- il y a 2 jours
Avec Pierre Arditi, comédien et auteur de "Le souvenir de presque tout" (Éditions Cherche Midi)
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NewsTranscription
00:00Le 10h midi, Sud Radio Média, Valérie Expert.
00:04Bonjour Pierre Arditi.
00:06Bonjour Valérie Expert.
00:08Je suis très impressionnée de vous recevoir.
00:10C'est vrai ?
00:10Oui, je reçois un écrivain aujourd'hui.
00:12Je reçois, si, si, Pierre Arditi, acteur, immense acteur.
00:18Vous publiez le souvenir de presque tout aux éditions du Cherche Midi.
00:22Alors il n'y a pas très longtemps, il y a une somme qui était parue,
00:25une biographie qui avait été écrite par Nathalie Simon.
00:28Absolument, oui.
00:29Et là c'est un livre très différent, très personnel, très intime,
00:33très émouvant et très sincère.
00:37J'espère.
00:37Oui, oui, et puis dans lequel vous vous dévoilez,
00:39on apprend pas mal de choses sur vous.
00:41C'est une sorte de, alors votre père était peintre,
00:44c'est une sorte de tableau, j'ai envie de dire, fait par petites touches.
00:48Oui, c'est un peu impressionniste.
00:50C'est un peu impressionniste parce qu'il y a un petit peu de tout dans ce livre.
00:53Oui.
00:54Ça a été quoi le déclic d'écrire parce que vous n'aviez jamais écrit auparavant ?
00:57Oui, j'avais écrit ou des articles, des choses comme ça.
01:02On m'a dit, oh, il faut écrire, vous devriez écrire.
01:04Alors j'ai dit, oui, oui, je vais le faire bon.
01:07Puis à un moment donné, je me suis dit, bah oui, allez, tiens, ça suffit.
01:10Je dis toujours, oui, oui, je ne le fais pas, là, je n'ai rien à dire et je vais le faire.
01:14C'est une manière de me retrouver face à moi-même, quoi, au fond.
01:18Et donc, j'en parle très peu de mon métier dans ce bouquin-là.
01:22Un petit peu.
01:22Un petit peu, mais je parle surtout de ma famille, de ceux que j'ai rencontrés,
01:27mon père, ma mère, ma soeur, ma petite enfance, mon adolescence,
01:32ma vie d'homme jeune et ma vie d'homme moins jeune.
01:36Donc c'est plutôt, ce n'est pas du tout une biographie, quoi.
01:38Non, ce n'est pas une biographie.
01:40Ça n'a vraiment aucun rapport.
01:41Mais ce sont des éléments de votre vie, quand même, qui sont constitutifs de qui vous êtes.
01:47Oui, c'est une promenade, oui, on peut appeler ça une promenade, d'ailleurs,
01:52au pays de ce que je suis, de ce que j'étais, de ce que je serais encore.
01:56C'est plutôt ça, l'histoire.
01:57Dans votre bureau, vous nous emmenez dans l'intimité de votre bordel.
02:01L'ordre de votre désordre, non ? C'est ce que dit Evine ?
02:04Non, le désordre est mon ordre.
02:06Le désordre de mon bureau est l'ordre de ma vie, oui.
02:09Alors, comment vous avez décidé, comment ça s'est passé ?
02:13Moi, ce qui m'intéressait, c'est de savoir à quel moment vous avez écrit,
02:15comment sont venus les souvenirs ?
02:18Parce que le souvenir de presque tout, ça veut dire qu'il y a des choses qui ne sont pas revenues ?
02:22Ça veut dire qu'il y a des choses, soit qui ne sont pas revenues,
02:25soit dont je n'ai ni envie ni besoin de parler,
02:29soit parce que le titre m'a beaucoup plu.
02:32D'ailleurs, je joue en ce moment une pièce qui s'appelle
02:34« Je me souviendrai de presque tout »
02:36et j'ai demandé, je me suis dit, mais c'est dommage,
02:38c'est absolument le titre qu'il faudrait que je donne à ce livre.
02:41Et donc, je me suis arrangé avec l'auteur pour en prendre une partie, la moitié.
02:44Donc, c'est ce souvenir de presque tout.
02:48La démarche est la même, c'est pas parce que j'aurais un problème de mémoire,
02:52par exemple, que je n'ai pas du tout.
