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  • il y a 5 minutes
Un chagrin infini pour ses proches. Le 24 octobre dernier, Dahbia Benkired était condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible pour le meurtre de la petite Lola, en octobre 2022. Elle n'a pas fait appel de cette décision de justice.
Sur BFMTV, Delphine Daviet, la mère de l'enfant, se dit "soulagée" de savoir que Dahbia Benkired "sera enfermée jusqu'au bout de sa vie". Pour elle, c'est désormais la reconstruction qui commence: "un jour après l'autre", selon ses mots.

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Transcription
00:00Merci à tous les deux d'avoir accepté de nous recevoir chez vous à Lillère, dans le Pas-de-Calais.
00:07Un mois tout juste après le verdict, comment allez-vous Delphine ?
00:12Ça va, soulagée. Une partie de moi est soulagée, en sachant que la chose sera toujours enfermée jusqu'au bout de sa vie.
00:21Mais après, il faut un jour après l'autre. C'est ce qu'on se dit. Il faut attendre petit à petit que ça s'atténue.
00:29Mais c'est encore compliqué.
00:31Vous, Thibaut, un mois après le verdict, comment vous digérez, si je puis dire, la congénation ?
00:36Au début, c'était dur. Parce que j'avais toujours les images en tête de tout ce qui s'était dit.
00:44Et là, je commençais à être soulagé car elle n'a pas pu faire appel. Du coup, on ne va pas pouvoir revivre ça.
00:51Et après, il y a toujours une partie de moi qui me dit que ça ne ramènera pas ma sœur, dans tous les cas.
00:57Vous le disiez, vous l'évoquiez. Il y a quelques jours, par la voix de son avocat, Dabia Benkired a annoncé qu'elle ne ferait pas appel de sa condamnation.
01:07Elle est donc désormais condamnée définitivement à la prison à vie.
01:11Il n'y aura pas de nouveau procès.
01:13Quand vous avez appris qu'elle ne ferait pas appel, quelle avait été votre première réaction ?
01:18Vous avez été étonnée ?
01:20Oui, quand même. Parce qu'en sachant qu'elle aime parler d'elle, on s'était dit qu'elle allait faire appel.
01:28Donc, on craignait un petit peu ceci.
01:30Mais à la fin, au bout des dix jours, on se dit, ça y est, c'est fini.
01:35On ne parlera plus d'elle.
01:36Je n'ai plus envie qu'on parle d'elle.
01:38Elle ne le mérite pas, pour nous, pour moi.
01:40Vous disiez, à ce moment-là, avant de savoir qu'elle ne ferait pas appel, que vous ne pourriez pas affronter un nouveau procès, revivre ces jours d'audience ?
01:47Non, ça aurait été compliqué.
01:49Ça aurait été très compliqué de revivre ces jours intensifs, comme on a vécu, oui.
01:55Dabia Benkired pourra faire une demande de libération conditionnelle après 30 ans de réclusion criminelle.
02:01La procédure, je le précise, pour obtenir ce type d'aménagement de peine est extrêmement stricte.
02:07Néanmoins, elle pourrait, sur le papier, sortir de prison un jour.
02:14Qu'est-ce que cette perspective, très hypothétique, suscite chez vous, Delphine ?
02:21Je le vivrais très mal si un jour, elle serait dehors, oui.
02:26Je ne serais pas bien, pas bien.
02:27Même si, au bout de 30 ans, j'en aurais quand même...
02:30Je ne serais peut-être plus là, dans 30 ans, mais je ne serais pas bien, non.
02:38Je n'aimerais pas qu'elle sorte.
02:39Enfin, je ne pense pas qu'elle sortira.
02:41Je ne pense pas.
02:42Je ne l'espère pas.
02:44Vous y pensez où, des fois ?
02:45Que peut-être, elle pourrait, un jour, dans longtemps, sortir de prison ?
02:50Ça n'est pas complètement exclu.
02:53Déjà, je n'espère pas, parce qu'elle ne mérite pas de revoir la lumière du jour.
