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Pendant la guerre froide, les États-Unis et l’Union soviétique se sont également livrés à une intense lutte d'influence sur le continent africain, et notamment au Ghana, au Congo, en Somalie, en Éthiopie, en Angola ou en Afrique du Sud.
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00:00L'histoire n'est pas une source exacte, elle n'est jamais gravée dans le marbre.
00:19Au fil du temps, la connaissance du passé s'affine et évolue.
00:30Mais les idées reçues ont la peau dure, et les a priori restent tenaces.
00:37Pour saisir les vérités du monde, il faut parfois bousculer les certitudes et décrypter les faits en proposant un autre regard.
01:01Dans les mémoires collectives, la guerre froide symbolise le conflit mondial qui oppose l'URSS et les États-Unis en Europe et en Asie, exclusivement.
01:28Et pourtant.
01:4218 avril 1955. Ce jour-là, la ville de Bandung, en Indonésie, devient le centre du monde.
01:5030 chefs d'État venus d'Afrique et d'Asie se réunissent ici pour un événement exceptionnel.
01:57A Bandung, le Tiers-Monde vient de surgir sur la scène internationale.
02:19Indiens, Chinois, Vietnamiens comptent bien faire entendre leur voix et encouragent les puissances dominées à secouer leurs joues.
02:30Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les métropoles européennes ont dû abandonner leur colonie.
02:36Après l'Asie, c'est le tour de l'Afrique.
02:38Ces nouveaux États doivent trouver leur place dans un ordre international, dominé par la guerre froide que se livrent américains et soviétiques.
02:48Mars 1957.
03:15Dans les rues d'Akra, la capitale de la Côte de l'Or, le peuple est en liesse.
03:21L'ancienne colonie britannique vient de proclamer son indépendance sous son nouveau nom, le Ghana.
03:27L'artisan de l'indépendance est le docteur Nkwamin Kruma.
03:56Militant anticolonial depuis sa jeunesse et économiste de formation.
04:01Sortir son pays du sous-développement grâce à la modernisation, voilà le rêve du nouveau président.
04:29Mais son optimisme se heurte à une rude réalité.
04:38Pendant plus d'un siècle, 200 millions d'Africains ont vécu sous la domination des puissances coloniales.
04:43La Grande-Bretagne, la France, la Belgique, l'Espagne et le Portugal ont exploité en Afrique hommes et richesses, contrôlé ses territoires et détruit ses cultures locales pour satisfaire leurs besoins.
04:56Dans les années 50, l'Afrique est un continent en difficulté.
05:09Tout reste à faire.
05:11Il faut des moyens que le Ghana n'a pas.
05:13Pas plus que les pays de la conférence de Bandung, dont les promesses de coopération ne seront pas suivies des faits.
05:24Les ressources économiques et technologiques indispensables à la modernisation se trouvent aux États-Unis ou en Union soviétique.
05:43Deux superpuissances qui, depuis 1945, se partagent le monde et ont dressé une frontière hermétique au milieu de l'Europe.
05:53Les Américains promettent la liberté et l'abondance.
06:04Les Soviétiques offrent la justice sociale et le plan quinquennal.
06:11Deux idéologies opposées rivalisent dans tous les domaines.
06:16L'économie, le sport, la culture, mais aussi le nucléaire.
06:23Leur objectif, prouver la supériorité de leur système pour l'exporter dans le reste du monde.
06:34Dans ce conflit appelé la guerre froide, il paraît presque impossible de ne pas choisir son camp.
06:46Ancien étudiant aux États-Unis, le président ghanéen se tourne d'abord vers l'Amérique.
06:50Il y cherche du soutien pour un grand projet de barrage sur le lac Volta qui doit permettre à son pays de développer son réseau électrique.
07:00Pour le président Eisenhower, les États africains émergents représentent de nouveaux marchés, des réservoirs de matières premières et des zones hautement stratégiques.
07:15Ils sont aussi des alliés supplémentaires qui offrent des voies dans les organisations internationales.
07:25Une manne que l'Amérique ne veut surtout pas voir tomber dans l'escarcelle de Moscou.
07:30Le projet du barrage sera signé.
07:36Au Kremlin, le premier secrétaire du parti communiste, Nikita Khrouchchev, suit lui aussi de près l'éveil des peuples d'Afrique.
07:44C'est un phénomène remarquable de notre époque, proclame-t-il.
07:50Les communistes sont des révolutionnaires et ils seraient malheureux s'ils ne tiraient pas des avantages de ces nouvelles opportunités.
07:57Pour réaliser ces ambitions, ils ordonnent de créer de nouveaux départements chargés des relations internationales.
