court
01:01:57Qu'on n'attrape pas
01:01:58Oh et surtout
01:01:59Qui ne peut pas rester sur le même arbre
01:02:02Un écureuil
01:02:03C'est ça
01:02:04Un écureuil
01:02:05Un peu oxygéné
01:02:07Ah vous n'êtes pas du tout ce que je croyais
01:02:10Oh pas du tout
01:02:12Tout à l'heure je regrettais d'être venu
01:02:14Maintenant je ne le regrette pas
01:02:16Ah non j'ai l'impression
01:02:17J'ai l'impression
01:02:18Mais charmant d'être en plein air
01:02:20D'aller à l'aventure
01:02:21A traversant
01:02:22En bons camarades
01:02:24Oh oui
01:02:25En bons camarades
01:02:26Seulement mes bons camarades
01:02:30N'avaient jamais la main si petite que ça
01:02:32Oh je ne leur en veux pas
01:02:34Voulez-vous encore un peu de porto ?
01:02:39Oui
01:02:39Oh oui un peu de porto
01:02:43Oui mais alors
01:02:44Il faudra me rendre ma main
01:02:46Eh oui
01:02:47Là voilà
01:02:49Tenez
01:02:56Oh nous nous sommes trompés de verre
01:03:02Et alors ?
01:03:02C'est grave
01:03:03Pourquoi ?
01:03:04Parce que maintenant je sais ce que vous pensez
01:03:06Dites-le
01:03:08C'est très gentil ce que vous pensez
01:03:11Oh non mais dites donc
01:03:14Dites donc voulez-vous bien ?
01:03:17Alors là elles vont un peu loin vos pensées
01:03:19Ah oui elles vont loin
01:03:20Oh elles vont loin
01:03:21C'est où j'en suis ?
01:03:22C'est bien ça
01:03:23Je ne suis plus le même homme
01:03:24Je ne me reconnais plus
01:03:25Vous me plaisez
01:03:26Mais vous me plaisez
01:03:28Il me vient des idées
01:03:29Des idées incroyables
01:03:30Je pense à des poésies
01:03:32À des machines
01:03:33À des voyages
01:03:34Dans des pays
01:03:35L'Espagne et ses fjords
01:03:37La Norvège
01:03:37Et ses corridas
01:03:38Oh jamais on m'a proposé des voyages pareils
01:03:41Eh bien moi je vous les propose
01:03:41Oh mon ami
01:03:43Oh
01:03:44Oh Adrienne
01:03:46Adrienne
01:03:47Je suis content
01:03:49Je suis heureux
01:03:50Comme le jour de l'ouverture de la chasse
01:03:52C'est moi
01:03:52Comme le jour de ma première faute
01:03:54Oh
01:03:57Oh
01:03:58Oh mais qu'est-ce que vous avez ?
01:04:00Oh il y a une chose que vous ne savez pas
01:04:01Je n'ai encore jamais trompé ma femme
01:04:03Non
01:04:03Et si je sens que ça va m'arriver
01:04:05C'est effrayant
01:04:05Oh mais remettez-vous mon ami
01:04:06Et ne rougissez pas de votre modestie
01:04:08Oh je suis si heureuse
01:04:10Pourquoi ?
01:04:10Oh ça avait toujours été mon rêve
01:04:12De rencontrer un homme sage
01:04:14C'est tellement inespéré
01:04:16Ah mais dites-toi
01:04:16Qu'est-ce que vous croyez ?
01:04:18Ah mais non
01:04:19Oh mais pas du tout
01:04:20Ne jamais avoir trompé sa femme
01:04:23C'est la virginité pour un homme
01:04:26Oh n'ayez pas peur
01:04:28J'ai le sentiment de ma responsabilité
01:04:30Je ne vous abandonnerai pas
01:04:32Merci je vous crois
01:04:33Oh j'ai trouvé mon arbre
01:04:36Je suis bien
01:04:37Je m'installe
01:04:38Oh petite écureuille
01:04:41Petite écureuille
01:04:44Oh
01:04:44Ben voilà ça y est
01:04:48Je suis venu chercher ma liste
01:04:49Tu sais alors nous causions
01:04:51Comme tu m'avais dit
01:04:53Je ne t'avais pas demandé de causer aujourd'hui
01:04:54Tu es d'une mauvaise foi
01:04:56De quoi parliez-vous ?