02:54J'ai trié des choses qui me venaient à mon esprit,
02:57qui venaient de ma sensibilité personnelle, de mon âme,
03:01pour employer un mot que j'emploie tout le temps,
03:02alors que je ne suis pas, je suis athée, mystique,
03:06mais je suis un athée quand même.
03:08– Oui, c'est pas si évident que ça.
03:10– Oui, je ne crois pas en Dieu, mais je n'en suis pas sûr.
03:11– Oui, c'est ça, c'est cette phrase qui est formidable.
03:13Je ne crois pas en Dieu, mais je n'en suis pas sûr.
03:15– Donc, voilà, c'est une chose, je voulais être très, très personnel.
03:19C'est une chose que je m'écris à moi-même,
03:21au fond, d'une certaine manière,
03:22en espérant que les autres, ils trouveront des points communs.
03:25Peut-être que ça leur parlera aussi de choses qu'ils ont vécues eux-mêmes,
03:28même si c'est d'une manière différente.
03:30– Oui, sur la mort en particulier,
03:33il y a des choses beaucoup plus gaies dans le livre,
03:36mais sur la mort, les deux chapitres consacrés
03:38à la mort de votre père et de votre mère,
03:41moi, m'ont beaucoup touchée,
03:42parce que ça fait réfléchir,
03:44ça pose un certain nombre de questions
03:45sur la mort de ses parents, évidemment,
03:48sur le fait que vous n'avez pas voulu les voir.
03:50– Mort, non, je n'ai pas voulu les voir morts, non.
03:54Ni l'un ni l'autre.
03:54– Non, mais c'est quelque chose qui peut interroger,
03:58qui peut renvoyer chacun...
04:01– Oui, oui, chacun fait comme il veut.
04:02– Non, mais renvoyer quelqu'un à cette question,
04:04parce que vous avez expliqué pourquoi,
04:07et ça, c'est très très intime.
04:08– Chacun enterre ses morts comme il veut,
04:10ou comme il peut, voilà.
04:12Moi, j'ai enterré mon père et ma mère
04:13sans jamais voir ses corps et ses visages sans vie.
04:18C'est d'ailleurs la raison pour laquelle
04:19ils sont toujours vivants, en ce qui me concerne.
04:22Ils ne sont pas morts.
04:23Alors, ce qu'il y a dans la boîte, c'est quelque chose d'autre,
04:24j'en ai rien à faire, c'est pas le problème.
04:27C'est toujours que, vous savez, on se dit
04:28« je ne peux pas faire mon deuil »,
04:30mais malheureusement, cette phrase est incorrecte,
04:34si j'ose ainsi m'exprimer,
04:35parce que le deuil commence à l'instant même
04:38où celui qu'on a chéri ou qu'on aime ferme les yeux.
04:41Après, qu'on n'est plus devant soi, comme ça,
04:44c'est plus le problème.
04:47Ils sortent de la vie, et en particulier de la vôtre.
04:49Donc, le deuil est immédiat.
04:51Il n'y a pas besoin d'attendre je ne sais pas quoi
04:53pour commencer à le faire, malheureusement.
04:55On est les propres assassins de nos propres parents.
04:58C'est comme ça, et c'est mieux d'ailleurs dans cet ordre-là.
05:01Ce qui est encore pire, c'est que les parents
05:03enterrent les enfants.
05:06Ça, c'est totalement inacceptable.
05:08La mort des parents est inacceptable aussi.
05:09C'est dans la logique des choses.
05:11C'est dans l'ordre des choses.
05:12C'est pour ça, si vous voulez,
05:13quand je dis presque tout,
05:15c'est parce que ce sont toute une série de choses
05:17qui sont venues comme ça.
05:18En écrivant, je me dis,
05:19mais tiens, après tout,
05:20pourquoi je ne parlerais pas de ça ?
05:22Pourquoi la petite enfance avec ma soeur,
05:25avec mon adolescence ?
05:27Le premier baiser.
05:28Ma manière de me traîner avec douleur
05:36dans mon métier à 17 ans,
05:38alors que je ne me fais pas confiance
05:39et que rien de ce que je suis ne me convient.
