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  • il y a 2 semaines
Philippe Pichon incarne un parcours hors norme : policier atypique, poète engagé, écrivain, mais aussi lanceur d’alerte. Il a su transformer son expérience de terrain en matière littéraire et polémique. Auteur de plusieurs dizaines d’ouvrages, il vient de publier un essai foisonnant consacré aux "Hussards, mousquetaires des lettres", des années Silex aux minutes McDo !
Au cœur des années 1950, dans l’immédiat après-guerre, un groupe de jeunes mousquetaires des lettres a bousculé Sartre et les existentialistes en opposant à l’idéologie leur désinvolture, leur subjectivité et leur goût du style libre. Électrons indociles et "droitiers" assumés, ces écrivains proposaient une littérature faite de trouvaille langagière, d’élégance, d’insolence et d’un refus viscéral du dogme.
Se réclamant de la grande tradition littéraire française - de Barrès à Stendhal, de Morand à Chardonne, sans oublier Céline -, les Hussards ont fait souffler un vent de liberté dans la littérature d’après-guerre, donnant un coup de vieux aux écrivains installés et aux gardiens du temple sartrien.
À l’heure où les talents littéraires ne sautent plus aussi facilement aux yeux, Philippe Pichon nous invite à redécouvrir Roger Nimier, Antoine Blondin, Jacques Laurent, Michel Déon et tous ceux qui ont rendu à la littérature française son panache, son romanesque et sa hardiesse.

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Transcription
00:00– Bonjour Philippe Pichon. – Bonjour Marcel Ville.
00:07– Vous incarnez un parcours hors normes, vous avez été un policier atypique,
00:11vous êtes un poète engagé, un écrivain contesté, un lanceur d'alerte aussi,
00:15vous avez su transformer votre expérience de terrain en matière littéraire,
00:19et aussi d'ailleurs polémique, vous êtes l'auteur maintenant d'une quarantaine d'ouvrages,
00:23j'ai bien compté, dont le dernier en date, c'est celui dont on va parler,
00:25on va parler des 39 autres, mais c'est les hussards, les mousquetaires des lettres,
00:32et c'est aux éditions du Verbe Aude, une très belle maison d'édition,
00:35et cet ouvrage bien évidemment, il est en vente, vous le savez, sur tvl.fr,
00:39sur le site de TV Liberté, vous allez dans la boutique de TVL pour vous le procurer.
00:44Avant même d'ouvrir les pages de cet ouvrage, il convient de définir pour nos téléspectateurs
00:50ce que l'on appelle en littérature les hussards, ou l'esprit hussard,
00:54ou le mythe des hussards, ou même l'école des hussards.
00:58– Alors d'abord, peut-être rappeler à nos auditeurs, à nos téléspectateurs,
01:02que l'expression vient de Bernard Franck, dans une chronique,
01:06« L'étant moderne », qui était la chronique de Sa Majesté la Mouche, donc Sartre,
01:12où il parle de grognards et hussards, parce qu'il va,
01:15on ne va pas les citer maintenant, on le citera un certain moment un peu plus tard,
01:18dans une formule, je les appelle fascistes par communauté,
01:21réunir des écrivains, pour lui, plutôt de droite,
01:25dans un mouvement, une école, etc.,
01:28des écrivains qui ont, pour le dire rapidement, la plume facile, le verbe haut.
01:34– Le verbe haut, ça tombe bien.
01:36À votre première définition, effectivement, qu'on trouve dans l'ouvrage des hussards,
01:39et la suivante, je vous cite,
01:40« Un groupe de jeunes qui propose la désinvolture et la subjectivité
01:46des électrons libres droitiers, tournés vers la trouvaille langagière,
01:51et non vers la recherche ».
01:53En quoi les auteurs que l'on qualifie de hussards
01:55diffèrent-ils, finalement, fondamentalement,
01:57par exemple, des essentialistes que vous avez cités de Sartre,
02:01au-delà, j'ai bien compris, des points de vue politiques ?
02:04– Eh bien, parce que les hussards, chez les hussards,
02:08les cas particuliers se vengent des généralités.
