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Rencontre entre Donald Trump, Volodymyr Zelensky et les dirigeants européens à Washington : la paix est-elle possible ? Tout savoir et tout comprendre sur ce qui ce sera passé au cours de la nuit avec Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique (il publie par ailleurs aujourd'hui "La question israélienne", aux éditions de l'Observatoire.
Regardez L'invité RTL de 7h40 avec Stéphane Boudsocq du 19 août 2025.
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00:00RTL Matin
00:02Que faut-il retenir des discussions hier soir à Washington entre Donald Trump, Volodymyr Zelensky et les principaux dirigeants européens ?
00:11La paix entre la Russie et l'Ukraine est-elle enfin en train de se dessiner ?
00:16Question que nous posons ce matin à notre premier invité. Bonjour Bruno Tertrait.
00:21Bonjour.
00:22Vous êtes directeur adjoint de la Fondation pour la Recherche Stratégique, grand spécialiste des relations internationales.
00:28Je rappelle le titre d'un de vos derniers ouvrages, La Guerre des Mondes, paru aux éditions de l'Observatoire.
00:34D'abord sur la forme.
00:35Les images des réunions à la Maison Blanche, d'abord le duo Trump-Zelensky, puis après en groupe avec les Européens,
00:41ont montré des participants volontaires, souriants, désireux d'avancer ensemble vers un plan de paix.
00:47Est-ce que pour vous c'est une unité de façade, un coup de com' ou est-ce que c'est la réalité ?
00:52C'est les deux. C'est d'abord un coup de com' bien sûr, parce qu'il était important pour les Européens de projeter une image d'unité vis-à-vis du président américain.
01:05C'était important pour le président américain de montrer qu'il était au centre du jeu.
01:10Bref, j'allais dire, tout le monde est content, à la fois le président Zelensky, les Européens et le président Trump.
01:15Et parce que cela permet de dire, vous voyez, nous essayons véritablement, tous ensemble, de travailler à la résolution de ce conflit.
01:25Sur le fond, en revanche, c'est quand même beaucoup plus flou, parce qu'il n'y a pas eu d'annonce officielle.
01:31Il n'y a pas eu de détail sur ce qui serait éventuellement envisagé.
01:36Mais la forme, c'est important aussi. Les apparences, ça compte.
01:40Donc, je dirais qu'en tout cas, ça n'est pas un échec.
01:42L'annonce principale, en tout cas, à ce stade de ce rendez-vous de Washington hier, c'est ce futur sommet Poutine-Zelensky qui pourrait précéder une autre rencontre.
01:51Poutine-Zelensky-Trump, ça reste flou, vous le disiez ce matin, mais c'est quand même une avancée majeure.
01:57C'est une avancée, si vous voulez, au sens où tout le monde est d'accord officiellement pour cette éventuelle perspective.
02:06Mais je crois qu'il faut doucher les enthousiasmes de certains.
02:09La Russie n'a montré à aucun moment depuis hier soir de signe qu'elle accepterait le principe d'une telle rencontre.
02:19La seule chose que les Russes ont dit, c'est que nous sommes d'accord pour élever le niveau des discussions,
02:23c'est-à-dire de discuter avec les Ukrainiens, éventuellement avec les Américains aussi, à un niveau relativement élevé.
02:30Mais je le répète, Poutine n'a absolument pas donné son accord pour un tel sommet tripartite.
02:35Oui, Poutine qui était absent des discussions, évidemment, physiquement hier, mais quand même omniprésent.
02:40On a appris que Donald Trump avait interrompu la réunion avec tous les participants pour rappeler le président russe,
02:47donc pendant ces discussions, et ensuite venir rendre compte de sa conversation à ses interlocuteurs.
02:53Il est là, il est très très très présent, même si c'est en coulisses, pour l'instant, en tout cas, Bruno Tertré.
02:59Oui, que Poutine soit là, oui, c'est une évidence, même s'il est en coulisses,
03:03mais je trouve que c'est assez intéressant, parce que ça montre que Trump, en tout cas, a une véritable volonté de faire quelque chose.
03:10Vous le savez, on l'a rappelé récemment sur notre antenne, il veut absolument le prier le Nobel de la paix,
03:15il veut absolument se débarrasser de cette affaire.
03:17Donc, on peut au moins le créditer d'essayer de faire quelque chose avec Poutine,
03:23même si, malheureusement, comme on l'a vu en Alaska, il se fait trop souvent balader par son interlocuteur.