08:07Les services spéciaux, le KGB et le GRU, reçoivent des briefings spécifiques sur la situation en Afrique.
08:20La ruée vers le continent est ouverte.
08:23Mais cette fois-ci, les Africains tentent d'imposer leurs règles.
08:30Pour empêcher une nouvelle colonisation, Nkrumah va jouer la concurrence.
08:37De retour de Washington, il prend contact avec Moscou et demande de l'aide pour un second projet.
08:44La construction d'une centrale hydraulique.
08:46Qui plus est, Nkrumah est séduit par le modèle de croissance soviétique basé sur le centralisme, la collectivisation et la mobilisation des masses.
09:01Indifférent aux susceptibilités de ses partenaires américains, le président ghanéen déclare
09:09« Le capitalisme est un système trop compliqué pour une nation fraîchement indépendante.
09:15Voilà pourquoi il y a un besoin pour une société socialiste. »
09:22Un rapprochement qui fait grincer les dents de l'oncle Sam.
09:32Mais retirer son aide au Ghana reviendrait à jeter le pays dans les bras du Kremlin.
09:37Il n'en est pas question.
09:43Nkrumah s'engouffre dans la guerre froide, sans se limiter à un seul camp.
09:47Pour multiplier ses alliances, le chef d'état ghanéen se tourne aussi vers le premier ministre chinois, Chu Enlai,
09:59et cultive les relations avec ses anciens colons britanniques.
10:04Sa méthode fait des émules sur le continent africain.
10:09Notamment au Congo, une ancienne colonie belge dont le roi boudouin annonce l'indépendance.
10:17Nous reconnaissons avec joie et émotion que le Congo accède ce 30 juin 1960 à l'indépendance et à la souveraineté internationale.
10:34L'homme de la situation est Patrice Lumumba.
10:44Après des années de lutte et un séjour en prison, cet ancien syndicaliste âgé de 35 ans devient premier ministre d'un Congo libre.
10:52Cette indépendance du Congo ne signifie pas chasser le belge du Congo ou nous séparer de la Belgique.
11:01Mais au contraire, nous voulons constituer un gouvernement souverain où les Congolais et les belges pourront travailler main dans la main au service de la nation congolaise.
11:09Emprunt d'idéalisme, son appel sonne pourtant comme un vœu pieux.
11:21En réalité, rien n'est mis en place pour une transition réussie.
11:26Et une partie des colons belges n'est pas prête à lâcher son pouvoir.
11:29Cinq jours après l'annonce de Lumumba, une mutinerie de soldats noirs éclate contre leurs officiers blancs.
11:43Elles se transforment en grève générale et entraînent de violentes manifestations.
11:49De nombreux blancs fuient le pays.
11:52Dans le bas Congo, il y a eu des brimades, des exactions, il y a eu des viols, il y aura des morts.
11:58C'est l'exode massif par le fleuve vers Brazzaville.
12:05Lumumba tente de maîtriser la situation en débarrassant l'armée de ses officiers belges.
12:11Mais il doit faire face à un autre conflit, plus grave encore.
12:16Le combat sécessionniste de la province du Katanga, dans le sud du pays.
12:20Son gouverneur, Moïse Chombe, a fait appel à des mercenaires pour obtenir l'indépendance de sa province.
12:35Une crise suivie de près par les Américains et les Soviétiques.
12:39Car le Katanga possède d'importantes réserves d'uranium,
12:43indispensables pour le programme nucléaire que poursuivent les deux superpuissances.
12:48Grâce à un accord passé avec les colons belges,
12:53les Américains en avaient jusque-là le droit d'exploitation.
12:57L'uranium du Katanga a même servi pour fabriquer les bombes d'Hiroshima et de Nagasaki.
13:05Maintenant que le Congo est indépendant,
13:07rien n'empêche Lumumba de faire affaire avec Moscou,
13:11même si le Premier ministre se défend de toute collusion avec le Kremlin.
13:14« Êtes-vous communiste, M. Lumumba ? »
13:17« Je dois toujours rire quand on me pose cette question.
13:21Je suis simplement un nationaliste, un leader nationaliste qui lutte pour un idéal.
13:28Je ne suis pas du tout communiste et je ne deviendrai jamais. »
13:33Mais dans ce contexte de guerre froide, ses paroles ne rassurent guère le camp occidental.
13:39Encouragé par son allié américain, Bruxelles envoie 10 000 soldats au Congo.
13:47Officiellement, ils viennent protéger la population blanche contre les violences.
13:50En réalité, certains Belges prêtent main-forte aux sécessionnistes du Katanga.