02:57Et pour moi, ça reste une personne dangereuse.
03:02Ça veut dire, la laisser enfermer en prison, c'est quand même, pour moi, sauver plusieurs personnes plus faibles qu'elle.
03:09Du coup, ça a été quand même un soulagement quand on a entendu qu'elle ne sortira pas de prison, normalement.
03:18La perpétuité réelle, la peine à laquelle elle a été condamnée et qui est désormais définitive,
03:24selon certains avocats qui ont réagi après le verdict, c'est une peine de mort qui ne dit pas son nom.
03:29C'est une façon pour eux de regretter, finalement, que cette peine existe.
03:33En tout cas, ça ressemble à un regret, à une critique.
03:37C'est, pour vous, une peine de mort déguisée, pour vous aussi ?
03:42Non, pour moi, de toute façon, elle ne mérite plus de sortir.
03:47Elle ne mérite pas d'autre pas que d'être entre quatre murs.
03:53Donc, non, pour moi, c'est une peine de mort.
03:57Non, pour moi, non.
03:59Et après, je ne suis pas pour, donc, la peine de mort.
04:01Si vous voulez savoir, je ne suis pas pour ça, parce que, pour moi, il faut qu'elle...
04:06Elle mérite d'être enfermée.
04:08Donc, pour moi, la peine de mort, c'est trop rapide.
04:11Donc, du jour au lendemain, voilà, c'est fini, on n'en parle plus.
04:14Ben non, non, il faut qu'elle fasse sa vie et ses jours, là-bas.
04:20Le 24 octobre, fin d'après-midi, le verdict est donc rendu.
04:25Peine maximale, perpétuité incompressible.
04:27Quand il tombe, ce verdict, vous êtes encore dans la salle d'audience, donc.
04:30Oui.
04:30Vous ressentez quoi, sur le moment ?
04:34Vous réagissez comment ?
04:35Sur le moment, je m'effondre dans les bras de mon fils, en lui disant, on l'a eu, on l'a eu.
04:43Donc, contente du verdict et contente qu'en France, il y a des peines qui existent et qu'il faut les appliquer.
04:52Donc, oui, je suis très contente de ce qui a été dit et ce qui a été fait.
04:57Même réaction pour vous, Thibaut, au moment où le verdict est rendu ?
05:03Qu'il ne mette pas cette peine et qu'il mette en dessous et qu'elle pourrait sortir un jour.
05:07Et du coup, voir qu'ils ont vraiment mis la peine maximale et que tous les jurés ont dit oui à toutes les questions que le président avait écrites, ça m'a vraiment mis un soulagement et ça m'a fait beaucoup de bien.
05:23La justice a été rendue.
05:26Oui.
05:27C'est ce que vous vous disiez quand le verdict a été rendu.
05:30Vous vous le dites toujours aujourd'hui avec un mois de recul.
05:33Oui, toujours, toujours.
05:34Je suis satisfaite de leurs décisions, des jurys, du président, de tout ce qui a été fait pour Malola.
05:42En sortant de la salle d'audience, il y a ce moment extrêmement poignant devant toutes les caméras qui étaient réunies.
05:50Vous laissez vraiment exprimer votre émotion.
05:52Oui, c'est rare.
05:53Très touchant.
05:56Dites, c'est rare.
05:57C'est très rare de ma part, oui.
05:59Je n'ai pas l'habitude de m'effondrer comme ça.
06:03Mais là, je pense que les nez, tout est parti.
06:07Il fallait que ça sorte.
06:08Donc, c'est sorti.
06:11Mais c'est très rare que je m'effondre comme ça, surtout devant des inconnus, encore.
06:15Même devant ma famille, je ne le fais pas.
06:17Donc, oui, mon corps, il fallait qu'il lâche.
06:22Vous avez laissé exploser, si je puis dire, tout ce que vous avez contenu, notamment pendant une semaine, pendant ces six jours d'audience, en fait.
06:31C'est ça.
06:31C'est ça. Tout est sorti.
