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Camille Bruyas - Nouvelles têtes
France Inter
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il y a 10 heures
Camille Bruyas, traileuse, 2e à l’UTMB fin août.
Retrouvez « Nouvelles têtes » présenté par Daphné Bürki sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes
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00:00
Il est 9h50, nous sommes en direct dans la grande matinale de France Inter
00:03
et ma nouvelle tête aujourd'hui a traversé des montagnes littéralement.
00:07
Elle est trêleuse, c'est l'une des meilleures ultra-trêleuses de la planète.
00:11
Elle court 90, 100, 170 km parfois plus, avec grâce, avec patience et une science du corps qui force le respect.
00:18
Mais alors c'est quoi être trêleuse ? C'est courir.
00:22
En pleine nature, sur des distances extrêmes avec parfois plus de 10 000 mètres de dénivelé,
00:26
en autonomie totale ou partielle, sur des sentiers, des crêtes, des rochers, des forêts, des cols, des volcans, c'est un sport.
00:33
Mais c'est aussi un monde où il faut connaître la géographie de son souffle, la cartographie de ses limites et forcément se dépasser.
00:40
Un monde où l'on traverse des paysages et surtout il paraîtrait qu'on se traverse soi-même.
00:45
Comme Camille Bruyasse qui est dans le studio, elle a grandi dans les monts du Lyonnais, au hameau de Balieu,
00:50
elle est kiné de formation, elle est partie vivre à l'époque à la réunion avec son compagnon et là-bas, le trail est roi.
00:56
Elle y découvre une pratique, une vocation, première course remportée sur les sentiers volcaniques.
01:01
Elle va exploser aux yeux du monde en 2021 lors de l'UTMB, mais deuxième place et cet été, elle a réitéré.
01:08
C'était incroyable Camille.
01:24
La musique, elle va bien, elle donne des bonnes émotions, c'est tout parfait.
01:31
Ce son qu'on entend, c'est ce que je voudrais comprendre ce matin.
01:34
Qu'est-ce que ça procure de courir jusqu'à traverser son propre corps ?
01:39
Et puis qu'est-ce que ça fait quand on vit au-dessus du monde entier finalement ?
01:44
Le monde entier est à tes pieds, vous êtes en train de courir et vous arrivez super gagnante.
01:49
Vous étiez la fierté de la France, c'était impressionnant.
01:53
Oui, j'ai été la première surprise.
01:54
C'est vrai que je ne m'attendais pas du tout à être la fierté de la France sur un événement qui n'est pas un championnat du monde.
01:59
On ne recourt pas pour son pays, on est plutôt là pour représenter une marque et avec une équipe qui nous soutient.
02:06
Donc j'ai été vraiment surprise de ça.
02:08
Et puis c'est vrai qu'on arrive aussi là sur cette édition UTMB, une nuit très compliquée.
02:12
C'est compliqué dans la nuit, enfin dans la nuit forcément, mais dans le froid.
02:17
Oui, vous avez fait le tour du Mont Blanc, comme on dit, vous faites le tour d'un massif.
02:21
On part le soir à 17h je crois de Chamonix, on revient le lendemain soir en fait.
02:27
Et donc moi j'ai mis à peine 24h, c'est vrai que ça paraît un peu lunaire.
02:30
Donc les gens ont le temps de dormir, ont le temps de faire plein de choses en fait pendant qu'on fait le tour du Mont Blanc.
02:34
Et voilà, la nuit a été très épique et en fait on a été beaucoup tout seul quand même pendant la nuit.
02:38
La journée il y a un peu plus de monde et c'est vrai que d'arriver de ces montagnes et d'arriver à Chamonix,
02:42
avec une foule, franchement c'est vraiment vraiment dingue à vivre.
02:46
Et il y a un peu ce décalage entre les deux.
02:47
J'adore que vous disiez ça parce qu'une course comme l'UTMB, ça se court avec les autres.
02:53
Et cette année vous avez été très entouré, mais tous les participants sont en tournée.
02:56
Il y a des amis, il y a des proches, mais il y a du public qui s'installe au bord des sentiers.
03:00
C'est un peu le Tour de France, mais puissance 1000 quoi.
03:03
Ils s'accrochent à des cordes, c'est un peu dangereux on va se le dire.
03:06
Et je sais qu'il y a des concurrents qui n'aiment pas trop ça,
03:08
où tout d'un coup en pleine nuit on peut être surpris, on peut se dire mais qu'est-ce qu'ils font ?
03:12
Ah, m'encourager c'est agréable ou c'est pas agréable en fait ?
