- il y a 4 jours
Le projet de recherche BRAINCODER est en phase de devenir une entreprise. Il a permis de développer un implant cérébral qui vise à traiter la surdité profonde et à remplacer les implants cochléaires, moins performants. Ce développement a été accompagné par le fonds Turenne Santé.
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00:00C'est le débat de ce Smart Impact, on va être au cœur de l'innovation des neurosciences avec Mounia Chahoui, bonjour.
00:14Bonjour.
00:14Bienvenue, vous êtes directrice associée au fonds Turenne Santé, et Brice Bâtelier, bonjour.
00:18Bonjour.
00:18Directeur de recherche au CNRS, et vous allez nous parler de ce projet Brain Coder.
00:22Je veux bien que vous nous présentiez ce fonds, fonds Turenne Santé, de quoi on parle ?
00:26Alors c'est plusieurs fonds déjà, c'est des fonds qui sont dédiés à la santé et qui investissent dans des sociétés qui vont du pré-amorçage comme Brain Coder jusqu'au capital développement transmission.
00:37On a un peu plus d'un demi milliard sous gestion, on a accompagné une cinquantaine d'entrepreneurs en 12 ans, et réalisé 25 sorties sur un multiple moyen de 2,7 fois la mise.
00:45Alors, j'ai déjà reçu pas mal d'entreprises qui étaient dans ce secteur de la santé, je suis toujours frappé par la longueur de l'engagement, vous voyez ce que je veux dire ?
00:57Ce n'est pas tout à fait vrai.
00:59Non, ce n'est pas si vrai que ça ?
00:59Ce n'est pas si vrai que ça.
01:00Il y a un investissement plus rapide que je ne le pense ?
01:02Très rapide, nous nos moyennes d'accompagnement c'est 5 ans, entre l'entrée et la sortie, donc on peut faire des choses rapides.
01:09Alors, c'est plus ou moins long, suivant la date d'entrée au capital et suivant aussi les aléas du projet, mais il y a des projets qu'on a accompagnés entre la création et la sortie, il s'écoule les 3 ans.
01:20D'accord, donc ça peut être rapide.
01:21Brain Coder, en quelques mots, c'est une innovation qui est assez fascinante, puisqu'il s'agit d'aider les personnes qui souffrent de surdité, c'est ça de surdité profonde ?
01:30Brain Coder, c'est vraiment un nouveau dispositif médical pour traiter la surdité profonde, qui actuellement est traité par l'implant cochléaire,
01:37qui est un dispositif qui fonctionne pour créer une perception des sons basiques, efficaces mais basiques.
01:45Et donc l'idée de Brain Coder, c'est de créer un implant cérébral qui vise maintenant le cerveau, alors que l'implant cochléaire est basé au niveau de l'oreille.
01:53Et au niveau du cerveau, on peut positionner beaucoup plus d'électrodes et passer beaucoup plus d'informations pour créer une perception naturelle.
02:00Donc là, on est dans un laboratoire de neurosciences, c'est ça ?
02:03Exactement, actuellement.
02:04Vous en avez tout du projet, on parlait de pré-amorçage, donc vous, vous en avez tout, ça fait combien d'années déjà que vous travaillez sur cette idée-là ?
02:12Donc sur cette idée, on travaille depuis 5 ans dessus, on a fait un dispositif pré-clinique, c'est-à-dire chez l'animal,
02:17on a démontré sa fonctionnalité et son impact dans ses conditions.
02:23Et donc maintenant, on est à l'étape où on voudrait passer, on est en train de construire en fait le dispositif qui sera implanté chez les patients.
02:30Oui, alors comment vous accompagnez, Mounia Chahoui, à un projet comme celui-là ?
02:35C'est quoi le facteur déclenchant, tout simplement ?
02:37Alors là, ce projet, il est accompagné par notre fondation, parce qu'on a une fondation chez Thuraine Santé qui s'appelle la Fondation Béatrice de Nice,
02:43qui était la personne qui m'a précédée chez Thuraine Santé et qui malheureusement décédait d'un cancer.
02:48Et donc on a fait perdurer cette fondation qu'elle avait fondée initialement et on l'a renommée en son honneur.
02:55Et donc c'est avec cette fondation qu'on finance actuellement le projet BrainCoder.