05:43Je pense que,
05:45évidemment, à moi ça me parle,
05:46mais je pense que ça peut parler à beaucoup de monde.
05:48Parce que ça décrit un certain nombre de choses
05:51que les gens traversent, acteurs ou pas.
05:53Ce n'est pas le problème.
05:53Mais vous vous êtes interrogé sur certaines choses,
05:55par exemple vous racontez que vous avez tenté de vous suicider.
05:58Après une peine de cœur,
06:00vous racontez aussi que vous avez été accro au jeu.
06:02Moi, je l'ignorais.
06:03Que vous avez flambé beaucoup d'argent.
06:05Donc ce sont des choses qui ne sont pas...
06:07On a un Pierre Arditi qui est presque un dieu vivant.
06:10Enfin voilà.
06:10Non, ils n'agèrent rien.
06:11Mais si, si, mais vous êtes à...
06:12Il y a des zones d'ombre.
06:13Oui, il y a des zones d'ombre.
06:14Mais ces zones d'ombre,
06:14pourquoi vous avez eu envie de les raconter ?
06:16C'est à moi que je les ai racontées.
06:18Pour essayer de m'expliquer.
06:19Oui, mais tout le monde va les lire.
06:20Pour essayer de m'expliquer.
06:21Pourquoi ça et pourquoi moi ?
06:24Oui.
06:24Voilà.
06:25En l'écrivant, je le décris.
06:29Tout simplement, je le décris
06:30et je le résous, au fond, d'une certaine manière.
06:34Alors que je ne vais pas trop regarder ça en face
06:36depuis longtemps.
06:38Donc encore une fois,
06:39c'est une manière d'être face à face avec soi,
06:41l'écriture.
06:42Puis l'écriture, c'est un avantage considérable.
06:45C'est le seul moyen.
06:46C'est le seul moyen de parler sans être interrompu.
06:49Voilà.
06:49Donc, ça me convient très bien.
06:51Le théâtre, j'ai bien aimé cette phrase aussi.
06:53Je préfère le théâtre parce qu'au moins, on ne se voit pas.
06:57Oui, je ne me vois pas.
06:59Si on me dit que je suis formidable, je le crois, je n'ai pas vu.
07:00Oui, c'est ça.
07:01Au cinéma, malheureusement, on me dit que je suis formidable,
07:03je vais voir le film.
07:04Je dis bon, ok, d'accord.
07:05Il vaut mieux que je quitte ta profession.
07:06Ce n'est pas la peine de continuer là-dessus.
07:08Et l'écriture, ça s'est fait quand ?
07:09Il y a un chapitre qui est boulimique.
07:11Ça, j'ai mis une année à peu près.
07:13Mais vous écriviez quand le matin, le soir ?
07:15Plutôt la nuit.
07:16Plutôt la nuit.
07:17Oui, plutôt la nuit.
07:18Quand j'avais un peu de temps, je vagabondais comme ça.
07:22Je prenais des notes sur un canal en me disant
07:24tiens, je pourrais peut-être parler de ça ou de ça ou de ça.
07:26Et puis, après le dîner, je me mettais dans mon bureau bordélique.
07:31Et voilà, je griffonnais un certain nombre de choses
07:33qui ne me convenaient, qui ne me convenaient pas,
07:35que je déchirais parce que je n'aimais pas.
07:36Je réécrivais plus tard, peu importe.
07:38Vous savez sans doute que quand on commence à écrire,
07:42ça crée d'autres choses auxquelles on n'aurait pas pensé
07:47et qui se greffent d'elles-mêmes sur ce que vous êtes en train de faire.
07:50Donc, c'est sans fin, finalement.
07:52C'est d'ailleurs formidable.
07:53C'est un besoin d'entraîner une autre.
07:57L'inspiration, c'est le travail.
08:00C'est le travail qui permet d'écrire et d'avancer.
08:03Si vous n'avez pas d'inspiration, vous n'écrivez jamais
08:05parce que ce n'est jamais la bonne heure, le bon moment.
08:08Mais c'est une magnifique écriture.
08:10Moi, j'ai découvert...
08:11Ça, je vous laisse le dire.
08:12Non, non, mais vraiment un écrivain.
08:15On vous entend plus quand on lit.
08:17Quand on lit, moi, je vous entendais.
08:19J'entendais votre voix.