02:11C'est-à-dire que les existentialistes,
02:14donc vous les avez rappelés, Sartre, de Beauvoir,
02:17ont voulu tirer des généralités d'à peu près de leur expérience,
02:21et c'est l'inverse chez les hussards,
02:23c'est « mon expérience vaut toute expérience »,
02:26et donc je mets, c'est le « moi-je »,
02:28c'est le « moi-je » de Claude Roy, qui est plutôt de gauche,
02:31c'est le « moi-je » qu'ils vont aller chercher chez l'égotisme de Stendhal,
02:35c'est-à-dire l'expérience devient roman.
02:38Ma vie est tellement intense, ma vie est tellement romanesque
02:41que je vais en faire un roman.
02:42– Dans les années 50, on est bien dans l'après-guerre,
02:44et c'est Sartre qui tient la vedette.
02:47On ne sait plus qu'aujourd'hui, il a un peu disparu,
02:50mais c'est lui qui tient le crachoir,
02:54avec ses artistes, ses intellectuels,
02:56attirés par, à cette époque-là, le socialisme modèle soviétique.
03:00– Alors, on ne s'en rend plus compte maintenant,
03:02mais en effet, l'exécuteur des consciences,
03:05l'exterminateur des âmes, c'est Aragon et Sartre.
03:10Ils n'ont pas que des strempotins au comité d'épuration des écrivains,
03:14on ne s'en rappelle plus, avec des écrivains qui vont être,
03:16en effet, fusillés, brasiliaques par exemple,
03:20et d'autres, si vous voulez, je pense à Morand,
03:22je pense à Chardonne, je pense à Freigneault,
03:24je pense à Céline, qui vont être mis au banc de la société littéraire,
03:28et donc ces hussards vont vouloir, par rapport à ces aînés,
03:32redonner des lettres de noblesse à leurs aînés,
03:35qui les ont un peu inspirés quelque part.
03:37– C'est Sartre qui fait la pluie et le beau temps à cette époque-là,
03:39alors que pendant la Seconde Guerre mondiale,
03:41son attitude est tout à fait répréhensible.
03:42– Il émet le verre de gris,
03:44il émet le verre de gris, puisque, je vous rappelle quand même
03:47que par rapport à Céline, il a voulu se faire parrainer,
03:51il a voulu que Céline vienne à la première représentation des mouches,
03:55il a participé à des émissions de radio, au moins 6 ou 7,
03:58qui étaient carrément tenues par les nains ou examinants,
04:01donc autant dire que Sartre est un collaborateur,
04:05il a parfois été attentiste plus que résistant.
04:08– Voilà, pas très résistant.
04:09Allez, ceci nous amène directement à l'ouvrage,
04:12et ma première question, elle est simple et elle est la suivante,
04:15pourquoi avoir choisi l'expression « mousquetaire »
04:17des lettres pour qualifier les hussards ?
04:19– Alors, en accord avec Sylvain Durin,
04:22on n'a pas dit les quatre mousquetaires…
04:23– Sylvain Durin, c'est l'éditeur.
04:25– Pardon, l'éditeur.
04:26– D'accord.
04:27Pas les quatre mousquetaires, parce que j'ai voulu dire que,
04:30et je vous dirai peut-être pourquoi immédiatement après,
04:33c'est cette droite épéiste qui, moi, me plaît beaucoup en littérature.
04:37Avec un fil conducteur, dans ce livre, c'est pour moi,
04:41et depuis toujours, les meilleurs écrivains sont à droite,
04:44et peut-être que les plus grands lecteurs sont à gauche.
04:47Sartre est un piètre écrivain, mais c'est un très bon critique.
04:50Solaire n'est carrément pas un écrivain, mais c'est un très bon critique.
04:54Alors que tous les autres, ceux dont vous allez me parler aujourd'hui,
04:57sont à la fois d'excellents critiques, mais d'admirables romanciers.
05:00Ce qui n'est pas qu'un, je schématise, à mon sens,
05:04pas plus hier qu'aujourd'hui, je pense que le corps à corps charnel,
05:09ce que doit être pour moi la littérature,
05:11ça vient surtout de la droite, de la droite et de l'extrême droite.
05:13Enfin, moi, je n'ai pas peur de vous le dire comme ça,
05:16si tant est qu'à l'époque, les notions de droite et d'extrême droite aient un sens.
05:20Et parce que, vous parlez de Sartre et d'Aragon,
05:24je pense que les Hussards, plutôt que des auteurs engagés,
05:26ont été des auteurs contre-engagés.