13:59Un mois plus tard, la Belgique signe un accord avec le gouverneur de la province,
14:04reconnaissant de facto son indépendance.
14:10Face à la violation de la souveraineté de son pays,
14:13Lumumba saisit l'ONU pour obtenir une aide militaire contre l'agression belge.
14:17Si l'ONU envoie des casques bleus, c'est pour ramener l'ordre
14:25et non pas pour remettre les Belges à leur place.
14:30Acculé, le premier ministre congolais joue alors le tout pour le tout
14:33et demande l'appui soviétique.
14:38Le Kremlin y voit l'occasion de gagner un nouvel allié africain.
14:42En signe de soutien, une ambassade soviétique ouvre ses portes à Léopoldville.
14:52L'URSS condamne haut et fort l'ingérence des Belges qu'elle accuse de néocolonialisme.
14:58Lumumba devient le symbole de la lutte contre l'impérialisme américain.
15:01Face à l'évolution de la situation, Washington s'interroge sur la ligne à suivre.
15:30Le rapprochement de Lumumba avec Moscou inquiète
15:35et les rapports des services secrets sont alarmants.
15:39Larry Devlin, chef de station de la CIA à Léopoldville, écrit
15:43« Nous pensons qu'il va devenir un homme fort, éliminer l'opposition modérée
15:48et établir un régime sous influence, voire totalement contrôlé par les cocos. »
15:55La réponse ne se fait pas attendre.
15:57Le chef de la CIA, Alan Deleuze, prend une décision radicale.
16:03L'éloignement de Lumumba est notre objectif le plus important.
16:06Pour parvenir à leur fin, les États-Unis recrutent un haut gradé de l'armée congolaise,
16:26qui plus est, un ancien protégé de Lumumba.
16:29Il s'appelle Joseph Mobutu.
16:31Il est farouchement opposé au communisme et dévoré par l'envie de diriger le Congo.
16:39Fort du soutien militaire et financier de l'oncle Sam, Mobutu fera le seul boulot.
16:47Il destitue Lumumba, le place où résident surveillé, et fait le ménage dans le pays.
16:52« Le colonel Mobutu, appuyé par l'armée, annonçait qu'il prenait le pouvoir.
17:00Il ordonnait en même temps la fermeture des ambassades soviétiques et tchécoslovaques.
17:04Dans le délai de 48 heures, on devait voir le personnel de ces ambassades préparer leur déménagement et brûler leurs archives. »
17:14Caché dans une petite voiture, Lumumba parvient à s'échapper de sa résidence.
17:24Une semaine plus tard, il est attrapé par les hommes de Mobutu et livré aux rebelles du Katanga.
17:29Le premier ministre congolais est tué le 17 janvier 1961, son corps dissous dans de l'acide, pour éviter toute commémoration.
17:43Pour le remplacer, Mobutu apparaît comme le candidat idéal aux yeux des Américains.
17:51« Il est dans notre intérêt de soutenir le colonel Mobutu comme contre-pouvoir, écrit Larry Devlin à la CIA.
17:59Il attend des instructions, maintenant et dans le futur. »
18:08Washington a gagné la Manche au Congo.
18:11Les Américains ont mis en place un pion pro-occidental et écarté les Soviétiques.
18:20Fraîchement élu à la Maison-Blanche, le président Kennedy félicite personnellement Mobutu pour son aide.
18:25« Mon général, sans vous, toute cette histoire aurait échoué et les communistes auraient pris le pouvoir. »
18:36Les archives de la CIA révéleront plus tard que près de 20 millions de dollars ont été transférés à Mobutu, sans aucune trace de comptabilité.
18:44« La mort de Lumumba suscite une vague mondiale d'indignation. »
18:59À l'ONU, des militants afro-américains font irruption dans la salle lors d'un conseil de sécurité
19:08et accusent les États-Unis d'avoir assassiné le premier ministre congolais.
19:13« Des manifestations contre l'impérialisme US se multiplient, ainsi que les déclarations hostiles de dirigeants africains. »
19:27« Ou Ghana, les virulents discours de Nkrumah menacent même le financement de son barrage. »
19:32« Les États-Unis sont en train de perdre la bataille des cœurs sur le continent africain. »
19:44« D'autant qu'ils soutiennent sans défaillance l'Afrique du Sud et son régime d'apartheid. »
19:52Un système de ségrégation raciale stricte, inventé par la minorité blanche,
19:57convaincue d'avoir été élue par Dieu pour régner sur les Noirs.