01:04:58Eh ben de ce que tu poésies, musique, écureuil
01:05:01Eh ben nous nous expliquerons en voiture
01:05:04Non je me rentrerai à pied
01:05:05Oh mais il y a une chance que nous n'avons pas décidé
01:05:07Où répéterons-nous généralement notre petit balaise ?
01:05:09Ici c'est impossible
01:05:10Dans un ministère on ne peut pas travailler
01:05:13Ah ben voulez-vous chez moi ?
01:05:15Chez nous ?
01:05:15A la maison ?
01:05:16Oh quelle bonne idée
01:05:17Monsieur le directeur
01:05:20Madame
01:05:20J'espère que nous nous quittons en bon cerne
01:05:22Les meilleurs, chère madame, les meilleurs
01:05:24Et pour vous le prouver, voyez, je n'ai pas de secret pour vous
01:05:27Voici la carte de la personne que je vais recevoir
01:05:29Madame Lucie de Valrenais
01:05:31Au revoir monsieur le directeur
01:05:34Dommage madame
01:05:35Au revoir madame
01:05:37Au revoir madame
01:05:38Je peux les assurer que je n'oublierai jamais ma première visite
01:05:40A la direction des beaux-arts
01:05:41Moi non plus
01:05:42Benjamin
01:05:56Monsieur
01:05:57Benjamin
01:05:58Comment suis-je ?
01:06:02Mais aussi bien que possible monsieur
01:06:04Ah bon ?
01:06:05Rien de cloche ?
01:06:06Mais non
01:06:06Bon
01:06:07Là
01:06:08Je suis entrée
01:06:10Madame Lucie de Valrenais
01:06:12Pardon monsieur, pardon, pardon
01:06:20Mais il y a erreur monsieur
01:06:21J'attends madame Lucie de Valrenais
01:06:22Oui
01:06:23C'est moi
01:06:24Comment c'est vous ?
01:06:25Oui, je vais vous dire
01:06:27C'est mon monsieur de Nîmes, n'est-ce pas ?
01:06:28C'est moi ?
01:06:29Oui
01:06:29Oui
01:06:29Voulez-vous
01:06:29Voulez-vous
01:06:30Voulez-vous me foutre le cas ?
01:06:31Non mais
01:06:31Voulez-vous me foutre le cas ?
01:06:33Voulez-vous me foutre le cas ?
01:06:34Sentez ma mère, monsieur
01:06:36Sentez, sentez
01:06:37Sentez
01:06:38Sentez
01:06:39Oh oh oh oh oh
01:06:41Ah les neuf muses
01:06:44Naturellement il leur en manque
01:06:48Voyons
01:06:49Il y a Clio
01:06:51Euterpe
01:06:54Erato
01:06:55Polymie
01:06:58Calliope
01:07:00Uranie
01:07:03Phrasine
01:07:05Allons bon
01:07:09J'en trouve dix
01:07:10Il y a aussi monsieur René avec leurs histoires de balais
01:07:36Une maison qui était si calme
01:07:38Madame Massénaire
01:07:39Même monsieur qui n'est plus le même
01:07:40On ne s'y reconnaît plus
01:07:41Ah j'ai bien peur que la place
01:07:44Qu'elle soit fichue
01:07:45Ah Louise
01:07:52Louise, monsieur est rentré ?
01:07:54Non madame
01:07:55Tiens
01:07:56Que tout soit prêt pour cinq heures et demie
01:07:59On répétera ici
01:08:00Madame Chamberral s'habillera dans ma chambre
01:08:03Et le comte Zakuskine dans la chambre de monsieur
01:08:05Viens madame
01:08:06Oui, bonjour mon amour
01:08:17Tu as l'air bien gay ?
01:08:18J'ai l'air gay moi ?
01:08:19Oh je ne veux pas dire si gay que ça
01:08:21Non, enfin si je l'ai l'air gay parce que j'entre
01:08:23Où tu étais ?
