- il y a 2 jours
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00:0019h-20h, Cache sur table sur Arabel.
00:07Bonsoir, bonsoir à tous. Bienvenue dans Cache sur table consacré à un sujet qui dérange autant qu'il interroge l'état de nos prisons.
00:15Chez nous, aujourd'hui, notre pays compte plus de 1400 détenus pour à peine 10 000 places.
00:20Les médias évoquent des cellules surpeuplées, des conditions de vie indignes, des agents pénitentiaires à bout de souffle.
00:26Plus de 500 détenus dormiraient à même le sol, selon certains chiffres.
00:30Et la Cour européenne des droits de l'homme a une nouvelle fois condamné la Belgique pour traitement inubain et dégradant.
00:35Alors, comment on est arrivé là et surtout comment en sortir ?
00:38Et pour en parler ce soir avec nous, Khalil Awasti, député fédéral PS, membre de la commission de justice. Bonsoir.
00:44Bonsoir.
00:45Et avec nous, Mohamed Berchat, président de la CSC pour les prisons bruxelloises et agent pénitentiaire de terrain. Bonsoir.
00:51Bonsoir.
00:51Alors, je tiens aussi que le MR était invité. Philippe Goffin et notamment Youssef Ndichy l'ont pu répondre à notre invitation pour problème d'agenda.
01:00Voilà, c'est dit.
01:00On va commencer, si vous voulez bien, ce soir avec l'état des lieux et aussi les sanctions européennes.
01:06Khalil Awasti, comment est-ce que vous, vous décrirez un petit peu la situation actuelle des prisons belges ?
01:13C'est une catastrophe et malheureusement, en fait, c'est une catastrophe à laquelle on ne souhaite trouver aucun remède puisqu'il n'y a aucun investissement, en fait, dans la recherche de remèdes.
01:23Et donc, c'est vraiment une gangrène et cette gangrène se propage.
01:27Effectivement, il y a la question des condamnations européennes, mais avant même de parler des condamnations européennes, c'est simplement les conditions de vie, en réalité, des détenus, les conditions de travail des agents pénitentiaires et de tout le personnel, en réalité, dans les prisons,
01:40qui sont désastreuses et qui sont indignes de l'Europe occidentale.
01:47Et donc, il faut pouvoir le dire ici, lorsque vous dites, il y a 500 personnes qui dorment au sol, c'est un inédit.
01:55Donc, 500 personnes qui dorment au sol, pour nos auditeurs, il faut s'imaginer, si vous prenez des matelas de 2 mètres, c'est comme si, à partir d'ici, vous étalez sur 1 km de longueur, en réalité, des personnes qui dorment par terre.
02:07Il y a aujourd'hui 1 km d'êtres humains qui dorment par terre, en Belgique.
02:13Et la situation, malheureusement, ne fait qu'empirer de jour en jour, puisque là où on prétendait qu'il y avait certains remèdes qui devaient être prodigués, depuis des mois, il n'y a absolument rien qui va mieux.
02:28La population carcérale ne fait qu'augmenter, le nombre de personnes qui dorment au sol ne fait qu'augmenter, la situation sanitaire dans les prisons ne fait que s'aggraver.
02:37Les bâtiments, en fait, ne font que se détériorer.
02:41Et donc, effectivement, ça, c'est aujourd'hui l'image objective, même pas catastrophiste, objective de nos prisons en Belgique.
02:48Alors, on va développer tout ça dans quelques instants, point par point.
02:51Je me tourne vers vous, Mohamed Berchat.
02:53Vous êtes chaque jour sur le terrain.
02:55À quoi ressemble, disons, une journée type dans une prison bruxelloise, aujourd'hui, en 2025 ?
03:00Je vais parler pour un run.
03:03On ne sait pas comment elle va commencer la journée.
03:05Parce qu'on dépend du nombre de personnes, du personnel qui sera présent.
03:09Donc, en fonction de ce qui est présent, on peut donner ou pas donner.
03:13Et voilà.
03:14Et alors, on a aussi une population qui est assez diversifiée, puisqu'on a des femmes, des internés.
03:19C'est une catastrophe, les internés.
03:20Parce qu'il n'y a pas d'endroits pour les placer.
03:24Il n'y a pas de structure adaptée pour eux.
03:25Qu'est-ce qu'on fait ? On les met en prison.
03:26Et c'est une population qui est fragilisée, qui a des séquelles psychiatriques.
03:33On est des agents appuyant danser, on n'est pas formés pour ça.
03:35Et alors, le taux d'accident de travail, elle est en nette augmentation, elle est explosive.
03:41Et tous les jours, on doit faire face à, notamment à ces matelas.
03:46Pour un run, ce sera inédit, puisqu'on va commencer à les avoir.
03:49Mais ailleurs, on part par centaines, on ne part pas par dizaines.
03:52C'est une centaine de bonshommes qui sont par terre, couchés, parfois à trois.
03:56Donc voilà, c'est une journée type.
04:00On ne sait jamais comment elle va commencer, on ne sait jamais comment elle va terminer.
04:03Et on ne sait pas dans quel état on va sortir.
04:05Voilà un peu l'état des lieux.
04:06Khalil Awastier, est-ce qu'on peut parler d'une crise structurelle ou d'un simple manque de place finalement ?
04:11Non, c'est une crise systémique.
04:12C'est une crise systémique qui a plusieurs facteurs.
04:15Alors, je pense que le premier facteur, c'est de considérer, de continuer à considérer que la prison est la seule sanction possible.
04:25C'est probablement qu'on en discutera, mais il faut pouvoir réfléchir effectivement.
04:30Est-ce que des internés ont leur place en prison ?
04:32Non, et ce n'est pas juste nous qui le disons.
04:33C'est aussi des juridictions internationales, c'est des personnes qui doivent être soignées.
04:37Toute une série de personnes condamnées ont-elles leur place en prison ?
04:40À mon sens, non. Elles doivent être aussi soignées.
04:42Je parle notamment des personnes qui souffrent d'addiction.
04:45Et dont on sait en réalité que la prison, ça n'est que mettre des gens dans une cellule, jeter la clé, les mettre entre parenthèses pendant X temps,
04:53et puis les faire sortir dans un monde qu'ils comprennent encore moins et qui va encore aggraver leur système d'addiction.
04:59Et donc, il y a cela.
05:00Et puis, il y a la volonté de ne pas investir dans quelque chose qui est perçu.
05:05Il faut pouvoir se le dire aussi entre nous, malheureusement dans la population,
05:08comme le fait de, s'ils sont là, c'est qu'ils l'ont un peu mérité,
05:11et que par conséquent, s'ils l'ont un peu mérité, ça ne doit pas être non plus,
05:15je prends, ce n'est pas mon expression, mais je la reprends, ça ne doit pas être le Club Med.
05:19Or, je rappelle toujours à toutes et tous que la prison, c'est une privation de liberté, effectivement,
05:25mais ça n'est pas la privation des autres droits, et notamment de la dignité.
05:28Justement, la population, la surpopulation a atteint un record historique.
05:35Comment expliquer une telle dérive ?
05:37Vous avez parlé de manque d'intérêt, manque d'investissement.
05:40Oui, il y a un manque d'intérêt.
05:42Il y a une politique carcérale d'abord,
05:44qui considère que la seule réponse à tous les phénomènes de société, c'est l'emprisonnement.
05:48Donc, c'est une vraie question.
05:51Et il faut pouvoir s'interroger.
05:53D'autres pays ont fait autrement, et ce ne sont pas des pays moins sûrs pour autant.
05:58Prends les Pays-Bas, il n'y a pas si longtemps que cela,
06:00ils ont décidé de réduire considérablement leur capacité carcérale, et ça fonctionne.
06:04Et les Pays-Bas ne sont pas un État moins sûr que la Belgique.
06:08Lorsqu'on emprisonne, on emprisonne très vite, parfois trop vite.
06:12Le nombre de détentions préventives est énorme.
06:15C'est plus de 40, entre 40 et 45% de détenus en Belgique qui ne sont pas encore condamnés,
06:19donc qui sont encore présumés innocents.
06:21Et donc, on enferme préventivement très très très longtemps, voire trop longtemps.
06:26Et puis, effectivement, il y a l'absence d'investissement.
06:30Vous savez, lorsqu'on dit que Saint-Gilles devait fermer le 31 décembre 2024,
06:34elle est toujours ouverte.
06:35Je vous invite à visiter Saint-Gilles.
06:36Il y a de la mer-ulomure, il y a des détenus qui dorment sans fenêtre.
06:39Sans fenêtre, on approche de l'hiver.
06:41Il y a des détenus qui dorment sans fenêtre et qui sont obligés de protéger,
06:44enfin de se protéger du froid avec des cartons et des couvertures.
06:47Et il y a même des agents pénitentiaires qui distribuent des doubles couvertures
06:50par peur d'avoir des détenus morts de froid le matin au réveil.
06:54Il faut s'imaginer ce que c'est.
06:55L'antin s'effondre sur elle-même.
06:57N'importe quel autre bâtiment, ça serait à l'exception d'une prison, on le fermerait.