20:08« Chaque nation a sa place dans le plan de Dieu, comme c'est écrit dans la Bible. »
20:13« Faites que l'indigène croit en Jésus-Christ, et vous aurez résolu la moitié de vos problèmes. »
20:19« Ensuite, il vous obéira, et il apprendra à aimer son maître. »
20:26La ségrégation est maintenue par une répression féroce.
20:44L'ANC, le parti d'opposition noire, est interdit depuis 1960.
20:49Ses dirigeants poussés à l'exil dans les pays voisins,
20:52d'autres condamnés à de lourdes peines de prison.
20:56Le plus célèbre d'entre eux est Nelson Mandela.
21:09Malgré l'indignation internationale, l'Amérique ne compte pas abandonner ce précieux allié.
21:14L'Afrique du Sud est son gendarme anticommuniste dans la région.
21:22Elle dispose aussi de réserves d'uranium, de mines de diamants et de métaux précieux, comme l'or.
21:33L'ANC, qui continue son action depuis l'étranger, n'a d'autre choix que de se tourner vers l'Union soviétique pour chercher de l'aide.
21:40L'occasion pour le Kremlin de se donner le beau rôle.
21:50Moscou offre de former les cadres de l'ANC et n'hésite pas à exploiter ce soutien en pointant du doigt le racisme américain.
21:56Au début des années 60, l'URSS jouit d'une excellente réputation sur le continent africain.
22:07Les allers-retours entre les dignitaires africains et soviétiques se multiplient.
22:25Des projets sont signés.
22:26Près d'une quarantaine de pays africains profitent de la présence de quelques 40 000 ingénieurs, conseillers politiques et militaires que le Kremlin a envoyés.
22:40Et ce n'est pas tout.
22:50A Moscou, l'Université de l'amitié des peuples, opportunément rebaptisée Université Patrice Lumumba, offre des bourses généreuses aux étudiants africains.
23:00La préparation de l'université est passée ici à 6 facultés.
23:14Les sciences mathématiques et la nature, les ingénieurs, les médicaments, les sérémonies, les historiques et les philologiques, les facultés économiques et les praves.
23:25Parmi les incontournables du programme, cours de langue.
23:31La visite du mausolée de Lénine sur la place Rouge.
23:43Et la découverte de l'hiver russe.
23:46L'opération séduction est bien rôdée.
24:06Magnanim, Khrouchev déclare devant les étudiants.
24:09Face au rouleau compresseur soviétique, l'administration Kennedy doit réagir.
24:37Pas question de laisser le continent africain à l'URSS.
24:46Nous pouvons accueillir la diversité que les communistes ne peuvent pas.
24:50Nous offrons un monde de choix.
24:53Et ils offrent un monde de coerce.
24:54Pièce maîtresse du nouveau soft power américain, les Peace Corps.
25:05Des jeunes volontaires en mission humanitaire destinés à dispenser des cours d'anglais, de mécanique et de médecine.
25:11I'm going to join the Peace Corps.
25:20Hard-working Peace Corps.
25:23Going to be a Valentino across the blue.
25:28I'm going to join the Peace Corps.
25:30Every-loving Peace Corps.
25:33Going to teach the foreign gals a thing or two.
25:36Notre paix score, je veux émphasiser, n'est pas designé comme un outil de propagande,
25:43n'est pas designé comme un outil dans la guerre mondiale.
25:46C'est un effort genuine par les gens des États-Unis
25:51pour jouer leur part en travaillant pour la paix.
25:54Ils vont vivre au même niveau que les citoyens du pays,
25:58qu'ils sont envoyés,
26:00le même travail, le même aliment,
26:03le même langage.
26:05Restaurer l'image des États-Unis devient d'autant plus urgent
26:18que la guerre du Vietnam a mis un frein à la course à l'Afrique
26:21et a réveillé le spectre d'un colonialisme américain.
26:31Engagée dans le conflit en Asie,
26:34l'Afrique renonce à de nouvelles aventures sous les tropiques.
26:46D'autant qu'en Afrique, rien ne va plus.
26:50Dix ans après la première vague d'indépendance,
26:56les Africains sont déçus de leurs leaders qui n'ont pas su tenir leurs promesses de justice sociale et de croissance.
27:04Certains, comme Krumah, ont même opéré un virage autoritaire,
27:08instauré un parti unique et imposé le culte de la personnalité.
27:12Le leader ghanéen, pionnier de la décolonisation, est destitué lors d'un coup d'État en 1966.
27:26Sa statue déboulonnée, ses écrits brûlés.
27:36Le coste de un Krumaharisme a devenu trop grand pour les gens s'arrêter.
27:40Des projets de prestigie ont fait du pays dwindling.