01:08:24J'étais au syndicat des agriculteurs
01:08:27Il me semble depuis huit jours que tu mets beaucoup plus de temps qu'avant à faire tes coups
01:08:31Oh, voilà une idée !
01:08:33Extraordinaire
01:08:34Ah ben dis-donc, dis-donc, j'ai été aussi chez l'armurier
01:08:37J'ai commandé mille cartouches
01:08:39Tu sais, mille cartouches, ça ne t'a pas pris un moment
01:08:41C'est vrai ?
01:08:42Ta parole d'honneur ?
01:08:43Ne me demande pas ma parole d'honneur pour une chose aussi belle
01:08:45C'est une phrase
01:08:47Allô ?
01:08:58Allô ?
01:08:59Guttabère, 35, 62
01:09:01Oui ?
01:09:03Ah non, allô ? C'est l'armurier ?
01:09:06Ici monsieur Paul Margerie
01:09:07Voulez-vous, cher monsieur, me livrer sans faute demain mille cartouches ?
01:09:12Oui, monsieur Margerie
01:09:13Merci
01:09:13Au revoir
01:09:15Dis-donc, Thierry, tout à l'heure, tu m'as demandé de te donner ma parole d'honneur
01:09:22J'ai refusé parce que ça m'a paru, enfant
01:09:24Parce que c'est comme ça, je te la donne, je te donne ma parole d'honneur
01:09:29Que j'ai commandé aujourd'hui même mille cartouches chez mon armurier
01:09:32Je te jure que cette suspicion, c'est...
01:09:36Enfin, tu es nerveuse, je le comprends
01:09:38Pourquoi ?
01:09:39C'est tout naturel, cette décoration, la patience
01:09:42Oui, oui, oui
01:09:43Fallait une nouvelle que j'ai rapportée hier, elles étaient bonnes ou quoi ?
01:09:47Je tiens plus du tout à cette croix
01:09:48Oh, tu as tort
01:09:50L'autre jour, j'ai fait quelque chose de pas très joli
01:09:53Comment ?
01:09:54En te demandant d'agir auprès de madame Chamorel
01:09:56Oh, c'était un enfantillage
01:09:59C'est depuis cet instant-là que je suis inquiète
01:10:01Comment ?
01:10:02Combien de fois l'as-tu vu ?
01:10:04Tu lui fais deux visites officielles
01:10:05Officielles aussi
01:10:07Mais je te jure que c'est du très convenable
01:10:08Oh, ça n'est pas du tout la femme qu'on croit, c'est une femme très, très bien
01:10:13C'est bizarre, oh là là, c'est pas du tout mon genre
01:10:16Qu'est-ce que c'est ton genre ?
01:10:19C'est toi
01:10:19Rembrasse-moi mon genre
01:10:22Tu es gentil quand je te crois
01:10:24À la bonne heure, je suis content
01:10:25J'ai besoin de savoir que je te laisse heureuse quand je pars
01:10:28Ça, c'est vrai, tu sais, ça me gâche tout mon plaisir
01:10:31Quel plaisir ?
01:10:33Quand je vais au syndicat des agriculteurs ou alors chez mon armurier
01:10:36Je t'aime bien, bien
01:10:39Papillon de nuit sans bol vert
01:10:43Madame, monsieur le compte à Couskine est là
01:10:45Et voici une lettre qu'on vient d'apporter de chez monsieur Desfarges
01:10:47Et il y a revenu de voyage ?
01:10:49Oui, madame, ce matin
01:10:50Eh bien, vous direz à monsieur Desfarges que je le recevrai avec grand plaisir
01:10:54Je vous demande pardon, madame
01:10:58Je vais amener Durakine
01:11:00Mon musique pour la bouillasse
01:11:03Qu'est-ce qu'il dit ?