07:02Tournai, Mons, et on peut les passer en revue,
07:06sont tous des bâtiments qui sont vétustes.
07:08Justement, Mohamed Berchat, votre regard sur ces conditions d'hygiène et d'alimentation,
07:13comment elles sont devenues finalement inacceptables aujourd'hui ?
07:16Je vais rebondir un peu sur ce que M. Oresti avait dit.
07:23En fait, il y avait une volonté politique, c'était de dire, voilà,
07:25toutes les peines doivent être exécutées.
07:27Et donc, quand on parle de catastrophe, c'est une catastrophe annoncée depuis longtemps.
07:32Donc, sur le gouvernement précédent, on a dit, voilà, toutes les peines doivent être exécutées,
07:36et alors, voilà, tout le monde en prison, et on voit un petit peu ce qui se passe.
07:39Donc, tous ceux qui doivent être en bracelet ou attendre un petit peu leur condamnation,
07:43d'abord, ils rentrent en prison et on réfléchit après ce qu'on en fait.
07:46Donc, voilà, et on ne revient pas sur les bâtiments, on a bien souligné ici,
07:52ça va dans tous les sens, ça fait...
07:55On ne parle pas que du bâtiment, il y a l'usible, il y a les rats,
07:58il y a tout ce qui va avec, les pigeons, on peut...
08:03Voilà, c'est tout ça aujourd'hui, dans des prisons vétues,
08:07et on doit travailler aussi, c'est des conditions de travail aussi...
08:10Il y a eu les conditions de détention, mais il y a eu les conditions de travail aussi,
08:13et ça va de pair.
08:14Alors, justement, le complexe de Haren, il est présenté comme un nouveau complexe,
08:18censé être moderne, il est déjà saturé, c'est quelque part un échec de ce modèle ?
08:24Oui, clairement.
08:25En fait, c'est présenté comme un village, mais en fait, c'est tous des blocs isolés des uns des autres.
08:30Si on a voulu séparer des détenus et du personnel, c'est le meilleur système qu'on a pu mettre en place.
08:34On ne se connaît pas, chacun s'organise en fonction du bâtiment où il est,
08:39mais on est séparé de tout.
08:41Donc, les condamnés, des prévenus, des internés, chacun est mis, je veux dire, séparément,
08:45et le personnel est mis, je veux dire, aussi séparément.
08:48Donc, si on a voulu se mettre, je veux dire, des étrangers entre personnel et détenus,
08:54on a réussi de ce côté-là.
08:56C'est une catastrophe, Aaron, depuis toujours.
08:58Tout le monde le dénonce, la structure, c'est trop grand.
09:01C'est beaucoup trop grand pour assumer tout ce qu'il faut faire pour garantir la sécurité, entre autres,
09:07et puis tout ce qui va avec, la formation, la réassertion, l'éducation, tout ce qu'on a.
09:10On y reviendra dans quelques instants, Raleigh Laouastie.
09:13Un nouveau complexe qui n'a de nom que de nouveau ?
09:16Mais Aaron, oui, c'est une prison neuve, à part que les critiques n'ont pas tardé à se faire jour.
09:22C'est-à-dire que c'était une prison, déjà, il faut pouvoir le rappeler, qui avait eu pour vocation de faire fermer et Forêt et Saint-Gilles.
09:30Or, qu'est-ce que l'on constate ?
09:32C'est que Forêt est fermée parce qu'elle était insalubre,
09:34mais que Saint-Gilles est malheureusement toujours ouverte alors qu'elle était insalubre,
09:38et que Berkendal, qui était l'ancienne prison pour femmes, a été transformée en maison de détention.
09:42Et donc, en fait, on a fermé, en réalité, un établissement sur trois.
09:45Et on a ouvert Aaron, qui est un maxi-complexe.
09:48Les conditions de vie à Aaron sont aussi, et c'est paradoxal, alors même que Saint-Gilles et Vétus,
09:55les conditions de vie à Aaron sont vécues plus durement par les détenus et par le personnel pénitentiaire,
10:00en réalité, que par exemple à Saint-Gilles, où, comme M. Berchal a indiqué,
10:06il n'y a plus cette collectivité, cette proximité, et cette empathie, en réalité,
10:12pour des personnes qui sont dans le même bateau.
10:14Et donc, la question qui se pose aussi, c'est de savoir quel modèle carcéral on veut.
10:18Moi, j'ai toujours plaidé pour des mini-unités de détention,
10:22donc notamment, par exemple, ce qu'on appelle les maisons de détention,
10:25mais ça peut être des mini-prisons,
10:27parce que je reste persuadé que si on construit des établissements de 60 à 100 places maximum,
10:33on sait faire un vrai travail social et un vrai travail de réinsertion,
10:36et un vrai travail de proximité.
10:38Lorsqu'on est dans un établissement pénitentiaire qui compte plus de 1 000 détenus,
10:44c'est impossible de mener ce travail de proximité.
10:47C'est impossible de mener ce travail de réinsertion.
10:49Et à nouveau, je le dis, sans cela, c'est malheureusement, en fait,
10:54la porte vers la récidive assurée.
10:55Donc, on dépense beaucoup d'argent, énormément d'argent,
10:59pour enfermer les gens pendant un certain temps,
11:02qui est le temps de la peine,
11:03pour ne absolument pas travailler à la réinsertion,
11:06et pour ne pas, finalement, en tirer un bénéfice pour la société,
11:09à savoir avoir une société plus sûre après,
11:11puisque la récidive est quasiment garantie à la sortie.
11:14Mohamed Berchard, comment vos collègues agents
11:18vivent-ils cette situation de tension permanente ?
11:20Est-ce qu'on peut garantir la sécurité,
11:23tant des détenus que du personnel,
11:25dans ces conditions de surpopulation, finalement ?
11:27Non, on ne s'est pas assuré, c'est impossible d'assurer ça.
11:30À partir du moment où vous impose quelqu'un...
11:32Déjà, pour les condamnés, déjà.
11:33Les condamnés, c'est un autre système,
11:36c'est une autre façon de fonctionner.
11:37Donc, c'est des gens qui connaissent leur pain,
11:40qui sont en attente de pain,
11:41qui connaissent leur dossier,
11:42qui préparent leur sortie, en fait.
11:43Si déjà, vous leur collez encore une autre personne,
11:47dans une cellule qui n'est pas prévue pour,
11:50avec les tensions qui vont avec,
11:52c'est ingérable.
11:53Donc, tous les jours, on doit gérer la frustration des uns et des autres,
11:59le manque de personnel, parfois le manque de...
12:01La sécurité, n'en parlons pas.
12:03Si vous êtes en vente sous-effectif,
12:04vous répondez un petit peu...
12:07Et ça dépend des outils informatiques, caméras, etc.
12:11Souvent, les interventions sont multipliées par 10, par 12.
12:15Tous les jours, il y a des interventions.
12:16Parce qu'il faut calmer l'un, parce qu'il faut calmer l'autre,
12:18parce qu'il y a des bagarres,
12:20parce que les prios, les pronades sont surpeuplés,
12:22parce qu'il y a une cinquantaine de détenus qui se promènent là,
12:24qui a la moindre tension,
12:25parce qu'il y a aussi, il faut le dire aussi,
12:27les largages.
12:29Et il ne faut pas oublier que c'est...
12:30Les largages.
12:31Les largages.
12:31De l'extérieur, on envoie...
12:34Oui, d'accord.
12:35Quelles que soient des substances stupéfiantes ou autres.
12:38Et il ne faut pas oublier non plus que...
12:40Il y a aussi, je veux dire,
12:42dans les prisons,
12:45c'est comme à l'extérieur,
12:46il y a un marché.
12:47Il y a des gens qui profitent de la détresse,
12:50il y a des trafics de stupéfiants,
12:51de téléphonie, de tout ce qu'on veut.
12:53Et il y a...
12:54Dès qu'il y a une demande et une offre,
12:57des gens se font de l'argent en prison.
12:59Ils s'adaptent.
13:00Ah, c'est...
13:00Il ne faut pas croire que certains se font plus
13:02à l'intérieur de la prison que à l'extérieur.
13:04Et donc, c'est aussi un fléau
13:07qu'on doit combattre tous les jours.
13:09Parce que la téléphonie, c'est quelque chose que...
13:12C'est vraiment un fléau chez nous.
13:13Et ailleurs, toutes les prisons,
13:15et les stupéfiants, n'en parlons pas.
13:17C'est quelque chose qu'on essaye d'engliger,
13:19mais qui est très problématique dans les prisons.
13:21Oui, Mohamed Berchat, je rappelle que vous êtes président
13:23de la CSE pour les prisons bruxelloises.
13:25Est-ce que, justement, les syndicats et les ONG
13:28collaborent suffisamment
13:29pour essayer de leur côté
13:31de faire un petit peu la situation,
13:33ou bien chacun travaille de son côté un petit peu ?
13:35Non, on crie tous la même chose depuis longtemps.
13:37Ce n'est pas nouveau,
13:39que ce soit les syndics,
13:40que ce soit les autres organisations,
13:43que ce soit les personnes,
13:46ou les avocats, ou la magistrature,
13:48qui disent que c'est des conditions
13:49qui sont complètement...
