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  • il y a 6 semaines
Dès les années 1950, de grands ensembles sortent de terre en un temps record. Les cinéastes qui n'ont jamais cessé de filmer les quartiers populaires s'y rendent pour explorer ce phénomène nouveau. Malheureusement, les utopies sociales de mixité et de vivre ensemble s'effondrent rapidement et le cinéma ne manque pas d'en être le reflet. En 1995, La Haine devient une référence et fixe les codes d'un genre désormais identifié : le film de banlieue. Les réalisateurs continueront alors d'être le relai de ce qui se passe dans ces territoires abandonnés par les gouvernements successifs. Violence, exclusion, racisme, sont autant de thèmes qui transcrivent le mal-être grandissant des banlieues. Malgré la dureté apparente de ce genre, la solidarité, l'entraide, la cohésion sont autant de valeurs mises en avant pour montrer l'esprit de collectivité de ces milieux. Et au travers de tous ces films, ce sont les débats politiques et sociétaux qui surgissent pour les spectateurs, relayés ensuite par les médias. L'occasion de pousser les politiques à ne plus dire : Jusqu'ici... tout va bien. Année de Production :

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00:00Générique
00:30Exactement là où nous nous trouvons, dans ce qu'il reste de l'usine lumière dont sont sortis les premiers personnages de l'histoire du cinématographe, c'était à l'époque la banlieue de Lyon.
00:53C'était la partie assez lointaine, c'est là qu'on repoussait les ateliers, les usines, évidemment qui n'étaient pas en centre-ville.
01:04Le cinéma lui d'emblée, et grâce aux lumières aussi, va représenter le peuple et le peuple des couronnes, des banlieues et le peuple des travailleurs.
01:14Tous les studios de cinéma, puisqu'il y avait énormément de films qui étaient tournés en studio, ont été construits autour des grandes villes, là où il y avait de la place.
01:26Donc c'était les studios de Joinville, Méliès s'est installé tout de suite à Montreuil, et donc vraiment en fait la banlieue et le cinéma sont très très liés.
01:37Quand le cinéma évoque la banlieue, elle ne ressemble pas à Neuilly, Auteuil ou La Défense, mais à Sarcelles, La Courneuve ou Vénitieux.
01:48Or ces territoires d'utopie n'ont cessé de se métamorphoser depuis leur création.
01:54Les jupes populaires pleines d'avenir sont devenues le théâtre de drame et de fantasmes de cités livrées aux émeutiers.
02:00Le regard des cinéastes a donc lui aussi évolué au fil des représentations et de l'histoire de ces territoires.
02:11Les films de banlieue au cinéma apparaissent en même temps que la banlieue dans la réalité, c'est-à-dire fin des années 50, début des années 60.
02:18Avant, il y a pas mal de films qui se déroulent dans des quartiers populaires, sauf que se sont montrés comme des quartiers,
02:24ils font partie d'un ensemble et qu'il n'y a pas cette fragmentation entre la grande ville, Paris et ses quartiers.
02:37Les années 50, c'est le début de la construction des grands ensembles pour loger les pieds noirs d'Algérie,
02:43pour loger les immigrés et les ouvriers de Paris.
02:47Et donc, effectivement, pour les cinéastes, filmer la banlieue, c'est filmer un phénomène nouveau.
02:55C'est ces grands ensembles et la vie qu'il va y avoir à l'intérieur.
02:59C'est l'époque de la conquête spatiale, où on a des rêves immenses en termes scientifiques, mais aussi de vie collective.
03:06On arrive dans des immeubles avec de l'eau chaude et les toilettes et avec des utopies sociales de mixité, de vivre ensemble.
03:14Le cinéma suit véritablement la politique qui est engagée, puisque entre 1946 et 1975, je crois qu'il y a plus de 8,5 millions de logements neufs qui sont construits.
03:26Et le cinéma est un véritable reflet de ceci.
03:29On voit pas mal de films dans lesquels on construit des banlieues.
03:32Il y a un film qui est assez emblématique d'ailleurs de tout ça, qui est Rue des Prairies.
03:36Gabin construit des nouveaux logements, ce qui vont devenir les banlieues, où il est ouvrier avec d'autres, etc.
03:43Les grands ensembles à la française, tels qu'ils ont été conçus, qui eux-mêmes sont uniques, je crois, en Europe, par rapport en termes architecturaux, font du cinéma assez unique.
03:59Finalement, quand on regarde bien architecturalement, les cités telles qu'elles existent, il y a quand même une assez grande variété.
04:06Alors peut-être que c'est moi qui vois une variété parce que je suis né dans une banlieue particulière, en l'occurrence la cité des Courtilières,
04:13qui est l'œuvre d'un architecte, d'une cité classée. Il y a béton et béton, en fait. Il y a vraiment des ambiances qui peuvent être très différentes.
04:21Et à ce moment-là, le décor devient un véritable personnage des drames qui vont se dérouler en banlieue.
04:33Le chat de Pierre Gagné de Fer s'ouvre par des images de grues et de bulldozers qui détruisent le vieux Paris.
04:41La banlieue se substitue au Paris des Faubourgs. Le Paris des Faubourgs a toujours été montré au cinéma.
04:56Mais là, explicitement, il y a quelque chose d'un nouveau Paris.
04:59Après les années 50, ce qui va être un tournant, c'est qu'on va passer du film de studio au film vraiment avec la nouvelle vague qui est faite dans la rue.
05:15Là, il va y avoir quelque chose qui va être vraiment différent et va changer les représentations sur la banlieue.
05:23Alors, La millième fenêtre, qui est un film de Robert Menegos, est un film très intéressant,
05:32qui montre pour une des premières fois un grand ensemble en construction et construit.
05:38Et un personnage incarné par Pierre Freinet qui, à la suite de procès qu'il a gagné,
05:43conserve le droit d'avoir son petit pavillon au milieu de ses grands ensembles.
05:46Donc, il y a tous les gens nouvellement arrivants qui voient ça et qui regardent avec un petit peu envieux Pierre Freinet.
05:53C'est un film qui défend les deux thèses dans le côté.
05:55Il défend à la fois « Ah, comme c'était beau tous ces petits jardins ! »
06:00« Ah, qu'est-ce qu'il est important de pouvoir se loger de façon décente ! »
06:05Et la promotion immobilière entraîne des abus. Regardez, voici un pur exemple.
06:22On décide de construire les ZUP dans les années 60 et elles commencent à arriver à la fin des années 60 et début des années 70.
06:30Et là, ça veut dire quoi ? Plus de bidonvilles. Les bidonvilles que jusque dans les années 60, il y avait aux lisières des villes.
06:39La ZUP, les ZUP, moi je n'ai jamais prononcé le mot « cité ». C'est un mot qui arrive plus tard.
06:46Et ma génération ne disait pas « cité », on disait la ZUP, les ZUP.
06:49À Lyon, on en a trois. Il y a les Minguettes, dont je suis originaire, la ZUP de Rieux et la ZUP de Vauvelin qui va faire parler d'elle beaucoup plus tard.
06:58Et le rêve était un rêve urbain, un rêve de vie nouvelle, de mélange des populations.
07:06Dans les années 60, on ne sait pas en fait ce que ça va faire aux gens d'habiter là puisque personne n'a jamais vécu ça.
07:12C'est vraiment nouveau.
07:13Donc la vision de la banlieue va se partager effectivement entre des cinéastes qui vont vraiment essayer de comprendre,
07:20comme Jean-Luc Godard, qu'est-ce que la modernité, le néo-capitalisme.
07:24On critique tout de suite le préfet de la région Île-de-France, Paul Delouvrier, qui a aussi œuvré en Algérie.
07:31Donc lui, il rapproche tout de suite en fait un petit peu une vision néocoloniale de la construction des banlieues
07:38où on va parquer ceux qui nous dérangent.