03:15
Ouais, c'est sûr que c'est toujours une histoire de décalage entre quand on est tout seul dans la montagne,
03:19
parce qu'il y a des endroits qui sont quand même compliqués d'accessibilité par rapport au Tour de France
03:23
où là c'est accessible par la route on va dire.
03:25
Là il faut quand même souvent randonner un peu ou en tout cas se rendre accessible à des points
03:28
qui sont... tout le monde fait son sport quoi pour venir nous encourager.
03:32
Mais ça peut être flippant !
03:34
Ça peut être flippant quoi d'un sentier tout d'un coup.
03:37
Parce qu'on dit oui, la beauté de la course, la solitude, mi-temps !
03:40
Ouais, sur l'UTMB c'est un peu moins vrai, ça c'est sûr.
03:43
Mais voilà, après ça nous donne énormément de force, énormément de...
03:47
Ouais, les encouragements toute la journée quand on est sur les 50 derniers kilomètres
03:50
qui sont quand même longs du coup, ça booste énormément.
03:54
Vous dites que vous n'aviez pas la capacité physique ni mentale
03:57
de faire plus d'un ultra trail de 100 miles par an.
04:01
Vous avez été vous-même blessée, pourquoi est-ce qu'on y retourne ?
04:03
Ça a l'air tellement épique, tellement douloureux.
04:07
Ouais, ça l'est.
04:08
Souvent je le dis après les ultras, je ne dis plus jamais.
04:11
Et puis en fait on y revient.
04:13
Pourquoi ?
04:14
Pourquoi ? Parce que je pense que moi ce qui m'anime énormément c'est l'aventure,
04:18
c'est justement de savoir que je ne sais pas ce qui va se passer.
04:21
Je ne sais pas si je suis capable de finir, entre guillemets.
04:24
Ça paraît un peu fou.
04:25
Mais sur des distances comme le 100 kilomètres,
04:27
c'est des choses que je connais.
04:29
J'ai beaucoup gagné de courses sur ces distances-là.
04:33
C'est des formats que j'apprécie et je connais l'issue, entre guillemets.
04:37
Et en fait je me rendais compte que si je continuais que dans ces distances-là,
04:40
il me manquait quelque chose.
04:41
Il me manquait une espèce d'aventure, une espèce de...
04:43
On ne sait pas sur ces courses-là qu'est-ce qui va se passer.
04:46
La preuve cette année sur l'UTMB,
04:48
si on regarde, on nous classe un petit peu avec des classements,
04:50
on appelle ça des codes UTMB en fonction des courses qu'on a faites.
04:54
Moi je suis dans peut-être le top 10, voire top 15 au départ et je finis deuxième.
04:58
Donc c'est vrai qu'on ne sait jamais exactement...
05:00
Ce n'est pas notre classement initial qui va nous amener...
05:04
Dans le sport c'est souvent comme ça,
05:06
mais en ultra encore plus, c'est vraiment exponentiel par rapport à ça.
05:09
Et puis il y a peut-être quelque chose en plus Camille, quand vous courez.
05:11
Je me demandais si vous regardiez souvent le ciel.
05:14
Parce que vous avez découvert tout ça à la Réunion, sur des sentiers volcaniques.
05:18
Et depuis vous parlez souvent du souffle, du paysage, de l'instant.
05:21
C'est ça qui m'intéresse, sur une crête dans la nuit,
05:24
entre deux nuages.
05:25
Est-ce qu'il y a une forme d'élévation qui dépasse la course ?
05:28
Est-ce qu'il y a quelque chose de spirituel dans ce que vous vivez là-haut ?
05:32
Ou est-ce que c'est juste moi et mon obsession du ciel qui déborde ?
05:35
Est-ce qu'il vous est arrivé des choses insensées dans cet endroit-là ?
05:39
Franchement c'est quand même des moments...
05:41
Des moments où en fait moi ce que je trouve qui est cool,
05:44
c'est qu'on va se souvenir uniquement nous-mêmes de ça.
05:47
Il n'y a rien qui peut...
05:48
Si on ne se souvient pas du moment, par exemple là,
05:50
moi ce qui me parle avec ce que vous êtes en train de dire,
05:53
c'est la nuit, la neige,
05:55
un col là au col de la Seigne,
05:56
où il n'y a personne, il y a un vent de fou.
05:59
Et là je me dis, c'est magique, c'est magnifique.
06:01
Alors que franchement tout le monde était en train de mourir de froid.
06:04
Je me dis, qu'est-ce qui se passe dans ta tête pour arriver à penser ça ?