13:51Juste à Rennes, on a construit
13:53un tribunal sur place.
13:56Ça a coûté, je ne sais pas combien de millions d'euros,
13:59et il n'y a personne qui vient.
14:00Aucun magistrat, depuis le début,
14:01n'a dit qu'il ne voulait y aller.
14:03Et donc, c'est un bâtiment qui est là,
14:05vide, abandonné,
14:06un peu les travaux inutiles.
14:08Mais ça a coûté de l'argent, tout ça.
14:10Il y a un bâtiment à l'extérieur qui est là,
14:12qui peut accueillir 64 places,
14:13et aussi abandonné.
14:14Quand on nous pose la question,
14:16on nous dit, oui, mais ce bâtiment-là
14:17peut accueillir une centaine de personnes,
14:18mais il ne peut être occupé
14:21que par des dossiers qui peuvent...
14:23Enfin, c'est des dossiers...
14:24Et ça ne concerne qu'une vingtaine de personnes
14:25dans tout Bruxelles.
14:27Donc voilà, on a construit cette prison
14:29en disant, voilà, ça va être la panacée
14:30des établissements pénitentiaires.
14:33C'est un trou sans fin.
14:34Et encore, on s'en parlait
14:35comme c'est un partenariat public-privé.
14:38Donc, voilà.
14:39Votre réaction, Khalil Awosti,
14:41ce tribunal sur place, notamment ?
14:43Mais, moi, ce que je dis,
14:44vous savez, moi, je tire mon chapeau
14:45aux agents pénitentiaires,
14:47parce qu'en réalité,
14:48ils vivent dans des conditions
14:50et ils travaillent dans des conditions
14:51qui sont terribles.
14:53Et ils sont conscients, en réalité,
14:55que leur sécurité, notamment,
14:58en fait, dépend aussi
14:59du bien-être des détenus.
15:00Plus ça se passe de manière pacifique
15:02en prison,
15:03plus tout va se passer,
15:04en se compris pour eux.
15:05Et malgré ça,
15:06on sait qu'il y a des agressions,
15:08on sait que c'est un métier
15:09qui n'est pas facile.
15:10Je prends un exemple,
15:11il faut pouvoir se le dire.
15:14De l'émoire,
15:14M. Berchat me corrigera éventuellement.
15:16Je pense que le solde,
15:17en fait,
15:18de jours de congé
15:19des agents pénitentiaires
15:20pour la Belgique,
15:20c'est plus de 700 000 jours.
15:23700 000 jours,
15:24simplement pour donner
15:25un comparatif,
15:26si vous divisez ça
15:27par 365,
15:28parce qu'en prison,
15:29on travaille 365 jours par an,
15:31c'est comme si, au fait,
15:32il y avait 1900 agents pénitentiaires
15:34qui prenaient tous congés
15:35pendant un an entier.
15:37C'est pour vous dire,
15:38en réalité,
15:39le dévouement
15:40des agents pénitentiaires.
15:41C'est-à-dire que c'est l'équivalent
15:42de quasiment 2000 agents
15:44qui pourraient prendre congé
15:45pendant une année entière
15:46pour rattraper ce solde.
15:48Et donc,
15:49on ne convienne pas encore
15:50les surcharger,
15:51parce qu'effectivement,
15:52s'il y a ces jours-là,
15:53c'est parce qu'ils doivent
15:54compenser les absences,
15:55ils doivent compenser
15:56les collègues malades,
15:57ils doivent compenser
15:58les collègues agressés,
15:59ils doivent compenser,
16:00en réalité,
16:01en heures supplémentaires,
16:02toute une série de choses
16:03lorsqu'ils font des missions
16:04qui ne sont pas les leurs,
16:05comme, par exemple,
16:06devoir accompagner
16:07des détenus à l'hôpital
16:08parce que les détenus
16:10doivent pouvoir être hospitalisés,
16:11parce que la police
16:12ne remplit pas son rôle
16:13et que c'est les agents pénitentiaires
16:14à les accompagner.
16:17Et donc,
16:17oui,
16:18il y a effectivement,
16:19je pense,
16:20une conscience
16:20chez les agents pénitentiaires
16:22et chez tous les acteurs,
16:23les acteurs internes
16:24et les acteurs externes,
16:25puisqu'il y a pas mal
16:26d'associations,
16:27etc.,
16:27qui entrent en prison
16:28pour essayer de faire du travail,
16:29que plus tout est apaisé,
16:31plus les détenus vont bien,
16:33en réalité,
16:34mentalement,
16:35physiquement et ainsi de suite,
16:37mieux ça va se passer
16:38pour tout le monde.
16:39Je pense qu'il y a
16:40cette conscience collective
16:41et heureusement.
16:42Mais après,
16:43on ne peut pas demander
16:44l'impossible aux travailleurs.
16:46Ils sont là,
16:47ils doivent être respectés
16:48dans leur travail,
16:48ils ont des missions légales
16:50et on doit pouvoir
16:51les respecter pour ça.
16:52Aujourd'hui,
16:52je n'ai pas l'impression
16:53que c'est le cas.
16:53Voilà,
16:54on va marquer une courte pause
16:55et on se retrouve juste après
16:56pour notre entretien.
17:0119h-20h,
17:02Casse sur table
17:03sur Arabelle.
17:05Et on retrouve nos invités
17:07ce soir,
17:07Khalil Awasti,
17:08député fédéral PS,
17:09membre de la commission justice
17:11et Mohamed Berchat,
17:12président de la CSC
17:13pour les prisons bruxelloises
17:14et agent pénitentiaire de terrain.
17:16Khalil Awasti,
17:17comment décrivez-vous
17:19la situation actuelle
17:20dans les prisons belges
17:21et surtout,
17:22quelle est la position
17:23de votre parti,
17:24le parti socialiste,
17:25sur cette surpopulation carcérale ?
17:27La position,
17:28elle est catastrophique,
17:29je l'ai dit,
17:30il y a un manque
17:31d'infrastructures de qualité,
17:32il y a une surpopulation carcérale
17:34qui est liée à des choix politiques,
17:36il y a un désinvestissement
17:38dans le cœur finalement
17:40du système que sont l'humain
17:42et les agents pénitentiaires.
17:45Et donc,
17:45notre position,
17:46c'est,
17:46en fait,
17:46il faut d'abord en revenir
17:47à une situation normale.
17:49Je pense qu'il y a 11 000 places
17:50aujourd'hui
17:51qui sont au maximum,
17:52qui sont prévues
17:53dans notre pays.
17:54il faut en revenir
17:54à une situation
17:55où on n'enferme pas
17:56plus de personnes
17:57que l'on a de places.
17:58Et donc,
17:59je pense que c'est possible
18:00en fonction des choix politiques
18:02qui sont réalisés.
18:03Premièrement,
18:04parce qu'il faut absolument
18:05trouver une urgence à cela.
18:07Deuxième chose,
18:09si on doit muter
18:10et on doit faire,
18:11je pense,
18:11un stop
18:12à la construction
18:13de nouvelles places,
18:14je n'ai pas de soucis
18:15à dire,
18:16à envisager
18:17la conversion de places,
18:18à se dire,
18:19à un moment donné,
18:19les vieilles prisons
18:20sont remplacées
18:21par des nouveaux établissements
18:23de plus petite taille,
18:24entre 60 et 100 places maximum,
18:27qui permettent
18:27de faire un vrai travail,
18:29un vrai travail social,
18:30un vrai travail de proximité,
18:31un vrai travail de réinsertion,
18:33pour que la peine,
18:34en réalité,
18:35qui devrait avoir aussi,
18:36qui a une fonction punitive,
18:38mais doit aussi avoir
18:38une fonction vertueuse
18:40et pédagogique
18:40qui doit permettre
18:41la réinsertion,
18:42parce que l'objectif,
18:43au final,
18:44c'est de faire en sorte
18:44que les personnes
18:45sortent améliorées de là
18:47et sortent
18:48pour se réinsérer
18:49dans la société,
18:49pour que la peine
18:50est une vertu.
18:51Et donc,
18:52il faut arrêter
18:53de construire,
18:54surtout pas construire
18:55à l'étranger,
18:56comme on peut l'entendre,
18:58et dire à un moment donné
18:59stop,
19:00on limite aux capacités maximales
19:01et on convertit
19:02avec des petites unités
19:03d'établissement.
19:04Il faudrait repenser
19:05la manière dont on se sanctionne,
19:06selon vous, alors ?
19:07Mais la manière
19:08dont on se sanctionne
19:09est en partie déjà repensée,
19:11donc on va avoir
19:12un nouveau code pénal
19:13qui va entrer en vigueur
19:14en avril 2026,
19:15ça a été un vrai travail,
19:17et il y a vraiment
19:18un changement de paradigme
19:19dans ce code pénal,
19:20puisque avant,
19:21ce qu'on appelait
19:22les peines alternatives,
19:24par exemple,
19:25le sursis probatoire,
19:26la probation,
19:28la peine de travail autonome
19:29et ainsi de suite,
19:29deviennent en réalité
19:31des peines principales.