05:29Un point qui me semble essentiel pour nos téléspectateurs,
05:32tous ces auteurs dont on va parler ont 20 ans en 1945.
05:35Et plutôt que des affinités idéologiques,
05:38je pense que c'est plutôt des amitiés générationnelles,
05:40ou une amitié générationnelle.
05:41– Alors, quand vous dites que la gauche n'a pas de grands écrivains,
05:45ce n'est plus le cas aujourd'hui, il n'y a pas des gens comme Yarnot.
05:48– Là, vous voulez me mettre en colère dès le départ,
05:52Ben, Yarnot, ce n'est pas un écrivain, c'est vraisemblablement…
05:54– Elle ne le disait, quand même.
05:55– Ah oui, oui, oui, mais ça ne vous a pas échappé,
05:57on ne m'a pas demandé mon avis, je n'ai pas voté pour elle.
06:00C'est certainement un redoutable sociologue,
06:02mais c'est tout sauf un écrivain,
06:04pas plus que les gros, vous savez, rappelez de ses deux sœurs,
06:09dont j'ai oublié le prénom,
06:10Marie Cardinal, tout ça, ne sont pas pour moi des écrivains.
06:14Elle raconte, c'est l'autofiction, si vous voulez.
06:16Pour moi, l'autofiction, sauf à de rares exceptions,
06:19n'appartient pas au domaine de la littérature.
06:20Je ne dis même pas l'autobiographie,
06:21parce qu'il y a des grands autobiographes,
06:23il y a des journaux intimes, on ne va pas les citer,
06:26de ces écrivains de droite et d'autre qui sont très intéressants.
06:29Mais pour moi, l'autofiction, c'est un peu une lâcheté vis-à-vis de soi-même,
06:33et puis c'est un peu une facilité avec l'écriture, me semble-t-il.
06:37– Ex-Citernier Arnaud, retour à des écrivains de qualité.
06:40Vous consacrez un très large chapitre aux inspirateurs des hussards,
06:45car que ce soit Nimier, Blondin, Laurent, Déon,
06:49les hussards ne surgissent pas de nulle part.
06:51Pour vous, ils se réclament d'une tradition littéraire française.
06:54– Oui, d'abord un modèle,
06:55un modèle qui est emprunté au XIXe siècle,
06:58qui est Stendhal,
06:59l'égotisme, qui veut dire l'égoïsme,
07:02parce qu'ils vont apprendre de Stendhal,
07:04pas que dans ses romans, d'abord parce qu'ils pensent,
07:07et je pense un peu comme eux,
07:09que les très bons bouquins de Stendhal sont plutôt tous les autobiographies.
07:13Je pense à ses souvenirs d'Italie,
07:14je pense à Henri Brulard, des choses comme ça.
07:18Ils vont aller chercher la verve, le galop,
07:21le romantisme au galop, sur un air de cavalerie.
07:24Je pense qu'ils vont chercher ça chez Stendhal,
07:27même s'ils tirent un peu la métaphore un peu loin.
07:29Et il y a, je ne sais pas si vous les avez cités,
07:34on va les citer,
07:35il y a à peu près avouable Barès,
07:38et carrément pas avouable Gobineau.
07:41– Mais c'est ça, parce que là, parmi les grands admirés,
07:43les grands aînés admirés, selon vos propres termes d'ailleurs,
07:46figurent donc, on l'a dit Stendhal,
07:47il y a bien sûr Barès aussi, Paul Morand, Chardon,
07:50puis aussi des écrivains qui ne bénéficient pas de la bonne presse,
07:53comme on dit encore aujourd'hui,
07:54c'est le cas de Céline, c'est difficile,
07:56mais enfin aujourd'hui…
07:58– On ne se rend pas compte de ce que vous dites là.
08:00– Voilà, et puis il reste Gobineau.
08:01Gobineau, lui, il reste complètement dans le ghetto, si j'ose dire.
08:05Quels sont leurs apports aux uns et aux autres ?
08:07– Alors, Céline, c'est certainement, là encore,
08:12l'oralité qui passe à l'écrit,
08:14mais avec tout un travail derrière qui est gommé.
08:17Pour Morand, qu'on peut citer également,
08:21c'est le Morand des Deux-Venises,
08:24avec là encore la capacité d'aller chercher du vécu autobiographique
08:28et de le transformer en roman.