06:34Il fallait que ça sorte. Il faut que ça sorte.
06:36On me le conseille, mais des fois, ça reste trop ancré en moi.
06:40Et en particulier, pendant ces six jours, d'un procès, d'une dureté à laquelle, j'imagine, vous vous attendiez, vous vous étiez préparée.
06:52Vous avez vécu de quelle manière ce procès ?
06:57Après, oui. Moi, je travaille beaucoup sur moi-même. J'ai toujours ma psy aussi, qui me suit depuis trois ans, et qui m'a aussi aidée à pouvoir combattre ces six jours à l'avance, on va dire.
07:10Et donc, je pense qu'elle m'a beaucoup aidée sur ce sujet-là. Et je pense que c'est ce qui m'aide aussi. Ma famille était là aussi.
07:17Donc, toute ma famille, ça aide beaucoup d'avoir ses proches à côté de soi.
07:22Comment vous l'avez vécu, Thibault, ce procès ? C'était aussi difficile que vous l'imaginiez ? Est-ce que la préparation à ce procès a permis d'atténuer un peu cette souffrance pendant le procès ? Comment vous l'avez vécu ?
07:37Moi, en préparation, je ne suis pas suivi. Du coup, apparemment, moi, c'était juste moi et moi-même.
07:45Non, parce que je n'aime pas trop être suivi par un psy ou quoi. Et après, comment je l'ai vécu ? Dès le premier jour, on a vu la couleur.
07:57Ça commence d'un coup, avec les images, la reconstitution. Et du coup, oui, après, dès le premier jour, j'ai eu peur d'aller au second jour pour revivre ça.
08:14Donc, vous vous êtes dit, je ne vais pas pouvoir continuer à être présent à ce procès par moment et peut-être après les premières journées,
08:25avec des moments qui ont dû être absolument abominables, même si on vous l'avait dit, le fait de le vivre, c'est quand même autre chose.
08:31Il y a eu des moments comme ça dans le procès où vous avez eu des doutes sur est-ce que je reste ? Est-ce que je m'en vais ?
08:35Non. Jamais ?
08:36Jamais. Non. Il fallait que je reste. Ah ouais ? Non. Il fallait que je sois là du début à la fin.
08:43Vous avez tout affronté.
08:44Oui.
08:44Vous avez tout, c'est un terme que vous utilisez, vous avez tout assumé.
08:48Oui.
08:48les photos.
08:51Les photos.
08:52Et le regard.
08:55C'est ça.
08:56De ce monstre, de cette chose. Ce sont vos mots, Delphine.
08:59Ce sera les miens, oui.
09:00Vous l'avez regardé droit dans les yeux.
09:02Oui.
09:02Vous aussi, hein, Thibaut ?
09:03Oui.
09:04Pendant ce procès. Qu'est-ce que vous y avez vu ?
09:07Rien.
09:07Dans ces yeux-là.
09:08Rien.
09:09Un vide.
09:10Rien. Pas de sentiments.
09:12Pas de peine.
09:15Rien.
09:15On n'en déduit rien de son regard, en fait.
09:18Elle ne nous a jamais regardé vraiment à nous.
09:20Nous, elle ne nous a pas fixé.
09:23Alors, est-ce qu'elle osait pas ou je sais pas.
09:25Mais le premier jour, quand on lui a demandé de dire, c'est mon fils qui lui a demandé,
09:31mon droit dans les yeux, toute la vérité, rien que la vérité, il n'y avait rien dans son regard.
09:36Rien du tout.
09:37Vous aussi, vous avez tenu, Thibaut, à affronter son regard.
09:41En tout cas, vous, à la regarder.
09:43Si elle ne vous a pas regardé, vous, vous l'avez regardé.
09:45C'était vraiment délibéré.
09:47C'était une volonté ferme, de votre part.
09:50Il fallait que je la regarde, parce qu'en quelque sorte, c'est ma sœur.
09:54La dernière personne qu'elle a vue, c'est elle.