08:20Et c'était très visuel.
08:21Vous avez des souvenirs très précis sur l'appartement,
08:25l'appartement de vos parents, sur certains lieux.
08:28C'est décrit avec énormément de précision, de détail.
08:32Oui.
08:32C'est une mémoire aussi qui est là.
08:36Oui, elle est sélective, ceci étant.
08:38Mais ce sont des choses que je ne peux ni ne veux oublier.
08:43Alors, je me défends dans ce bouquin d'être nostalgique,
08:46en réalité, évidemment.
08:47C'est inondé de nostalgie.
08:49Bon, voilà.
08:50Mais qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ?
08:51Je n'ai pas pu lutter contre, finalement.
08:53Alors, de temps en temps, je râle contre moi-même en me disant
08:56« Mais quoi, ça va ? »
08:57Je me souviens d'un démarrage où j'ai marqué
08:59« La nostalgie n'est plus ce qu'elle était. »
09:01Non, elle est pire.
09:03Ça fait plus de mal à mon âge.
09:07Et compte tenu de ce que je suis,
09:09ça fait plus de mal de savoir que ça n'existe plus.
09:12Donc, au fond, en l'écrivant, je me suis dit
09:14« Tiens, je peux revivre encore un peu ce genre de passage. »
09:18Mais il y a...
09:18On a pu faire des chapitres sur la couleur de l'escalier de la rue des Martyrs
09:22qui m'a toujours frappé.
09:24La couleur verte, pomme, comme ça.
09:26Je ne sais pas pourquoi ils avaient peint ça comme ça,
09:28les propriétaires de tout ça.
09:31Mais je me souviens très bien, genre,
09:33ça, j'ai dû l'écrire, d'ailleurs.
09:35Les gens qui montent plus difficilement l'escalier
09:37qui me disaient « Ah, bah, tu vas vite, toi. »
09:39Oui, j'avais sept ou huit ans.
09:40Et quand vous y êtes retourné...
09:41Maintenant, c'est moi qui peux dire ça
09:42à d'autres gamins qui montent beaucoup plus vite que moi.
09:45On va marquer une toute petite pause.
09:47On va se retrouver avec vous, Pierre Arditi.
09:48Bah oui, parce qu'il y a un petit peu de pub.
09:49Il faut bien vivre, oui.
09:51Et oui, et on va continuer à évoquer ce livre
09:54formidable, le souvenir de presque tout.
09:57Il y a une chose qui m'a surpris,
09:58c'est quand vous parlez des enfants.
10:00Je ne vous imaginez pas aussi sensible aux enfants,
10:03aux petits-enfants.
10:04A tout de suite.
10:05Le 10h midi, Sud Radio Média, Valérie Expert.
10:10On est avec Pierre Arditi, immense comédien,
10:13le souvenir de presque tout, paru au Cherche Midi.
10:16Je vous le conseille, si c'est la période des fêtes,
10:19des cadeaux de Noël, je pense que c'est un livre
10:21dans lequel vous ne pouvez être qu'émus
10:24en lisant ce livre, parce que ce sont
10:26de très courts chapitres, des chapitres
10:29qui vous racontent, Pierre Arditi,
10:31qui raconte des épisodes de votre vie.
10:33Vous parlez beaucoup de vos parents,
10:34avec une infinie tendresse,
10:36une infinie admiration
10:37pour votre père, pour votre mère aussi,
10:41avec des chapitres difficiles
10:43de votre enfance, même si vous dites
10:45que vous avez une enfance très heureuse.
10:46Puis juste avant la coupure,
10:48je disais que j'avais été très étonnée
10:49par ces chapitres sur les enfants.
10:52Vous avez énormément de tendresse,
10:54très sensible aux petits-enfants,
10:56à la main, la main qui se tend vers vous.
10:59Je ne vous imaginez pas comme ça.
11:01Vous l'êtes devenu ?
11:02J'ai des jardins secrets.
11:04C'est-à-dire, je les regarde autrement aujourd'hui.
11:08Je n'ai plus l'âge d'en faire des enfants.
11:12Donc maintenant, je ne peux plus m'extasier
11:14que sur ceux des autres.
11:16Et il se trouve que, pendant un bon moment,
11:19j'ai habité juste à côté d'une école
11:20comme une primaire.
