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00:00Coup de projecteur, comme promis, sur l'art contemporain africain.
00:04La foi d'art contemporain de Lagos arrive à son terme.
00:08Et c'est l'occasion de passer au crible ce secteur.
00:12Quels artistes suivre ? Combien pèse ce marché ? Comment s'exporte-t-il ?
00:17On va poser ces questions à Cindy Olohou.
00:20Bonjour. Merci beaucoup d'être sur notre antenne.
00:23Ce matin, vous êtes historienne de l'art, critique d'art contemporain,
00:27commissaire d'exposition.
00:28Pour commencer, Cindy Olohou, quel bilan faites-vous de cette édition de la foire de Lagos ?
00:36Qu'est-ce qui a retenu votre attention ?
00:40Bonjour. Merci beaucoup pour votre invitation.
00:44Déjà que c'est la dixième édition et que, via cette édition 2025,
00:48le Nigeria confirme sa place sur le marché international
00:51et sur le marché de l'art contemporain africain.
00:54qu'on voit que cette édition a permis vraiment une sorte d'équilibre
00:59et la montée d'une double dynamique,
01:01avec à la fois une internationalisation de plus en plus grande
01:05et un renforcement de l'écosystème local.
01:07C'est-à-dire qu'auparavant, il y avait beaucoup de collectionneurs internationaux, étrangers,
01:12et là, on voit que la scène locale nigériane est aussi très, très bien installée,
01:16acquiert des œuvres, des artistes nigériens et plus globalement de la sous-région d'Afrique de l'Ouest.
01:22Et c'est très encourageant pour le marché.
01:25Est-ce qu'on peut dire que le Nigeria est en train de devenir une sorte de nouvel hub
01:30de l'art contemporain sur le continent ?
01:33Nouvelle hub, je ne sais pas, parce qu'il faut toujours faire attention avec le terme nouveau,
01:42surtout quand on parle de l'Afrique en général,
01:45où on a tendance à percevoir que tout est toujours nouveau.
01:48Je pense que c'est plutôt une tendance qui s'inscrit dans la structuration
01:52et la consolidation du marché,
01:54et qu'en effet, le Nigeria est ce hub avec l'Afrique du Sud,
01:58qui sont un peu les deux pays pôle et têtes d'affiches,
02:01tant en termes de marché local que d'artistes issus de ces pays-là,
02:06qu'on retrouve au niveau du marché international de l'art contemporain
02:08et qui caracolent en tête des ventes.
02:11Quelles sont les spécificités de l'art contemporain africain, Cindy Olohou ?
02:18Oula !
02:20C'est une question difficile.
02:23On n'est pas tous d'accord sur le sujet en histoire de l'art.
02:26En spécificité, je pense qu'il y a d'abord la question de définir
02:32ce qu'est l'art contemporain africain.
02:34Alors, on a besoin de ces catégorisations pour en parler,
02:37et le marché se structure aussi autour de ces enjeux-là.
02:40Mais il faut savoir que dans l'art contemporain africain,
02:44on englobe aussi bien des artistes vivants et travaillants en Afrique
02:47que des artistes issus des diasporas récentes, voire anciennes africaines,
02:53et également des artistes afrodescendants qui abordent des thématiques
02:57liées au continent africain et à son histoire.
03:00Donc, c'est très, très multiforme, avec de très nombreuses pratiques,
03:04même si on retrouve des éléments liés à la récupération,
03:08mais aussi tout un mouvement autour du black portraiture,
03:11c'est-à-dire la représentation des figures noires,
03:13dans une volonté de les revaloriser, de les mettre en avant,
03:18de dignifier aussi ces figures qui ont longtemps été mises sous le tapis
03:23au sein de l'histoire et de l'histoire de l'art.
03:27Mais ces thématiques-là, que ce soit la récupération ou le black portraiture,
03:31on les retrouve aussi dans l'art américain, par exemple,
03:34ou dans d'autres milieux artistiques.
03:39Et quels sont les courants, par exemple, s'il y en a ?
03:42Quelles sont aussi les valeurs sûres à suivre ?
03:48Alors, les courants, ce serait difficile à définir dans le marché,
03:52même si, évidemment, le courant black portraiture est très, très en vogue actuellement
03:56dans le marché de l'art contemporain africain.
03:58Donc, surtout des peintures de figures noires magnifiées dans des grands formats,
04:04des grands tableaux.
04:06Parmi les têtes d'affiches, on retrouve beaucoup d'artistes nigériens,
04:08nigériens, ghanéens ou sud-africains, comme ghanéens comme Omoako Boafo,
04:15ou encore Toye Unoji Odoutola, qui est nigérienne et américaine.
04:20Des artistes sud-africains comme Marlène Dumas,
04:24qui est l'artiste féminine contemporaine africaine
04:29qui a vendu l'œuvre la plus chère cette année.
04:32À Christie's, il me semble, près de 13 millions de dollars,
04:37si je ne dis pas de bêtises.
04:39Donc, on retrouve ce type de tendance-là avec quand même une surreprésentation
04:43d'artistes issus du Nigeria, d'Afrique du Sud, du Ghana ou alors de la diaspora.
04:50Cindy Olohou, vous avez évoqué tout à l'heure la question de l'argent,
04:54vous l'avez effleuré.
04:55On va essayer d'entrer un petit peu plus en détail.
04:58Quel est l'état du marché de l'art africain ?
05:01Combien est-ce qu'il pèse, par exemple, en termes d'échelle de valeur,
05:05si jamais, bien entendu, ça existe ?