27:44Les rulers vivent en opulence.
27:46A la fin des années 60, une nouvelle génération de leaders nationalistes africains émergent.
28:08L'un d'entre eux est le général somalien Mohamed Syedbare.
28:14En 1969, il fomente un putsch contre le gouvernement pro-occidental à Mogadisciu.
28:24Dans la foulée, il affirme
28:26« Pour garantir les intérêts du peuple somalien, nous déclarons que la Somalie sera dorénavant un État socialiste ».
28:37Afin d'appuyer ses déclarations, le général fait circuler des affiches et symboles
28:42qui ne laissent aucun doute sur ses convictions.
28:54C'est un appel du pied que le Kremlin et son nouvel homme fort, Leonid Brezhnev, ne peuvent ignorer.
29:00D'un point de vue géostratégique, la Somalie a une grande valeur.
29:08Ses ports permettent de contrôler les grandes routes commerciales maritimes
29:12entre le canal de Suez et l'océan Indien.
29:15En 1974, un accord de coopération est signé.
29:21Des ingénieurs soviétiques débarquent pour construire une base de tir de missiles
29:26ainsi qu'un centre naval près de la mer Rouge.
29:29La République Démocratique de Somalie devient ainsi l'investissement soviétique le plus substantiel en Afrique.
29:45La même année, la dernière puissance coloniale d'Europe, le Portugal, fait la révolution des œillets
29:52pour se libérer de 40 ans de dictature.
29:57Le nouveau gouvernement démocratique décide de se retirer de l'Angola,
30:01qu'il occupe depuis le XVIe siècle.
30:05La première colonie sur le continent africain,
30:07ancienne plaque tournante de la traite des esclaves,
30:10sera l'une des dernières à retrouver son indépendance.
30:13La date est fixée un an et demi plus tard, le 11 novembre 1975.
30:22Suite aux accords signés avec les Portugais,
30:25c'est le MPLA, le Mouvement Populaire pour la Libération de l'Angola,
30:29qui doit prendre le pouvoir.
30:30À sa tête, le socialiste Agosto Neto.
30:42Étudiant en médecine dans la capitale portugaise,
30:45il a la confiance des anciens colons.
30:47Mais sa position est fragile.
30:49Il y a une tentative de l'impérialisme pour néocoloniser le pays.
30:57Et même, il y a aussi une tentative d'introduire ici, dans le pays,
31:04des forces étrangères.
31:08Ces forces étrangères sont représentées par deux autres factions
31:11qui lui disputent le pouvoir.
31:12Au nord, le FNLA, le Front National de la Libération pour l'Angola.
31:20Et au sud, l'Unita de Jonas Savimbi.
31:24Ces deux parties sont soutenues par les États-Unis et le Congo de Mobutu,
31:29appelé maintenant le Zahir.
31:31Leur objectif, éviter qu'un gouvernement socialiste ne s'installe en Angola.
31:36Entre les trois factions, une guerre civile éclate.
31:47Celui qui prendra le contrôle de la capitale Luanda le 11 novembre 1975,
31:52jour de l'indépendance annoncée, aura remporté la partie.
32:00Pour les deux blocs rivaux, une nouvelle perspective de gagner du terrain en Afrique s'ouvre.
32:04Seuls freins à leurs ambitions expansionnistes,
32:11la politique de détente que Moscou et Washington mènent depuis dix ans.
32:19Dans ce contexte, intervenir activement en Angola serait perçu comme une provocation par les deux côtés.
32:25Après un moment d'hésitation, Moscou choisit de s'engager dans le conflit.
32:35Pour ne pas mettre en danger la détente, il n'est pas question d'envoyer des hommes.
32:41Le Kremlin opte donc pour un soutien logistique et matériel.
32:45Les armes soviétiques permettent aux troupes d'Agosto Neto de s'emparer de Luanda en juin 1975.
32:55A la Maison-Blanche, c'est la panique.
33:02A l'armée,
33:03Henry Kissinger, le conseiller du président américain et Bill Colby, le patron de la CIA, se réunissent dans le bureau Oval.
33:17Il faut à tout prix faire barrage au MPLA.
33:23A l'armée, Henry Kissinger, le conseiller du président américain et Bill Colby, le patron de la CIA, se réunissent dans le bureau Oval.
33:32Il faut à tout prix faire barrage au MPLA.
33:39La CIA monte alors une opération secrète.
33:41Du matériel d'une valeur de 50 millions de dollars sera envoyé aux adversaires de Neto.
33:52Les livraisons transitent par le Zahir de Mobutu, l'allié américain.
