ART & MARCHÉ - Emission du vendredi 19 janvier

  • il y a 8 mois
Vendredi 19 janvier 2024, ART & MARCHÉ reçoit Marie-Anne Ferry-Fall (Directrice, ADAGP) et Solenne Blanc (Directrice générale, ArtNova et Groupe Beaux Arts)

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Transcript
00:00 [Générique]
00:08 Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans Art & Marché,
00:10 votre émission hebdomadaire consacrée au marché de l'art.
00:14 Commençons par l'actualité de la semaine,
00:16 Arnaud Hovag, maison mère du groupe Beaux-Arts,
00:18 fait l'acquisition de The Art Business Conference,
00:21 portant à l'international le réseau de conférences sur le marché de l'art.
00:25 Nous en parlons avec Solène Blanc,
00:27 qui est directrice générale du groupe Beaux-Arts et d'Art Nova.
00:30 Pour l'interview de la semaine, nous nous intéressons au droit d'auteur,
00:33 l'ADAGP, qui protège les créateurs d'art visuel dans le monde a fêté ses 70 ans
00:39 et publie une histoire du droit d'auteur de l'antiquité,
00:43 alia aux éditions Flammarion.
00:45 Nous interviewons sa directrice, Marianne Ferryfol.
00:49 Tout de suite, c'est Art & Marché.
00:51 [Générique]
00:55 Bonjour Solène Blanc, vous êtes directrice générale du groupe Beaux-Arts et d'Art Nova.
00:59 Merci d'être avec nous.
01:01 Vous avez annoncé l'acquisition de The Art Business Conference,
01:04 le principal réseau international de conférences pour le marché de l'art.
01:08 Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi avoir fait cette acquisition ?
01:12 Bonjour Sybille.
01:14 Oui, en effet, nous avons réalisé cette acquisition tout récemment.
01:19 Déjà, The Art Business Conference,
01:21 c'est un peu la référence au niveau international des conférences
01:25 qui réunissent les acteurs du marché de l'art,
01:27 donc active avec une conférence à Londres, à New York
01:30 et également des événements satellites,
01:33 notamment à Tefaf, Dubaï et autres.
01:35 C'est pour nous une continuité
01:39 puisqu'on avait lancé The Art Market Day à Paris
01:41 dans cette même esprit de réunir les acteurs internationaux du marché de l'art.
01:46 Et c'est aussi pour Arnova qui n'est pas vraiment fort à l'international
01:51 en renforçant cette logique de réseau.
01:54 Et donc l'objectif, c'est de faire une sorte de grande plateforme
01:59 où tous les acteurs du marché de l'art vont pouvoir communiquer,
02:04 se rencontrer à travers des conférences.
02:07 Tout à fait.
02:08 Ce sont des rendez-vous,
02:10 un rendez-vous annuel dans chacune de ces grandes villes
02:14 pour que les acteurs internationaux du marché de l'art puissent se rencontrer, débattre.
02:18 Donc on organise, ce sont toujours des formats d'une journée, de panel
02:22 avec des référents qui viennent porter autour de sujets
02:26 qui sont vraiment les tendances et les facteurs de transformation du marché de l'art,
02:32 qui vont apporter leur retour d'expérience, leur point de vue, débattre.
02:37 Et donc il y a aussi cet effet de rencontre.
02:40 C'est important pour nous, en temps post-Covid, encore plus,
02:43 d'avoir ces espaces de rencontre et ces espaces aussi d'apport
02:46 et d'échange d'expertise et d'expérience.
02:48 Et ça, ça va se matérialiser dès l'année prochaine ?
02:51 Tout à fait.
02:53 Enfin, dès cette année, donc dès 2024,
02:55 puisque la prochaine conférence sera à Maastricht le 8 mars prochain,
03:00 à New York le 23 mai, à Londres le 10 septembre
03:04 et puis The Art Market Day, qui aura lieu à Paris en novembre 2024
03:08 et dont la gestion sera également confiée à Louise Ameline,
03:12 qui est la fondatrice de The Art Business Conference
03:15 et qui conserve à la fois une part minoritaire dans la société The Art Business Conference,
03:20 mais aussi va être vraiment chargée de diriger et de développer cette activité
03:24 en lien avec le groupe Beaux-Arts et compagnie qui portait The Art Market Day,
03:28 qui de coup devient The Art Business Conference Paris.
03:31 Merci beaucoup pour toutes ces précisions solennes blanches.
03:35 Je rappelle que vous êtes directrice générale d'Art Nova et du groupe Beaux-Arts.
03:38 Et tout de suite, on passe à l'interview de la semaine.
03:40 [Générique]
03:44 L'ADHGP fête ses 70 ans et autant d'années à faire respecter les droits d'auteur des artistes qu'elle accompagne.
03:50 Sa directrice Marianne Ferrifal est avec nous à l'occasion de la sortie du livre
03:55 "Une histoire du droit d'auteur de l'Antiquité à l'IA" aux éditions Flammarion
04:00 et écrit par Jean-Baptiste Rendu et Richard Robert.
04:03 Merci beaucoup d'être avec nous.