06:07
Et ça c'est des moments que j'ai pu immortaliser que moi en fait,
06:11
parce que vu de mes propres yeux et personne d'autre a pu en fait immortaliser ces moments-là.
06:16
Et je pense que c'est ça qu'on va chercher dans ces courses-là.
06:20
Moi je dis qu'il faut en faire un film, un film d'action, un film d'amour,
06:23
c'est romantique l'ultra trail en fait.
06:26
Est-ce que vous avez des rituels juste avant de courir ?
06:29
Non, moi je ne suis pas trop rituelle.
06:31
Un peu de yoga quand même ?
06:32
Oui, on va dire que le yoga ça fait partie,
06:35
je suis prof de yoga depuis longtemps,
06:36
c'est quelque chose qui m'accompagne dans ces longues distances
06:38
et ça peut paraître un peu opposé.
06:40
C'est vrai qu'entre courir avec un chrono
06:43
et toujours plus des distances, toujours plus folles,
06:46
on se dit, moi ça m'a énormément apaisée en fait
06:50
et amenée un équilibre entre ces deux disciplines
06:52
qui justement ramènent un petit peu aussi à prendre le temps de faire les choses.
06:57
Alors il y a peut-être, je ne sais pas si vous écoutez de la musique,
06:59
c'est la seule chose que je n'ai pas réussi à repérer.
07:01
Vous écoutez un peu de musique, elle ne voit jamais rien.
07:02
Moi je me suis dit, elle s'est fait une playlist
07:04
et elle s'est peut-être mis les morceaux de son enfance.
07:06
Entre autres, apparemment, ce son-là.
07:08
Désolée, je dois le sortir.
07:16
C'est la chanson de votre enfance un peu ?
07:18
Oui, c'est un peu votre délire.
07:21
Moi j'adore.
07:21
Moi j'adore Céline.
07:23
Mais je me suis dit avec Ultra Trail,
07:25
ça aurait été plus logique cette chanson de Céline Dion.
07:27
Parce que votre trajectoire, cette dernière année,
07:34
elle a été fulgurante en l'espace seulement de quatre saisons.
07:37
C'est quand même dingue Camille.
07:39
Vous avez enchaîné les plus prestigieux Ultra Trail de la planète,
07:41
il y a le Western States, le Hard Rock 100,
07:45
l'UTMB bien sûr, la Diagonale des Fous.
07:47
C'est quoi le prochain ?
07:48
Bonne question.
07:51
Bonne question.
07:52
Non, c'est vrai que j'ai réalisé que je voulais aussi retourner sur l'UTMB.
07:56
Donc ça a été un peu la cinquième année qui a conclu
07:58
et terminé un peu cette boucle, on va dire.
08:01
Voilà, là il va falloir se renouveler, trouver d'autres idées.
08:05
Pour l'instant, là je suis encore un peu dans la réalisation.
08:09
Vous récupérez peut-être ?
08:10
Je récupère encore un peu.
08:11
Je réalise un petit peu ce qui s'est passé à Chamonix il y a un mois.
08:14
Vous avez un conseil à donner aux auditeurs ?
08:16
Parce qu'il y en a beaucoup qui font de la course à pied,
08:18
je pense que voilà,
08:19
qui s'abîment peut-être un peu les genoux aussi.
08:21
Vous avez des conseils à donner aux auditeurs ?
08:25
Oui, la course à pied c'est un sport qui est très traumatisant
08:28
et on veut toujours en faire plus.
08:29
Donc on a tendance à,
08:30
le conseil que je donne souvent c'est d'être progressif,
08:33
on a tendance à vouloir en faire un peu trop vite
08:35
sur des corps qui ne sont pas forcément prêts.
08:39
Et voilà, c'est pas grave.
08:40
Mais vous, vous avez connu un moment de désespoir,
08:42
un vrai moment de désespoir là-haut dans la montagne ?
08:45
Un vrai moment de désespoir en course ?
08:48
Non, j'ai toujours été...
08:49
C'est Camille Brouillasse !
08:52
Mais Camille quand elle gagne,
08:53
ce qu'on n'a pas vu dans l'image,
08:55
elle gagne, vive la France,
08:56
elle fait quoi ?
08:57
Elle attend ses concurrents sur la ligne d'arrivée
08:59
et elle les prend dans ses bras !
09:01
C'est pour ça que je vous cours après depuis cet été,
09:04
je n'avais jamais vu ça de ma vie,
09:05
elle s'appelle Camille Brouillasse,
09:06
il faut la suivre, bravo Camille !
09:08
Merci encore d'être venue aujourd'hui.
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