09:59Du coup, il fallait que je vois vraiment à quoi elle ressemble, ses sentiments ou quoi.
10:05Et après, pendant tout le long du...
10:06Les sentiments, pardon, vous en avez perçu ?
10:08Non.
10:09Chez cette femme, cette jeune femme.
10:10Pendant tout le long du procès, je n'ai pas eu un seul moment où j'avais l'impression qu'elle était dégoûtée d'être là.
10:19Juste, elle était là et point barre, même pendant...
10:21Vous auriez préféré de la colère ou quelques formes de sentiments que ce soit, plutôt que ce rien, comme vous dites ?
10:29Peut-être même pas.
10:30Je n'attendais rien d'elle, en fait.
10:31D'accord.
10:32Donc, moi, je n'attendais rien en retour de sa part, tout compte fait.
10:37Donc, non, peut-être autre chose, ça ne m'aurait pas non plus...
10:40Voilà.
10:41Lors de sa dernière prise de parole, à la fin, à la toute fin du procès, d'Abiyah Benkirède a demandé pardon.
10:49Vous souriez, Delphine.
10:51Est-ce que vous pensez pouvoir le lui accorder un jour ?
10:54Non.
10:55Non.
10:56Ça, je ne peux pas.
10:58Non.
10:58C'est pas...
10:59Non, je ne pourrais pas.
11:01Ce n'est pas pardonnable.
11:02Il n'y a pas de mots, hein.
11:03Il n'y a pas de...
11:05C'est tellement cruel de ce qu'elle a fait que je ne pourrais jamais la regarder et lui dire
11:11« Je te pardonne ».
11:12Non, je ne peux pas.
11:15Moi, pareil.
11:16Ce n'est même pas un mot qui me reste dans la tête.
11:21Le pardon, pour elle, je n'en ai aucun.
11:22Vous aviez demandé la vérité.
11:24Vous, vous aviez demandé la vérité.
11:26Vous ne l'avez pas obtenue.
11:27C'est-à-dire qu'elle n'a pas livré de véritable réponse sur le processus qui l'a fait passer à l'acte
11:33quand vous disiez au tout début qu'une part de vous était soulagée.
11:38C'est lié à ça, notamment ?
11:40Au fait que vous n'avez pas eu toutes les explications que vous attendiez pendant ce procès ?
11:43On ne saura vraiment jamais la vérité à 100% de sa part
11:48parce qu'elle a tellement changé et changé une version que je pense que non,
11:54on ne saura jamais le pourquoi, pourquoi Lola, pourquoi nous, pourquoi on n'aura jamais la réponse.
12:01Malheureusement, on ne l'aura pas.
12:03Et ça reste un regret ou vous avez tourné la page même de cela ?
12:07Ça reste dans ma tête.
12:09Ça reste dans vos têtes ?
12:09Oui.
12:10Je me poserai toujours la question.
12:13Pourquoi elle l'a suivie ?
12:14Pourquoi elle l'a choisie, elle ?
12:17Pourquoi tout ça, tout ça, on ne sait pas.
12:21Elle ne l'a jamais dit.
12:23Et puis comme elle a changé de version tout le temps,
12:27on ne saura jamais vraiment le fameux, je ne pense pas.
12:30Et pour cette absence d'explication concrète, parfois,
12:34est-ce que, je ne sais pas, vous vous accrochez à une hypothèse ?
12:38Je ne sais pas, vous me dites, de toute façon, il n'y a rien à comprendre.
12:41Un tel geste, un tel acharnement, il n'y a rien à comprendre.
12:44Non, je ne pense pas.
12:45Vous voudriez quand même avoir...
12:46Oui, j'aurais aimé quand même.
12:48Au fond de moi, oui.
12:49J'aurais aimé avoir des réponses plus claires, plus nettes.
12:52Et je me poserai toujours au sérieux avec la question,
12:56pourquoi Lola l'aurait suivie ?
12:58Après, c'est une très grande manipulatrice.
13:03Donc Lola était très gentille aussi, il se disait oui aussi.