08:30Chez Freignaud, je ne sais pas si on l'a cité,
08:32qui sera copain de Michel Déon,
08:36c'est également le côté un peu lyrique,
08:40lyrique chez les Hussards n'est pas un grand mot,
08:42c'est-à-dire la possibilité d'avoir à la fois une profonde nostalgie
08:45et de bouffer la vie, pardon, de cette trivialité par les deux bouts.
08:48Et je pense que c'est ce qui est peut-être le facteur commun
08:52des auteurs que vous venez de rappeler,
08:54Chardon, Freignaud, Céline, etc.
08:57qui sont pour moi des écrivains majeurs,
09:01n'en déplaise à Aragon et à Sarthe à l'époque,
09:03puisque là encore, ces écrivains-là sont épurés,
09:07on va leur même attenter, ce n'est pas les seuls,
09:10on aurait pu parler de Giraudoux, Cocteau, etc.,
09:13mais on leur fait plus que des procès d'intention,
09:15on va aller jusqu'à leur faire des procès judiciaires,
09:18j'allais vous dire.
09:19– Déussard, vous allez en connaître quelques-uns,
09:21nous, le TV Liberté a eu la chance à ses débuts
09:23d'avoir un entretien avec Michel Déon, par exemple,
09:26vous avez rencontré Michel Déon ?
09:28– Oui, je le raconte dans le livre,
09:29très grande personnalité,
09:32je vais vous raconter l'anecdote pour l'un de mes anniversaires,
09:35donc le livre est dédié à Christian Millot,
09:38Christian Millot me dit, viens à la cantine…
09:40– Ah, Christian Millot, il faut peut-être préciser…
09:42– Ah, pardon, Go et Millot, il est connu pour le célèbre critique gastronomique,
09:46mais Christian était aussi un…
09:48– Très bien, il fait va.
09:48– Et un hussard, puisqu'il a travaillé avec Nimier, etc., etc.
09:52Pour ton anniversaire, comme tu n'arrêtes pas de m'embêter,
09:55avec ton Céline, qui est un auteur de chevet,
10:01viens à la cantine, j'ai quelqu'un à te présenter,
10:03donc j'arrive sans trop avoir révisé mes humanités,
10:06et je vois immédiatement Michel Déon,
10:10et donc à peine assis, Millot me saute dessus,
10:12et au moment de l'apéritif, Déon et quelques autres,
10:16c'est le cas de Blondin, avaient une descente assez solide,
10:20et il me dit, Christian Millot me dit,
10:23« Quel est ton bouquin préféré de Déon ? »
10:25et donc, si vous avez, moi j'ai peut-être une trentaine d'années,
10:2835 ans, quelque chose comme ça,
10:29quand vous avez un monstre sacré,
10:31parce qu'on ne se rend plus compte de qui est Michel Déon,
10:34qui est récemment disparu, alors quand je dis récemment,
10:37il y a peut-être 10 ans, je ne voudrais pas dire de bêtises,
10:40c'est pour moi un monstre qui a traversé les années,
10:42qui était très discret, académicien,
10:44c'était un monstre de la littérature,
10:46il y a des chefs-d'œuvre, etc.
10:48Et donc, pour m'en tirer, alors que j'aurais pu citer « Bagages en voie couvert »,
10:51qui était peut-être la façon dont je suis rentré chez Déon,
10:54je veux dire, dans son univers,
10:56c'était sa correspondance avec Freigno,
10:58qui est d'une subtilité absolue,
11:00qui est d'une… le mot fraternité prend tout son sens,
11:05et donc, là encore, deux intelligences hors normes,
11:10pour nos téléspectateurs, Freigno, c'est le fameux Guillaume Franqueur,
11:14les étonnements de Guillaume Franqueur.
11:17Et donc, quand on a deux écrivains qui correspondent,
11:20ça donne un bouquin magnifique.
11:23– Ça donne envie de les connaître mieux,
11:24et constitue d'ailleurs, c'est eu ça, une constellation d'écrivains.
11:28Alors, j'ai cherché, vous avez cherché, et je vous ai lu,
11:31donc j'ai trouvé ces termes-là dans votre ouvrage,
11:33quel était leur esprit commun ?
11:35J'ai ressorti trois notions, l'élégance, l'insolence,
11:39le refus de l'idéologie.
11:40Est-ce que ces trois termes vous conviennent ?