19:32Et c'est l'emprisonnement
19:33qui devient en fait
19:34la peine alternative
19:35dans la philosophie
19:36de se dire
19:37l'emprisonnement
19:38doit être
19:38l'ultime remède
19:40et on doit faire en sorte
19:41comment on offre au juge
19:43un panel de sanctions
19:45suffisamment large
19:46que pour faire en sorte
19:48qu'il utilise la sanction
19:49la plus appropriée,
19:51ça peut être
19:51une peine d'amende,
19:52ça peut être
19:52une peine de travail,
19:53ça peut être
19:53une peine de probation,
19:55ça peut être
19:55une peine de traitement
19:56à l'avenir,
19:57notamment pour des personnes
19:57qui souffrent d'addiction,
19:59une peine de traitement
20:00et qui permet en fait
20:02de faire en sorte
20:03un,
20:04qu'on n'enferme pas
20:05parce que l'enfermement
20:05coûte cher à la société
20:07avec pas beaucoup
20:08de résultats
20:08et deux,
20:09qu'on choisisse
20:11une sanction adaptée
20:12qui permette
20:12une réinsertion optimale.
20:14Oui,
20:14on parlait en off tout à l'heure
20:15et il y a aussi
20:16des moyens
20:17de faire des économies
20:18en envoyant tout ça.
20:20Oui,
20:20il y a moyen
20:20de faire des économies,
20:21vous savez aujourd'hui
20:22un détenu coûte
20:24entre 70 et 75 000 euros
20:26par an
20:27à la collectivité,
20:28un détenu,
20:29il faut s'imaginer
20:29ce que c'est,
20:3070 à 75 000 euros.
20:32Aujourd'hui,
20:32on a une surpopulation
20:34de 2000 détenus,
20:35ce qui veut dire
20:36que cette surpopulation
20:37nous coûte annuellement
20:38150 millions d'euros.
20:40150 millions d'euros
20:41et je ne suis pas certain
20:42que ces 150 millions d'euros
20:44bénéficient
20:45en retour à la société.
20:47Par comparaison,
20:50aujourd'hui,
20:51un agent de probation,
20:52en réalité,
20:53suit à peu près
20:54une quarantaine de personnes
20:55et coûte
20:57à la collectivité
20:58à peu près
20:5975 à 80 000 euros.
21:01Même si on devait
21:02diminuer et diviser
21:03le nombre de personnes
21:04suivies par deux,
21:04c'est-à-dire 20,
21:05le fait de choisir
21:07des peines
21:08qui ne sont pas
21:08la peine d'emprisonnement
21:09en mettant
21:10un professionnel
21:12qui est chargé
21:13d'encadrer,
21:13de guider la personne,
21:15c'est un système
21:16qui serait,
21:16à mon sens,
21:16plus vertueux
21:17et qui coûterait
21:1720 fois moins cher
21:18à la collectivité.
21:20Moën Berchat,
21:21du point de vue
21:22syndical,
21:23en tant que syndicaliste,
21:24quelles sont,
21:25disons,
21:25aujourd'hui,
21:25vos principales
21:26revendications ?
21:27Je pense que ce sont
21:29les mêmes qu'hier,
21:29elles n'ont pas changé
21:30ou ça a évolué
21:32aussi en fonction
21:33de l'évolution
21:33de la situation
21:34des prisons.
21:34Non,
21:35elles n'ont pas évolué,
21:36c'est toujours la même chose,
21:37c'est donner les moyens
21:38de notre travail,
21:39c'est-à-dire en matière
21:40de sécurité
21:41et de personnel.
21:42On ne parle pas
21:42que les agents
21:43pétentiaires,
21:43on parle de tout ici,
21:44que ce soit
21:45les assistants sociaux,
21:46les psychologues,
21:47les psychiatres,
21:48les assistants administratifs,
21:50c'est tout ce personnel-là
21:51qu'on parle.
21:53Souvent,
21:53quand on parle des prisons,
21:54on parle des agents
21:54pétentiaires,
21:55il y a tous ces gens-là
21:56qui ont un rôle
21:56très important aussi
21:57dans le fonctionnement
21:58d'une prison,
21:59et notamment,
21:59il n'y a pas que la surveillance,
22:01mais la gestion des dossiers.
22:02Chez nous,
22:02les assistants sociaux
22:03qui doivent s'occuper
22:04des détenus,
22:05en général,
22:05c'est une gestion
22:06dans d'autres prisons,
22:07c'est une cinquantaine
22:07de dossiers.
22:09Ici,
22:09ils sont en double,
22:11c'est 90 dossiers,
22:12voire 100 dossiers,
22:12ils sont à bout,
22:13ils sont fatigués,
22:14ils sont crevés,
22:16et on tire sur la corde,
22:18on n'arrête pas
22:19d'alerter l'administration
22:20pour donner des moyens
22:21en personnel
22:22pour gérer ces dossiers-là,
22:23parce que le détenu,
22:24lui,
22:24qu'est-ce qu'il veut ?
22:25En fait,
22:25le détenu,
22:26ce n'est pas son problème,
22:27le manque de personnel.
22:27Lui,
22:27ce qui l'intéresse,
22:28c'est qu'il y a un suivi
22:29de son dossier,
22:30quand il demande
22:30une permission de sortie,
22:32un permis de congé,
22:33quand il doit aller à la commune
22:34arranger ses papiers,
22:35mais si déjà,
22:36il y a plein de choses
22:39que le détenu doit préparer,
22:40mais c'est par manque de personnel
22:41ou parce que
22:42l'assurance sociale
22:44ou le greffe
22:46n'a pas géré son dossier,
22:47il s'est reporté encore
22:48de deux ou trois mois.
22:49Donc,
22:49c'est de la frustration.
22:50Ça aussi,
22:51ça n'a pas de la frustration.
22:52Donc,
22:52le détenu,
22:53lui,
22:54il a un programme.
22:55Il connaît encore mieux
22:55les règlements
22:57et sa situation personnelle.
22:59Il sait que
22:59s'il dépasse ces délais-là,
23:01c'est reporté,
23:02etc.
23:03Et donc,
23:03ça amène de la frustration.
23:04S'il doit rencontrer un employeur
23:06et qu'il n'a pas son congé,
23:07c'est fini,
23:08c'est terminé.
23:08Ou qu'il s'y rate
23:09une formation
23:10ou un rendez-vous
23:10pour une formation,
23:12c'est fini,
23:12c'est reporté
23:12encore une fois
23:14au calendrier.
23:14Il y a des personnels
23:16qui sont importants,
23:17notamment,
23:18que ce soit pour les infirmiers
23:19ou que ce soit
23:19pour les administratifs,
23:21c'est un groupe de personnes
23:22qui sont oubliées
23:23parce que c'est des petits groupes
23:24et on pense que,
23:25bon,
23:25finalement,
23:26si l'hocéan n'est pas géré
23:28maintenant,
23:29il sera géré plus tard.
23:30Mais le détenu,
23:30il n'est pas dans cette attente-là.
23:32Et cette frustration-là,
23:34la première personne
23:35qu'il voit,
23:36c'est la chemise bleue,
23:38sa frustration,
23:38sa colère,
23:39c'est envers nous
23:40que je n'ai pas vu le directeur,
23:41je n'ai pas vu mon assistance sociale,
23:43je n'ai pas vu...
23:43Ou on aime mon dossier,
23:45et donc tout ça,
23:46on est des éponges,
23:47mais à un certain moment,
23:47cette éponge-là,
23:48elle ne prend plus rien,
23:49et alors il y a un ras-le-bol collectif
23:52et on ne sait pas
23:53de quelle manière,
23:54par des grèves,
23:55on voit que ça ne marche pas,
23:57ou par des...
23:58On essaie de dialoguer
23:59même dans les concertations,
24:01oui, oui, oui,
24:01mais même les directeurs de prison,
24:02ils sont démunis.
24:05Dernièrement,
24:05ils ont fait des actions
24:06pour alerter le politique,
24:09etc.
24:10Même nous,
24:10même le premier,
24:11ce n'est pas que
24:12la ministre de la Justice,
24:12même le premier ministre,
24:13on essaie de...
24:14qui prend son dossier
24:15à bras-le-corps
24:16parce qu'ici,
24:16on est en souffrance partout
24:18et ce système-là va,
24:20tôt ou tard,
24:20va casser.
24:21Si on ne prend pas
24:21l'initiative maintenant,
24:23ça va s'écrouler de partout.
24:24Alors justement,
24:25vous parlez de la frustration
24:26des détenus,
24:27est-ce qu'il y a risque
24:27de craindre une explosion
24:29de violence aussi,
24:30quelque part ?
24:32La violence,
24:34enfin,
24:35dernièrement,
24:35on a vu ça à Lantin
24:36et ailleurs,
24:37à un certain moment,
24:38il ne faut pas...
24:39Il y a aussi,
24:40non seulement de la détresse,
24:41mais il y a des gens
24:42qui se suicident en prison.