13:07Donc elle a sûrement voulu l'aider.
13:09Et en contrepartie, voilà ce qui s'est passé derrière.
13:13Qu'est-ce que vous dites aux gens qui, et ils sont très nombreux,
13:19s'émeufs de votre dignité, de votre force ?
13:26Vous avez impressionné.
13:27Vous vous impressionnez même.
13:29Vous en avez conscience ?
13:30Non, parce que...
13:32Alors, je n'aime pas les compliments.
13:35C'est peut-être bête, mais je n'aime pas recevoir des compliments.
13:38Je ne sais pas pourquoi, c'est comme ça.
13:42Je suis naturelle.
13:45Je ne veux pas expliquer le pourquoi du comment.
13:47J'ai été éduquée comme ça.
13:49Mes enfants sont éduqués pareil.
13:51Donc voilà, on espère que...
13:54Et il fallait le faire pour Lola.
13:56Oui.
13:57Être comme on est de tous les jours.
14:00Votre naturel, vous l'avez, si je puis dire, augmenté.
14:04On regarde ce que vous estimiez devoir à votre fille.
14:08C'est un peu ça, en fait.
14:08C'est ça.
14:09Voilà.
14:10Il fallait combattre, être fort pour Lola,
14:14être fort aussi pour mon mari, qui n'est plus là non plus.
14:17Johan.
14:19Donc, oui, c'est...
14:21Et on a vécu tellement de drames aussi dans notre famille.
14:25Ça renforce peut-être, pour ma part.
14:28Peut-être que j'ai un caractère aussi comme ça.
14:31Donc, oui, il fallait se battre.
14:34Une immense dignité aussi au passage au regard de la dimension politique
14:41de ce meurtre sordide d'Abiya Benkiré des temps algériennes,
14:47sous OQTF au moment des faits.
14:48Vous êtes devenue, malgré vous, symbole d'un combat.
14:52Vous avez toujours rejeté les tentatives d'exploitation politique.
14:55Oui.
14:55On n'est pas politique et on ne le saura jamais.
14:57Et ça, je veux qu'on respecte notre choix
15:00parce qu'on n'a rien à faire là-dedans.
15:05C'est leur combat, eux, et ce n'est pas le nôtre.
15:07Voilà, tout simplement.
15:08C'est tentant parfois, c'est une question,
15:10c'est tentant parfois de se laisser aller, si je puis dire,
15:15à des choses qu'on peut ressentir dans ses tripes,
15:19de la colère à la haine.
15:21Vous parliez tout à l'heure de la peine maximale
15:26à laquelle elle a été condamnée.
15:28La peine de mort n'existe plus en France.
15:30Est-ce que parfois, vous, Thibaut,
15:31vous êtes un jeune homme, un jeune adulte,
15:34est-ce que parfois, c'est des choses qui vous traversent l'esprit
15:36ou pas du tout ?
15:38Sur la peine de mort.
15:40Sur une volonté, parfois, de vengeance
15:43et sur la peine de mort, par exemple.
15:47Mais est-ce que c'est quelque chose qui vous a traversé l'esprit
15:49au regard de ce que vous avez vécu ?
15:52Pour être honnête, j'avais juste envie de lui sauter dessus
15:58dès que je l'ai vu arriver dans la salle.
16:01Après, je ne l'ai pas fait parce qu'on reste humain
16:05et on avait envie que ce procès se fasse dans les règles,
16:10on va dire.
16:10Et après, comment dire ?
16:16Ouais, non, en tout cas, ça aurait servi à rien
16:19de franchir ce mur
16:21qui était entre elle et nous.
16:24Ça aurait fait plus de mal
16:25déjà à nous
16:28et ça aurait remis une mauvaise image
16:32que nous, en tout cas, on veut apporter.
16:36Vous êtes fière de votre fils ?
16:39Très.
16:39Mélphine, je vois votre regard.
16:42Ouais, je suis très fière de lui.
16:44Il a mûri d'un coup
16:45et je le trouve très fort également.