11:22Peut-être même d'ailleurs des cours préparatoires,
11:24des choses comme ça.
11:25Et tous les matins de ma fenêtre,
11:26je voyais les petits-enfants
11:28donner leur main aux parents,
11:32père ou mère,
11:33qu'ils ont accompagnés à l'école.
11:35Et cette façon de leur tendre cette main,
11:39cette petite main,
11:40était bouleversante,
11:41parce que d'une certaine manière,
11:43ils confiaient leur avenir,
11:45leur destin,
11:47leur marche, simplement,
11:48à la main du père ou de la mère.
11:50père ou mère,
11:52qui d'ailleurs n'ont pas forcément conscience
11:56que ce que leur donne leur enfant à ce moment-là,
11:59ils ne le feront plus quelques années plus tard.
12:01Donc c'est une sorte de cadeau précieux
12:03que souvent les parents ne voient pas.
12:05Et moi, ça me déchire.
12:06Mais c'est comme ça.
12:07Il y a beaucoup de choses qui me déchirent maintenant.
12:09Et puis, je me souviens avoir écrit aussi
12:12sur des cyclistes, par exemple,
12:14qui me...
12:15Bon, je n'ai pas une passion pour eux.
12:17Je n'ai pas une passion pour les enragés du vélo à Paris.
12:20Il me semble être devenu des nouveaux tueurs
12:22ne respectant qu'eux-mêmes
12:24aux dépens des autres,
12:25piétons, femmes, enfants, vieillards.
12:26La seule chose
12:27qui en fait me fait
12:30ne pas les détester complètement,
12:31ce sont les sièges ou les remords
12:32qui transportent les enfants.
12:34Oui.
12:34Ça, c'est très joli.
12:36Je vois passer mes fantômes.
12:38Je me souviens de mon père
12:39me trimballant sur le siège,
12:41enfin, sur le panier...
12:42Sur le porte-bagages, oui, à l'époque.
12:44C'était moins sophistiqué que ça.
12:46À l'arrière ou à l'avant
12:48avec ma sœur Catherine.
12:49Et c'est ravissant.
12:51Ils ont des casques, maintenant.
12:52Ils sont comme des explorateurs.
12:54Ils sont comme Tintin à la recherche.
12:55On ne sait pas quelle aventure.
12:57C'est beau à regarder.
12:59C'est déchirant.
12:59Puis, qu'est-ce que vous voulez...
13:01Il y a aussi, là-dedans,
13:03une volonté de...
13:05de voir ou de retrouver
13:07le fantôme de moi-même.
13:10C'est comme ça.
13:10Le bouquin est vraiment...
13:14Il est à fleur de...
13:15Je ne devrais pas dire ça,
13:17parce que ça ne devrait pas,
13:18mais il est tout de même
13:19à fleur de nostalgie et de sentiments.
13:21Alors, ce n'est pas mielleux,
13:23mais c'est comme ça.
13:24Ce n'est pas du tout mielleux.
13:25C'est très pudique
13:29et en même temps très intime.
13:30C'est ça qui est très réussi dans le livre.
13:32C'est que les mots que vous avez,
13:34encore une fois,
13:34pour vos parents,
13:35pour votre sœur,
13:36qui était devenue une petite mère pour vous,
13:37quand à un moment,
13:38vos parents ont été obligés
13:40de vous laisser à la campagne,
13:42ce qui vous a fait détester la campagne.
13:44Ça aussi, on l'apprend.
13:45Après, ça a peut-être un peu changé.
13:47Mais c'est vrai qu'il y a cette...
13:49Moi, je dis infinie tendresse,
13:50parce que je trouve que la tendresse,
13:51ce n'est pas mielleux.
13:53Ce n'est pas cucu.
13:56Alors, vous parlez aussi de votre métier.
13:59Moi, je trouve qu'il y a quand même pas mal de choses
14:01sur le métier, sur le théâtre.
14:03Il y en a quelques-unes, oui.
14:04À 17 ans, il y a les figures tutélaires
14:06qui ont été là,
14:09Chérault, Laurent Terzièvre,
14:12Emmanuel Riva.
14:13Emmanuel Riva, c'est des pages magnifiques.
14:15Oui.