33:59Il n'est pas le seul soutien sur le continent que les États-Unis mobilisent.
34:06Il y a aussi l'Afrique du Sud.
34:09Pretoria envoie 3000 soldats en Angola.
34:18Commence alors l'un des affrontements les plus sanglants de la guerre prétendument froide.
34:26Équipés de matériel américain, les troupes rebelles avancent depuis le nord et le sud vers la capitale.
34:31Sur place, le journaliste polonais Richard Kapuscinski raconte la tension qui règne à Luanda à l'approche des troupes.
34:45Qui va arriver le premier ?
34:51Le FNLA est une armée cruelle.
34:54Il y a quelques jours, ils ont pris la ville de Lukala.
34:58Il ne restait pas un seul survivant.
35:01Des têtes de femmes avaient été jetées le long de la route.
35:04Des corps dont on avait découpé le cœur et le foie.
35:07Le 2 novembre, une semaine avant la date de l'indépendance, les armées rebelles sont à seulement 30 km de Luanda.
35:19Les soldats du MPLA de Neto sont encerclés.
35:27Il envoie alors en toute urgence un télégramme à Moscou pour demander de l'aide.
35:35Quand le Kremlin refuse, Neto se tourne vers un autre allié communiste, Fidel Castro à Cuba.
35:45Avec l'accord tacite de Moscou, Castro lance deux jours plus tard l'opération Carlota, le sauvetage in extremis d'un Angola socialiste.
36:02Trois avions de l'armée cubaine effectuent 70 rotations entre Lille et Luanda, soit 18 000 km aller-retour,
36:10pour acheminer près de 4000 soldats volontaires et des armes.
36:17En Angola, à des milliers de kilomètres de chez eux,
36:21soviétiques et américains mènent une guerre chaude par armées interposées.
36:25Les combats se soldent par une victoire éclatante des Cubains,
36:40qui permet au MPLA d'Agosto Neto de prendre le pouvoir.
36:47Le 11 novembre 1975, Neto proclame l'indépendance du pays et devient son président.
36:53Si Moscou s'est tenu officiellement éloigné du conflit, personne n'est dupe. L'URSS a gagné.
37:07Une victoire difficile à accepter pour son rival américain.
37:23Nous ne pensons pas que les russiens auront un peu permanente en Afrique, en Angola, ou d'autres.
37:29Le tout record des pays africains est que,
37:32même si ils peuvent rire pour un moment et que les russiens ont aidés,
37:35ils vont s'en sortir plus vite.
37:37Moscou savoure son triomphe.
37:45Le vent tourne enfin dans notre direction, affirme un officiel du Kremlin.
37:54Les américains, en revanche, sortent humiliés de cette guerre.
37:58Ils essuient aussi de nombreuses critiques pour leur soutien au régime sud-africain.
38:02Certaines élites sont même persuadées que leur pays est en train de perdre la bataille pour l'Afrique.
38:17Galvanisé par son succès, le Kremlin poursuit son offensive sur le continent africain.
38:24Sa nouvelle cible, l'Ethiopie, dans l'est de l'Afrique.
38:29Jamais colonisé, c'est l'une des plus anciennes monarchies au monde.
38:34Son roi, Aïlé Sélassié, règne en despote depuis des décennies,
38:39sur un peuple qui vit dans la pauvreté et dont seuls 5% savent lire et écrire.
38:44En 1974, une révolution éclate.
38:54Un mouvement appelé Dergue renverse et exécute le roi.
38:58A la tête de la contestation, Mengistou Aïlé Mariam, un militaire issu des milieux populaires.
39:07Il annonce vouloir transformer le pays selon les principes du marxisme-l'hélénisme.
39:13L'université d'Addis Abeba, financée par les Etats-Unis depuis les années 50, devient le foyer de la révolution.
39:28Mengistou lance aussi une campagne contre ses opposants.
39:39Lors d'un discours public, le nouveau chef éthiopien brise une bouteille de liquide rouge
39:45pour montrer qu'il entend faire couler le sang des contre-révolutionnaires.
39:48Une vague de terreur s'abat alors sur le pays.
40:02Pendant les deux années à venir, 500 000 hommes, femmes et enfants sont raflés et exécutés.
40:10Ces atrocités n'empêchent pas Moscou de soutenir la transformation socialiste du pays.
40:18L'Ethiopie nationalise ses entreprises et collectivise ses terres, sous l'œil bienveillant de son grand frère soviétique.
40:33Mais si le Kremlin ferme les yeux sur cette terreur rouge, il va devoir prendre position
40:39dans un conflit qui opposera l'Ethiopie à la Somalie de Siadbaré, un autre de ses protégés africains.