07:40Dans deux ou trois choses que je sais d'elle, effectivement, c'est nommé en fait la salle de bain, l'eau courante, tout ça.
07:49Mais c'est mis en balance avec tout ce qu'il n'y a pas, surtout.
07:53On est vraiment avec l'avènement des grands centres commerciaux, du zoning.
07:56Donc on habite quelque part, mais finalement, les activités sont ailleurs parce que l'école n'est pas là,
08:02les commerces ne sont pas forcément en bas, il faut prendre sa voiture et puis les lieux de loisirs sont à Paris.
08:07Et donc lui, il va choisir de prendre ce film-là pour essayer de montrer comment la société va créer de nouveaux besoins
08:14avec cette société de consommation.
08:15Et même une femme de classe moyenne avec un mari qui travaille va être amenée à se prostituer.
08:21Effectivement, ça se passe dans la banlieue, mais que Godard utilise pour un thème qui lui est proche,
08:26qui revient, qui est l'absence de communication.
08:28Donc en fait, le décor est utilisé de façon très, très habile pour montrer des gens qui, en fait, effectivement, ne parlent pas entre eux.
08:35Le cinéma a immédiatement accompagné la France des banlieues frappée par la sarcellite.
08:41Des grands ensembles ont poussé en un temps record autour des grandes villes.
08:44Mais la réalité de la vie dans ces barres de béton est venue contredire cette utopie née avec la Vème République.
08:51Et les désillusions des banlieusards ont rapidement été portées à l'écran.
08:55On ne va pas avoir de film en mode réalisme socialiste qui va dire « c'est génial, tout est bien ».
09:04Il va y avoir tout de suite une suspicion sur ces endroits-là.
09:07Dans « Elle court, elle court, la banlieue », par exemple, effectivement, les personnages sont toujours en train de courir après un bus, un métro.
09:16C'est vraiment métro, boulot, dodo.
09:19Et il y a cette course des personnages pour simplement vivre, faire des choses, etc.
09:27Ils entendent les voisins, donc c'est la promiscuité.
09:30Il y a aussi un regard critique, mais qui est plutôt un regard amusé, plus léger, en fait.
09:36Il y a moins de charges politiques dedans, mais ça dénonce certaines choses, en tout cas ça les souligne.
09:42Le couple incarné par Marc Keller et Jacques Higelin, qui vont habiter, qui veulent quitter Paris,
09:49c'est trop cher, c'est trop moche, c'est trop pollué, et tout.
09:53Ils trouvent cet endroit qui, dans un premier temps, leur plaît.
09:55Les copains viennent faire la fête avec eux, puis ils se rendent compte qu'on entend beaucoup Robert Castel,
10:01qui est à l'étage du dessus.
10:02On se rend compte que, de temps à autre, les transports peuvent s'arrêter.
10:05Et petit à petit, le décor va fissurer leur couple, et à la fin, on ne rit plus du tout.
10:12Il y a toute une partie du cinéma qui utilise le décor de la banlieue,
10:17dans des films d'auteurs, ou dans des films de grand public,
10:19pour montrer le caractère triste, la solitude qui accompagne les gens qui sont là-dedans,
10:25le côté déshumanisant.
10:27Et là, il y a quand même énormément de titres qui viennent à l'esprit,
10:31que ce soit Les Valseuses, ou même, comme un film, le film de Michel Audiard,
10:34Le cri du corps morant, le soir au-dessus des jonques.
10:37On en trouvera également des traces dans Buffet froid, une décennie plus tard.
10:42La crise de 1974, la crise pétrolière, avec le chômage, la désindustrialisation.
10:51Ici, à la Courneuve, il y avait tout un tas d'usines.
10:55Quand Godard vient filmer, c'est le plein emploi.
10:57Mais moins de dix ans après, c'est le chômage.
11:03Donc les gens restent dans leur logement,
11:04mais comment ils font pour payer cette électricité qui est très chère,
11:07l'eau qui est très chère, ces grands espaces, comment on les chauffe, etc.
11:12Donc très vite, cette modernité, elle va accueillir des chômeurs aussi,
11:17qui étaient des anciens employés, des anciens ouvriers, etc.
11:20Et donc le cinéma va rendre compte, en fait, de ce déclassement.
11:25Quand on va montrer des personnages comme le théoarien d'Archimède,
11:33le père est ouvrier, il est alcoolique,
11:36et c'est le fils qui est incarné par Kader Boukanev,
11:40qui va le chercher au bistrot pour le ramener à la maison.
11:43Donc voilà, il y a cette souffrance qui est montrée, mais qui est montrée de l'intérieur.
11:48Moi, je découvre ce film, je suis sorti de l'adolescence,
12:03et je me dis, c'est nous, on a vécu ça.
12:06Et le film montre de manière extraordinairement précise
12:09ce qu'était la vie, et de manière assez romanesque.
12:15Médichareff réussit magnifiquement ça.
12:18Ensuite, c'est un film de témoignage, comme fera plus tard Le Gonne du Shabbat,
12:24qui est aussi un film de témoignage sur une période d'ailleurs plus antérieure.
12:29Parce qu'il y a aussi une population d'origine immigrée, d'origine étrangère,
12:38qui a vécu, et parmi elles, évidemment, des gens qui deviennent des artistes.
12:42Je m'appelle Omar E. Génevant.
12:44Je suis née dans un grand hôpital, à France.
12:47Je suis français.
12:50Mon père, il a une petite maison à lui, avec un grand terrain autour.
12:53C'est pour ça qu'il a invité son frère Saïd et des amis.
12:55Les années 80, ça va être le moment où les cinéastes d'origine maghrébine
13:03vont faire leur grande entrée dans le cinéma français.
13:08Avant le cinéma, effectivement, il fallait avoir l'IDEC,
13:12il fallait passer par des écoles reconnues, très prestigieuses,
13:16et inaccessibles pour des autodidactes.
13:18Et là, en fait, Mehdi Charef va présenter ce qui est encore un livre à Constantin Costa-Gavras,
13:25qui lui dit qu'il faut en faire un film.
13:26Parce qu'il y a des gens qui sont du cinéma et qui se disent
13:28qu'on ne peut pas continuer à faire un cinéma de l'entre-soi.
13:32Travail, je veux dire travailler.
13:33Je vais trouver du travail.
13:37C'est bien, mon fils.
13:39Oui, mais il faut être français.
13:40Qui pêche ? Français ?
13:42Moi, c'est français.
13:43Jamais, homie.
13:44Reste-toi, jamais, homie.
13:46Ça va être effectivement l'occasion pour ces cinéastes qui sont issus de l'immigration
13:56de pointer les tensions qui se font jour dans la société française
14:01et l'avènement du Front National.
14:03Ils vont le mettre en scène via leur personnage.
14:07On s'aperçoit déjà qu'il y a un rejet et que c'est à la Courneuve.
14:27Il y a eu des premiers morts où il y a un habitant qui a tiré sur des jeunes
14:33et qui les a tués parce qu'ils faisaient trop de bruit en bas avec les motos.
14:37Il y a tout ça qui crée, avec les rodéos, l'histoire des rodéos,
14:41et c'est là qu'on crée la politique de la ville.
14:42Qu'est-ce qu'on s'emmerde ici ?
14:46Qu'est-ce qu'on s'emmerde ici ?
14:50Vous n'avez qu'à aller faire un tour.
14:51Vous allez chanter ailleurs, les gars.
14:52J'ai des gosses qui dorment, moi.
14:54Oui, je suis là, je suis là, je suis là, je suis là.
14:58Ces films sont vraiment des intermédiaires.
15:00Ça constitue un palier.
15:01Ils sont en rupture avec ce qui précédait,
15:04où on ne parlait que de solitude.
15:06Là, en fait, on dit non, la solitude mène à autre chose
15:09qui est la délinquance, l'ennui.