01:11:14Ceci
01:11:15Si cette dame mettait une estourjante de la Volga et que je fousse un estourjant, il y aurait beaucoup de caviar à l'automne
01:11:24Il y a encore des domestiques
01:11:26Ah mais, vous t'arrivez
01:11:28Chère amie, vous avez tout le temps, vous n'êtes plus assuré à monsieur
01:11:32Si j'ai devancé ce qui est pareil à la colombe et de l'Ars, j'arrive où la bonne nouvelle est à la main
01:11:41Eh bien, donnez vite !
01:11:42Ce matin, grand désolé à l'ambassade
01:11:44Haute personnalité politique, leur maîtresse, les maris de leur maîtresse, enfin l'intimité, quoi
01:11:50Les sous-jets des prochaines décorations ont été mis sur la nappe
01:11:54Et c'est ainsi que j'ai appris la nouvelle est magnifique
01:11:56Quoi ?
01:11:57Vous êtes proposé par la croix, par les ministres
01:12:00Non !
01:12:01Si !
01:12:02Oh, ça fait tout de même !
01:12:04Vous comprenez ?
01:12:05Oh si, votre dossier a été transmis au conseil de l'ordre qui l'examine
01:12:08Ah, c'est vrai, j'ai oublié, il y a encore ça
01:12:10Oh, il y a confiance, il sait bien qu'il peut y avoir quelques petites difficultés, n'est-ce pas ?
01:12:14Ces messieurs du conseil de l'ordre se sont des ans un peu asés
01:12:17Mais aussi, pourquoi ne pas-t-on pas plus jeunes ?
01:12:19Mais, s'ils avaient 20 ans, toutes les femmes se redécoraient
01:12:22Les printemps décorent tout ce qu'on lui donne
01:12:24En tout cas, chère amie, je ne sais comment vous exprimez ma reconnaissance
01:12:27Eh, je vais m'effacer
01:12:29Si, voyons
01:12:30Si, eh bien, alors la moindre des sauces, une barbe, une perle, un petit souvenir
01:12:35Je laisse à votre étacte
01:12:36Ah bon, bien, bien
01:12:37D'ailleurs, votre doigt suffit à mes récompensées
01:12:41Elles me consolent
01:12:43Vous avez besoin d'être consolé
01:12:45Mais qu'est-ce que vous avez ?
01:12:50Eh, rien, les corps boulevérisseient, une ingrate
01:12:54Je coussais, c'était là
01:12:59Je n'ai plus pleuré une femme qui est dans les bras d'une autre
01:13:02Ça, ça n'est pas de sa graine
01:13:05Il y a beaucoup d'hommes comme vous, seulement ils ne le disent pas
01:13:09Je n'ai pas fait
01:13:10Je n'ai pas fait
01:13:11Je n'ai pas fait
01:13:11Je m'excuse, mais quand je souffre
01:13:14Je ne suis plus capable que d'une sauce
01:13:16Une sauce ? Et laquelle ?
01:13:20Danser
01:13:21C'est bien un comité
01:13:30Bonjour, Dépensé, mais dis donc, qu'est-ce que vous êtes devenu depuis 8-12 jours ?
01:13:36Un grand voyage
01:13:37Un grand voyage, ou ça ?
01:13:38Oui, en Cécile
01:13:39Je suis arrivé ce matin, vous êtes ma première visite
01:13:41Qu'est-ce que vous me racontez là ?
01:13:42C'est assez surprenant, mais je dois reconnaître que j'ai fait une gaffe
01:13:45Une gaffe, en quoi ?
01:13:46En vous annonçant la décoration probable de Mme de Valrenais
01:13:50Oui, j'ai réfléchi et quand je suis assez fin
01:13:52J'ai deviné que cette nouvelle ne vous avait pas été agréable
01:13:55Voyons
01:13:55Si, si, si, si
01:13:56Et même j'ai juré de réparer ces faits
01:13:58Vous savez que mon oncle, le baron des Fargettes, est un personnage très important de la commission de la Légion d'Honneur
01:14:05Oh, il est juif d'une grande autorité
01:14:06Oh, mon ami !