14:16Elles sont d'ailleurs douloureuses,
14:18comme souvenir.
14:18Oui, douloureuses.
14:19Un souvenir douloureux
14:20qui est devenu par la suite...
14:22Très agréable.
14:23Mais c'est que les choses...
14:25C'est ce qu'on apprend...
14:26Enfin, ce qui peut nous apprendre des choses,
14:28c'est que les choses qui ont été douloureuses
14:30nous servent, sont utiles
14:32et se transforment avec le temps.
14:34Oui, bien sûr.
14:35C'est ce qu'avait dit mon père.
14:36Mon père l'avait dit un jour.
14:37Oui.
14:37Tu verras, il y a des tas de choses
14:39qui ne te plairont pas dans la vie,
14:41qui te contrarieront,
14:42qui sont désagréables,
14:44et tu verras qu'avec le temps,
14:45tout ça finira par te toucher.
14:49Ce sera attendrissant avec le temps.
14:51Et c'est vrai.
14:52Alors, vous ne parlez pas du tout de la télé ?
14:53Vous parlez du cinéma ?
14:54Vous parlez du théâtre ?
14:55Pourquoi ?
14:55Non, je n'en ai pas venu.
14:58Non, je ne suis pas mineur.
14:59Non, je suis un des premiers acteurs à en faire
15:02à l'époque où tout le monde voulait faire du cinéma
15:04ou du théâtre.
15:05Donc, moi, je n'ai jamais méprisé la télévision.
15:07Je ne la mépriserai jamais.
15:09Il m'est arrivé de faire des choses
15:10tout à fait passionnantes à la télévision.
15:11Oui, oui, le sang de la vie, ça a été formidable.
15:12Et j'ai appris en particulier mon métier là-dedans.
15:14C'est vrai ?
15:15Alors oui, c'était très mal vu dans les années 60
15:18de faire de la télévision.
15:21Il fallait faire du théâtre ou du cinéma.
15:22Mais pas la télé.
15:23La télé, c'était méprisable.
15:24Bah non.
15:25Et pourquoi vous l'avez fait à cette époque-là ?
15:27Parce que d'abord, j'avais besoin de faire mon métier
15:28et de l'apprendre.
15:29Ensuite, parce qu'il y avait des réalisateurs
15:30absolument remarquables.
15:32Que ce soit Marcel Bluval, Stadio Lorenzi,
15:34Jean-Pierre Marchand.
15:35Pardon pour ceux que j'oublie,
15:36mais il y en a d'autres.
15:38Il y en a eu beaucoup d'autres.
15:39C'était quelquefois tout à fait remarquable.
15:42Mais ce n'est pas venu.
15:42Je me suis posé la question
15:43comme une mission médiatique.
15:45Non, parce que les quelques passages
15:47qui parlent de mon métier,
15:52c'est par exemple la partie
15:54où je découvre l'enseignement Stanislavskien,
15:56c'est quand je décide d'arrêter de vivre.
16:00Quand on lira le livre, on comprendra pourquoi.
16:02Mais c'est moins au fond sur mon métier
16:04qui est une conclusion de ça,
16:06plutôt que sur l'État
16:07que peut provoquer un amour brisé.
16:10Donc c'est un mélange des deux.
16:11Donc est-ce que c'est vraiment sur le métier ?
16:13Oui, ça fait toucher du doigt
16:15une chose qu'il faudra que je maîtrise.
16:17Voilà, Terzièvre,
16:18la rencontre avec Terzièvre,
16:19mais à un moment où je suis très jeune
16:21et où je bois de la bière
16:23pour me donner du courage
16:24et quand j'arrive devant lui,
16:24je suis incapable d'aligner trois mots.
16:27Donc ça, oui, c'est un souvenir.
16:29Mais sinon, je me suis beaucoup
16:30vraiment tourné vers la vie
16:36et que tout le monde peut vivre.
16:37Son père, sa mère, sa sœur,
16:39la famille,
16:40les jeunes filles
16:42dont je peux tomber amoureux ou pas.
16:44Ce que je suis pour elle.
16:45Vous avez du succès ou pas
16:45quand vous étiez adolescent ?
16:47Adolescent ?
16:48Enfin, 17 ans ?
16:50Non.
16:51Pas vraiment.
16:52Et à juste titre.