02:58Il est possible que par la suite on le finance avec nos fonds de capital risque.
03:03Et c'est un projet en fait qui a été sélectionné par une quarantaine de projets, parce que chaque année on fait un appel à projets.
03:09On reçoit 40 projets.
03:12D'abord on en présélectionne une vingtaine avec la capacité de création d'une entreprise.
03:17Et ensuite il y a deux experts externes qui analysent pour nous le projet avec la validation technique, scientifique,
03:24mais aussi la validation d'un go-to-market pas trop long et également d'un potentiel de marché suffisant.
03:31Et ensuite on réunit un nouveau jury qui va sélectionner définitivement le gagnant.
03:37Et lors d'une cérémonie qui a lieu en général en juin, on remet le prix avec différents entrepreneurs de la santé.
03:43Donc c'est comme ça qu'il a été sélectionné.
03:44Il y a eu un certain nombre d'États.
03:48Voilà, exactement. On valide aussi la propriété intellectuelle.
03:51Nous ce qui nous a beaucoup plu chez ce projet, et j'espère que vous pourrez mettre ça à l'antenne,
03:57mais on vous fait écouter les quatre saisons de Vivaldi avec un implant cochléaire et avec le dispositif de brain cover.
04:07Et la différence elle est juste exceptionnelle.
04:11Et c'est un marché qu'on a trouvé intéressant, qui est important,
04:15qui a très peu évolué toutes ces dernières années,
04:19puisque les implants cochléaires c'est une technologie assez ancienne,
04:22qui a assez peu évolué sur la différenciation des sons depuis que ça a été développé.
04:29Et là par contre, ça permet cette différenciation dans les sons de manière très très fine.
04:34Et en plus c'est une technologie qui peut être facilement utilisée,
04:36puisque les implants au niveau cérébral, c'est des choses qui sont déjà très utilisées en neurochirurgie,
04:41avec tout ce qui est implants en Parkinson, etc.
04:43Et là avec une technologie beaucoup moins invasive,
04:45donc qui sera forcément très adaptée, adoptée par le marché.
04:49Brice Bateulier, il s'adresse ce dispositif plutôt aux patients pour qui les implants classiques ne fonctionnent pas,
04:59ou alors ça peut concerner toutes les personnes qui souffrent de surdité ?
05:03Alors dans un premier temps, effectivement, nos premiers patients cibles,
05:06ce seront les patients qui ont perdu le nerf auditif,
05:08et donc qui ne peuvent pas recevoir d'implants cochléaires.
05:11Donc ça c'est vraiment notre go-to-market.
05:13Mais si chez ces patients on démontre effectivement l'efficacité qu'on a prévue,
05:18ça pourra concerner tous les patients pour avoir une restauration meilleure en fait.
05:23Alors on est dans l'interface entre le cerveau et l'implant, donc la machine,
05:29c'est évidemment toujours assez fascinant.
05:33Voilà, comment ça marche, c'est quoi, qu'est-ce que vous implantez ?
05:36C'est vraiment des questions de béotien, de curieux à vous poser.
05:39Alors ce qu'on implante en fait, c'est des électrodes flexibles qui viennent épouser la surface du cerveau,
05:44qui ciblent la zone du cerveau qui crée la perception auditive.
05:48C'est connu depuis très longtemps en neurochirurgie que quand on stimule électriquement cette zone,
05:52on génère des perceptions, donc nous on veut exploiter cette propriété.
05:56Et en fait l'élément clé qui nous permet de créer ce dispositif,
06:00c'est la partie software en fait, la partie software du dispositif,
06:03comment on transforme l'information auditive dans le langage des neurones qui code la perception des sons.
06:08Et donc on a créé cet algorithme qu'on a appelé Brain Codec,
06:12qui permet de faire cette opération clé en fait.
06:16Est-ce qu'il y a déjà, parce que là on est vraiment dans l'innovation,
06:19un référentiel réglementaire ?
06:23Est-ce que les autorités de santé se sont déjà penchées sur ce type d'implant cérébro ?
06:28Ou est-ce que ça fait partie du chemin et vous avancez parallèlement avec les autorités de santé ?
06:35Vous voyez ce que je veux dire ?
06:36Il y a des choses qui existent, puisque comme Mounia en a parlé,
06:39il y a effectivement les implants pour les patients parkinsoniens,
06:43de stimulation profonde, donc il y a déjà de l'existant.