11:42Oui, en synthèse.
11:43– Oui, vous avez absolument raison, et pour l'ajouter,
11:46vous finissez par le refus de l'idéologie,
11:48ce qui est peut-être l'acceptation de son propre idéalisme.
11:52Parce que les quatre, on peut peut-être les citer maintenant,
11:56les quatre historiques, Roger Nimier, Antoine Blondin,
11:59Michel Déon et Jacques Laurent.
12:01Le Jacques Laurent, qui est le Jacques Laurent,
12:03que les téléspecteurs connaissent, des Caroline Chéry, mais pas que…
12:05– Cécile, c'est Cécile Saint-Laurent, dit Jacques Laurent.
12:08– Exactement, c'était des idéalistes, mais au sens intime du terme,
12:20c'est-à-dire qu'ils avaient vis-à-vis de la vie,
12:23à la fois de la gourmandise, vous l'avez dit,
12:26une forme de dilettantisme, mais qui était créatif,
12:30ce n'était pas des gens foutus, c'était des dilettantes,
12:31et une manière de vivre en même temps qu'une sorte de mal de siècle,
12:38vous savez, on a beaucoup utilisé cette expression,
12:40des mal-aimés, mal-aimants, mais avec des bonhommes,
12:44vous vous rappelez, nos jeunes téléspectateurs ne se rappellent pas,
12:47mais nous on s'en rappelle, les chroniques de Blondin,
12:51sur toute la petite reine, on lisait plutôt les articles de Blondin,
12:55en tous les cas c'était mon cas, plutôt que de regarder la télévision
12:58et les coureurs dont je me foutais, mais les articles de Blondin…
13:00– Éditeurs de France.
13:00– Exactement.
13:01– Vous avez cité quatre, même si on reste sur ces quatre-là,
13:07quel est l'auteur ? Quelle est la personnalité
13:08qui incarne le plus authentiquement l'esprit Hussard ?
13:11Alors, bien sûr, on pense peut-être à l'auteur du Hussard bleu.
13:15– Oui, alors Roger Nimier, dont on fête,
13:19et c'est une des coïncidences, mais pas que du livre,
13:22puisqu'on fête le centième anniversaire de la naissance de Roger Nimier, 1925,
13:28les autres sont un peu plus vieux, ils sont 19, 1919,
13:31c'est peut-être la… vous savez, il y a un auteur qui s'appelle Marc D'Ambre,
13:37qui est un peu le spécialiste français des Hussards, qui lui d'abord pense qu'il y a une école des Hussards,
13:43et il pense que le chef de file de ce mouvement, de cette école, qui pour moi n'en est pas un,
13:50c'est en effet Roger Nimier, parce qu'il cumule, y compris pour la postérité,
13:56pardon, de cette facilité de langage, toutes les qualités.
14:00Il est mort très jeune, dans un accident de voiture.
14:02– En 1962.
14:03– C'est ça, avec une œuvre assez copieuse derrière lui,
14:07mais avec beaucoup de, là encore, pardon, de cette facilité,
14:11beaucoup de livres achevés qui paraîtront posthumement.
14:15Et donc, il fait partie de cette James Dean de la littérature,
14:19qui donne, si vous voulez, à l'éternité un goût de reviens-y, si je puis dire.
14:27– C'est parce qu'aussi, il donne peut-être l'idée que la littérature peut être aussi un style de vie,
14:31en même temps qu'une œuvre, parce que…
14:33– C'est un écrivain fulgurant, à la Hussarde.
14:36– À la Hussarde, alors, de là à enchaîner avec les femmes,
14:40après vous êtes difficile avec moi, mais en effet, l'alcool, les femmes,
14:4525 heures dans chaque journée, etc., etc.
14:47Et donc, en effet, une vie, c'est l'homme pressé de Moran, si vous voulez, Nimier.
14:53Donc, il a dévoré la vie, il a dévoré toutes ces femmes.
14:58Vous savez qu'il y a eu une liaison, on lui prête une liaison,
15:01je pense qu'elle est documentée, avec Dormann, Geneviève Dormann,
15:04qui lui a survécu.
15:08– Et porte-femme aussi, hein ?
15:09– Je sais que le bal des deux dos fait partie de votre bibliothèque.
15:13– Oui, oui, oui, parce qu'elle a rencontré.