15:12Ce ne sont pas des films qui chargent,
15:13ce sont des films qui constatent.
15:15Plus tard, il y aura des charges véritables
15:17contre la police, contre les trafics,
15:20contre les gangs, contre les services publics
15:22qui ne font pas leur boulot, des choses comme ça.
15:24Là, c'est vraiment un point de vue documenté
15:27sur des expériences que ces metteurs en scène ont vues.
15:29Et j'y vois quand même un lien,
15:31puisque ces films datent du début des années 80,
15:34et ça coïncide à peu près avec les premières émeutes
15:37qui se déclenchent à Vénitieux,
15:38qui datent à peu près de ce moment-là.
15:40J'ai passé ma belle jeunesse à la CAF.
15:43Ça veut dire caisse d'allocation familiale.
15:46C'est pour les enfants qui ont des problèmes de famille,
15:49comme moi.
15:50La réputation de la CAF
15:52est une réputation de voyous,
15:55de voleurs et de bandits.
15:57Mais moi, je crois que c'est seulement
15:58des garçons malheureux
16:00à coup de leurs parents, comme moi.
16:02Dans pas mal de films,
16:03l'école va être assez critiquée,
16:06puisqu'elle est perçue dans les films
16:10comme De Bruit de Führer,
16:12ou bien comme...
16:14Surtout dans le plus beau métier du monde,
16:16avec Gérard Depardieu,
16:17comme un endroit où, en fait,
16:19on n'arrive pas à tenir les élèves,
16:25que ça se dégrade,
16:26et que l'école est un peu montrée
16:27comme l'endroit où il y a une reproduction sociale
16:30qui est opérée
16:31et qui produit de la casse sociale, en fait.
16:34Ces films commencent également
16:35à poser la question
16:36de la confrontation des différentes cultures.
16:39Ce sera beaucoup plus affirmé
16:40quelques années plus tard.
16:42Et ces films-là,
16:43c'est une espèce de parenthèse
16:44entre le film de banlieue
16:46tel qu'il va se développer
16:46dans les années 90
16:47et les films d'interrogation
16:50des années 70.
16:57Il montrait qu'une politique
17:00engagée dans les années 40, 50
17:04et interrompue au milieu des années 70
17:08continue à produire des effets
17:09tels que celui-ci d'exclusion
17:11d'une partie de la population
17:12et bien évidemment un acte politique,
17:14quelle que soit la façon dont on le montre,
17:16que ce soit en rigolant,
17:17que ce soit en pleurant,
17:18en râlant ou en émouvant.
17:21Jusqu'en 1995,
17:24les films ont témoigné
17:25de la vie en banlieue.
17:27Avec la haine,
17:28le cinéma change de registre.
17:29Mathieu Kassovitz
17:31apporte un regard neuf
17:32de l'intérieur de ses territoires.
17:34De là à parler
17:35d'un nouveau genre cinématographique.
17:39Mon premier contact
17:40avec le film de Mathieu Kassovitz,
17:42la haine,
17:43c'est une claque cinématographique.
17:46C'est-à-dire, je vois...
17:47C'est bizarre à dire,
17:49j'étais gamin quand je l'ai vu.
17:50Je vois du cinéma
17:51quand ils éteignent la tour Eiffel
17:54où il y a le plan Trans-Trav,
17:55où on fait un travelling avant
17:56et un zoom arrière.
17:57Donc je me dis,
17:58putain, ouais, c'est génial.
18:00Je vois qu'il y a des idées de fous.
18:02Et je vois qu'il y a une émotion.
18:03C'est-à-dire que je...
18:04J'ai mal, je pleure.
18:06À la fin, j'ai peur.
18:07Je souris, je rigole.
18:09Je vois un film de cinéma
18:10avec des gens qui me ressemblent.
18:12Je me dis, putain,
18:13il y a un mec qui parle comme nous.
18:15C'est l'histoire d'un homme
18:16qui tombe d'un immeuble de 50 étages.
18:18Le mec, au fur et à mesure de sa chute,
18:21il se répète sans cesse pour se rassurer.
18:24Jusqu'ici, tout va bien.
18:26Jusqu'ici, tout va bien.
18:28Jusqu'ici, tout va bien.
18:30Mais l'important, c'est pas la chute.
18:33C'est l'atterrissage.
18:35Le noir et blanc renforcent encore
18:36la présence, je trouve, de la cité
18:39qui est filmée comme rarement
18:41on avait filmé des grands ensembles
18:42avec des mouvements de caméra au-dessus d'elle
18:44ou des endroits qu'on ne voyait pas,
18:47les toits des immeubles.
18:51Il y a beaucoup de trouvailles.
18:52Il y a une BO très, très forte,
18:54très originale avec les rappeurs du moment
18:56et qui sont aussi engagés
18:59dans le mouvement rap,
19:00dans le mouvement antiraciste.
19:08Il y a l'influence, effectivement,
19:10du cinéma français,
19:11du cinéma américain
19:13dans ce qu'il a de meilleur
19:14par sa rapidité,
19:15par sa fluidité du moment.
19:17C'est un moment que tu parles comme ça,
19:19mec !
19:20Le théorème d'Archimède
19:25avait eu le prix Jean Vigo,
19:27Les Princes, un succès d'estime,
19:29Hexagone aussi, un succès d'estime.
19:31Mais la haine,
19:33Mathieu Kassovitz monte les marches
19:35avec Vincent Cassel,
19:36avec Hubert Koundé,
19:37avec Saïd Tagmawi
19:38et c'est un film-événement.
19:39Lequel film sortait de nulle part
19:42dans le cinéma français
19:45et le génie de Kassovitz
19:47est de faire un film grand public,
19:49de faire émerger, évidemment,
19:50une génération de tout,
19:52d'acteurs, de techniciens,
19:53de plein de choses.
19:55Mais, soudainement,
19:56de scénariser ça
19:58d'une façon grand public,
20:00ce qui fait que,
20:01quand sort Les Misérables,
20:02l'agilie aussi,
20:05parce que Mathieu Kassovitz
20:07est lié à toute cette école
20:09et ce territoire court-tragemé,
20:12mais, tout à coup,
20:15le film référence
20:16pour cette génération-là,
20:17c'est la haine.
20:19Pour la première fois,
20:20dans la haine,
20:21il y a un véritable sentiment
20:22de collectivité,
20:23un sentiment de solidarité.
20:25C'est des gens,
20:26c'est des populations
20:26qui ont des choses en commun
20:28et qui veulent les partager.
20:30Moi, j'en ai plein de cul
20:30de super ce putain de système
20:31tous les jours comme un connard.
20:33On est là,
20:33on vit dans des trois rats
20:34comme des merdes et quoi.
20:34Qu'est-ce que tu fais quelque chose,
20:35toi, pour changer quelque chose ?
20:37Tu ne bouges pas ton cul,
20:37toi non plus ?
20:38Au-delà de l'image
20:39qu'il a donnée des banlieues
20:40pour tout le monde,
20:42c'est de voir qu'encore aujourd'hui,
20:46les jeunes de Cité
20:47s'identifient à ce film.
20:50La question,
20:51ce n'est pas tant de savoir
20:52quelle est sa véracité.
20:55Je pense qu'aucun film
20:56naturaliste
20:57n'aurait réussi
21:00la même chose
21:01d'une certaine manière.
21:02Ce qui est puissant
21:03dans le film,
21:03c'est sa vérité.
21:04C'est là où il a réussi
21:07pas son coup,
21:09mais son film.
21:10Ce film-là,
21:11personne,
21:12même personne
21:13ne peut toucher à la haine.
21:18Film de banlieue
21:19ou film sur la banlieue,
21:21peu importe.
21:23Le film manifeste
21:24de Kassovitz
21:25a ouvert la voie
21:26à d'autres.