03:29Vous vous attendez aujourd'hui à ce que Vladimir Poutine réagisse d'une façon ou d'une autre,
03:34prenne position, annonce à son tour des choses ?
03:37Comme d'habitude, la Russie va prendre son temps, comme d'habitude, la Russie joue la montre.
03:42Je rappelle que les bombardements n'ont pas cessé cette nuit en Ukraine.
03:45Donc, il y aura, bien sûr, des réactions russes.
03:48Celles-ci, je prends le pari, seront relativement floues.
03:52Il n'y aura pas d'annonce majeure de la part de la Russie, je pense, dans les heures et dans les jours qui viennent.
03:58Et Trump va continuer à presser la Russie en ce sens.
04:03Et Poutine va continuer à jouer avec Trump comme un chat joué avec une pelote de laine.
04:09Alors, parmi les participants européens qui étaient présents en Washington hier,
04:12il y avait le président français Emmanuel Macron.
04:14Il a dit d'accord pour une réunion.
04:16Et pourquoi pas une réunion à quatre ?
04:17C'est-à-dire Ukraine, Russie, États-Unis et l'Europe.
04:21C'est important pour vous ?
04:23Alors, ce n'est pas anodin parce que ça veut dire que toute la stratégie des Européens
04:27emmenée sur ce terrain par Emmanuel Macron,
04:30et je dois dire de manière assez fine,
04:33c'est de marquer Trump à la culotte, si j'ose dire,
04:36d'accompagner le président Zelensky pour lui montrer qu'il n'est pas seul,
04:39de l'accompagner presque physiquement, comme on l'a vu hier à Washington,
04:42mais aussi de montrer qu'eux, ils veulent peser dans cette affaire.
04:47Et je crois que les Européens, quelque part, ont réussi leur coup,
04:49au sens où Trump a compris que de toute façon, il avait besoin d'eux aussi,
04:53quand on parle notamment de ces fameuses garanties de sécurité futures
04:57dans le cadre d'un éventuel accord de stabilisation, si ce n'est de paix.
05:02Et donc, les Européens sont dans le jeu définitivement, à mon sens, oui.
05:07Alors, c'est en effet un des autres points d'accord apparemment d'hier soir,
05:11cette sécurité garantie à l'Ukraine après le conflit.
05:15On a cru comprendre qu'Américains et Européens, en effet,
05:19allaient y prendre toute leur part, mais là aussi,
05:22ils sont de bonnes intentions, tant mieux,
05:23mais concrètement, ça peut vouloir dire quoi ?
05:26Ça passe par le renforcement des capacités militaires de l'Ukraine,
05:29ça passe par une présence internationale permanente,
05:32comme une force d'interposition sur le terrain.
05:35Alors, c'est là que, justement, ça devient très flou,
05:38puisque après avoir évoqué pendant quelques jours,
05:41notamment par la bouche de Marco Rubio, le secrétaire d'État américain,
05:45la possibilité d'un engagement formel,
05:48peut-être même un traité, pourquoi pas,
05:50de défense des 80% du territoire ukrainien qui ne sont pas occupés,
05:56les Américains sont redevenus un petit peu flous sur ce sujet.
06:00Donc, quand on parle de garantie de sécurité,
06:02ça peut vouloir dire soit un engagement ferme et solennel de défense,
06:06ça peut vouloir dire effectivement, et c'est ce à quoi les Européens pensent,
06:10une présence militaire concrète sur le terrain,
06:15ça peut vouloir dire aussi le renforcement considérable des capacités militaires ukrainiennes,
06:21y compris par des armes américaines qui seraient achetées à la fois par les Ukrainiens et les Européens.
06:26Donc voilà, on parle de tout cela à la fois,
06:28mais je dois dire que le Sunday Washington n'a absolument pas clarifié l'état exact du débat.
06:34Et puis, Bruno Tertré, on ne parle plus non plus de cesser le feu.
06:37Donald Trump, en affirmant d'ailleurs au passage avoir mis fin déjà à six guerres, je le cite,
06:43dit en gros que ce n'est pas forcément utile et qu'il vaut mieux tout de suite aboutir à la paix.
06:48Mais ça, c'est un désaccord avec les Européens qui, eux, ont commencé à dire qu'il fallait d'abord cesser le feu.