40:45Le 23 juillet 1977, les troupes somaliennes envahissent leurs voisins éthiopiens.
40:52La raison de cette agression, le désert de Gaden.
40:59Situé en Ethiopie, il est revendiqué par la Somalie.
41:03Pour choisir son camp, le Kremlin pèse le pour et le contre.
41:11D'un côté, il y a la Somalie et sa situation géostratégique avantageuse.
41:17Conscient de cet atout, Siadbaré ne se laisse pas enfermer dans sa relation avec l'URSS.
41:25Il cultive aussi des liens avec la Chine, l'Arabie Saoudite et même les États-Unis.
41:32De l'autre côté, il y a l'Ethiopie, une élève idéologiquement plus docile.
41:40Mengistou va jusqu'à ériger une statue de Lénine en plein centre d'Addis-Abeba, la plus grande en dehors de l'Europe.
41:49Le leader éthiopien déclenche aussi l'enthousiasme chez certains dirigeants communistes européens, notamment chez l'Allemand Erich Honecker.
42:00Le secrétaire de la Socialistique Unique Partie de la Germaine, le collègue Honecker, qui a été venu à Prasso-Addis-Abeba, et le collègue Mingistou Haile Mariam, ont créé le médecin Karl Marx.
42:11Mais il n'y a pas que l'idéologie. L'Ethiopie est importante pour pallier certains manques de l'économie est-allemande.
42:22Notamment une pénurie de café qui fait craindre aux dirigeants de la RDA une révolte populaire.
42:33Mengistou accepte de troquer les précieux grains de café en échange d'armes est-allemandes.
42:39Honecker est conquis.
42:41Le cubain Fidel Castro veut lui aussi se faire son opinion.
42:53Après une rencontre avec le somalien Siad Baré et l'éthiopien Mengistou, Castro conclut.
43:00Siad Baré est avant tout nationaliste. Le socialisme qu'il affiche est une coquille vide.
43:06Mengistou en revanche est un homme calme, sérieux et sincère, conscient du pouvoir des marques.
43:11Mais c'est à Brejnev de trancher.
43:17Dans la guerre pour le désert de Gaden, il donne la priorité à l'Ethiopie de Mengistou.
43:23L'armée rouge entreprend alors sa plus grande intervention militaire étrangère depuis la guerre de Corée dans les années 50.
43:32En six mois, jusqu'à l'été 1978, armes et matériels d'une valeur d'un milliard de dollars sont envoyés en Éthiopie.
43:49Fidel Castro rajoute 11 000 de ses soldats.
43:54Une force militaire considérable qui écrase l'armée somalienne soutenue par les Etats-Unis.
44:01Cette nouvelle bataille par procuration entre les deux superpuissances se solde une fois de plus par une victoire soviétique.
44:17Mais la relation avec les Etats-Unis a atteint un point de non-retour.
44:27Zbigniew Brzezinski, le conseiller pour la sécurité nationale du président Jimmy Carter, écrira plus tard
44:39« La détente s'est perdue dans le désert de Gaden. »
44:45Il est temps pour l'Amérique de répliquer.
44:50À partir de 1981, le nouveau locataire de la Maison-Blanche s'appelle Ronald Reagan.
44:58Pour lui, l'URSS est ni plus ni moins l'empire du mal qu'il faut détruire coûte que coûte.
45:07Le moment semble propice.
45:10Depuis deux ans, l'Union soviétique est embourbée en Afghanistan
45:13où elle consomme de précieuses ressources.
45:18Reagan veut porter le coup de grâce
45:20et lance une nouvelle course à l'armement surnommée « La guerre des étoiles ».
45:26Débarrassés du fardeau vietnamien,
45:50les Américains peuvent investir dans la reconquête de l'Afrique.
45:53À ce titre, Reagan reçoit l'Angolais Jonas Savimbi de l'Unita,
46:01adversaire du gouvernement socialiste en place,
46:04et lui renouvelle son soutien.
46:11Washington révise aussi ses relations avec l'Afrique du Sud,
46:15dont la politique d'apartheid devient de plus en plus problématique à assumer.
46:19Dans les townships où est parquée la population noire,
46:24de nombreuses émeutes éclatent.
46:27L'armée sud-africaine les réprime violemment.
46:29Sous la pression des mouvements noirs américains,
46:39les États-Unis doivent prendre leur distance de cette répression.
46:50Responsables politiques sud-africains, occidentaux
46:53et leaders de l'opposition de l'ANC entament secrètement des négociations.
46:59Les Blancs envisagent pour la première fois d'abolir l'apartheid.