21:28Héritier conscient
21:28ou pas de la haine,
21:30ces cinéastes
21:31explorent d'autres facettes
21:32de ce qu'on appelle
21:33désormais
21:34les cités.
21:35Ce qu'on voit
21:42d'entrée de jeu
21:43quand on arrive
21:43de l'extérieur
21:44dans une cité,
21:45c'est des tours,
21:47des bars
21:47et du béton.
21:49En fait,
21:49non.
21:50qu'il s'agissait
22:03pour moi
22:03après de faire,
22:04c'était vraiment
22:04de rentrer
22:05par contre
22:05dans ce monde-là.
22:07traiter d'une question
22:16qui me taraudait,
22:17qui était très personnelle,
22:18très intime.
22:19Ce n'était pas
22:20une autobiographie,
22:21c'était en partie
22:23évidemment un film
22:24inspiré de tout ce que
22:26j'avais connu,
22:27vu, etc.,
22:28mais aussi entendu,
22:30etc.
22:30mais c'est à partir
22:32du moment
22:33où justement
22:33j'ai voulu
22:34en faire un film,
22:36comment là,
22:36à ce moment-là,
22:37c'est poser la question
22:37et effectivement
22:38de savoir
22:39quel choix artistique faire,
22:41c'est-à-dire
22:41comment filmer
22:42la banlieue
22:42sachant qu'elle a déjà
22:44été filmée,
22:45qu'elle sera encore filmée
22:46et qu'elle allait
22:48être mes choix esthétiques
22:49et surtout
22:50pour un premier film.
22:51C'est bon,
22:52tout simple,
22:52t'es exclu.
22:54Tu n'as rien à faire là,
22:54tu ressors s'il te plaît.
22:55Attends,
22:56comment tu me parles là ?
22:57Je suis chez moi ici là,
22:58à tous mes potes là.
22:59Alors que ça n'a pas commencé.
23:01Qui fait la loi,
23:02voilà.
23:02Ça, c'est quelque chose
23:03qui m'a intéressé,
23:04mais dans un microcosme
23:06qui est celui
23:06des adolescents.
23:09Bon, maintenant,
23:10tu sors,
23:10sinon on appelle la police.
23:12Putain,
23:12mais je m'en bats les couilles,
23:12la police !
23:13Qu'est-ce qu'on me fait ?
23:14Hein ?
23:15C'est vrai qu'en cité,
23:17on passe un peu plus vite
23:18à l'acte,
23:19on transgresse plus facilement
23:21les règles,
23:22les lois,
23:23etc.
23:23Parce que de fait,
23:24on est déjà sur un territoire
23:26d'exclusion.
23:29Il est temps de dire stop !
23:40Stop à la haine !
23:41Vous allez me l'arrêter,
23:42cette marche.
23:46Je salue la France
23:47de toutes les couleurs !
23:49Le point de départ de la marche
23:51n'est pas la banlieue.
23:52Le point de départ de la marche,
23:53c'est une bavure policière
23:55et c'est une balle
23:56qui a failli tuer
23:58un jeune français.
24:02To me, Jaïja !
24:03Mohamed !
24:04Après, tu butes ?
24:08Mais c'est pour toi,
24:08c'est pour te venger, Mohamed !
24:09D'accord, tu veux me venger.
24:10Tu veux habiter
24:11tous les racistes de France.
24:12S'il faut, ouais.
24:12Bah, t'as du boulot.
24:13Ces personnages sont à l'opposé
24:16des clichés
24:18qu'on a pu entendre,
24:21voir à la presse,
24:23dans les sujets
24:23ou dans d'autres films.
24:24C'est-à-dire,
24:24c'est des personnes
24:26qui sont victimes
24:26d'une bavure policière
24:28et qui décident de répondre
24:29par la non-violence.
24:30Et c'est ça, moi,
24:31c'est le point de départ
24:32qui m'intéresse.
24:33C'est-à-dire que c'est pas une émeute
24:34qui va suivre
24:35cette violence policière.
24:37C'est un seating
24:38devant un commissariat
24:39et quand le mec se réveille,
24:42il décide d'organiser
24:44une marche
24:47inspirée par un film de cinéma
24:50qui est Gandhi,
24:52qui est réalisé par Attenborough.
24:54Donc c'est le cinéma
24:55qui les inspire.
24:56Martin Luther King l'a fait.
24:58Gandhi l'a fait.
24:59C'est une marche
24:59contre le racisme
25:00et pour l'égalité.
25:01Et moi, ça a été
25:02une revendication,
25:03c'est chiant de le dire,
25:04politique,
25:05de ne pas arriver
25:06dans du sensationnel
25:08pour ne pas trahir.
25:09Ces mecs sont vivants.
25:10Ils ont été trahis
25:11pendant 30 ans.
25:13Vous imaginez
25:13si je faisais un film
25:14To Me
25:15et je lui dis
25:16« Ouais, tu sais quoi,
25:17on va partir. »
25:17À un moment donné,
25:18tu prends un lance-flamme
25:19et tu brûles un village.
25:20Parce que t'es énervé,
25:21t'as reçu une balle.
25:23Ouais, j'aurais pu.
25:25Non.
25:26Non.
25:26Non.
25:36Gagarine, c'est une cité
25:40qui a été plantée
25:41au bord du RERC.
25:43On peut passer,
25:44si on habite dans le coin
25:45plusieurs fois par jour,
25:46vraiment,
25:47sous cette immense barre
25:49de briques rouges
25:49sans se poser une seule fois
25:51la question de son histoire
25:52ou de ce qui va se passer
25:53dans le futur.
25:54Je pense qu'on a voulu mettre
25:55de la lumière
25:56et une lumière
25:57chargée de toute la poésie
25:59que nous ont inspiré les gens.
26:00Je crois qu'avec Gagarine,
26:07on a eu envie
26:08de rendre hommage
26:08à un lieu,
26:09à une tour
26:10de 365 logements
26:12qui, pendant 60 ans,
26:14a accueilli
26:14des utopies
26:16de vivre ensemble,
26:18des milliers
26:19de destins,
26:21souvent collectifs.
26:23Et puis, en 2020,
26:24on se dit
26:25« Tout ça,
26:26ça n'a pas marché.
26:27On détruit tout,
26:27on recommence. »
26:29Aïe, il faut qu'il perd,
26:30il va détruire la cité.
26:35On voit un immeuble,
26:37on veut raconter son histoire
26:38et ses vies intimes
26:40avec une forme de poésie.
26:42Comment on fait
26:43pour le montrer
26:43comme un vaisseau spatial ?
26:45Et là,
26:45c'était des jours
26:48et des jours
26:48de repérage,
26:49mais de jeux
26:49où on photographie
26:51l'arrête d'un immeuble.
26:53On se dit
26:53« Tiens,
26:54et si on la fait avancer
26:54dans le ciel ?
26:55Là, c'est vrai,
26:55ça fait un peu comme un vaisseau.
26:56Là, il y a le soleil
26:57qui sort de côté.
26:58C'est une petite référence
27:00à des choses
27:01qu'on avait vues
27:01comme « Dominar
27:02et l'Odyssée de l'espace »
27:03mais dont on n'avait même
27:04plus conscience
27:05qu'on avait vues.
27:06Et puis, en fait,
27:07ce jeu-là,
27:08il était aussi très politique
27:10et on se dit
27:11« Oui, c'est important
27:14de montrer les choses
27:15différemment. »
27:20C'est un film admirable
27:25parce qu'il redit
27:27à quel point,
27:29parce que c'est l'histoire
27:30d'un immeuble
27:30qu'on va détruire
27:32et c'est à Vénitieux.
27:33Parce que nous,
27:34les Minguettes,
27:34on aime bien dire
27:35qu'il s'est passé
27:37plein de trucs
27:37avant tout le monde
27:39et avant partout ailleurs.