05:09Alors, je n'aurais pas un chiffre exact de combien pèse ce marché.
05:14Ce que je peux dire, c'est qu'il est en croissance
05:17et avec une meilleure représentation au sein du marché global de l'art contemporain.
05:22Par exemple, en 2017, ça représentait 0,1 % des enchères mondiales, je crois.
05:28Et là, on est à près de 4 % du marché global de l'art contemporain africain.
05:334 % des ventes sont de l'art contemporain africain.
05:37Donc, c'est quand même une très, très forte croissance en très peu de temps.
05:409 % des artistes qui vendent le mieux,
05:44qui sont parmi les enchères les plus élevées,
05:47sont de... qu'on appelle des artistes ultra-contemporains,
05:49c'est-à-dire vraiment encore vivants,
05:53moins de 40 ans pour le marché de l'art,
05:56sont issus du continent africain.
05:59Et, par exemple, les transactions de plus d'un million de dollars
06:05étaient en augmentation de près de 200 % depuis 2016 dans les maisons de vente.
06:10Par contre, on a quand même une tendance globale
06:12au ralentissement du marché de l'art,
06:14mais qui est une tendance mondiale,
06:17qui est liée au contexte actuel avec les conflits
06:19et les incertitudes économiques mondiales actuelles.
06:26Ce qui est aussi...
06:28À cela s'ajoute pour le marché de l'art contemporain africain aussi,
06:31une sorte de...
06:32On sort un peu des tendances spéculatives
06:33qu'on a pu voir jusque dans les années 2021.
06:37C'est-à-dire que depuis 2016 jusqu'à 2021,
06:39il y a eu vraiment un engouement,
06:40une croissance presque exponentielle,
06:43mais avec une très, très forte spéculation
06:45de certains collectionneurs,
06:47avec des artistes qui sont passés,
06:48qui ont vu leur code passer
06:49de 1 million à 3 millions en un an, par exemple.
06:53Ça a été le cas de Amo Akobo Afo
06:55lors de ses ventes à Hong Kong.
06:57Et là, on sort un peu de cette phase-là.
06:59On revient à quelque chose de plus stable,
07:02mais aussi de plus consolidé.
07:04C'est-à-dire qu'on est moins dans la spéculation.
07:05Les collectionneurs sont plus aguerris,
07:09sont plus prudents,
07:11réfléchissent sur le long terme dans les acquisitions.
07:14Et c'est plutôt encourageant
07:17dans la stabilisation du marché.
07:18Cindy Olo, on va parler politique,
07:20puisque l'art est politique comme on sait.
07:23Est-ce que ce marché de l'art contemporain africain
07:28ou de l'art contemporain africain plus généralement
07:30peut servir de vecteur de diplomatie,
07:34de soft power, comme on dit généralement ?
07:37Oui, certainement.
07:43La culture a toujours participé au soft power,
07:46à la diplomatie et aux échanges interculturels.
07:50Je ne sais pas si c'est un marché qui va jouer ce rôle
07:53que plutôt aussi une institutionnalisation
07:58de l'art contemporain africain.
08:01Et tout ça participe d'un ensemble aussi plus général,
08:06c'est-à-dire de ce qu'on a pu appeler
08:08un renversement du signe africain.
08:09En tout cas, c'est comme ça qu'Achille Mbembe le mentionne.
08:12Et c'est comment aussi,
08:13via toute une revalorisation
08:16de récits, d'éléments culturels
08:20issus de cultures africaines ou afro-diasporiques,
08:23se retrouvent mis sur le devant de la scène
08:25via des réseaux sociaux.
08:26Il y a une sorte d'empowerment,
08:27si je peux me permettre cet anglicisme.
08:30Et évidemment que l'art contemporain africain
08:33joue sur cette scène.
08:34Et on a pu le voir aussi avec un pays comme le Bénin,
08:37où la restitution des 26 trésors au Bénin
08:40a permis aussi, a été un énorme succès
08:43avec des milliers de visiteurs sur place
08:46lors de leurs présentations au palais présidentiel.
08:49Mais aussi avec le Bénin,
08:51maintenant on mène aussi toute une politique
08:52tournée vers l'extérieur de valorisation culturelle.
08:55Il y a eu notamment l'exposition
08:57Révélation, l'art contemporain du Bénin,
08:59qui a voyagé, qui a été présentée à Rabat,
09:01au musée Mohamed VI,
09:02puis à la fondation Clément Martinique,
09:05puis à la conciergerie à Paris,
09:06et qui met vraiment en avant l'art contemporain
09:08béninois, avec des artistes,
09:13le savoir-faire, tout un tas de connaissances.
09:15Donc évidemment que ça commence à jouer
09:16à un vrai rôle de soft power,
09:17et on voit que l'image aussi du Bénin
09:19change médiatiquement,
09:22et qu'il est maintenant beaucoup plus présenté
09:23comme un centre culturel,
09:25un pays de valorisation de patrimoine
09:27extrêmement dynamique,
09:28avec en parallèle aussi une politique
09:30de retour et d'accueil.
09:34Merci beaucoup, Cindy Olorou,
09:36pour ces explications,
09:38pour votre décryptage du marché
09:39de l'art contemporain,
09:41à l'occasion de la fermeture
09:42de la foire d'art X,
09:44de Lagos,
09:45historienne de l'art,
09:46critique d'art contemporain,
09:47commissaire d'exposition.
09:48Merci.
09:49Merci.
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