01:14:08Eh bien, le baron, très affaibli, beaucoup de peine à suivre une idée
01:14:10Etait le matin même de ma dernière visite, parti pour Palerme, où il allait faire une cure d'orange
01:14:15En sortant de chez vous, je n'ai pas hésité
01:14:17J'ai fait ma valise, j'ai sauté dans le train, et trois jours après, je débarquais en Cécile, où je suppliais mon oncle de rentrer immédiatement à Paris
01:14:23Ah, ça c'est gentil !
01:14:24Il refusa, alléguant que sa cure devait durer trois semaines
01:14:27A force d'énergie, je le forçais à tripler le traitement
01:14:31Je le fis passer de 30 oranges par jour à 90
01:14:33Le neuvième jour, je le poussais dans le train, et nous sommes arrivés ce matin à Paris
01:14:36Oh, merci, merci, mon ami
01:14:38A une heure, je suis retourné chez lui, je l'ai arraché de son lit, je l'ai fait masser, teindre à billets, et je l'ai poussé moi-même aux séances de l'ordre
01:14:44Après qu'il m'ait promis, d'une façon formelle, qu'il s'opposerait avec la dernière énergie à toute décoration de femme dans la promotion des beaux-sins
01:14:53Vous avez fait ça, mais bien tous mes compliments, vous avez la main, vous
01:15:00Mais, mais enfin, mais
01:15:01Oh, vous avez une précision, une sûreté de la gaffe, c'est du génie, ça
01:15:05Mais la madame
01:15:05Oh, mais malheureux, c'est moi qui suis candidate, c'est moi
01:15:08Oh, mais c'est une catastrophe, je suis conscient, je ne vais réparer
01:15:11Mais qu'est-ce que vous allez encore faire ?
01:15:12Le téléphone des gens descendent, et je remonte les gens, j'en ai tout de suite
01:15:14Oh, quelle histoire, quelle histoire, on parle de ça
01:15:16Oh, monsieur le directeur, monsieur le directeur, avant tout, laissez-moi vous exprimer ma reconnaissance
01:15:22Ma profonde reconnaissance, mon émotion, je sais que vous avez bien voulu
01:15:26La seule chose que je puis vous assurer, c'est que le ministre a bien voulu ratifier mon choix
01:15:30Oh, que vous êtes bon, monsieur le directeur, asseyez-vous, monsieur le directeur
01:15:33Que le ministre est bon, on peut dire tout ce qu'on voudra, hein, mais nous vivons une belle époque
01:15:38Toutes ces réformes sociales, c'est admirable, oh, quelle belle époque
01:15:42Ah, c'est mon avis
01:15:43Ah, oui, mais quand je pense, quand je pense à ce que j'ai fait, moi, oh là là, je suis remplie de confusion
01:15:49Non, non, non, ne parlons plus de ça, et même en en passant, laissez-moi vous dire
01:15:53N'en parler à personne, oui, ça vaut mieux pour vous, pour moi aussi d'ailleurs
01:15:59Oh, monsieur le directeur
01:15:59C'est la seule récompense que je souhaite pour mon attitude, de qui, je dois le dire, n'a pas été sans mérite
01:16:05Oh, je devine ce que de madame de Valrenais a dû mettre en œuvre, hein
01:16:08Comment est-elle ?
01:16:10Ah, c'est une femme qui ne ressemble à aucune autre
01:16:14Je suis sûre qu'il n'aurait tenu qu'à vous
01:16:16Ah oui, oh, ça, ça, il n'aurait tenu qu'à moi, évidemment, mais vous savez, moi, la justice avante
01:16:21C'est très beau, ça
01:16:22Je dois dire d'ailleurs que vous avez su auprès de moi un avocat qui a bien plaidé votre cause
01:16:26Hein, qui ça ?
