- il y a 5 jours
Alice Douard, réalisatrice du film “Des preuves d’amour” (au cinéma ce jour).
Retrouvez « Nouvelles têtes » présenté par Daphné Bürki sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes
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00:00Et Daphné Burki et sa nouvelle tête.
00:02Il est 9h50 dans quelques secondes et nous sommes en direct dans la grande matinale de France Inter.
00:06Et aujourd'hui, ma nouvelle tête s'appelle Alice Douard.
00:09Elle est réalisatrice et elle vit une grande nouvelle ce matin.
00:12Elle sort son premier long métrage.
00:14Et il y a d'autres bonnes nouvelles parce que déjà, je reçois une femme réalisatrice.
00:18Une femme réalisatrice qui filme un sujet très peu représenté
00:21et qui fera du bien à certaines âmes qui nous écoutent.
00:25Une femme réalisatrice qui filme un sujet précieux
00:27et qui a trouvé le moyen d'en faire une comédie romantique, politique,
00:32qui met tout le monde d'accord.
00:33Tous ceux, en tout cas, qui l'ont vu depuis le festival de Cannes.
00:36Ce son de Disclosure, c'est celui qu'elle aime,
00:39mais c'est aussi celui qu'on retrouve dans le film L'épreuve d'amour.
00:43Où l'on voit, à ce moment-là, une femme enceinte qui danse.
00:46Une femme enceinte qui danse dans un club avec ses amis.
00:50Une femme enceinte qui danse dans un club avec sa femme.
00:57Elle normalise une image qu'on nous a interdite.
01:03En tout cas, qu'on a voulu contraindre, qu'on a voulu diriger.
01:06Alors, flèche dans le cœur, évidemment, pour Alice Douard ce matin,
01:09qui a fait ses armes en scénario à la FEMIS
01:11avant de signer plusieurs courts-métrages très remarqués,
01:13dont l'attente César 2024 du meilleur cours.
01:17Et aujourd'hui, elle fait son entrée au cinéma avec un film tendre, drôle et absolument nécessaire.
01:21Bienvenue à Alice Douard sur France Inter.
01:23Merci Daphné, bonjour.
01:25Je suis ravie de vous accueillir aujourd'hui.
01:26Donc, il est 9h51, donc dans 9 minutes,
01:29sort votre premier film au cinéma partout en France.
01:31Comment ça va ?
01:32Très bien.
01:34Non, mais c'est très joyeux de sortir un premier film.
01:36Je suis hyper contente.
01:38On a un peu le trac quand même.
01:39Oui, beaucoup, beaucoup, beaucoup.
01:40Bah oui.
01:41Je me demandais si vous étiez bien dans le studio
01:42ou si vous auriez été plus à l'aise derrière le ficus d'un hall de cinéma
01:45pour surveiller les gens qui rentrent dans la salle.
01:47En tout cas, je suis choquée.
01:49Ça peut m'arriver cet après-midi.
01:51Tu vois ce truc de réalisateur ?
01:53En tout cas, ce film, c'est l'histoire de Céline qui va devenir mère,
01:59mais pas comme dans les films.
02:01Elle n'est pas enceinte.
02:02Dans 3 mois, c'est Nadia, sa femme, qui portera leur enfant.
02:05Et pendant que le ventre de l'une s'arrondit,
02:07l'autre, elle cherche sa place.
02:08Aux yeux de la loi, aux yeux des autres.
02:10Et puis parfois, même au sien, on écoute quelques sons de la bande originale.
02:14Vous avez fait comment alors ?
02:15On a fait l'amour.
02:16Oui, non.
02:17C'est une fille ?
02:19Oui.
02:20Ah, c'est bien, tant mieux.
02:21T'as pas peur d'être jalouse ?
02:22Jalouse de quoi ?
02:24C'était pas instinctif de t'imaginer coucher avec une fille.
02:28D'imaginer ta fille coucher avec un mec, ça c'est instinctif.
02:30Des preuves d'amour, ça explore cette maternité qu'on ne montre jamais.
02:35C'est une comédie sentimentale, voire romantique.
02:38Comment devenir parent quand rien autour de soi ne vous reconnaît comme tel ?
02:42Qu'est-ce qui vous a donné envie de raconter cette maternité-là,
02:44celle qu'on invisibilise et celle qu'on ne filme pas ?
02:47D'abord, c'est le manque de représentation.
02:50Moi, je suis maman d'une petite fille que je n'ai pas portée et que j'ai dû adopter.
02:54Et quand je racontais mon histoire, les gens ne savent pas le parcours d'adoption
02:58qui va avec nos familles.
03:02Et donc, c'est la création d'une image manquante.