04:04 Merci de votre invitation.
04:06 Alors un petit feu d'actualité qui est amusant, qui nous prend un petit peu de distance,
04:09 j'imagine, avec tous ces droits d'auteur, c'est...
04:11 J'ai vu qu'il y avait la première version de Mickey qui est rentrée dans le domaine public.
04:16 Alors je me suis demandé, en fait, qu'est-ce que ça veut dire, le domaine public ?
04:19 Qu'est-ce que ça veut dire, en fait, qu'on peut utiliser cette image comme bon nous semble ?
04:24 Oui, vous avez raison.
04:25 En fait, le droit d'auteur a deux grandes composantes.
04:29 L'une, le droit moral qui est perpétuel.
04:32 Et l'autre, que l'on appelle les droits patrimoniaux.
04:35 Donc le fait de pouvoir, pour un auteur, gérer, autoriser ou non, l'utilisation de son oeuvre
04:42 et en toucher une rémunération.
04:43 Eh bien, ces droits ont une durée donnée.
04:47 Alors, en Europe, c'est la vie de l'auteur et 70 ans après.
04:50 Aux Etats-Unis, on est sous l'empire du copyright.
04:53 C'est beaucoup plus compliqué de calculer la durée des droits.
04:56 Mais effectivement, en tout cas, au 1er janvier 2024,
05:01 un certain nombre d'artistes sont tombés dans le domaine public.
05:04 Notamment les premières oeuvres de Walt Disney.
05:08 Vous avez utilisé ce terme copyright,
05:11 qui est un terme qu'on utilise pas mal dans le grand public, dans le jargon de tous les jours.
05:15 Et finalement, c'est très différent du droit d'auteur.
05:18 Oui et non.
05:20 Les deux, ce sont une propriété intellectuelle.
05:23 C'est-à-dire le fait qu'un travailleur intellectuel, qui est le créateur,
05:29 ou un investisseur, sur des oeuvres protégées,
05:33 ait une sorte de monopole d'exploitation pour protéger la création
05:37 et récompenser la création ou l'investissement dans la création.
05:41 En fait, le copyright est né aux Etats-Unis,
05:44 d'ailleurs quelques années avant le droit d'auteur.
05:48 Là, on est à la fin du 18e siècle.
05:51 C'est un droit qui rémunère l'investissement,
05:55 c'est-à-dire le temps passé où l'argent mis à créer une oeuvre
05:59 pour qu'il y ait ce retour sur investissement.
06:01 Et c'est très différent du droit d'auteur qui lui est né en Angleterre
06:07 et en France à la fin du 18e siècle, au moment de la Révolution française, en 1793.
06:13 Et qui lui, rémunère, protège l'auteur en tant que personne physique,
06:19 en tant qu'humain qui produit des créations, qui enrichissent la société.
06:23 Et c'est une récompense de ces créations.
06:26 D'accord.
06:27 Alors, c'est un livre qui a 2000 ans d'histoire de droit d'auteur.
06:31 Est-ce que dans ces 2000 ans, la France a une position particulière ?
06:35 C'est vrai qu'on parle beaucoup de l'exception culturelle, etc.
06:37 La France se bat beaucoup aussi pour nos artistes.
06:39 Quelle est la place de la France par rapport au droit d'auteur ?
06:42 Alors, elle est très importante.
06:44 Je ne voudrais pas être taxée de chauvine en disant que c'est peut-être
06:47 l'une des plus importantes au monde en matière de droit d'auteur.
06:50 Importante, c'est-à-dire plus de protection ?
06:52 Oui, et puis un vrai rôle d'exemplarité.
06:56 Moi, je le vois.
06:58 Je suis, au niveau international, rapporteur général de toutes les sociétés d'auteurs
07:03 des arts graphiques et plastiques dans le monde, le CISGP.
07:07 Et après avoir été aussi présidente des sociétés européennes,
07:12 je vois combien la voix de la France et l'action de la France
07:15 dans la protection de la culture et dans la protection des artistes,
07:18 qui peuvent être d'ailleurs deux choses très différentes,
07:22 et notamment en droit d'auteur, est extrêmement attendue,
07:26 regardée et suivie.
07:28 Donc c'est extrêmement important parce que, à la fois,
07:32 la culture française en tant que création artistique du moment
07:36 a toujours été très vive, et le rayonnement aussi international
07:41 est très important.
07:43 Et je crois que nos collègues internationaux prennent la mesure
07:47 du fait que le rayonnement culturel d'un pays,
07:51 ça passe surtout et avant tout par le soutien à la création
07:56 et par la protection des artistes.
07:58 - Et alors, vous partez de l'Antiquité.
08:01 A l'Antiquité, je m'imagine qu'il n'y avait pas le terme "droit d'auteur",
08:05 mais est-ce qu'il y avait déjà cette perception de la protection d'une oeuvre d'art ?
08:09 - Alors, non, parce que bien sûr, le droit d'auteur, c'est quelque chose
08:14 qui, comme je vous le disais, est né, en tout cas, au siècle des Lumières,
08:20 à un moment où la notion de l'individu au sein et sa place dans la société
08:24 a été reconnue en tant que telle dans l'Antiquité,
08:27 on était quand même sociétalement très loin de tout ça.