16:53Parce que je n'étais pas fini.
16:54J'étais en cours de fabrication.
16:55Ça ne plaisait pas assez.
16:59Vous vouliez faire quoi
17:00quand vous étiez petit ?
17:01Moi ?
17:02Oui.
17:03J'ai eu pendant un moment
17:04une idée que j'aurais bien voulu
17:05être acteur,
17:06mais très tôt.
17:07J'avais 8-9 ans en voyant jouer Robert Hirsch
17:09qui était un de mes héros.
17:10Et puis après,
17:11je ne me faisais pas confiance.
17:13Alors je me suis dit
17:13ben non, je vais faire autre chose.
17:14Je vais rapporter de l'argent à la maison
17:18où il n'y en avait pas.
17:19Et puis finalement,
17:21ce qui devait arriver est arrivé.
17:23et je finis par me faire suffisamment confiance
17:25grâce à ma sœur.
17:26Oui.
17:27C'est Catherine, votre sœur,
17:28qui vous a amené à ces cours de théâtre.
17:30Pour devenir ce que je suis devenu.
17:31Alors il y a un chapitre
17:32qui tombe de nulle part dans tout ça.
17:34C'est celui sur la bouffe.
17:36Celui qui est...
17:38Parce que c'est effectivement
17:40très nostalgique.
17:42Mais alors le passage sur le coup de gueule
17:45qui s'appelle marre.
17:47Il y en a marre.
17:48Marre des légumes oubliés
17:49qu'on a bien fait d'oublier.
17:50C'est ce que dit mon ami Jean-François Piège.
17:53qui dit
17:53pourquoi on parle de légumes oubliés ?
17:55Parce que si on les a oubliés,
17:56c'est qu'il y avait bien une raison.
17:57Et de cette cuisine qui vous horripile,
18:00de cette cuisine moderne.
18:01La cuisine pince à épiler, oui.
18:04Ça, ça me...
18:05Je ne peux pas...
18:06Je ne sais pas du tout
18:06ce que j'ai envie de manger.
18:07Ça m'ennuie.
18:09Maintenant, si vous voulez,
18:11le grand truc,
18:13c'est que les cuisiniers
18:17pensent qu'ils sont aussi des peintres.
18:19Non.
18:20Oui, je suis d'accord avec vous.
18:21Si je veux voir un Malévite,
18:22je vais dans une galerie
18:23où je peux le voir
18:24et ce que je demande à une assiette,
18:25c'est qu'elle soit bonne.
18:26Alors, je ne dis pas
18:27qu'il faut qu'elle ait l'air
18:28d'être prévomis.
18:29On est d'accord.
18:30Enfin, bon,
18:30à un moment donné,
18:31la beauté de l'assiette,
18:33c'est que ça soit...
18:34que ça régale.
18:36C'est le but suprême tout de même.
18:38C'est le but suprême
18:38et ce qui nous régale,
18:39ce sont les plats...
18:41On est un peu fabriqués.
18:42On se connaît bien tous les deux.
18:43On aime un peu le même genre.
18:45Il est plat canaille.
18:46Un peu roboratif et canaille.
18:48Voilà, c'est ce qu'on aime.
18:49Mais ça m'a fait rire,
18:50enfin, oui, sourire,
18:51ce chapitre
18:52parce qu'il est...
18:53Il est très bref.
18:54Il est très bref.
18:55C'était même pas...
18:57Ça m'est venu comme ça
18:58parce que je sortais
18:58d'un endroit
18:59où j'avais mangé comme ça
19:00et je me suis dit
19:00la barbe.
19:02Il y en a marre.
19:02Le menu surprise
19:03où c'est de toute façon
19:04c'est le chef qui décide.
19:05Et de toute façon,
19:06on vous demande
19:06si vous n'avez pas d'allergie.
19:08Alors, on a envie de répondre
19:09oui, j'ai une allergie
19:10à la connerie.
19:10Voilà, mais c'est pas grave.
19:13Ce livre,
19:14il passe un certain nombre...
19:16Il revient sur un certain nombre
19:17de choses dans votre vie.
19:19Le dernier chapitre,
19:20ne pas revenir.
19:22Mais d'une certaine manière,
19:23vous êtes revenu
19:23sur tous ces souvenirs.