03:04Et puis surtout, la proposition de ces familles existent
03:07et remettre l'amour au centre de nos récits.
03:11Parce que même avec la loi Taubira, même avec le mariage pour tous,
03:14pour les couples de femmes qui avaient recours à une PMA à ce moment-là,
03:17il fallait adopter son propre enfant après la naissance, une maternité.
03:21Donc, il passe par le tribunal.
03:22Alors, tous ceux qui imaginent encore que ce parcours,
03:25il est simple, il est fluide, il est évident, j'ai envie de dire...
03:28Rien compris !
03:29Non, rien compris !
03:33Alors, vraiment, rien compris.
03:34C'est nouveau, ça !
03:36Alice, et ça va revenir souvent.
03:38Alice, vous connaissez cette réalité de l'intérieur.
03:41Ce film s'inspire, on l'a compris, de votre histoire, la vôtre.
03:44Comment on vit une première maternité
03:45quand la loi vous regarde comme si vous étiez étrangère à votre propre famille ?
03:50C'est précisément ça, le chemin.
03:51Moi, j'ai rencontré aussi beaucoup d'autres femmes qui ont fait des enfants ensemble.
03:55Et le point commun de nous toutes, c'était le doute,
03:57cette question de la légitimité que se pose n'importe quelle personne qui va avoir un enfant.
04:01Mais dans notre cas, il faut prouver aux yeux de la justice qu'on mérite cette place.
04:06Et le film raconte ça, en fait.
04:08Et donc, il part de cette situation extrêmement spécifique,
04:10deux femmes attendent un enfant,
04:12pour aller vers l'universalité de la maternité, de la parentalité.
04:16Donc, c'est un film qui peut s'adresser à tout le monde.
04:17Et surtout vers la beauté de la naissance.
04:20Une fois que l'enfant est là, la question juridique, elle s'efface.
04:22Parce qu'avoir un enfant, il n'y a rien de plus beau.
04:25Et dans le soin et dans le temps qu'on passe avec,
04:27le lien se crée au-delà, évidemment, de la question légale.
04:32Alors, il y a ce personnage de Céline, qui ne porte pas l'enfant,
04:36mais qui est entre deux âges.
04:37Vous savez, l'attente de l'enfant,
04:39et puis son enfance avec sa propre mère.
04:42C'est une grande pianiste incarnée par Noémi Lovski,
04:44qui est absolument extraordinaire.
04:46La future grand-mère écrit une lettre à sa fille pour l'adoption.
04:49Et elle cite Nietzsche en disant,
04:51« Il faut porter en soi un chaos pour mettre au monde une étoile dansante. »
04:54Je ne connaissais pas cette citation.
04:56Moi, j'ai pensé que le chaos dont vous parlez,
04:58il est question, il n'est pas seulement de l'intérieur,
05:01mais aussi celui imposé par les normes,
05:03celui imposé par les procédures, les attentes,
05:05parfois même par l'homophobie.
05:06Et pourtant, au cœur de ce chaos,
05:08vous avez réussi à montrer dans ce film cette petite lumière,
05:11l'émergence de ce désir de parentalité, de maternité aussi.
05:16C'était le but.
05:16Oui, je pense que le film, c'est aussi une proposition de réconciliation.
05:20C'est-à-dire qu'en 2013, au moment des manifs pour tous,
05:23surtout, je dis mariage pour tous, mais surtout manif pour tous,
05:25on a vu à quel point les gens étaient opposés
05:26à ce projet de loi et à nos familles.
05:28Et moi, j'ai un souvenir d'une violence inouïe,
05:31parce qu'il y avait un million de personnes dans la rue,
05:32ce qui est énorme.
05:33Et de ce chaos, enfin, en tout cas,
05:35ce chaos où nous, on l'a affronté,
05:37on est nombreuses à l'avoir affronté,
05:38et nos familles existent.
05:40Et l'amour, il est infini.
05:41Il est peut-être plus beau encore,
05:43parce qu'on part d'une blessure.
05:46Voilà, c'est ça, l'offreuse de Nietzsche.
05:48Alors, forcément, moi, j'aime bien l'idée,
05:51et vous en avez parlé au début,
05:52de voir des films où tout le monde se sent représenté.
05:54Ça fait du bien, quand même.
05:55Donc, je ne sais pas si vous avez créé ces courts-métrages,
05:57ce film, parce que, bon,
05:59ça vous a vraiment manqué à un moment donné.
06:00Mais dans vos références romantiques de l'enfance,
06:03il y a quand même un gros crush assez étonnant.
06:05C'est Drasic.
06:06Ah oui.
06:07Ah oui.
06:09Je ne l'ai pas vu venir.
06:11Excuse-moi.
06:12La série Arcley Caravivre.