08:30 Dans l'Antiquité, on admirait les oeuvres, et l'individu auteur
08:34 qui était derrière ces oeuvres importait peu.
08:37 En revanche, on a tenu à partir de ce moment-là,
08:40 un, parce que c'est de là dont nous viennent quand même
08:44 des pièces artistiques inestimables, et puis parce qu'on a réussi,
08:49 pour les lecteurs du livre, à retrouver les écrits d'un poète martial,
08:54 un poète de la Rome antique, qui avait déjà qualifié de plagiariste
09:00 quelqu'un qui lui avait substitué, qui s'était substitué à lui
09:04 pour revendiquer la paternité d'un poème qui n'était pas du tout le sien,
09:07 mais celui de Martial. Et en fait, le plagiariste, c'était le délit
09:13 qui qualifiait celui qui volait des enfants ou des esclaves.
09:17 Et donc c'est intéressant cette analogie, celui qui vole une oeuvre
09:20 est qualifié comme celui qui vole l'enfant.
09:24 Et la chose qui était assez troublante, c'est qu'à l'occasion
09:28 des 70 ans de la DAGP que vous évoquiez, on a tenu un grand colloque
09:32 à la Biothèque Nationale de France, où sont intervenus moult artistes
09:36 et personnalités du monde de l'art, et l'un de ces artistes,
09:39 un artiste sénégalais, d'aujourd'hui, sollicissé, a de façon tout à fait
09:44 spontanée, exprimé que le droit d'auteur, c'était un lien juridique
09:49 entre lui et ses oeuvres, lorsqu'elles circulaient à travers le monde,
09:53 et que pour lui, ses oeuvres étaient comme des enfants dont il avait besoin
09:56 d'avoir des nouvelles. Et c'est troublant cette communion, en tout cas,
10:01 de ressenti entre un poète de l'Antiquité et un artiste plasticien du XXIe siècle.
10:06 - Et justement, pour rester dans le XXIe siècle, quels sont les enjeux
10:10 d'aujourd'hui ? J'imagine que la technologie, ce sont des questions
10:15 qui sont fortes et que vous prenez à bras-le-corps à la DAGP.
10:19 Quels sont les liens avec le droit d'auteur, du coup ?
10:21 - Au que oui. Alors, le lien entre technologie et droit d'auteur,
10:27 bizarrement, est assez ambigu et pas toujours très serein.
10:33 Ce que nous regrettons, parce que ça n'a pas lieu d'être,
10:37 cette opposition. Comme je vous le disais, le droit d'auteur a 250 ans maintenant.
10:43 Donc, depuis l'imprimerie et l'invention de la lithographie et des gravures,
10:49 texte, images, musique, ont vu arriver un certain nombre de nouvelles technologies,
10:56 certaines qui ont même été très créatives, comme la photographie ou le cinéma,
11:00 la radio, la télévision, l'Internet. Et à chaque fois, le droit d'auteur,
11:06 c'est tout à fait adapté. Les artistes se sont emparés de ces outils.
11:10 Ces outils ont permis de diffuser des œuvres. Et la création est plus vive que jamais.
11:15 Et les œuvres circulent plus que jamais. Et là, on se retrouve,
11:20 en ce début du XXIe siècle, après quelque chose qui a déjà éprouvé la création,
11:26 l'arrivée d'Internet et la circulation des œuvres. On a réussi à trouver des régulations
11:32 qui permettent que les droits sur Internet, en tout cas dans la loi, doivent être respectés
11:40 et que la plupart des opérateurs Internet les respectent concrètement,
11:44 même s'il y a encore des négociations à mener. Là, l'un de nos enjeux majeurs,
11:48 c'est l'avènement de l'intelligence artificielle. Donc, on est sur un phénomène
11:52 qui est très récent, puisqu'on va le dater d'il y a deux ans, en tout cas,
11:55 pour le fait qu'il arrive dans le grand public. Et où là, on est non seulement
12:02 sur un enjeu pour les auteurs et les créateurs d'une façon générale,
12:06 puisqu'on est sur des logiciels qui vont remplacer la création humaine,
12:10 mais on est aussi sur un enjeu de société globalement, puisque la question peut se poser
12:16 de savoir si une image synthétique, par exemple, a la même valeur en termes
12:22 de créativité et de sens que l'image créée par un humain.
12:28 Et il y a énormément de problématiques qui sont liées par cet effet substitutif
12:34 du travail des auteurs humains par des créations faites par des algorithmes.
12:39 Ce sont des chantiers à mener, mais qui ne vous font pas peur.
12:42 Non.
12:43 Le droit d'auteur a déjà vécu ça.
12:46 Exactement.
12:47 Merci beaucoup pour vos réponses, Marianne Ferry-Fall.
12:49 Directrice de l'ADAGP. Et quant à nous, on se revoit la semaine prochaine
12:52 pour un nouveau numéro d'Art et Marché.
12:54 [Musique]

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