01:16:27Ma femme
01:16:27Oh, Adrie, Adrie, voyons que nous présents la femme de Votre Marison, là
01:16:37Eh bien, justement
01:16:38Plus tard, ailleurs
01:16:39Non, ici, maintenant
01:16:39Petit garde
01:16:40Oh, que vous êtes bourgeois
01:16:41Oh, bourgeois, moi, bourgeois, tenez
01:16:43Oh, mais bah vous flamnez pas, vous, au moins
01:16:46Que vous pouvez être Paul Tron
01:16:47Paul Tron, moi, Paul Tron
01:16:48Vous voyez, c'est même un peu gaga, c'est en fond
01:16:50Vous n'avez jamais eu d'aventure, mais c'était pas un hasard
01:16:52C'est par vocation
01:16:53Tout ce que vous dites, tout ce que vous faites
01:16:55Ah, comme une odeur de mariage
01:16:57Vous trompez votre femme sans goût, tristement
01:17:00Comment on fait une bonne action
01:17:01C'est pas extrêmement drôle
01:17:02C'est grave ce que vous me dites, là, tiens
01:17:04Je sais, maintenant
01:17:07Vous n'aurez jamais l'idée d'une chose vraiment amusante, drôle
01:17:10Quoi ? Ah, je vous m'enviens, pardon
01:17:12Si j'allais trouver votre femme, que je lui dise
01:17:14Je suis la maîtresse de votre mari
01:17:16Nous avons passé hier, la journée au fond de Passy
01:17:18Eh bien, je suis sûre que vous ne seriez pas très content
01:17:20Oh, vous avez des idées, vous ?
01:17:22Vous, je le ferai
01:17:23Oh, ça ne fait pas tant
01:17:24Mais non, calmez-vous, je ne dirai rien
01:17:27Non
01:17:27Seulement, la preuve est faite
01:17:28Quoi qu'elle preuve
01:17:29Vous êtes un tout petit amant
01:17:31Un amant pour la province
01:17:32C'est que dommage, vous êtes gentil seulement
01:17:34Vous n'avez pas été pris assez jeune
01:17:36Adrie, vous me faites beaucoup de peur
01:17:38On a mis toutes les affaires de madame dans cette chambre
01:17:41Si madame Bavard ne lui manque plus
01:17:43Oui, si, vous allez vous habiller
01:17:44Non, me coiffer seulement, j'ai ma robe
01:17:46Et là-dessous ?
01:17:47Oui, là-dessous
01:17:48Elle ne tient pas beaucoup de place
01:17:49Elle est légère, très légère
01:17:50Oh, je veux voir
01:17:51Non, non, non, rêvez-moi, c'est bien meilleur
01:17:53A tout à l'heure, Colombe
01:17:55Oh, cool
01:17:57Oh, cool
01:18:27Ah, la bêche
01:18:36Oh, oui
01:18:37Mais enfin, il y a une catastrophe
01:18:40Il nous manque
01:18:41Pardon
01:18:43Qu'est-ce qu'il nous manque ?
01:18:45Le second motif du morceau
01:18:47Le second motif du morceau ?
01:18:49Il n'est pas là
01:18:50C'est de faire ça à sa couscule
01:18:52Je pense que je danse l'après-midi d'une fois
01:18:54Qu'est-ce que tu peux raconter là ?
01:18:55Ça c'est de faire ça à sa couscule
01:18:57Oh, que l'après-midi d'une !
01:18:59Alors moi, j'ai mis ma robe de neuf pour rien
01:19:01Oh, c'est trop bien merveilleux
01:19:02Oui, oui, bah du calme, du calme
01:19:03Alors demain, demain, demain ?
01:19:06Non, non, pas lui, pas demain
01:19:07Voyons Adrie
01:19:07Non, il faut être prudent, mon ami
01:19:09Très prudent, trop prudent
01:19:11Adrie, je suis fâché
01:19:12La porte de la direction des Beaux-Arts se plie pour M. Chamborel
01:19:14Portez-le-lui dans le salon
01:19:15Adrien, tu m'embêtes ?
01:19:27Madame, madame, et vous aussi, monsieur
01:19:31Je vous apporte une grande nouvelle
01:19:32L'événement que nous présentions est maintenant officiel
01:19:35Ce jour est un grand jour pour vous deux
01:19:38Madame, au nom de la République
01:19:41Au nom du gouvernement
01:19:42Et au nom des Beaux-Arts
01:19:45Je vous fais chevalier de la Légion d'Honneur
01:19:48Voilà
01:19:50Canaille !
01:19:53Comment ?