27:40Donc, je crois
27:41que c'est aux Minguettes
27:42qu'on a détruit
27:42la première fois
27:43un immeuble.
27:44c'est-à-dire qu'on a vu
27:46un immeuble s'écraser.
27:47Les gens pleuraient.
27:49Les gens pleuraient.
27:51Ma sœur était là-bas.
27:52Elle était émue.
27:55C'est notre quartier.
27:57Et notre quartier
27:58partait en poussière.
27:59Pourquoi l'avait-on construit
28:00si c'est pour finir comme ça ?
28:02Est-ce qu'on détruit Versailles ?
28:04Versailles a été construit
28:06une bonne fois pour toutes.
28:08Pourquoi ce n'est pas Versailles
28:09en banlieue ?
28:10Déjà, ils vivent en banlieue.
28:12Donc, ça serait bien
28:13que ça soit bien.
28:14Bon.
28:16Et Gagarin disait ça,
28:18le bonheur
28:19de vivre là-bas.
28:21Il y a deux catégories
28:23de cinéastes.
28:24Ceux qui ont vécu
28:25ces situations,
28:27ceux qui ont été
28:28plus particulièrement sensibles
28:29à ces questions
28:31de banlieue,
28:33d'immigration,
28:34de délinquance,
28:35de quartier oublié
28:36de la République.
28:38Donc, ça,
28:38c'est le côté documenté
28:40et hommes en colère.
28:41Et il y a
28:42les cinéastes auteurs
28:43qui, eux, voient
28:44dans les grands ensembles,
28:47dans les décors,
28:48de quoi nourrir
28:49leur propre thématique
28:50purement personnelle
28:51et de faire leur film
28:52à l'intérieur
28:53de ce nouveau genre
28:55qui est le film de banlieue.
28:57« Toi, tu débarques,
28:58nous, ça fait dix ans
28:59qu'on est là.
29:00On est les seuls
29:01à se faire respecter. »
29:02« Eh les gars, les gars,
29:03il soleil, il soleil ! »
29:03« T'as qu'ils le respectent,
29:04tu me parles.
29:04Les gens d'ici,
29:05ils ont peur de vous,
29:06c'est tout. »
29:08Ça pouvait être que
29:08quelqu'un comme Lajli
29:09qui puisse tourner ce film-là
29:11à l'endroit où il l'a tourné.
29:13Tout le film se passe là,
29:14donc Lajli en est issu
29:16et il connaissait comme sa poche
29:18et c'était possible.
29:19Moi qui connais bien
29:20Les Bosquets de Montfermeil,
29:23ça peut être très compliqué.
29:25Chaque auteur a son inspiration,
29:28a son territoire
29:28et son imaginaire
29:29et tout le monde n'est pas là
29:31pour faire les films de banlieue.
29:32Mais Lajli,
29:34lui, il vit,
29:35moi j'ai quitté les Minguettes,
29:37lui, il vit toujours
29:38à Montfermeil,
29:39il vit toujours là-bas
29:40et il crée des écoles
29:42et il essaye par le cinéma
29:43d'apprendre.
29:46aux jeunes
29:46à se servir d'une caméra.
29:49Toujours sur cette idée
29:50que nous ici
29:51à l'Institut Lumière
29:52nous développons aussi
29:53depuis 30 ans,
29:54c'est-à-dire
29:54si on fait ses propres images,
29:57on respectera
29:57celles des autres.
30:00J'ai l'impression sur les petits,
30:01il faut qu'on retrouve le new.
30:04Arrête-toi là !
30:06Il va y avoir
30:09les chaînes de télévision
30:10en continu
30:11qui vont imposer
30:12une manière de filmer
30:13assez différente.
30:14Caméras sur l'épaule,
30:15tremblées
30:15avec des perspectives,
30:17des flammes,
30:17tout l'imaginaire
30:18qui va se dégager
30:19des images filmées
30:20par les chaînes
30:20de télévision en continu,
30:21je pense aux émeutes
30:22de 2005 par exemple,
30:24va influencer considérablement
30:26la façon de filmer
30:26les banlieues.
30:28Donc la télévision
30:28va beaucoup peser
30:29sur l'esthétique
30:32du film de banlieue
30:32des années 2010.
30:34dix et autres.
30:34Arrête-toi !
30:35Arrête-toi !
30:36Arrête-toi !
30:36Arrête-toi !
30:36Individu en fuite !
30:38Comme tout genre qui naît,
30:41le film de banlieue
30:41est devenu un genre
30:42qui crée ses excès,
30:44ses clichés,
30:45ses figures récurrentes.
30:48Bon, ici, c'est le 9-3.
30:49Eh ben, dis donc.
30:50Heureusement que les vaccins
30:51sont à jour.
30:52Mais un vrai banlieue,
30:52elle a ce que tu n'auras jamais
30:53dans le huitième arrondissement.
30:54La fraternité,
30:55la solidarité.
30:55Bien, les gars,
30:56ou quoi ?
30:56Souvent, le genre crée
31:02des scories, quand même.
31:04Il faut bien reconnaître
31:04ce qui est.
31:09Tout comme le western,
31:11le film de banlieue
31:12serait-il un genre viriliste ?
31:14Réalisateur puis réalisatrice
31:16participe à la mue
31:18des représentations
31:18de la banlieue
31:19avec de plus en plus
31:20de premiers rôles féminins.
31:22Dans des films
31:26comme Raï,
31:29comme Vas citer va craquer,
31:30comme État des lieux,
31:31et aussi,
31:32ça se vérifie
31:33pour la haine,
31:35les personnages principaux
31:36sont des personnages masculins.
31:39Il y a quelques personnages
31:40féminins,
31:42mais qui vont être
31:43plutôt des mamans,
31:43des sœurs,
31:44mais qui ne seront jamais
31:45des personnages principaux.
31:49Il y a un film
31:49qui va faire exception,
31:50c'est le film La Squale.
31:52Puisque la chef de gang
31:54est une femme
31:55et elle maîtrise
31:57autant la violence
31:57que les hommes,
31:59si ce n'est plus.
31:59Il est pas mal,
32:00ton dos entre les hommes.
32:02Quand tu es encore,
32:02je te déroule.
32:03Faut que tu ne te pointes
32:04pas au secteur ici.
32:05Non, parce qu'elle a
32:06des grands frères,
32:07c'est pour ça qu'elle se la pète.
32:08Pour ce film,
32:09c'était vraiment
32:09ce point de vue féminin.
32:11Donc d'avoir une héroïne,
32:12mais un personnage ambivalent,
32:14qui soit à la fois
32:15qui adopte
32:19toutes les règles
32:20du Caïda,
32:22qui puisse s'identifier
32:24à un héros masculin
32:27ultra-machiste,
32:29qui puisse même
32:30en tomber amoureuse,
32:32et en même temps,
32:33avec cette image
32:37de femme.
32:38Et donc,
32:40une part d'elle-même
32:42qui était forcément en danger,
32:46exposée justement
32:48au machisme.
32:49Et ensuite,
32:50on va avoir le film
32:51L'esquive d'Abdelatif Kechich,
32:53puisque le personnage
32:55de Sarah Forestier
32:56va maîtriser
32:58la langue de Marivaux.
33:00Et qui maîtrise
33:01la langue de Marivaux
33:03maîtrise les rapports amoureux
33:05et maîtrise la situation.
33:07Il n'est plus question
33:08de délinquance,
33:09il n'est plus question
33:10de viol,
33:12etc.
33:13Donc,
33:13on est aussi
33:14dans une bascule
33:14de la représentation
33:15des jeunes de banlieue.
33:16« Non, mon cher,
33:17la durée m'en est trop précieuse. »
33:19« Ah,
33:19ces paroles me fortifient. »
33:21« Amuse-toi ! »
33:22« Je ne sais plus
33:23comment te le dire.