24:44Il y a des gens
24:45qui,
24:46par détresse,
24:47par désespérance,
24:48parce qu'ils ne vivent pas
24:51dans un environnement
24:51où une prise en charge
24:52suffisante,
24:53il ne faut pas non plus
24:54mettre juste une pancarte
24:54pour dire,
24:55voilà,
24:55il est suicidaire.
24:56OK,
24:56on est bien avec ça.
24:57L'agent dit,
24:58OK,
24:58on va le revoir
24:59tous les quarts d'heure,
25:00tous les 20 minutes,
25:00on va aller voir
25:00si le bonhomme,
25:02ça va,
25:02il respire encore.
25:03Mais ce n'est pas ça.
25:04Enfin,
25:04il y a une prise en charge.
25:05Il y a,
25:06comme dans la société,
25:07à l'extérieur,
25:07comme à l'intérieur,
25:08il y a des gens
25:09qui psychologiquement
25:10sont très fragiles
25:11où la seule manière
25:13de s'exprimer,
25:14c'est tout casser,
25:15brûler,
25:16foutre le feu à leur matelas.
25:17Il y a eu des morts par ça.
25:18René a eu des décès
25:19par rapport à ça.
25:21Et quand on sait,
25:22il n'y a pas que par les coups,
25:23par la violence,
25:23il y a aussi par,
25:25ils sont violents eux-mêmes.
25:26Donc ils se coupent,
25:27ils se,
25:27voilà,
25:27et c'est des appels au secours.
25:29Bon,
25:29mais ça,
25:29c'est par un ou deux,
25:30c'est multiplié par combien
25:31dans toutes les prisons belges ?
25:32Voilà,
25:33c'est un témoignage assez fort.
25:34Votre réaction,
25:35Khalil Awasti,
25:36face à la détresse des détenus
25:38et à la saturation du personnel.
25:40Mais,
25:40vous savez,
25:41moi j'entends,
25:42et c'est dans le quotidien,
25:43c'est-à-dire que moi je comprends,
25:45vous savez,
25:45moi je visite des prisons.
25:47Il y a des prisons
25:47où on dit que parce qu'il n'y a pas suffisamment
25:49d'agents pénitentiaires,
25:51ils en sont réduits
25:51à deux douches par semaine.
25:53Deux douches par semaine.
25:55Imaginez,
25:55donc on vit
25:56dans de la surpopulation,
25:58dans des conditions désastreuses
25:59en termes de salubrité,
26:01et on limite
26:02les détenus
26:02à deux douches par semaine
26:03et parfois même ces deux douches,
26:04ils n'y ont pas droit
26:05parce qu'il manque du personnel
26:07et qu'ils n'arrivent pas à les sortir
26:08et donc ça se réduit
26:08à une douche par semaine.
26:10C'est-à-dire,
26:10comment voulez-vous
26:11qu'on soit serein ?
26:12Comme M. Berchat le dit,
26:14quand vous êtes dans un cycle
26:16en réalité de réinsertion,
26:18vous demandez un congé pénitentiaire
26:19parce que,
26:20en fait,
26:20vous savez que pour votre dossier
26:23et pour vous-même d'ailleurs,
26:24il faut trouver un emploi,
26:26il faut trouver une formation professionnelle,
26:27que vous faites des pieds et des mains
26:28déjà depuis l'intérieur,
26:30c'est pas facile
26:30parce qu'en fait,
26:32il faut soit avoir de la famille,
26:33soit avoir des moyens
26:35pour avoir finalement
26:36des professionnels
26:37comme des avocats
26:37qui font le travail pour vous.
26:39C'est pas simple
26:40de déjà effectuer cette démarche
26:42depuis l'intérieur d'une prison.
26:44Vous avez des rendez-vous
26:44avec un employeur,
26:45vous avez des rendez-vous
26:46pour une formation professionnelle,
26:47pour un cycle
26:48et ainsi de suite
26:49et parce que le personnel,
26:50il ne le fait pas exprès,
26:51mais parce que le personnel
26:52est saturé,
26:53il ne sait pas prendre la décision
26:54dans les temps
26:55et vous ratez
26:55votre opportunité de réinsertion.
26:57Pire encore,
26:58pire encore,
26:59des détenus
27:00qui sont en fin de peine
27:02et qui ont le droit de sortir
27:03et qui sont détenus
27:04plus longtemps en réalité
27:06alors qu'ils se disent
27:07mais c'est pas normal,
27:07on m'a dit que je devais sortir
27:08tel jour.
27:10C'est arrivé
27:10et ça arrive encore
27:11que des détenus
27:12restent en prison
27:13encore plusieurs jours
27:14et en fait,
27:16ils doivent faire
27:16des pieds et des mains
27:17et puis parfois,
27:18effectivement,
27:18ça devient malheureusement
27:19un peu violent
27:20pour que leur dossier
27:21soit pris en considération,
27:22qu'on le revoit
27:23et qu'on se rend compte
27:23effectivement que ce détenu
27:24devait sortir
27:25il y a trois jours,
27:26il y a quatre jours,
27:26il y a cinq jours
27:27en réalité de prison
27:28et donc,
27:29ils font des jours
27:30supplémentaires de détention
27:31alors qu'ils devraient être libres
27:33parce qu'ils sont arrivés
27:34à fin de peine
27:34et ça,
27:35c'est la réalité quotidienne.
27:37Alors,
27:37Raleigh Laouestil,
27:38la Belgique a été condamnée
27:39à plusieurs reprises
27:40par la Cour européenne.
27:42Est-ce qu'il y a finalement
27:43des conséquences concrètes
27:45ou c'est toujours sans suite
27:46ce genre de décision ?
27:47Non,
27:47apparemment pas.
27:48Donc,
27:48on a effectivement été condamnés
27:50à plusieurs reprises.
27:51Je dois aussi rappeler
27:52qu'il y a,
27:54au-delà des condamnations
27:55par les juridictions européennes,
27:57il y a aussi d'autres choses
27:58qui sont assez symboliques.
27:59C'est-à-dire qu'il y a,
28:00par exemple,
28:00des mécanismes
28:01à travers
28:02les mandats d'arrêt européens
28:04pour,
28:05en fait,
28:05faire que les Belges
28:07qui sont condamnés
28:07dans d'autres pays européens
28:09viennent purger leur peine
28:10en Belgique.
28:11Il faut savoir
28:12qu'il y a des juridictions nationales
28:13d'autres pays
28:14en fait,
28:15qui révoquent
28:16ces décisions-là
28:17au motif que
28:18les conditions de détention
28:19sont indignes
28:20et sont constitutives
28:21de traitements inhumains
28:22et dégradants en Belgique.
28:23Et donc,
28:23il y a des décisions
28:24d'autres pays
28:25qui refusent que des Belges
28:26puissent être rapatriés
28:27dans les prisons en Belgique
28:28parce que les conditions
28:29s'assimilent
28:30à un traitement inhumain
28:31et dégradant.
28:31Et donc ça,
28:32c'est aujourd'hui
28:33la photographie
28:34qu'on a
28:34au niveau européen
28:36et au niveau international
28:37de notre système carcéral.
28:38Je ne suis pas sûr
28:39que ce soit finalement
28:40une belle carte de visite.
28:41Et chez nous,
28:42en ces temps de crise
28:43et des mesures Arizona,
28:45pourquoi l'avenir
28:46des prisons
28:47ne semble pas être,
28:48disons,
28:48en priorité sur l'agenda ?
28:50Parce que je pense
28:51qu'en fait,
28:51il n'y a pas de volonté politique
28:53que de faire de ce dossier
28:54une priorité.
28:57La question,
28:58on entre,
28:58il ne faut pas se le cacher,
29:00dans une ère
29:01où les populismes
29:02sont de plus en plus importants,
29:03où la post-vérité
29:05est malheureusement quotidienne,
29:07et où la question
29:08de la dignité humaine
29:10et des droits humains
29:11en général
29:12n'est plus une question,
29:14malheureusement,
29:14qui est centrale
29:15dans le débat de société.
29:16On oppose.
29:18On oppose les uns aux autres.
29:19Et ici,
29:20et en l'occurrence,
29:21on prend en considération
29:22le fait que si des personnes
29:24ont été condamnées,
29:26c'est qu'elles ont fait
29:26quelque chose de réempréhensible,
29:28certes,
29:28et donc elles sont condamnées.
29:30Mais à nouveau,
29:30je répète,
29:31être privé de liberté,
29:32ça n'est pas être privé de dignité.
29:34Et je pense que ça doit être
29:34même un dossier
29:36sur lequel on doit se pencher
29:37en priorité.
29:38Parce que les droits humains
29:39et la dignité humaine
29:40sont fondamentaux.
29:42Et si on commence,
29:43finalement,
29:44à brader ces principes
29:45et ces valeurs-là,
29:46on va commencer par les prisons,
29:48et puis progressivement,
29:49on va aller vers
29:49d'autres segments de la société.
29:51Votre sentiment,
29:52Mohamed Barcha,
29:53sur notre gouvernement
29:54qui ne semble pas
29:55prendre à bras-le-corps
29:56et mettre à l'agenda
29:57ce dossier des prisons ?
29:59Oui, je suis tout à fait d'accord.
30:00Je rejoins tout à fait
30:00ce que dit ce Ouesti.