06:54Oui, c'est un désaccord majeur.
06:56Frédéric Schmerz, le chantelier allemand, l'a d'ailleurs dit devant le président Trump,
07:01c'était assez courageux de sa part,
07:02mais les Européens ont préféré, encore une fois, accompagner la manœuvre plutôt que se prendre Trump de front.
07:09Ils ont dit, bon, vous ne voulez pas cesser le feu tout de suite parce que M. Poutine n'en veut pas ?
07:14Il va très bien, essayons d'aller directement à un hypothétique accord de paix,
07:19mais ils n'ont pas cessé de répéter que ça serait quand même difficile de négocier quoi que ce soit
07:23pendant que les bombardements continuent comme ça a été le cas cette nuit.
07:27Et puis, il y a ce dossier des territoires, d'éventuels échanges.
07:30Donald Trump en parlait il y a encore peu de temps.
07:34Ça n'a pas du tout été abordé, en tous les cas pas publiquement.
07:36Peut-être se le sont-ils dits entre eux.
07:39Le chancelier allemand, Merz, vous l'évoquiez, a dit après la réunion
07:43que l'Ukraine ne devait pas y être contrainte.
07:45Et on sait que pour Kiev, ça c'est une ligne rouge totalement infranchissable.
07:51Oui, c'est aussi une ligne rouge pour les Européens qui tiennent beaucoup.
07:54Est-ce que l'un des grands acquis de la sécurité européenne,
07:56à savoir on ne change pas les frontières par la force, soit respecté ?
08:01Alors, on peut imaginer évidemment en diplomatie des formules créatives,
08:04du type, nous ne reconnaissons pas tel territoire comme Russe,
08:09mais nous sommes d'accord pour dire qu'il est au moins provisoirement occupé.
08:12Mais là-dessus, il n'y a pas eu effectivement de discussion entre Européens Zelensky et Trump.
08:20Ça a été certainement discuté pendant la réunion bilatérale entre Trump et Zelensky.
08:25Il y a d'ailleurs cette photo où on voit une carte,
08:27on voit Zelensky et Trump qui sont devant une carte de l'Ukraine.
08:30Mais en effet, il a été décidé de réserver cette discussion à un sommet,
08:38ou en tout cas à une réunion entre l'Ukraine et la Russie.
08:40Le message, c'était, nous, on n'est pas là pour discuter de vos territoires,
08:44ce sont les Ukrainiens souverains qui décideront de l'avenir, du futur,
08:50de ces territoires occupés par la Russie.
08:52Car je le répète, Trump n'arrête pas de parler d'échanges,
08:55mais il n'y a pas grand-chose à échanger du côté ukrainien.
08:58Et quid Bruno Tertrette d'éventuelles sanctions contre Moscou
09:02en cas d'échec final des discussions ?
09:05Le président Macron l'a évoqué, lui aussi à l'issue de la réunion,
09:09mais en surface, ce dossier-là a été évacué également.
09:14Non, pas complètement, parce qu'ils en ont parlé à demi-mot.
09:18Si vous voulez, les Européens, et notamment le président Macron,
09:21effectivement, n'ont pas cessé de répéter,
09:23attention, nous avons encore des moyens de faire mal à la Russie,
09:26dont l'économie d'ailleurs commence à aller de moins en moins bien.
09:29Les Américains, de leur côté, le langage de Trump,
09:34comme d'habitude, il change presque tous les jours.
09:37Trump se dit parfois favorable à faire mal à la Russie
09:40sur le plan économique, et puis il change d'avis le lendemain.
09:44Donc on ne sait pas vraiment ce que les Américains comptent faire
09:47le jour où Trump se rendra compte que, pardonnez-moi l'expression,
09:51Poutine le mène en bateau, ce qui est à mon avis très probable qu'il arrive.
09:55Vous pensez d'ailleurs, au passage, Bruno Tertrecht,
09:58qu'il a été déstabilisé, heurté, surpris, je ne sais pas,
10:02par ce qui s'est passé en Alaska vendredi.
10:05Cet accueil en grande pompe, cette réhabilitation de Poutine
10:08dès le tapis rouge sur le tarmac,
10:11pour au final une montagne qui accouche d'une souris.
10:14Ça l'a remué, Donald Trump ?
10:16Vous savez, c'est très difficile de déstabiliser ou de remuer Donald Trump.