06:47La différence pour nous, c'est que les implants existants stimulent plutôt avec une électrode,
06:52et que nous on va amener beaucoup de courant en même temps.
06:55Et donc là on doit discuter effectivement avec les instances de régulation,
06:59pour savoir quelles vont être les bonnes normes de sécurité en fait.
07:05Cette barrière réglementaire, qui doit être inhérente d'ailleurs aux investissements santé,
07:11vous l'intégrez à vos choix, à vos décisions ?
07:14Complètement, complètement.
07:16D'ailleurs elle fait partie de la durée qu'il faudra pour atteindre le marché,
07:23et donc c'est un aspect qu'on regarde effectivement en détail avant d'investir dans un dossier.
07:30Alors est-ce qu'on est dans la caricature ?
07:32Pardon, je vais...
07:33Parce que j'ai...
07:34En vous posant la question, je me disais, est-ce qu'on est dans la caricature
07:38de ce que la France peut produire en matière de paperasse et de barrières réglementaires,
07:42ou est-ce qu'en matière de santé c'est plus simple ?
07:44Alors, non, c'est pas facile, et puis en plus ça s'est complexifié en Europe,
07:49puisqu'avant on avait, pour les dispositifs médicaux, on avait ce qu'on appelait le marquage CE,
07:55qui était plus facile à obtenir que l'agrément FDA qui est nécessaire pour les Etats-Unis,
08:01et là ça s'est complexifié en Europe, parce que c'est vrai qu'il y a eu des scandales,
08:05dans le passé, le scandale PIP par exemple, sur les implants en silicone mammaire,
08:11et aussi sur ces ravers, sur des implants orthopédiques,
08:15donc du coup ils ont complexifié au niveau européen,
08:17et aujourd'hui ça devient, ce qui est dommage, aussi complexe en Europe qu'aux Etats-Unis,
08:21et donc les gens ont plutôt tendance à aller d'abord aux Etats-Unis,
08:24parce que c'est qu'un marché, et il y a beaucoup de patients,
08:27plutôt qu'en Europe où vous allez avoir un système de remboursement qui va être propre.
08:32Alors qu'on peut concilier les deux, on peut concilier le...
08:34Enfin, heureusement d'ailleurs qu'il y a des règlements pour nous protéger,
08:37mais sans tomber dans l'extrême complexité.
08:40On aurait pu concilier les deux, et puis surtout que sincèrement,
08:42les scandales Serravert et les scandales PIP,
08:46c'était des scandales qui étaient des scandales de fraude,
08:48c'était pas lié au marquage CE, donc c'est dommage qu'on ait plus complexifié,
08:53parce que du coup, pour moi, je trouve qu'on a perdu d'une certaine façon,
08:57pour l'Europe, un avantage compétitif qui était majeur.
09:00Il y avait même des sociétés américaines qui venaient en Europe,
09:03d'abord pour faire approuver leur innovation,
09:05parce qu'elles trouvaient que le marquage CE était plus facile à obtenir.
09:08Et là, on est dans le cas contraire, c'est vraiment dommage qu'on ait perdu cet avantage compétitif.
09:14Vous en êtes où, Brice Batelier ? Des essais cliniques ?
09:18J'ai bien compris qu'il ne faut pas aller plus vite que la musique,
09:22mais vous, dans votre plan, à quelle échéance vous pouvez imaginer
09:27implanter des personnes qui souffrent de surdité profonde à mieux entendre ?
09:34Donc, notre échéance, c'est qu'on est en train de mettre en place des partenariats
09:38avec des cliniciens, des neurochirurgiens, pour faire une première chez l'homme,
09:43donc des premiers tests, et ça, c'est à échéance de 3 ans environ.
09:47De 3 ans ?
09:48Oui, à cause du parcours réglementaire en particulier,
09:50dont on parlait.
09:51On va faire des tests préliminaires de sécurité,
09:54et donc on s'est donné cette échelle-là qui est assez raisonnable.
09:57Et alors après, qu'est-ce qui se passe ?
10:00C'est-à-dire, vous faites les premiers tests chez l'homme,
10:03on va avoir des vidéos avec un patient qui entend les 4 saisons de Vivaldi,
10:08et avec son regard et son sourire qui s'éclaire,
10:12qu'est-ce qui se passe après ?