33:24Il y a du plaisir à faire ça.
33:25Sors de toi.
33:26Change de langage,
33:27change de manière de parler,
33:28change de manière de bouger.
33:29Amuse-toi ! »
33:31Et après,
33:31effectivement,
33:32on va être aussi
33:33dans des films
33:34plus de récits initiatiques
33:36comme « Divine »
33:37d'Ouda Benyamina
33:39où elle,
33:40c'est une jeune fille
33:42qui rencontre les difficultés
33:44et qui va s'improviser
33:45d'hileuse.
33:46Alors qu'elle aspire
33:47à faire de la danse
33:49et à être tout autre part.
33:50Mais la vie
33:51ne lui permet pas de ça.
33:53Les mecs,
33:53c'est comme des chiens.
33:54S'ils sentent que t'as peur,
33:55ils te bouffent.
33:56Mais toi,
33:56t'as souvent l'air d'avoir peur.
33:58Non, je n'ai pas peur.
34:01Tu vois que t'as peur.
34:02T'es flippante aussi.
34:03Il y a l'existence,
34:04le surgissement
34:04d'une cinéaste
34:06qui remporte
34:06la caméra d'Orakan.
34:08Sa première inspiration,
34:09c'est quelque chose
34:10dont je ne sais pas
34:11la part d'autobiographie.
34:13Mais en tout cas,
34:14la part sans doute,
34:15sans nul doute,
34:17de désir de dire
34:19voilà,
34:19il est important aussi
34:20de montrer ces filles-là,
34:23de montrer ces filles
34:24de la banlieue,
34:25ces filles
34:27qui viennent de familles
34:28d'origine,
34:29immigrées.
34:29Il faut oser être riche.
34:31Tu visualises la thune
34:32et elle viendra quoi ?
34:33On n'a qu'à juste
34:34se poser, visualiser,
34:34la thune la vient
34:35comme tu dis.
34:37J'explique comment c'est.
34:39Vroom !
34:39Vroom !
34:40Le genre s'empare du décor,
34:43les auteurs s'emparent
34:44du décor
34:45et les femmes
34:47s'emparent également
34:48du sujet
34:49en disant
34:49nous existons.
34:52Et là,
34:53je me suis arrêtée
34:53et je vous ai regardées.
34:56Vous étiez belles
34:57et je me suis dit
34:58que ce moment,
34:59il était parfait
35:00et que je ne m'oublierai jamais.
35:03Filmer la banlure
35:08vient à filmer
35:09l'absence d'une relation
35:11entre une grande ville
35:12et ses périphériques
35:14qui ne peuvent plus y accéder
35:15parce qu'il n'y a pas
35:16de transport
35:16comme les trois types
35:17de la haine
35:18qui sont coincés à Paris
35:19qui ne peuvent pas revenir.
35:20Donc le fait
35:21que l'on dénonce
35:22une absence de relation,
35:25l'absence de cohésion
35:26au sein de la nation
35:27est un acte
35:28éminemment politique.
35:33Il faut que je parle.
35:42Il faut que je parle d'ici.
35:43Dans pas mal de films
35:45qui ont été tournés
35:46en banlieue,
35:46on va voir des personnages
35:48qui sont englués
35:49dans la cité,
35:50qui sont enfermés dehors,
35:52enfermés dans leur quartier,
35:54qui évoluent là
35:55parce que c'est un territoire
35:56qu'ils maîtrisent
35:57et qui n'ont plus que ça,
35:59finalement.
36:00C'est un territoire
36:00qui leur appartient
36:02et dont ils sont fiers
36:04et en même temps
36:05dont ils sont victimes.
36:08Et cette ambivalence-là,
36:09ce côté
36:10je t'aime moi non plus
36:12va être très très présent
36:14dans les films.
36:15Et c'est vrai
36:15que quand les personnages
36:16vont aller à Paris,
36:17ils vont avoir peur
36:17qu'on sache
36:20qu'ils ne sont pas d'ici.
36:21Je veux vivre aux Etats-Unis.
36:23Mon cousin,
36:24il habite là-bas.
36:25Je ne vois pas l'intérêt
36:26de partir au bout du monde.
36:28Avec le personnage de Yuri,
36:29même si c'est en sous-texte,
36:32je pense qu'on voulait aussi
36:33parler de la difficulté,
36:34des barrières invisibles
36:35qu'il y a
36:36entre la banlieue
36:37et la ville-centre,
36:38là, en l'occurrence Paris,
36:40parce que c'est vraiment
36:42des constructions mentales.
36:43On parlait d'images tout à l'heure,
36:44c'est vraiment ça,
36:45des images qu'on intègre.
36:46Est-ce qu'on a le droit
36:47d'aller là-bas ou pas ?
36:48Est-ce qu'on a le droit
36:49de rêver à devenir médecin,
36:52à devenir astronaute ?
36:54La problématique de
36:55c'est quoi sortir dans la vie ?
36:57Et nous,
36:57notre personnage de Yuri,
36:59il a beau vouloir
37:00aller jusqu'à l'espace,
37:01il n'est pas prêt
37:02à traverser le périph.
37:03Donc...
37:04Regardez le monde,
37:19notre société,
37:21à partir du point de vue
37:22d'un banlieusard
37:23qui va s'aventurer à Paris,
37:25par exemple,
37:26ça, c'est très intéressant.
37:27C'est ça qui m'amusait,
37:28c'était de montrer comment,
37:29pour des jeunes de cité
37:33qui arrivent dans ces lieux-là,
37:34c'est quand même la vitrine.
37:37Donc c'est là
37:37où ils peuvent exprimer
37:38toute leur...
37:40justement,
37:41leur haine,
37:42leur...
37:45presque leur revendication sociale.
37:47Voilà, on va casser,
37:49vandaliser.
37:51Voilà, c'est une manière
37:52de renvoyer sa propre humiliation
37:55et de rejeter ces valeurs-là,
37:59mais dans une relation
38:00qui est très ambiguë.
38:01quitter la banlieue
38:05serait alors l'exception
38:06qui confirmerait la règle.
38:09Les films insistent en effet
38:10sur l'entre-soi communautaire
38:11né des différentes politiques
38:13menées dans ces banlieues.
38:16Un entre-soi
38:16dont les conséquences
38:17sont pourtant connues
38:18depuis longtemps
38:19et sur lesquelles
38:20le cinéma alerte
38:21depuis toujours.
38:22ce cinéma
38:24qui va montrer la banlieue
38:25très vite,
38:27c'est vraiment...
38:27ça représente en fait
38:28l'espace
38:29où il y a du malheur social.
38:30C'est une permanence,
38:31en fait.
38:32On va le voir
38:32des années 60,
38:36de Terrain vague,
38:37même des cœurs verts
38:38d'Edouard Lunds,
38:38etc.
38:39jusqu'aux misérables,
38:42en fait,
38:43de Lajli,
38:44aujourd'hui.
38:45Clairement,
38:46en banlieue,
38:48c'est dur d'être heureux.
38:49J'enseigne à Sarcelles.
38:59Moi,
39:00quand j'ai vécu
39:02à Pantin,
39:03il devait y avoir
39:04une soixantaine
39:05de nationalités
39:06dans la même municipalité.
39:09Donc,
39:09ça,
39:10c'est la réalité
39:11des cités,
39:11c'est-à-dire
39:12une énorme diversité
39:13ethnique
39:15et culturelle.
39:17Qu'est-ce que tu connais
39:17du racisme ?
39:18Je connais mieux
39:18que toi le racisme.
39:19Ça va trop loin,
39:20François,
39:20on n'y arrivera pas.
39:22Le cœur des gens
39:22s'est fermé.
39:23Il est temps
39:24de dire stop !
39:25Stop à la haine !