30:02Ici,
30:03je veux dire,
30:05c'est dédié aux citoyens
30:08où on les voit vous en prison.
30:10Et c'est l'endroit
30:11où ils méritent d'aller.
30:12Vous êtes responsable
30:13de vos actes,
30:14vous avez été en gant l'année,
30:16vous devez purger.
30:17Donc,
30:17à partir du moment
30:18où on tient un discours
30:19en disant,
30:20quelle que soit la peine
30:21pour laquelle vous avez été condamné,
30:22vous devez faire de la prison,
30:23que ce soit en un an,
30:27deux ans,
30:27trois ans.
30:28En fait,
30:28c'est une communication
30:30pour les citoyens
30:31en disant,
30:32ne vous inquiétez pas,
30:33tout acte répréhensible
30:34sera poursuivi,
30:35condamné.
30:36Mais il faut avoir
30:37les moyens de sa politique aussi.
30:38Il faut dire,
30:39oui,
30:39je les mets en prison,
30:40OK,
30:40pas de souci.
30:41OK,
30:42on a sonné,
30:43il y a des règles,
30:44il y a des lois,
30:44pas de problème.
30:45À certains moments,
30:46il faut donner aussi
30:46les moyens de sa politique également.
30:48On ne peut pas dire,
30:48bon,
30:48voilà,
30:49plus de com',
30:50je viens à Rennes,
30:51je coupe le cordon,
30:52je fais des photos
30:53et c'est bon,
30:55j'ai mon petit nom
30:56de ministre de la Justice
30:57qui a ouvert...
30:58Enfin,
30:58c'est ça qu'il y a eu.
30:59Et puis,
31:00voilà.
31:00Et puis,
31:01on dit que...
31:02Et c'est annoncé,
31:03on nous dit,
31:03on ne va pas savoir tenir ça,
31:05ce genre de programme
31:07de mettre tout le monde
31:07en prison,
31:08etc.
31:08Et puis,
31:09voilà,
31:09on arrive deux ans,
31:10trois ans plus tard,
31:11à une catastrophe annoncée.
31:12Et maintenant,
31:13comment faire ?
31:14Comment faire ?
31:15Justement,
31:15on en parle dans quelques instants
31:17après notre dernière pause.
31:18A tout de suite.
31:20Casse sur table
31:21sur Arabel.
31:23Et on retrouve
31:24nos deux invités
31:25pour la troisième
31:25et dernière partie
31:26de Casse sur table.
31:27Khalil Awesti,
31:29est-ce que le futur
31:30du système carcéral belge
31:32passe par la construction,
31:33vous avez dit non tout à l'heure,
31:34la réinsertion
31:35ou encore une révolution
31:36du modèle fondamentalement ?
31:38Moi,
31:38je suis un optimiste
31:39donc je pense que ça passe
31:40par les trois en réalité.
31:41Il faut d'abord,
31:42en fait,
31:42réformer la pensée.
31:44Il faut habituer,
31:45en fait,
31:46aussi,
31:46il faut,
31:47je pense,
31:47faire confiance
31:48à l'intelligence des gens
31:49et les habituer
31:50à ce qu'une sanction pénale,
31:53ça ne veut pas dire
31:53automatiquement un emprisonnement.
31:55Ça peut être plein d'autres choses
31:56et ça doit être
31:57plein d'autres choses.
31:59D'abord,
32:00qui doit permettre,
32:01en réalité,
32:02de mieux adapter la sanction
32:04et de mieux réinsérer,
32:06de mieux sensibiliser
32:07au comportement délinquant,
32:09de mieux faire prendre conscience,
32:10finalement,
32:11l'auteur du comportement délinquant,
32:13criminel,
32:14de son comportement,
32:16des problèmes qu'il a engendrés,
32:18de la manière dont il doit réparer
32:19et de la manière dont il doit se réinsérer.
32:21Un.
32:21Deux,
32:23je pense que ça passe par un stop,
32:25un moratoire,
32:26en réalité,
32:27de la construction de nouvelles places.
32:28On est à 11 000 places en Belgique,
32:31c'est suffisant,
32:32c'est proportionnellement plus
32:33que chez nos collègues aux Pays-Bas,
32:36je pense que c'est même proportionnellement plus
32:37que chez nos collègues en France,
32:39qui n'ont pourtant pas un système carcéral
32:41par 10 000 habitants.
32:43Un.
32:44Et deux,
32:44il faut surtout veiller
32:46à ce que les vieilles prisons soient fermées
32:48et remplacer,
32:50si on est dans un mécanisme de substitution,
32:52non pas par des maxi-prisons,
32:54mais par des petites unités
32:56qui permettent de faire un vrai travail
32:57avec les détenus.
32:58Alors,
32:59quelle place,
32:59justement,
32:59donner à la prévention de la récidive
33:02dans les politiques publiques ?
33:04Mais le problème,
33:05c'est qu'aujourd'hui,
33:05il n'y en a aucune.
33:07Aujourd'hui,
33:07en fait,
33:07tout le monde parle de récidive
33:09et tout le monde parle de prévention de la récidive,
33:12mais aujourd'hui,
33:12la prison,
33:13c'est une école de la criminalité.
33:15Ce n'est rien d'autre que cela,
33:17malheureusement.
33:18C'est pour ça que je dis,
33:18on fait rentrer
33:19des petits délinquants
33:22dans une fabrique à criminels
33:24et donc,
33:24on les fait rentrer
33:25pour une période
33:26de un mois
33:27à trois ans maximum
33:28et ils se confrontent
33:29à de la grande criminalité
33:30et là où c'était
33:31de la petite délinquance,
33:32en fait,
33:33on les fait rentrer
33:33dans l'école,
33:34dans une fabrique à criminels.
33:35C'est complètement absurde.
33:37Je pense qu'il y a autre chose à faire.
33:39Un,
33:40et de deux,
33:40à nouveau,
33:41je le dis,
33:42vous savez,
33:42la prison,
33:43ça ne peut pas simplement
33:44être une parenthèse
33:45où on met,
33:46en fait,
33:47le temps sur pause,
33:48on dit aux gens,
33:49toute la société évolue,
33:51toute,
33:51autour de nous,
33:52la société évolue.
33:53Et en fait,
33:54les gens restent
33:55dans un moment,
33:57en fait,
33:58ce qui est le moment
33:58dans lequel ils sont rentrés
33:59en prison.
34:00Et puis,
34:00lorsqu'ils en sortent,
34:01la société a évolué,
34:03ils ne savent plus
34:04à quoi elle ressemble,
34:05ils sont complètement défasés,
34:06ils n'ont pas acquis
34:07une seule compétence supplémentaire
34:09à valoriser,
34:10au contraire,
34:10parce qu'ils ont un trou
34:11sur leur CV,
34:12ils ont un casier judiciaire,
34:15et ainsi de suite,
34:15et ainsi de suite.
34:17Ils n'ont rien acquis,
34:19parce qu'il n'y a pas
34:19de mécanisme de réinsertion,
34:21il faut pouvoir le dire,
34:21il n'y a pas de politique
34:22de réinsertion en Belgique,
34:23donc ils n'ont acquis
34:24aucune nouvelle compétence
34:25à valoriser,
34:26et on leur dit,
34:27allez-y.
34:29Pour les plus chanceux,
34:30ils ont de la famille
34:30qui peut les accueillir,
34:31pour les autres,
34:32ils n'ont pas de logement,
34:33ils n'ont pas de travail,
34:34ils n'ont absolument rien,
34:35et on leur dit,
34:35allez-y,
34:36et surtout,
34:36réinsérez-vous.
34:38Je pense que pour ceux
34:39qui arrivent,
34:40très sincèrement,
34:41c'est de l'ordre du miracle,
34:43et donc aujourd'hui,
34:43ce qu'il faut faire,
34:44c'est tout autre chose.
34:45C'est pour ça que je parlais
34:46d'accompagnement,
34:47d'investir dans l'accompagnement,
34:49d'investir dans une réelle insertion,
34:51et de se dire que
34:51cet accompagnement
34:52et cette réinsertion
34:53doivent se faire
34:54en dehors des murs d'une prison.
34:56Justement,
34:56Mourette Berchat,
34:57est-ce que les agents
34:57sont formés pour accompagner
34:59les détenus
35:00vers cette réinsertion possible ?
35:03Nous, on a un accompagnement
35:04de terrain,
35:05on n'a pas un accompagnement
35:06pour les accompagner
35:07dans la démarche
35:08qu'ils font à l'extérieur.
35:10Je rejoins tout à fait
35:11ce que dit M. Ovesti.
35:12Dans les prisons,
35:13il n'y a pas de formation
35:13qualifiante.
35:15Quand ils sortent
35:16pour demander un emploi,
35:17le premier,
35:17le trou qu'il y a,
35:18c'est, tiens,
35:19pendant cette période-là
35:19où vous étiez,
35:20et dès que vous avez
35:20accueilli judiciaire,
35:21c'est fini,
35:22c'est terminé.
35:24En fait,
35:25le rôle,
35:25il n'y a même pas
35:26ni le forum,
35:27ni l'orbème,
35:27il n'y a rien en prison.