01:19:54Je ne sais comment vous vous exprimez
01:19:56Mon indignation
01:19:57Ma reconnaissance, monsieur l'hériture
01:20:00Ma reconnaissance
01:20:01Je suis bouleversée, vous savez, je suis bouleversée
01:20:04Mais remettez-vous, chère madame, remettez-vous
01:20:06Monsieur, je vous adresse mes sincères félicitations
01:20:08Madame, moi aussi je veux vous dire quelque chose
01:20:11Je ne vois pas, madame
01:20:12Vous ne croyez pas que je veuille vous complimenter
01:20:15Pour cette récompense inéritée que vous venez d'obtenir
01:20:17Non, d'abord, je ne saurais pas, je ne m'y connais pas très bien
01:20:19Je voudrais seulement vous dire que depuis un petit moment, je suis émue
01:20:22Vraiment, au fond du cœur
01:20:24Vraiment ?
01:20:25Oui
01:20:26Et si jamais une personne vous avait fait du mal
01:20:30Peut-être malgré soi
01:20:32Je voudrais vous dire qu'elle regretterait
01:20:36Jusqu'au fond du cœur
01:20:37Et qu'elle ne recommencerait jamais
01:20:38Jamais
01:20:39Merci
01:20:41Oh, elles sont gentilles
01:20:43Oui, merci bien
01:20:44Il y a Léon ?
01:20:45Oui, ça va
01:20:46Francine, écoute-moi
01:20:52Je n'ai rien à écouter
01:20:53C'est vrai, tu ne parles
01:20:54Non
01:20:54Tu sais, Francine, je suis très, très malheureux
01:20:59Tout ce que c'est bien fait
01:21:00Ma Francine
01:21:01Il faut me consoler
01:21:04De m'avoir trompée
01:21:04Mais oui, oui, justement
01:21:06Ça me fait une peine
01:21:08Mais pourquoi l'as-tu fait ?
01:21:09Je ne sais pas, Francine
01:21:10Je me repens
01:21:12Hum, tout trompant
01:21:13Je ne sais pas avoir été coupable, tout trompant
01:21:15T'avoir été pincé
01:21:17Ben oui
01:21:18Quoi ?
01:21:18Ah ben non, je veux dire les deux
01:21:19Si tu savais, si tu savais
01:21:20Comme j'avais peur
01:21:21Je pensais à toi tout le temps
01:21:24Tu pensais à moi, ben c'est du propre
01:21:25Non, ce n'est pas vrai, j'y pensais jamais
01:21:27Tu n'y pensais jamais ?
01:21:27Oh, c'est abominable
01:21:28Je te jure
01:21:30Mais qu'est-ce que tu me jures ?
01:21:31Je ne sais pas ce que tu voudras
01:21:32Je ne sais pas ce qu'il a dit
01:21:32Oui, je m'exprime mal
01:21:34Les mots qu'il faudrait pour te convaincre, ils existent
01:21:36Seulement nous deux, il n'y a que toi qui pourrais les trouver
01:21:38Et c'est justement moi qui en ai besoin
01:21:39Si tu me m'en mettons
01:21:40Il n'y a pas d'excuses, personne ne peut vous en découvrir
01:21:42Ah ben si tu me donnais deux ou trois jours de réflexion
01:21:45Ben j'en trouverai des excuses
01:21:46Et oui, de très bonnes encore
01:21:48Tiens, quand ce ne serait que dans ces romans
01:21:50Le roman
01:21:50Mais dans tous, il y a un mari qui compte sa femme
01:21:52Souvent même, il y en a plusieurs
01:21:53Et toujours les femmes pardonnent à leur mari
01:21:55Et elles les aiment davantage après
01:21:56Et on pleure, et on rit, et c'est magnifique
01:21:59Et c'est ça que tu trouves bien
01:22:00Et c'est ça que le public demande
01:22:01Et c'est ça que l'académie couronne
01:22:03Eh bien le roman, ce n'est pas la vie
01:22:04Oui, alors les romanciers sont des malfaiteurs
01:22:06Paul
01:22:07Parfaitement
01:22:07Et votre littérature, c'est une sale blague