06:14Ah oui.
06:15Alors, il y a le piercing,
06:16il y a la chemise bûcheron.
06:18Je l'avais oublié, celui-ci.
06:19Le Brun, le beau gosse.
06:21Et il paraît qu'à cette époque-là,
06:23Adolescente, vous aviez un sacré talent.
06:25Vous faisiez des bolasses enflammées.
06:27C'est vrai.
06:29Est-ce que vous vous imaginez jouer des bolasses
06:31devant Drasic ?
06:33Je ne sais pas si c'est tout à fait la même époque,
06:35peut-être,
06:35mais une époque jonglage,
06:36bolasses enflammées,
06:37ça, c'est vrai.
06:38Et Drasic,
06:39un de mes premiers grands amours imaginaires.
06:41Je lui avais même écrit une lettre
06:42via Star Club.
06:43Non !
06:44Mais je ne sais pas s'il l'a reçu.
06:45On ne le saura jamais.
06:48Alors,
06:48on va écouter une autre de vos références
06:50de comédie romantique de l'enfance.
06:53Il y avait Laboum et Vicky aussi.
07:00Alors, forcément,
07:01j'ai une question un petit peu clichée, Alice.
07:04Mais je suis obligée de la faire.
07:05Aujourd'hui,
07:06vous sortez votre premier film,
07:07là,
07:07dans quelques minutes.
07:09Maintenant,
07:09vous êtes mère,
07:10après un sacré combat quand même.
07:12Qu'est-ce que vous diriez
07:13à l'adolescente que vous étiez ?
07:15Que la peur,
07:20ça passe.
07:22Et pourtant,
07:22vous m'avez dit
07:23que le super pouvoir
07:23que vous aimeriez avoir,
07:25c'est de ne jamais avoir peur.
07:26Oui.
07:26Moi,
07:27je suis une grande angoissée
07:27et je trouve que
07:29j'aimerais ne plus avoir peur.
07:31Ça,
07:32ce serait vraiment génial.
07:33Alors,
07:34peut-être que c'est le but de ce film.
07:35C'est de donner de la force
07:36à beaucoup,
07:37beaucoup d'entre nous.
07:39En tout cas,
07:39j'espère que
07:40tout le monde pourra
07:41se reconnaître dans ce film
07:42et c'est une proposition
07:44de film joyeux
07:44où aucun homosexuel ne meurt,
07:46ce qui est déjà pas mal
07:47parce que c'est souvent le cas
07:48quand même dans les films.
07:50Rien que pour ça,
07:51voilà,
07:51vous sortez bien du film.
07:52Normalement,
07:52vous allez bien
07:53quand vous sortez du film.
07:54C'est vrai,
07:55c'est un parti pris.
07:57Personne ne meurt,
07:57personne n'est malade.
07:59C'est juste de la joie,
08:00de l'amour
08:00et du fun même.
08:03Et du fun,
08:03bah oui,
08:04la proposition,
08:06c'est de faire rire.
08:06Le rire,
08:06c'est fédérateur
08:07et c'est ce qui nous sauve.
08:08Donc,
08:09voilà,
08:09j'espère que les gens vont rire
08:10et puis surtout
08:11quand tout sort du film,
08:12on a envie d'être amoureux
08:12et je pense qu'on en a besoin.
08:14Je fais une grande dédicace
08:15du coup à Monia Chokri,
08:16vos comédiennes
08:17et Ella Rumpf
08:18qui sont absolument
08:18extraordinaires dans ce film.
08:21Dans les sons
08:21qui vous aident à vivre,
08:22vous m'avez dit
08:22bon,
08:23bah,
08:23il y a tout France Gall.
08:24Je me suis dit
08:25bon,
08:25bah,
08:25c'est facile
08:26parce que,
08:26bon,
08:26bah,
08:26on a besoin d'amour
08:27et je vous l'ai dit
08:28encore ce matin en arrivant,
08:29enfin,
08:30une comédie romantique.
08:31Il n'y en a pas assez
08:31en ce moment,
08:39à mes copines les baronnes,
08:41à les baronnes,
08:42on a un groupe de copines
08:43on s'appelle les baronnes
08:44depuis 25 ans.
08:45So chic !
08:47Et à toute l'équipe du film,
08:48évidemment,
08:49parce qu'on l'a fait
08:49avec tellement d'amour,
08:50c'était tellement bien ce tournage.
08:52Et à ma fille
08:53et à ma femme.
08:54Allez,
08:54on les embrasse aussi.
08:55Merci beaucoup
08:55d'épreuve d'amour.
08:56C'est maintenant,
08:57c'est à vous.
08:57Ça se passe au cinéma.
08:59Bravo à Lisbois.
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