35:29En fait,
35:29il y a tout des,
35:31je pense que,
35:32tout des,
35:32comment je vais dire ça,
35:36à l'extérieur
35:37des accompagnements
35:37qui peuvent se faire
35:39pour la recherche
35:40d'un emploi,
35:40pour la recherche
35:41d'un logement,
35:44etc.,
35:44mais qui n'existent pas
35:45en prison.
35:45Comment voulez-vous
35:46que quelqu'un cherche
35:47un emploi
35:47s'il se présente
35:48au premier,
35:49et tout le monde
35:49fait la même formation,
35:51c'est ça qui est délirante.
35:52Et à l'extérieur,
35:53on va chez le même
35:54employeur.
35:55C'est le premier
35:56qui trouve quelque chose
35:57et voilà,
35:57moi par chance
35:58j'ai trouvé là
35:58et tout le monde
35:58va par là.
35:59Mais la filière,
35:59elle est tarie,
36:00elle est terminée.
36:00Et la récidive,
36:03c'est vrai,
36:04mais je veux dire déjà
36:05le niveau d'instruction.
36:07Il y en a qui ne savent
36:07ni lire ni écrire.
36:08Ils sont nés en Belgique.
36:10Ce sont des Belges.
36:11Ils ne savent ni lire
36:11ni écrire.
36:12Et quand ils écrivent
36:12quelque chose,
36:13sur un papier
36:14ou une demande,
36:15ils écrivent
36:15d'une manière phonétique.
36:16Moi je vous défie
36:16de comprendre
36:17ce qu'ils disent.
36:18Et parfois même,
36:19heureusement que de temps en temps
36:20ils peuvent passer
36:20par des détenus
36:21qui peuvent écrire pour eux,
36:23mais il y a un inéctrisme
36:24et un...
36:25Mais ce serait hallucinant
36:26de savoir un petit peu
36:27le niveau d'instruction
36:29des détenus.
36:31Et c'est là
36:31que ça me faudrait commencer.
36:32D'abord l'instruction,
36:33remettre à niveau
36:35parce que voilà,
36:36demander un emploi,
36:37savoir se présenter,
36:40savoir écrire,
36:41savoir faire un CV correctement.
36:42Tout ça,
36:43il y a des lacunes
36:43par leur parcours scolaire
36:45qui s'est arrêté très tôt.
36:47Mais c'est un chemin,
36:48mais je veux dire,
36:49je comprends la récidive.
36:50À un certain moment,
36:50quand les obstacles
36:52deviennent de plus en plus
36:53importants,
36:54de plus en plus grands,
36:55à un certain moment,
36:56vous vous retrouvez
36:56dans le même quartier,
36:57vous fréquentez
36:57les mêmes personnes
36:58et vous retombez
36:59dans les mêmes travers.
37:00Justement,
37:01le numérique
37:01et l'éducation
37:02en détention
37:03peuvent devenir
37:04des leviers de changement
37:06et de réinsertion
37:07dans le tissu social.
37:08Est-ce que c'est réalisable,
37:09selon vous ?
37:09Mais ils doivent,
37:10je pense,
37:11je l'ai dit,
37:12et c'est pour ça
37:12que je dis que
37:14plutôt que de privilégier
37:15l'emprisonnement
37:15bête et méchant,
37:17je pense qu'effectivement,
37:18passer en réalité
37:19par des agents de probation,
37:21faire en sorte
37:22que les gens
37:22soient moins incarcérés,
37:24faire en sorte
37:24que des gens
37:25soient suivis
37:25par des professionnels
37:27de la réinsertion,
37:28qu'ils soient adéquatement
37:29redirigés
37:30vers des organismes
37:31d'enseignement,
37:32de formation professionnelle
37:33et ainsi de suite,
37:35et les accompagner
37:36dans ce parcours
37:37pour faire
37:38qu'ils trouvent
37:39une raison
37:39pour se lever le matin,
37:41qu'ils trouvent
37:41une raison
37:42en fait
37:42pour simplement
37:43réparer,
37:44puisqu'il y en a
37:45beaucoup en réalité
37:46qui sont condamnés.
37:47Il faut penser par exemple
37:48aux victimes aussi,
37:49qui sont condamnés
37:50sans un franc.
37:51Il y a des victimes
37:51qui attendent réparation
37:52et qui n'ont rien
37:53pendant des années.
37:54Pour pouvoir réparer,
37:55il faut pouvoir
37:56gagner de l'argent,
37:57il faut pouvoir travailler.
37:58Et donc simplement,
37:59si on veut
37:59que ce cercle vertueux
38:01soit en fait
38:02clos,
38:03à ce moment-là,
38:04il faut permettre aux gens
38:05de gagner leur vie
38:05pour se réinsérer,
38:07pour réparer
38:08et pour aller de l'avant.
38:09Sans quoi,
38:10il reste avec un boulet
38:11qui est le boulet
38:12de l'emprisonnement
38:12et ce boulet
38:14les traîne
38:15vers le fond
38:16et ne fait
38:17que ce que l'on voit
38:18aujourd'hui en Belgique.
38:19Malheureusement,
38:19ça mène à de la récidive.
38:20Il y a aussi la santé mentale
38:23dont on parle peu,
38:24la santé mentale
38:25des détenus
38:25qui est quelque part
38:26un sujet tabou.
38:27Comment on peut
38:28la prendre en charge
38:29correctement ?
38:31Déjà,
38:31si le citoyen normal
38:32a déjà des difficultés
38:34à trouver des centres
38:35pour une aide psychologique,
38:39alors imaginez
38:39pour les détenus.
38:41Les détenus,
38:42pratiquement pas tous,
38:43mais beaucoup de détenus
38:44rentrent abîmés
38:45par la consommation
38:48de stupéfiants,
38:49par autre chose.
38:50Et donc,
38:53voilà,
38:53en fait,
38:53c'est sympa.
38:55La prison sert
38:56à cacher
38:57ces personnes-là
38:57de la société.
38:58Il ne faut pas
38:59qu'ils traînent en rue,
39:00il ne faut pas
39:00qu'ils...
39:00Il ne faut pas les voir.
39:01Voilà,
39:02il ne faut pas les voir,
39:03il faut les cacher.
39:04Et donc,
39:04les endroits
39:04où il faut les cacher,
39:05c'est dans les prisons.
39:06Et parce que,
39:07par lâcheté
39:08ou par manque
39:09ou parce que c'est
39:09une population
39:09pour laquelle on dit
39:10bah,
39:11voilà,
39:11ils sont dans un endroit
39:12où finalement,
39:14ils seront bien suivis,
39:16on leur donnera
39:17à manger,
39:18ils seront au chaud,
39:19ils seront...
39:20ils pourront avoir
39:21une douche tous les jours.
39:22Mais non,
39:22c'est pas ça.
39:23Et en plus,
39:24on n'est pas adapté
39:25pour ce genre de public.
39:27C'est une population
39:27qui doit avoir
39:28un suivi psychiatrique,
39:30avoir un parcours,
39:32je veux dire,
39:33pour revenir
39:34dans un...
39:34en société.
39:36Mais si c'est pour les...
39:36En fait,
39:37en réellement,
39:37on les cache.
39:38Et on ne veut pas les voir
39:39et on les met en prison.
39:41Voilà.
39:41Et sans perspective.
39:43Oui.
39:43Vous pensez que
39:44notre société
39:45n'est pas prête
39:46à considérer
39:46de détenus
39:47comme un citoyen
39:48en reconstruction,
39:49finalement ?
39:50Mais je pense que c'est
39:51en fait l'inverse.
39:52C'est-à-dire que
39:52notre société
39:53attend du détenu
39:54qu'il soit un citoyen
39:55en reconstruction,
39:56mais que l'État
39:57ne fait rien
39:57pour faire en sorte
39:59que ce détenu
40:00soit un citoyen
40:00en reconstruction.
40:02Je pense que
40:02tout le monde,
40:03en réalité...
40:04Alors,
40:04je peux entendre
40:05les victimes,
40:06les familles de victimes,
40:07etc.,
40:08qui considèrent
40:08que la sanction
40:09est importante.
40:10Mais il y a aussi
40:11beaucoup de victimes
40:12et des familles de victimes
40:13qui considèrent
40:13que la sanction
40:14est importante,
40:14mais qui veulent aussi
40:15éviter que la personne
40:16qui les a rendues
40:17en fait victimes
40:18ou familles de victimes
40:19ne recommence
40:21après finalement
40:22l'exécution
40:23de cette section.
40:24Parce que sans quoi,
40:25en fait,
40:26il y aura d'autres victimes.
40:28Et donc,
40:28ils n'attendent pas de cela.
40:29Et donc,
40:29il faut pour cela
40:30sanctionner,
40:32certes,
40:32réparer,
40:33je vous l'ai dit,
40:33les victimes
40:34dans ce qu'elles sont,
40:35mais il faut aussi
40:36réparer les détenus.
40:38En fait,
40:39il y a toute une série
40:40de détenus
40:41qui sont malheureusement
40:42aujourd'hui
40:42inaptes à la société.