16:48Ouais.
16:50Et je lui dis bravo.
16:51Je ne le dis pas tous les jours.
16:52Il le sait, mais il le sait ce que je pense.
16:55Et ouais, je suis fière de mon fils.
16:58Depuis le procès, depuis le verdict particulier,
17:00qu'est-ce qui a changé pour vous ?
17:01Qu'est-ce qui a changé en vous même, je dirais ?
17:04Mélphine ?
17:05Moi, pas grand-chose.
17:09Je suis toujours suivie.
17:13Après, non, je n'ai pas changé plus que ça.
17:15Je penserais toujours la même chose.
17:19Après, peut-être des gens pensent que j'ai changé,
17:23mais peut-être que moi, je ne vois pas comment je peux changer.
17:27Parce que des fois, on ne se rend pas compte
17:28comment on peut être et comment...
17:30Mais comme vous disiez tout à l'heure,
17:32il y a une part de moi qui est soulagée.
17:35Oui.
17:35Ça, c'est l'effet, l'effet verdict.
17:38C'est ça.
17:38La justice qui a été rendue, qui est passée.
17:41Oui.
17:42C'est une part seulement de vous.
17:43Voilà.
17:43Qui est soulagée.
17:44C'est ça.
17:45Et l'autre part sera toujours triste.
17:50Et une partie de moi-même, oui, qui est partie avec Lola.
17:54Comme je dis, ma mini-moi, je l'ai toujours dit.
17:56On a été très fusionnels.
17:57Donc, cette partie-là, oui, me manquera tout le temps.
18:01Tout le temps.
18:02Et on a du mal à s'en remettre, oui.
18:04Sur ça, en tout cas.
18:06C'est le temps qui atténue...
18:09Je ne sais pas si le temps peut atténuer.
18:12Parce que des fois, je me dis que ce n'est pas réel.
18:14Des fois, je me dis que c'est réel.
18:16Et dans ma tête, c'est encore un peu ambigu, on va dire.
18:19Encore aujourd'hui ?
18:20Voilà.
18:20Encore aujourd'hui, oui.
18:22Malgré le procès...
18:23Malgré le procès.
18:23Ce qui a rendu très réel.
18:26Et des fois, je vais penser d'un seul coup, je vais repenser à tout ça.
18:29Et ça va m'arriver de faire des crises d'angoisse, oui.
18:32Mais je ne le montre pas.
18:34On est ici à Lillère.
18:35Oui.
18:36Dans le Pas-de-Calais.
18:37Là où vous êtes née.
18:39Moi, je suis née, oui.
18:40Dans le Pas-de-Calais.
18:40Je suis une vraie ch'ti, moi.
18:43Oui.
18:43Depuis le meurtre, vous avez déménagé.
18:48Voilà.
18:48Vous habitez de Paris.
18:49Non.
18:49Vous vous dites que vous avez changé de vie, d'une certaine manière, à travers ce déménagement.
18:55À travers tout ça, oui.
18:57On a changé de vie, oui, complètement.
18:58Parce qu'il fallait...
19:00On a tout perdu.
19:01On a perdu...
19:03Moi, j'ai perdu mon travail.
19:05Lui et ses amis, son lycée.
19:07Enfin, on perd tout.
19:08Tout s'effondre.
19:10Et on se dit, il faut se relever.
19:13Donc, oui, je suis revenue dans ma ville natale, on va dire.
19:16Et je suis très bien ici et je suis très bien entourée par les amis, la famille.
19:22Donc, oui, on est bien, là.
19:23On est bien.
19:24Un retour aux sources, d'une certaine manière.
19:25C'est ça.
19:26Je crois que vous avez...
19:27C'est dans le Pas-de-Calais que vous avez donné naissance à Lola et à Thibaut.
19:31À Thibaut, puis à Lola.
19:33Lala, c'est ça.
19:34On se sent ça.
19:34Oui, oui.
19:35Je voulais absolument accoucher dans le Pas-de-Calais.