01:22:09Sans elle, nous serions déjà dans le Périgord
01:22:11Sans elle, tu ne me aurais pas emmené à la direction des Beaux-Arts
01:22:13Et sans elle, tu ne me aurais pas dit
01:22:14Parfaitement, tu me l'as dit sacré longtemps
01:22:16Un chien
01:22:17Oh, tu sais, quand je pense à tout ça
01:22:18Et je m'humiliais, moi, tout à l'heure
01:22:20Eh, ben, j'avais l'air intelligent
01:22:21Tiens, tout ça, c'est ta faute
01:22:23C'est toi qui aurais dû me demander pardon
01:22:24Mais enfin, Paul, comme tu me parles
01:22:27Oui, je te parle comme j'aurais dû le faire depuis longtemps
01:22:29Tiens, mais je ne sais pas, j'avais peur de toi
01:22:31Tu avais tort
01:22:33Oui, oui, oui, oui, j'avais tort
01:22:34Seulement, je t'aime et je t'admire
01:22:36Là, alors je te regarde, je t'écoute
01:22:37Et je me tais
01:22:38Tu vois, je viens de parler un peu fort
01:22:40Mais c'est fini
01:22:41Je ne serais même pas fichu de recommencer
01:22:44Tant pis
01:22:45Oui, parce que toi, toi, tu es une femme
01:22:48Une famille patente
01:22:49Et moi, je suis
01:22:50Je suis un bon gars
01:22:52Pas très futé, pas très malin
01:22:55Tu sais bien
01:22:55La miche, la tartine
01:22:58Oh, Paul, Paul, je te demande pardon, Paul
01:23:01Oh, Paul, Francine, c'est moi qui te demande pardon
01:23:03Oh, Paul, Paul
01:23:04Ma Francine, ma petite Francine
01:23:08Tu es là, je t'ai retrouvé
01:23:09Moi aussi, je suis là
01:23:11Je me suis retrouvé
01:23:12Et on s'aime comme avant
01:23:15Non, on ne peut pas s'aimer comme avant
01:23:16Il faudra s'aimer plus
01:23:18Je sens que ça me sera
01:23:19Très facile
01:23:21Oh, Paul, tu es belle
01:23:25Vous allez monter ça
01:23:26Oh
01:23:27Qu'est-ce que tu as ?
01:23:29Je ne sais pas, c'est plus parce que je ne suis pas très moderne
01:23:31Enfin, cette croix que je vois sur ta poitrine
01:23:32Ça fait penser à des choses, à des gens
01:23:34Et alors ?
01:23:35À l'armée, à la magistrature
01:23:36À mon ancien colonel et au proviseur du lycée
01:23:40On va dire qu'on prend des gens pour qui j'ai du respect de la déférence mais pas autre chose
01:23:44Et alors ?
01:23:46Parce que si tu faisais plus fort que moi
01:23:47Je ne pourrais jamais me résoudre à coucher avec un chevalier de la Légion d'honneur
01:23:52Paul !
01:23:52Pourquoi m'as-tu fait te dire tout cela ?
01:23:55Tiens, je te la donne
01:23:57Je ne la rends jamais
01:23:58Hein ?
01:24:00Oh, si !
01:24:01Nous n'irons plus au bois sacré
01:24:03Demain soir, nous serons Périgord
01:24:06On m'a écrit que les brouillets, elles étaient toutes roses
01:24:08Tu sais, le rose, hein ?
01:24:10Ça va beaucoup mieux que le rouge aux femmes
01:24:12Et puis ça s'est passé
01:24:14Tiens, tiens
01:24:15Qu'est-ce que c'est que ça ?
01:24:16Non
01:24:16Eh bien, c'est le manuscrit du roman que je viens d'écrire
01:24:20Eh bien, voilà ce que j'en fais du manuscrit du roman que je viens d'écrire
01:24:25Voilà !
01:24:25Non, mon chéri, c'est trop, c'est trop gué
01:24:27C'est dommage, moi je le trouvais joli, ton roman
01:24:29T'en fais pas, mon chéri
01:24:31J'en ai une copie
01:24:33J'en ai deux
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