19:25Oui, je suis revenu
19:26mais pas de la même...
19:27C'est pas de ce retour-là
19:28dont je parle.
19:29Oui, vous parlez du revenir
19:30sur des lieux
19:30où on a aimé.
19:31Oui, c'est beaucoup
19:32revenir sur les lieux.
19:34Sur des lieux
19:35où on essaierait
19:36de retrouver
19:36certains sentiments
19:37ou une certaine géographie
19:39qu'elle soit humaine
19:40ou territoriale.
19:42Il y a toujours
19:43quelque chose
19:44qui n'est plus là
19:45parce que...
19:45Parce que c'est pas
19:47les choses qui changent.
19:48C'est nous.
19:48C'est nous qui changeons.
19:50Et donc, on ne peut plus
19:50les percevoir
19:51de la même manière.
19:52Et c'est décevant.
19:53Chaque fois que j'ai essayé
19:54de faire ça,
19:55j'ai été déçu
19:55parce que les gens
19:57que j'avais croisés
19:58à ce moment-là
19:58n'existaient plus
19:59parce que je n'étais plus le même.
20:01J'avais pas envie d'être...
20:02Voilà.
20:02Donc, je fais en sorte
20:04d'essayer
20:05de ne pas revenir
20:06sur les dieux
20:07de mes crimes
20:07m'ont dit.
20:08Mais ceci étant,
20:09j'y suis contraint
20:09par la vie elle-même
20:11parce qu'évidemment,
20:12il n'y a pas beaucoup
20:12d'endroits maintenant
20:13dans Paris
20:14que je croise
20:15sans y avoir été absent.
20:18Il y a toujours
20:18la trace toujours
20:19de mes fesses
20:20quelque part
20:21sur un banc public
20:22ou sur un trottoir.
20:23Donc, c'est très difficile
20:24de me dire
20:25« Ah, je ne connaissais pas ça. »
20:26Non.
20:27Je suis arrivé à un stade
20:28où pratiquement
20:29je suis passé partout.
20:30Alors, je ne peux faire
20:31que mon souvenir.
20:32Et vous continuez
20:33à aller aux terrasses des cafés.
20:34Très joli texte aussi
20:35sur les terrasses
20:35au début du livre.
20:36Vous aimez passer
20:38voir les gens,
20:39voir la vie,
20:40imaginer.
20:40On peut passer des journées
20:41à regarder ça.
20:42On croise des âmes
20:43comme ça.
20:44On s'attache à l'une
20:45ou à l'autre
20:45ou pas.
20:46On peut en sourire,
20:48on peut être bouleversé.
20:49C'est un théâtre
20:51à part entière celui-là.
20:52Magnifique, vraiment.
20:54Le souvenir de presque tout
20:55Pierre Arditi.
20:57C'est paru
20:57au Cherche Midi.
20:59Je vous disais avant
21:00qu'on commence l'émission
21:00à quoi on reconnaît
21:01que c'est un bon livre.
21:02C'est quand on a
21:02coché toutes les pages
21:04et qu'on a souligné
21:05pratiquement une page sur deux
21:06parce que c'est une
21:07très très belle écriture
21:08et c'est un livre
21:09touchant,
21:11qui émeut
21:13et qui en même temps
21:14en dit beaucoup sur vous.
21:15Merci beaucoup
21:16d'avoir été ce matin
21:17sur Sud Radio,
21:18cher Pierre Arditi.
21:19Et c'est moi
21:20qui vous remercie.
21:21Et vous êtes au théâtre,
21:22évidemment,
21:22Théâtre Montparnasse.
21:23Je joue une pièce
21:24qui a pratiquement
21:25le même titre
21:25que le bouquin
21:26mais parce que je me suis dit
21:28bon Dieu,
21:28quand j'ai vu ça,
21:29c'est comme ça
21:30que j'aurais dû appeler le livre.
21:31Alors j'ai vu
21:32l'auteur à qui j'ai demandé
21:34est-ce que je peux prendre
21:35la moitié du truc
21:36donc au lieu de
21:37je me souviendrai de,
21:38c'est un souvenir de.
21:40Merci à vous
21:41et très bonne journée
21:43sur Sud Radio.
21:43A bientôt dans un restaurant
21:44Absolument pas.
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