Myriam Benraad : «La déception (de ceux qui ont rejoint l’EI) est synonyme de défaite»

CNEWS

La chercheuse au CNRS, Myriam Benraad, était invitée dans Les Visiteurs du Soir, ce samedi 10 juin, sur CNEWS. Elle s’est exprimée sur le conflit contre l’État islamique : «La déception (de ceux qui ont rejoint l’EI) est synonyme de défaite».

Transcript

00:00 -Oui, alors, ça a été vraiment, on peut le dire, en 2014,

00:02 ce fameux prêche à la mosquée de Mossoul par Al-Bardadi.

00:08 Il est vrai que c'est un moment clé, puisque c'est...

00:12 -C'est la 1re fois qu'on le voyait, en plus.

00:14 -C'est la 1re fois qu'il se met en scène

00:16 après des années de clandestinité,

00:18 parce que c'était un vétéran du djihad irakien

00:21 contre les Américains, dès les années 2000.

00:23 Il était passé par les prisons, les bases américaines,

00:26 donc il y avait quand même un passif très lourd.

00:29 Mais surtout, c'est à partir de là qu'on voit vraiment

00:31 s'enclencher un processus de transnationalisation,

00:35 avec un certain nombre de mouvances djihadistes,

00:38 tout d'abord au niveau des mouvances en Afrique, en Asie,

00:42 en Afghanistan, et puis, évidemment,

00:44 les réseaux plus ou moins organisés en Europe,

00:47 qui vont voir la réalisation d'un rêve, en fait,

00:51 dont tout le monde veut, évidemment, migrer vers le Califat.

00:54 Et c'est là qu'on assiste à ces départs massifs

00:57 dans l'histoire du terrorisme des combattants étrangers.

01:00 Il y en a eu d'autres, évidemment,

01:02 concernant d'autres insurrections armées de ce type,

01:05 mais là, c'était quelque chose d'assez impressionnant.

01:07 -Ils n'avaient pas l'impression de rejoindre un mouvement terroriste,

01:09 ils avaient vraiment l'impression d'être des brigades internationales.

01:11 -Exactement, oui, parce qu'en arrière-fond,

01:14 on a cet homme qui apparaît, qui rétablit le Califat,

01:18 qui se prononce donc "calif", commandant des croyants,

01:22 et puis surtout, on a derrière un dispositif de propagande

01:26 qui a été quand même assez largement, abondamment étudié depuis,

01:29 qui promet une utopie,

01:31 qui promet un véritable paradis musulman,

01:34 en quelque sorte, à ceux qui le rejoignent.

01:36 Alors, évidemment, la désillusion, elle est très grande.

01:39 C'est bien aussi pour ça que je dis que,

01:40 par rapport à cette base militante, ou du reste, une partie de la base,

01:44 la déception est quand même aussi synonyme de défaite.

01:47 La défaite, elle est morale par rapport aux civils,

01:48 mais elle est aussi, tout de même,

01:51 je dirais, interne, organisationnelle,

01:53 parce que, dès les premières heures, en fait,

01:55 de nombreux militants ont été déçus et assez même horrifiés

01:58 de ce qu'ils trouvaient sur zone.

02:00 Le problème, c'est qu'ils ne pouvaient pas partir.

02:02 Ils étaient otages du mouvement,

02:04 mais la propagande, en effet, a joué un rôle fondamental.

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