39:27Moi, c'est ça,
39:27c'est une espèce
39:28de photographie
39:30de cette immigration-là
39:33en France,
39:34en banlieue,
39:35avec des jeunes
39:37d'origine maghrébine
39:39et pas que,
39:40et qui demandent
39:41juste une chose,
39:42c'est, au fait,
39:42vouloir être français.
39:44Donc, je trouvais ça
39:44assez intéressant
39:45de me dire,
39:45mais en fait,
39:46cette revendication,
39:47elle est assez dingue
39:48parce qu'en fait,
39:48vous l'êtes.
39:49Mais en fait,
39:50eux ne se sentent pas
39:51considérés comme des français.
39:52Donc, à ce moment-là,
39:53ils sont pionniers
39:54de quelque chose.
39:55En égalité !
39:57Prove dans leur pays,
39:58c'est meurant !
39:58Tu risques rien !
39:59Toi, ta tête,
40:00c'est un gilet pare-balles !
40:01C'est pas vrai, peut-être !
40:02C'est là où le mot « beurre »
40:04apparaît.
40:04C'est là où le mot « beurre » apparaît,
40:06qui pour moi est une insulte.
40:11La manière dont on le positionne,
40:13la manière dont on le dit,
40:15dire que tu es beurre
40:16veut dire que tu n'es pas français.
40:18« J'en appelle à votre esprit d'équipe,
40:21la cohésion. »
40:24Quand les films
40:25Le Misérable commencent,
40:26en fait,
40:26la scène d'introduction,
40:27effectivement,
40:27on a ce gamin
40:28qui est fou de joie
40:30parce que l'équipe de France
40:32a gagné
40:33et il brandit
40:35le drapeau français.
40:37Moi, je perçois cette scène
40:38comme, effectivement,
40:39comme le cinéaste
40:42revendique que lui,
40:46comme tous les gens qui filment,
40:48ont envie d'être français.
40:51Et ensuite,
40:53on a l'envers du décor
40:54et de voir tous les obstacles
40:56et tout ce qui fait
40:58que ce jeune n'est pas considéré
40:59comme un français à part entière
41:01et n'a pas les mêmes droits.
41:02Par rapport à la réalité sociale
41:18de ce qu'est la cité
41:19des Bosquets de Montfermeil,
41:23c'est vrai que c'est
41:23une cité qui a été abandonnée
41:25par un peu
41:28tout le monde.
41:31Et ce qui reste,
41:31et ce qui cimente
41:33en fait les relations,
41:34c'est la religion.
41:35Dans Les Misérables,
41:36il y a un personnage
41:38qui s'en sort,
41:39c'est le personnage
41:39de l'imam
41:40parce que c'est lui
41:40qui vient apaiser
41:41tout le monde
41:43et qui vient régler
41:44un petit peu la situation.
41:46Pour ça,
41:46c'est un reflet
41:47très juste
41:49de ce qui se passe
41:50dans certaines cités
41:51et en France.
41:52Ceux qui jouent
41:54le rôle social
41:56d'entraide,
41:58etc.,
41:59vont être
41:59des associations
42:01religieuses
42:03liées à l'islam.
42:04Et donc,
42:05en ça,
42:05Al-Ajli
42:06se fait le reflet
42:07et montre ce personnage.
42:09Mais
42:09c'est un personnage
42:11assez héroïque
42:12et un personnage
42:13d'autorité.
42:13Ce sont des personnages
42:31qui rencontrent des drames,
42:32il y a des meurtres,
42:33il y a des émeutes,
42:34il y a la pauvreté,
42:35la promiscuité,
42:36la délinquance,
42:37beaucoup de choses.
42:38Il n'empêche
42:39que ce qu'il en ressort
42:40régulièrement
42:41de tout ça,
42:42c'est des choses
42:42très positives.
42:43la cohésion,
42:44l'entraide,
42:45on va s'en sortir.
42:47Ce sont des personnages
42:47qui veulent véritablement
42:49aller vers quelque chose.
42:50Il faudrait qu'on refasse
42:51le lec,
42:51puis la sécu.
42:52Si tout est nickel,
42:53ils ne pourront pas
42:53la détruire.
42:54Mais attendez,
42:54mais ce n'est pas comme ça
42:55qu'on réparole un ascenseur.
42:56Je sais très bien ce que je fais.
42:57On essaie de montrer
42:57un peu tout ça,
42:58je crois,
42:58dans le film.
42:58C'est-à-dire,
42:59il y a des scènes
42:59qui valorisent ce collectif,
43:01comme quand Yuri
43:02réunit tout le monde
43:03autour de grands tablés
43:05pour ensuite aller voir
43:06l'éclipse tous ensemble
43:07sous une voile
43:08qu'il a construite.
43:09Et ça,
43:09c'est vraiment un symbole
43:11de choses qu'on a vues.
43:14C'est quoi ton rêve ?
43:16Le SOS lumineux
43:17qu'il envoie à la fin,
43:18c'est un SOS au monde,
43:20à l'État,
43:20à la France,
43:21mais peut-être plus largement,
43:22à dire attention
43:23aux soins à apporter
43:25à la jeunesse,
43:26de banlieue,
43:27parce qu'elle est capable
43:28de grandes choses.
43:29Et si on ne fait pas attention,
43:33on va se priver de ça,
43:35en fait.
43:45Il y a quelque chose
43:46de positif,
43:47c'est la volonté
43:48d'émancipation
43:50de ces deux filles
43:52à la fin.
43:53Voilà, pour moi,
43:53c'est ça qui est positif,
43:55c'est les ferments,
43:57heureusement,
43:59dans les cités,
44:01que ce soit chez les jeunes,
44:02les plus âgés,
44:03etc.
44:05à la fois de la révolte,
44:08d'un changement possible
44:09et d'une autre société possible.
44:10Cadeau.
44:12Tu veux que je fasse quoi avec ça ?
44:13Faut bien qu'il paie pour ce qu'il t'a voulu.
44:14C'est fort, j'ai compris.
44:15Mon aide !
44:17Une balle,
44:18une émeute,
44:19des morts,
44:19la merde.
44:20Et des politiciens
44:21qui vont récupérer la cause
44:23pour faire voter extrême droite,
44:24ça serait le cliché du film.
44:26Là, c'est une balle,
44:28un réveil,
44:29grandit,
44:30on marche,
44:30100 000 personnes,
44:31on va voir le président.
44:32On va conquérir le cœur des Français
44:34et on va lui faire prendre conscience
44:35que son visage a changé.
44:37Tout le monde découvre
44:37une autre offense,
44:39le spectateur,
44:40et on montre que,
44:40en fait,
44:41le cliché du jeune de banlieue,
44:44il est à l'opposé
44:45et le cliché du français blanc,
44:47raciste,
44:48c'est autre chose.
44:49À un moment donné,
44:50le film,
44:50la vie,
44:51c'est la nuance.
44:51Il n'y a pas un méchant,
44:52un gentil,
44:53c'est beaucoup plus compliqué que ça.
44:54Pour combattre ces films
44:55qui sont fantasmés
44:56ou délirants,
44:58c'est de faire un film normal.
44:59C'est avec des gens normaux.
45:01C'est avec des gens
45:01qui ne se lèvent pas le matin,
45:02avec des accents
45:03qui sont venus de nulle part.
45:04Pour moi,
45:05c'est ça la revendication.
45:07Nous avons décidé de marcher.
45:10Est-ce que c'est le bon choix ?
45:12On n'en sait rien.
45:13À la fin,
45:13il y a un panneau
45:14qui recontextualise
45:17l'histoire d'SOS Manguette,
45:19SOS Racisme,
45:20le fait que les marcheurs
45:24n'ont pas adhéré,
45:25se sont faits un peu récupérer,
45:26etc.
45:27Mais ça, c'est des mots, en fait.
45:28Et nous, le cinéma,
45:29c'est l'image.