10:13Entre le moment où on l'a testé pour la première fois chez l'homme,
10:16et puis ça devient vraiment un dispositif médical sur le marché.
10:18Dans le premier test, on va tester un prototype,
10:21et l'étape d'après, ce sera vraiment de construire le dispositif final,
10:26et ensuite de le valider à travers un véritable essai clinique
10:30sur une cinquantaine de patients.
10:32C'est à peu près l'ordre de grandeur pour les implants cochléaires actuellement.
10:36Et c'est ça qui déterminera ensuite la commercialisation du dispositif.
10:41BrainCoder, c'est déjà une entreprise ?
10:43Ou c'est encore un programme de recherche ?
10:45C'est encore un programme de recherche,
10:46mais ça va devenir une entreprise l'année prochaine.
10:48Et vous êtes là pour accompagner aussi le passage de l'un à l'autre ?
10:52Exactement, on est à la disposition de Brice,
10:55s'il a des questions sur son business plan, etc.,
10:58l'introduire à des gens,
11:00et puis aussi le financer dans cette phase de preuve de concept.
11:05Ça représente quel marché ?
11:07Alors le marché de la surdité profonde,
11:10c'est environ 3 milliards d'euros au niveau mondial par an.
11:15C'est 1700 implantations en France,
11:18donc c'est quand même pour un marché autour de 100 millions d'euros en France.
11:23Donc c'est quand même un gros marché.
11:24C'est intéressant.
11:26Oui, bien sûr, et c'est forcément rentré dans votre équation.
11:30On parlait de l'Europe,
11:31on est dans une phase où il y a,
11:35enfin on parle beaucoup de moments de rupture,
11:39sur beaucoup de thèmes,
11:41aujourd'hui en Europe.
11:43La concurrence, elle est américaine, elle est chinoise,
11:45comment vous pensez qu'on se situe face à cette concurrence
11:48sur ce marché des neurosciences aujourd'hui ?
11:51Alors, je dirais qu'elle est américaine et elle est chinoise,
11:54de plus en plus.
11:56Après, moi je trouve qu'en France,
11:58on a une science de très bonne qualité,
12:00on a des très bons médecins, des très bons KOL,
12:03on a des très jolies technologies,
12:05et en plus, on a de plus en plus des entrepreneurs à succès.
12:07Donc on a tous les outils pour réussir.
12:10Ça veut dire qu'il y a un écosystème autour de la santé
12:14qui existe et qui est encore puissant en France ?
12:18Qui est encore puissant et très compétitif.
12:21On a encore le crédit impôt recherche,
12:23qui a un avantage majeur pour nos entreprises
12:25dans le monde de la recherche,
12:27et on a des très bonnes équipes et qui savent ce qu'elles font.
12:30Donc c'est pour ça que récemment,
12:31il y a eu beaucoup de succès,
12:32beaucoup d'entreprises qui ont été cédées
12:33pour des valorisations très importantes
12:35à l'industrie de la santé.
12:37Il y a une question peut-être d'éthique
12:40qui dit un plan dit de données neuronales,
12:45à qui elles appartiennent ?
12:47Vous voyez ce que je veux dire ?
12:49Je vais vous poser la même question à tous les deux.
12:50Je commence avec vous.
12:51Nous, on a poursuit le problème
12:52parce qu'en fait, on va créer un dispositif
12:54qui va seulement stimuler le cerveau.
12:57D'accord.
12:58Et donc, qui ne va pas acquérir de données.
13:00D'accord.
13:01Et donc, on n'aura pas cette question-là.
13:04Mais c'est une vraie question quand on parle de science.
13:06C'est une vraie question, mais elle est traitée.
13:08Elle est traitée parce qu'on a une politique RGPD en Europe
13:11qui d'ailleurs est très bien faite.
13:14Et donc, les sociétés dans le monde médical
13:16doivent le respecter.
13:17Et notamment, les sociétés dans le monde du logiciel.
13:20RGPD, Règlement Général de la Protection des Données.
13:22Merci beaucoup à tous les deux
13:24d'être venus sur ce plateau.
13:25Bon vent au programme Brain Coder.
13:27Voilà, c'est l'heure du grand entretien de ce Smart Impact.
13:31Le grand Paris Climat au programme.
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