19:37Voilà.
19:38Et j'en ai fait, oui, des ch'tis, du coup, plus ou moins, entre guillemets.
19:41Et donc, c'était réconfortant de revenir ici ?
19:44Oui.
19:44Ici.
19:45Moi, je me sens bien ici.
19:47Dans ma ville natale, je me sens bien.
19:49Parlier des conséquences du meurtre de Lola, pour vous, Delphine, pour vous, Thibaut,
19:55aussi, ça nous amène à la question des dommages collatéraux.
20:00Une telle abomination, après une telle horreur, celle de perdre un enfant, surtout, dans ces conditions.
20:05Notamment le lien, sur le lien avec les autres.
20:09Leur empathie, mais parfois aussi leur pitié.
20:11Ça, c'est quelque chose dont on n'a pas forcément conscience quand on n'est pas concerné.
20:17Et vous, Delphine, vous le vivez au quotidien, j'imagine, ce changement du lien avec les autres depuis ce qui vous est arrivé.
20:23Moi, j'apprécie parce que les gens que je côtoie et ma famille respectent que je n'ai pas envie d'en parler.
20:32Quand j'ai envie, voilà, je vais le faire.
20:34Sinon, s'ils voient que j'en parle pas, en fait.
20:39C'est très, très rare que je vais évoquer le sujet en famille ou entre amis.
20:45Et tous les gens respectent.
20:46Ils ne me posent pas de questions.
20:48Ils ne me regardent pas en pitié.
20:50Et ça, je préfère.
20:52Vous n'êtes pas que la mère de Lola, comme si c'était inscrit sur votre front,
20:59et que vous ne représentiez que ça, je mets des guillemets, évidemment.
21:01Je suis une femme aussi, je suis maman, je suis une femme.
21:08J'ai un peu plusieurs rôles, mais je n'aime pas qu'on me prenne en pitié.
21:13Ça, je ne voudrais pas.
21:15Je n'aimerais pas que quelqu'un dans la rue dise,
21:17« Oh, regarde, c'est la pauvre maman. »
21:20Ben non, non, il ne faut pas dire ça.
21:23J'ai des beaux enfants, voilà.
21:26Et ça, je suis fière de mes enfants, oui.
21:28C'est la question d'avancer, de comment avancer,
21:35après un tel drame.
21:36Vous dites, « Je suis une maman, je suis une femme. »
21:40Il y a la vie sentimentale aussi.
21:41C'est ça, il faut avancer, il faut essayer jour après jour de…
21:47On se lève, voilà, on se dit un jour après l'autre.
21:51Moi, actuellement…
21:51On se lève, on se relève ?
21:53On se lève.
21:54Petit à petit, quand même, vous diriez-vous ?
21:54Petit à petit, voilà.
21:56Des fois, je n'ai pas envie de me lever.
21:58Voilà, mais je lui dis, non, il faut y aller, il faut se battre.
22:03Et ouais, donc je le fais.
22:05Thibaut, c'est pareil, vous êtes très fort,
22:06vous êtes comme votre mère.
22:08Elle disait il y a quelques instants,
22:09sur vous aussi, évidemment, ça a eu des conséquences.
22:11Le fait de devoir, au-delà du drame, bien sûr, du meurtre,
22:16changer de ville, perdre ses amis,
22:21refaire une vie, se refaire un entourage, d'une certaine manière.
22:24Ça, vous estimez, avec le temps qui passe, que vous réussissez plutôt bien à le faire ?
22:30C'est quand même un cataclysme dans une vie.
22:32Vous êtes jeune.
22:34Au début, ça a été très compliqué, car du coup, on était chez ma mamie.
22:40Oui, au début.
22:40Et moi, je restais dans ma chambre, je ne bougeais pas, je m'enfermais dans ma bulle.
22:47Et après, on a commencé à déménager dans plusieurs endroits.
22:51Et là, on s'est retrouvés ici.
22:52J'ai rencontré, du coup, ma copine,
22:57qui maintenant m'aide beaucoup dans ma vie.