40:43et c'est pour ça
40:45qu'ils ont commis
40:45des infractions.
40:46Et donc,
40:47il faut les rendre
40:48aptes à la vie
40:49en société
40:50et leur donner
40:51en réalité
40:52les moyens
40:52de pouvoir
40:53se réinsérer.
40:55Malheureusement,
40:55ça ne se fait
40:56dans toute une série
40:57de situations,
40:58pas seul.
40:59Alors,
41:00on a aussi,
41:01avant de nous quitter,
41:02d'autres questions,
41:03deux, trois,
41:03avant de nous quitter
41:04ce soir.
41:05Est-ce que
41:06vous imaginez
41:07des priorités
41:08qu'il faudrait mettre
41:08en avant ?
41:09Allez,
41:09on prend une date 2030
41:10pour sortir de la crise
41:12et si vous avez
41:12des priorités
41:13à prendre,
41:14lesquels seraient-ce ?
41:15Je l'ai dit,
41:16donc,
41:16faire un moratoire
41:17sur la construction
41:18de prison.
41:20Les prisons,
41:20plus on les construit,
41:21plus on les remplit
41:22et jamais on ne les ferme.
41:24Donc ça,
41:24et Saint-Gilles
41:25en est la meilleure preuve.
41:26C'est la première chose.
41:28Deuxième chose,
41:29c'est le plus vite possible,
41:30en fait,
41:30convertir les maxi centres
41:32de détention
41:32qui sont aujourd'hui
41:34vétus
41:34en petites unités
41:35pour réinsérer.
41:37Et trois,
41:38libérer très rapidement
41:39et avoir une autre politique
41:40pénitentiaire,
41:41que ce soit en matière
41:41de détention préventive
41:42ou en termes de condamnation,
41:44on en ferme trop tôt,
41:45trop vite
41:46et trop longtemps.
41:47Moën Berchat,
41:48qu'est-ce serait d'après vous
41:49la priorité
41:50ou les priorités
41:51des priorités
41:51pour mettre en oeuvre
41:52pour essayer
41:53de sortir de la crise
41:54ou du moins
41:55atténuer cette crise ?
41:57Je pense que c'est
41:58au législateur
41:59de la prison,
42:01on est les acteurs
42:01de la dernière chaîne
42:02de la justice,
42:03donc c'est au législateur
42:04de réfléchir
42:05à améliorer
42:06ou à revoir
42:08les conditions de détention,
42:09à revoir certaines règles
42:10comme la préventive
42:12en Belgique,
42:12mais je veux dire
42:13après 8, 9, 10 mois
42:14de préventive,
42:15ça n'existe une part ailleurs.
42:17Donc vous êtes condamné
42:18pour des petits faits,
42:19vous êtes presque
42:20à la fin de votre peine
42:20quand vous êtes condamné
42:21pour certains,
42:22pour les délits moyens.
42:24Et ici,
42:25par l'acheter,
42:26les maisons de détention
42:28au début,
42:31c'était pour les gens
42:31qui étaient de moins de 3 ans,
42:33maintenant,
42:33pour faire des places,
42:34on fait de moins de 5 ans.
42:36Et on retrouve même
42:36des gens avec des dossiers lourds
42:37qui se retrouvent
42:38dans des maisons de détention
42:39et qui récidivent
42:41parce qu'il n'y a pas
42:41d'accompagnement,
42:43parce que c'est...
42:44Les maisons de détention,
42:45c'est une bonne idée,
42:46mais mal gérée,
42:47mal pensée.
42:48Il y a les mauvais acteurs
42:49qui occupent le terrain.
42:50Voilà,
42:51c'est des agents pénétentiaires.
42:52Si c'est pour les accompagner
42:53au foot et au cinéma,
42:55l'objectif est raté.
42:56Ce qu'il faut,
42:57c'est un accompagnement sérieux.
42:58C'est-à-dire que,
42:59bien que s'ils disent
43:00qu'on va rechercher un emploi,
43:01il faut être sûr
43:01qu'ils recherchent un emploi.
43:03Si on dit qu'ils cherchent
43:03un logement,
43:04il faut être sûr
43:04qu'ils cherchent un logement.
43:05Des preuves de recherche,
43:07etc.
43:07Mais s'il n'y a personne
43:08qui est derrière ça
43:09et qu'on sert
43:10de ces maisons de détention,
43:12c'est des petites unités,
43:13comme...
43:14s'ils le souhaitent
43:15et on est tout à fait d'accord
43:16là-dessus.
43:16Mais si c'est pour dire,
43:18voilà,
43:18bon,
43:18ils sont en fin de peine
43:19ou pour les petites peines,
43:20on va les mettre là.
43:21Mais que derrière ça,
43:22il n'y a pas de suivi
43:23si on laisse à eux-mêmes.
43:25Et puis on ne sait pas,
43:25bon,
43:26oui,
43:26j'ai trouvé un emploi.
43:27Oui,
43:27c'est bien possible.
43:29Mais en général,
43:29c'est quoi ?
43:30S'il a de la chance
43:31de trouver un petit contrat
43:31d'intérimaire,
43:32il le montre.
43:33Ah oui,
43:33j'ai trouvé un petit contrat
43:33d'intérimaire.
43:34Ah ok,
43:35ok,
43:35on voit qu'il fait des efforts,
43:36etc.
43:36Et puis ça s'arrête là.
43:38Et donc,
43:38je pense qu'il y a
43:41beaucoup de choses
43:42à réfléchir.
43:42La détention
43:43n'est plus une solution
43:44pour mettre des gens
43:45pendant 8 ou 9 mois
43:47de préventif.
43:48Je pense qu'il y a
43:48d'autres moyens
43:51de faire.
43:53Il ne faut pas oublier
43:53non plus qu'il y a
43:54de la pauvreté.
43:55C'est des gens pauvres
43:55les détenus.
43:56Pour certains,
43:57il faut s'imaginer
43:58que la grosse majorité,
43:59leur seul moyen
44:00de pouvoir acheter
44:01dans les prisons,
44:02c'est travailler.
44:03Et à Aaron,
44:04on est arrivé
44:05à ce que le travail
44:07soit partagé.
44:08C'est-à-dire que
44:09pour que tout le monde
44:10puisse avoir
44:10un petit peu de sous,
44:12on partage le travail.
44:13On est en 2025
44:15et on est là
44:16à partager le travail
44:17pour 95 de l'heure.
44:18À 7 euros par jour.
44:197 euros par jour.
44:20Une dernière question
44:21avant de quitter.
44:21Le temps passe très vite.
44:23Ali Lawasti,
44:24si vous avez un message
44:25à faire passer
44:26notamment
44:27au ministre de la Justice,
44:29notre ministre de la Justice,
44:30quel serait-il ?
44:31Avoir une vision
44:32et vider les prisons.
44:33Je pense que
44:34ça servira
44:35à tout le monde
44:36puisque je pense
44:37sincèrement
44:37qu'on peut en revenir
44:38à 11 000 détenus
44:39sans causer
44:40de problèmes
44:41d'insécurité
44:41en Belgique.
44:43Ça servira
44:43à les détenus,
44:44ça servira
44:45à le système,
44:46ça servira
44:46à l'ensemble
44:47des travailleuses
44:47et des travailleurs
44:48dans les prisons.
44:50Ça soulagera
44:50tout le monde
44:51et ça permettra
44:52d'en revenir
44:53à un fondamental,
44:55c'est-à-dire
44:55une politique pénale
44:57qui soit au moins digne.
44:58Ça, c'est important.
44:59Mohamed Verchat,
45:00si vous avez un message
45:01à adresser
45:02à notre ministre
45:02de la Justice ?
45:03Ça va être simple,
45:04il faut être à la hauteur
45:05de la fonction,
45:05ce qui n'est pas le cas.
45:07On a le costume
45:08mais il faut savoir
45:08rentrer dedans.
45:09Et pour l'instant,
45:10je ne vois rien
45:11ou aucune initiative
45:12qui montre
45:13qu'elle s'intéresse
45:14à ce qui se passe
45:15dans les états
45:15plus loin pénitentiaires,
45:17sauf les sorties
45:18comme le Kosovo
45:19et ailleurs,
45:20qui a nuqué une tête.
45:22Il faut être à la hauteur
45:23de la fonction,
45:24il faut rentrer
45:25dans le costume
45:25et il faut se battre
45:27pour son département
45:28parce que la justice
45:29est un plus important
45:30de la démocratie
45:31et pour l'instant,
45:32elle est dans le commun.
45:34Voilà, des messages
45:34francs et massifs
45:36de Mohamed Barcha,
45:37président de la CSC
45:39pour les prisons bruxelloises
45:40et agent pénitentiaire
45:41de terrain également avec nous,
45:42Khalil Awasti,
45:43député fédéral PS,
45:44membre de la commission
45:45de justice.
45:46Merci messieurs
45:47pour vos éclairages.
45:48Merci.
45:49Et c'est ainsi
45:49que l'on referme
45:50à notre édition
45:52de Casse sur Table.
45:53Une excellente soirée.
45:54Elle écoute nos programmes.
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