47:03En échange, l'ANC, soutenu jusque-là par Moscou,
47:07promet d'abandonner sa politique socialiste.
47:10Au milieu des années 80,
47:17le communisme ne fait plus rêver les Africains.
47:20Au contraire.
47:22Son bilan est plutôt désastreux.
47:24Notamment chez le fidèle camarade Mengistou en Éthiopie.
47:37La collectivisation des terres a entraîné une terrible famine.
47:42Rien que dans la province de Wolo,
47:44dans le nord-est du pays,
47:45elle a coûté la vie à plus de 500 000 personnes.
47:48A Moscou, la classe politique vieillissante
47:58n'a rien à opposer à l'érosion de son influence.
48:02L'Empire Rouge doit lutter contre ses propres problèmes économiques.
48:13Nommé à la tête du Parti communiste en 1985,
48:16Mikhaï Gorbatchev reconnaît les difficultés de son pays.
48:22Sous son impulsion,
48:24l'URSS commence à se retirer d'Afrique.
48:28Ainsi, quand les indépendantistes érythréens
48:30menacent de faire scission dans le nord de l'Éthiopie,
48:33Gorbatchev ne vient pas en aide à Mengistou.
48:37Par manque de moyens,
48:39mais surtout parce que les bonnes relations avec l'Europe
48:42et les États-Unis sont devenues sa priorité.
48:46Au sujet de l'Afrique,
48:50Andrei Koziref,
48:52futur ministre des Affaires étrangères,
48:54déclare
48:55« La majorité des pays en voie de développement
48:58ne souffrent pas tant du capitalisme
49:00que de son absence. »
49:06Un aveu d'échec fait en 1988
49:08qui sonne la fin définitive
49:10de l'expérience soviétique en Afrique.
49:18Un an plus tard,
49:19le mur de Berlin tombe.
49:25Deux ans plus tard,
49:26l'Union soviétique est démantelée.
49:28C'est la fin de la guerre froide.
49:40Et sur le continent africain,
49:42le jeu des alliances,
49:44savamment tissé pendant plus de 30 ans,
49:46s'écroule,
49:47tel un château de cartes.
49:48L'Amérique lâche successivement
49:51ses pions anticommunistes.
49:54Mobutu au Zahir
49:55et Savimbi en Angola.
49:59En Éthiopie,
50:00Mengistu déclare vouloir
50:01abandonner le communisme
50:02et décrète l'ouverture du pays
50:04à une économie mixte.
50:08Un retournement opportuniste
50:09qui n'empêchera pas
50:11la scission de l'Érythrée,
50:12le dernier pays africain
50:14à acquérir son indépendance
50:15en 1993.
50:20En 1994,
50:23après avoir passé
50:2327 années en prison,
50:25Nelson Mandela
50:26devient le premier président
50:28d'une nouvelle Afrique du Sud.
50:35Le journaliste polonais
50:37Richard Kapuscinski écrira
50:39« En Afrique,
50:41la guerre froide a été menée
50:42d'une manière particulièrement
50:44brutale et cynique.
50:46Et l'Afrique était incapable
50:48de faire quoi que ce soit
50:49pour arrêter le massacre. »
50:58La fin de la guerre froide
50:59a donné à l'Afrique
51:01l'occasion de reprendre
51:02son destin en main.
51:06En 2002,
51:08l'organisation de l'unité africaine
51:09est devenue
51:10l'Union africaine.
51:12un nouvel outil
51:15de coopération économique
51:16et politique
51:17mais aussi
51:18un contre-pouvoir
51:19aux convoitises étrangères
51:21dont l'Afrique
51:22est à nouveau la proie.
51:25Américains,
51:26Européens
51:26mais aussi Russes
51:27et Chinois
51:28investissent le continent
51:30pour exploiter
51:31ces précieuses ressources.
51:32A l'occasion
51:36du 60e anniversaire
51:37de l'Union africaine
51:38en 2023,
51:40son président
51:41met en garde
51:41contre un scénario dangereux.
51:43La volonté
51:44des uns
51:45et des autres
51:46menace
51:47de transformer
51:48l'Afrique
51:48en terrain
51:49de bataille
51:50géostratégique.
51:52Recréant de ce fait
51:53une nouvelle version
51:54de la guerre froide,
51:56nous devons résister
51:57à toutes les formes
51:59d'instrumentalisation
52:00de nos États membres.
52:05Tout l'enjeu
52:06de l'Afrique
52:07est de faire face
52:08aux nouveaux impérialismes
52:09pour éviter
52:11que l'histoire
52:12ne se répète.
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