23:02Franchement, je suis très content de l'avoir rencontrée, à ce moment-là.
23:09Et après aussi, ma mère, elle m'aide beaucoup.
23:12Et tous nos proches qui sont ici, notre famille,
23:17ils sont vraiment formidables, en tout cas avec nous, au quotidien.
23:22Il y a de la lumière, quand même.
23:24Oui.
23:25Non ?
23:26Oui.
23:29Nous, on est une famille unie, soudée.
23:32Donc, pour moi, ça m'aide beaucoup.
23:36Et les amis aussi.
23:38J'ai des amis qui, pour moi, font partie de ma famille aussi.
23:41C'est ma famille de cœur.
23:44Notamment, les gens du cropping.
23:48Et mes amis d'enfance, du coup, que je revois.
23:52Que j'apprécie beaucoup.
23:55Donc, tout ça, ça aide, je pense, aussi à se lever tous les jours.
23:59Le mot bonheur, ça vous parle ?
24:01Moi aussi.
24:02Ça vous parle ?
24:03Oui, quand même.
24:03Quand même.
24:05On rigole.
24:07On essaie de s'amuser, quand même, au maximum.
24:11Pour ne plus trop penser, peut-être.
24:13Et vous y arrivez ?
24:14Oui.
24:15Oui.
24:16Vous êtes croyante ?
24:19Oui.
24:21Vous parlez à Lola ?
24:22Vous échangez avec Lola ?
24:23J'ai lu que vous voyez quelqu'un qui vous rapproche de votre fille.
24:29C'est ça.
24:30Oui.
24:30Ça fait depuis le début que je vois cette personne qui parle à Lola à travers...
24:37Voilà.
24:38Donc, je peux lui parler à travers elle, on va dire.
24:40Et à mon mari aussi.
24:44Après, mon fils me prend un peu pour une folle, des fois, là-dessus.
24:48Mais voilà.
24:49Moi, j'y crois beaucoup.
24:52Et ça me fait du bien, oui.
24:54Et c'est quelqu'un en qui je peux avoir confiance,
24:58parce que c'est une dame qui fait partie de la famille de mon mari.
25:03Donc, du coup, c'est pas quelqu'un qui va se moquer de moi, on va dire.
25:08Donc, oui, j'y crois et je veux y croire.
25:12Et vous lui parlez à Lola et elle vous parle ?
25:15Voilà, oui.
25:18Et comment vous ressortez de ces moments-là ?
25:21Des fois, c'est compliqué quand je ressors.
25:24Quand je m'en vais, je me dis que c'est réel, c'est pas réel.
25:28Mais j'y crois.
25:29Parce qu'il y a des choses où cette dame qui m'a dite que personne ne pouvait savoir.
25:36Donc, je me dis oui.
25:41Elle me parle à travers elle et j'attends toujours un signe.
25:45J'espère l'avoir un jour, ce signe.
25:48Oui, Thibaut, ce lien avec votre petite sœur, vous le maintenez ?
25:54De quelle manière ?
25:56On a bien compris que vous ne vous réfugiez pas.
25:57Non, mais moi, je ne suis pas du tout croyant.
26:03J'étais comme mon père.
26:05Mon père, il était pareil.
26:08On croit, on va dire, quand ce qu'on voit.
26:11Mais après, moi, ce qui m'unit à ma sœur et à mon père aussi, c'est le sport.
26:18Le sport, ça m'aide beaucoup à extérioriser.
26:24On va dire que ça me guérit un peu.
26:28C'est le sport, votre psy ?
26:29Oui, c'est ça.
26:32C'est le sport qui fait toute ma vie sur soi.
26:34Le basket.
26:35Oui.
26:37Merci.
26:38Merci Delphine Davia.
26:39Merci Thibaut Davia.
26:40Merci à vous.
26:40Merci de nous avoir fait confiance et de nous avoir réussi ici, chez vous, aujourd'hui.
26:44Merci à vous.
26:45Merci à vous.
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