10:20Il est tellement sûr de lui que je ne suis même pas sûr
10:23qu'il ait compris que, de toute façon, tout ce tralala,
10:27tout ce décorum, tout ce qu'il a offert symboliquement à Poutine
10:30et qui était énorme.
10:32Finalement, vous savez, Poutine, comme tout bon dirigeant soviétique
10:35par le passé et russe aujourd'hui,
10:37eh bien, il empoche les concessions,
10:39mais il n'offre rien de substantiel, rien de sérieux.
10:43Donc je ne suis pas sûr du tout que Trump ait été déstabilisé
10:46par ces images du week-end dernier
10:48qui n'étaient quand même pas tout à fait au crédit de l'Amérique.
10:50Qu'attendez-vous maintenant concrètement en termes de calendrier ?
10:54On s'est parlé hier à Washington,
10:56on s'est appelé également entre Washington et Moscou.
10:59Il y a une vidéoconférence aujourd'hui
11:01entre les 27 Européens à l'issue de ces discussions.
11:05Le calendrier, là, on nous dit,
11:06alors ça va bouger d'ici dix jours à deux semaines.
11:10Vous pensez que ça peut s'accélérer vraiment maintenant
11:12ou comme vous l'évoquiez,
11:14les Russes notamment vont essayer de temporiser encore ?
11:17Non, je pense vraiment que la Russie va essayer de temporiser.
11:20Pour être très clair,
11:22s'il y avait un sommet entre Trump, Zelensky et Poutine
11:27avant le mois de septembre,
11:30je crois que je changerais de métier
11:31parce que ça voudrait dire que je n'ai rien compris
11:34à ce qui est en train de se passer.
11:35Donc, écoutez, je serais vraiment très surpris
11:38qu'il se passe des choses très substantielles,
11:41des avancées concrètes substantielles,
11:43là, avant le début du mois de septembre.
11:45Mais avant que vous changez de métier,
11:47Bruno Tertré, on vous garde encore ce matin,
11:49on a besoin de votre éclairage.
11:51Vous êtes confiant quand même,
11:52vous êtes un grand spécialiste des relations internationales.
11:55On voit que les choses,
11:56alors peut-être à petits pas pour l'instant,
11:58progressent.
11:59Vous pensez qu'au final,
12:00puisque le but à l'arrivée,
12:02c'est d'obtenir quand même une paix,
12:04vous pensez qu'on va y arriver ?
12:06On est à trois ans et demi de conflit.
12:08Vous le disiez, ça frappe encore tous les jours sur l'Ukraine.
12:11Les Russes avancent sur le front.
12:13Ça peut vraiment avancer positivement ?
12:16Je crains que nous ne puissions pas avoir de véritable paix
12:20avec le régime russe tel qu'il est aujourd'hui
12:23et l'Ukraine démocratique que nous connaissons.
12:25Je crois que c'est tout simplement impossible.
12:27Ce qu'on peut espérer,
12:29c'est une sorte de cessez-le-feu plus,
12:31c'est-à-dire une stabilisation de la situation,
12:34un armistice de longue durée,
12:35au moment, et nous n'y sommes pas encore,
12:37où les deux parties considèreraient
12:39que c'est de leur intérêt mutuel.
12:42Mais là, la Russie, malheureusement,
12:44à mon sens, n'est pas du tout
12:46dans cet état d'esprit.
12:49Donc, il se pourrait être que dans les semaines,
12:50dans les mois qui viennent,
12:51on ait à un moment ou un autre,
12:54effectivement, cette stabilisation.
12:55Mais je ne crois pas du tout à une paix véritable.
12:58Comment voulez-vous faire la paix,
13:00au sens strict du terme,
13:02entre un régime quasiment fasciste aujourd'hui
13:05qui a décidé que son voisin ne devait pas exister,
13:08et ce même voisin,
13:09qui est un pays, certes,
13:11une démocratie imparfaite,
13:12mais qui est un véritable pays européen.
13:14C'est un petit peu comme dire
13:15que l'Allemagne nazie aurait pu faire la paix,
13:19faire la paix avec la Pologne.
13:20Merci Bruno Tertré,
13:22c'était passionnant, extrêmement clair.
13:24Merci d'avoir été notre invité ce matin sur RTL.
13:26Je rappelle que vous êtes le directeur adjoint
13:28de la Fondation pour la Recherche Stratégique.
13:31Bonne journée à vous.
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