45:31Et j'ai fait confiance aux mots,
45:33alors que pendant tout le reste,
45:34j'ai fait confiance à l'image.
45:36Si je tournerais maintenant le film,
45:38je pense que là, maintenant,
45:39quand j'ai vu Les Retours à la fin,
45:41j'aurais aimé filmer ça,
45:43cette espèce de désillusion.
45:44La marche,
45:45c'est un très beau film,
45:46mais qu'elle n'a pas forcément
45:48trouvé son public
45:48parce que,
45:49ici, en banlieue,
45:52on est resté sur ce goût amer
45:53que c'était une occasion ratée.
46:08Petit à petit,
46:09ça a glissé.
46:09Il y avait toutes les couches sociales
46:10qui avaient été la cité.
46:11Et petit à petit,
46:12c'est des endroits
46:12qui se sont paupérisés.
46:14Donc, il y a eu la politique
46:15des grands frères
46:16où petit à petit,
46:16on a laissé à la charge
46:18de jeunes qui étaient
46:19plus ou moins formés
46:20qu'on leur a laissé la charge
46:24de s'occuper des petits frères.
46:26Et ensuite,
46:27quand ça a basculé
46:27dans la vacance,
46:29on a laissé aux dealers
46:31le soin de s'occuper
46:31de la cité
46:32et de ce qui s'y passait.
46:34Donc, petit à petit,
46:34il y a eu un glissement
46:35qui, bien sûr,
46:37est retranscrit dans les films,
46:39dans Deepan,
46:40avec cette cité
46:40qui est complètement
46:41aux mains des dealers.
46:43On voit aussi
46:43dans Les Misérables,
46:45il y a un des personnages
46:45qui s'appelle Le Maire.
46:46Donc, il y a un maire
46:48de la cité de Montfermeil,
46:51des Bosquets,
46:51et puis, il y a le maire
46:52pour tout le monde
46:55qui, apparemment,
46:56ne vient jamais dans la cité.
47:08Bacnor et Les Misérables,
47:09effectivement,
47:10sont d'abord
47:10deux films courageux
47:11parce qu'ils attaquent
47:11des problèmes
47:12et des questions
47:12qui ne sont pas simples
47:13à résoudre.
47:15et ils y vont
47:16de façon l'un et l'autre
47:18extrêmement franche
47:19et extrêmement nuancée
47:21avec beaucoup,
47:21beaucoup de subtilité
47:23dans leur approche et tout.
47:24Ce que je constate,
47:26c'est que ces problèmes
47:27reçoivent un écho
47:28puisque c'est deux films
47:29qui ont recueilli
47:29énormément de succès,
47:31public et critique.
47:32Le César est allé
47:33aux Misérables,
47:34Bacnor a rencontré
47:36beaucoup de spectateurs.
47:38Ce qui signifie
47:38qu'au-delà du spectacle,
47:40il y a des gens
47:40qui s'intéressent
47:41aux personnages,
47:42aux situations,
47:44aux évolutions
47:45qui peuvent se produire,
47:47qui est quelque chose
47:47de très positif
47:48puisque ce sont des films
47:49qui sont très interrogatifs.
47:53Tu sais quoi ?
47:54On ne sert à rien.
47:55On ne sert plus à rien.
47:59Effectivement,
48:00on a opposé
48:00Les Misérables
48:01de la Jolie
48:02à Bacnor
48:02de Cédric Riménez
48:04du fait de l'origine sociale
48:07et culturelle
48:08supposée des cinéastes
48:10sur une vision
48:12très différente
48:14et partisane
48:15de chacun des films.
48:17Là, effectivement,
48:18le débat
48:18qu'il y a pu avoir
48:19entre Bacnor d'un côté,
48:22Les Misérables de l'autre,
48:23nous renvoie encore
48:24à ce manichéisme
48:26qui est le triste manichéisme
48:27encore une fois
48:28de nos gouvernements
48:31qui se succèdent
48:33en opposant
48:35deux discours,
48:39un discours extrêmement démagogique
48:41et un discours...
48:42Enfin, les deux discours
48:42sont extrêmement démagogiques.
48:44Un discours répressif
48:45et un discours,
48:46je dirais, caritatif.
48:48Quand on vient de citer,
48:49c'est terrible
48:50parce que d'un côté,
48:51on a la schlag,
48:52de l'autre,
48:53on a la commisération.
48:56les deux sont insupportables.
49:02Et tu veux pas aller
49:03parler au petit frère, là ?
49:04Hein ?
49:05C'est quoi ?
49:05C'est des fous, ça, quoi ?
49:07À chaque fois qu'il tape,
49:10on tape.
49:12À chaque fois qu'il tue,
49:14on tue.
49:16Je trouve tout aussi ridicule
49:17de dire que Bacnor
49:18est un film de droite
49:19qu'Athéna serait
49:20un film de gauche.
49:22Et y compris,
49:22vice-versa.
49:24Pas parce que Marine Le Pen
49:25a dit du biais,
49:26qui vient de Bacnor,
49:27Bacnor est un film
49:28fondationnal.
49:30Bacnor est le meilleur film
49:32qui évoque la question,
49:34du point de vue policier,
49:36des territoires perdus
49:37de la République.
49:39Athéna,
49:40c'est du point de vue
49:41des émeutiers.
49:44On dit qu'Athéna
49:45était un film irresponsable.
49:47Mais qu'est-ce qui s'est passé, là ?
49:48Et si on s'était intéressé
49:50à ce que Romain Gavras
49:51a montré dans Athéna ?
49:54Genre,
49:55je suis ministre de la ville,
49:57M. Gavras,
49:58je voudrais vous voir.
50:00Comment vous avez écrit
50:01votre film ?
50:02Est-ce que tout ça est vrai ?
50:04Est-ce que vous vous êtes
50:05inspiré de quelque chose
50:07qui fait que ce qui se passe
50:09dans votre film,
50:09ça pourrait arriver ?
50:11Cédric, Jimenez,
50:13comment ça vous est venu,
50:15ce scénario ?
50:16Avec qui vous avez enquêté ?
50:17Qui vous a parlé de ça ?
50:19Qui vous a dit
50:19qu'on ne pouvait pas pénétrer
50:21ce à quoi il aurait répondu ?
50:24L'un à Cédric, Jimenez,
50:25je ne vais quand même
50:26pas vous l'apprendre.
50:27Vous le savez mieux que moi.
50:29Nous, on n'est que le reflet de ça.
50:31Ce à quoi Romain Gavras
50:33aurait répondu pour Athéna,
50:35enfin, je ne vais pas vous apprendre
50:372005, etc.
50:38Je ne vais pas vous dire
50:39la cocotte minute
50:40que sont les banlieues.
50:42Nous sortons des meutes
50:55tout à fait importantes,
51:00voire jamais vues
51:02dans ce pays à telle échelle.
51:04Tout à coup, on peut se dire
51:05qu'une partie,
51:07non pas des solutions,
51:08mais en tout cas des problèmes,
51:10le cinéma les avait montrées.
51:12Alors nous, évidemment,
51:13les cinéphins,
51:14on pense que le cinéma
51:15pose les yeux sur tout,
51:19mais c'est vrai.
51:21Et en réponse à tout,
51:22c'est aussi en grande partie vrai.
51:26Film après film,
51:27des cinéastes ont donc montré
51:28comment ces banlieues
51:29sont devenues ce qu'on appelle
51:31désormais
51:31les territoires perdus
51:33de la République.
51:35Réalisateurs et réalisatrices
51:36doivent aujourd'hui
51:37s'emparer d'autres sujets sensibles
51:39comme l'homophobie
51:40ou l'antisémitisme,
51:42qui touchent aussi les cités
51:43et pousser les politiques
51:45à ne plus dire
51:46« Jusqu'ici,
51:48tout va bien ».
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