15:15– Et on pourrait dire d'ailleurs que Dormann fait partie de,
15:20je ne sais pas si on peut parler de Néo-Hussard, en tous les cas, pour moi, la grande…
15:23– La filiation.
15:25– Oui, la petite sœur de ces quatre noms-là.
15:28– Est-ce que l'esprit des Hussards leur a survécu ?
15:32En d'autres termes, que reste-t-il des Hussards sur notre toit littéraire ?
15:36Existe-t-il des Hussards modernes ?
15:37Ou bien, est-ce que ça reste, c'est possible, après tout, une nostalgie littéraire ?
15:41– On aimerait bien que ça soit finalement une nostalgie littéraire,
15:45mais je vois quand même quelques noms qui émergent.
15:47Je pense à Patrick Besson, je pense à Denis Tignac,
15:54qui nous a quittés, que je connaissais un petit peu,
15:56qui nous a quittés…
15:56– Souvent à TV Liberté.
15:57– Voilà, qui nous a quittés il y a cinq, six ans.
16:01Je pense à, dans les plus jeunes, au Jean-Claude Van Damme,
16:04des lettres belges, à Von Kovlart, pardon.
16:09Je pense, quelqu'un qui nous a quittés, mais qui était aussi un ami de la maison,
16:14je crois, Guy Dupré, un peu à part, mais qui, à mon avis, a l'esprit Hussard.
16:21Je pourrais en citer d'autres, peut-être.
16:24J'aurais peut-être pu mettre Sylvain Tesson, vous voyez.
16:28Pour les mêmes raisons, d'ailleurs.
16:31Ce goût de… c'est quelque chose…
16:33c'est mieux que Frison Roche, Tesson.
16:35Vous voyez, c'est, là encore, le goût du beau langage,
16:41la trouvaille langagière, plutôt que de la recherche à la Philippe Solers,
16:50puisque, du coup, on n'aura pas le temps d'en parler,
16:51mais pour moi, il n'y a pas d'âge d'or en littérature,
16:54je suis d'accord avec ce que vous venez de dire,
16:56mais peut-être qu'il y a eu nos années Solex,
17:00et qu'on a maintenant des années McDo,
17:02qui ont commencé, grosso modo, avec Femmes de Philippe Solers,
17:06et qui se termine un peu péniblement avec Eni et Arnaud,
17:10Philippe Delerne, etc., etc.
17:11– Voilà, voilà, voilà, on est d'accord là-dessus.
17:14Je veux juste préciser, d'ailleurs, que dans Sylvain Tesson,
17:17il y a toujours cette idée aussi de la concomitance,
17:20du style de vie avec l'œuvre, voilà.
17:22Un personnage.
17:23– Oui, c'est pour ça que je me permets de l'arranger
17:25parmi le mot néonu, ça ne convient pas à vous.
17:28– Je pense qu'il ne vous en voudra pas.
17:29– Non.
17:29– La question est d'ailleurs beaucoup…
17:31je me fais son porte-parole, je n'ai pas le droit,
17:32mais voilà, je pense qu'il ne serait pas embêté de cette remarque.
17:36La question est d'ailleurs beaucoup plus cruelle,
17:38d'ailleurs, que cela finalement dans mon esprit.
17:41C'est en fait dans un monde littéraire,
17:42vous l'avez dit, dominé par les grandes maisons,
17:44aujourd'hui, d'ailleurs, politiquement correctes,
17:47la censure.
17:48La censure, hein.
17:49– Je n'ai rien contre Paul, P.O.L.,
17:51mais enfin quand même, tout ça nous tombe des mains quand même.
17:54– Mais qu'est-ce qui reste possible dans un esprit,
17:57par un esprit hussard aujourd'hui ?
17:58Est-ce que ça pourrait exister en fait ?
18:00– Je crois que même des maisons qui pour moi avaient de l'importance,
18:03Mercure de France, Gallimard, historiquement de l'importance,
18:06même si elles n'étaient pas assez au départ,
18:08à côté de grandes génie que sont Proust, Céline et d'autres,
18:12c'était de Noël, comme vous savez,
18:14je crois qu'il ne reste rien de l'esprit hussard
18:17ou tellement peu de choses,
18:19parce que d'abord, le monde va encore plus vite que Nimier,
18:24c'est dire si ça roule fort,
18:26que les réseaux sociaux ont mis à bas
18:28le reste de résistances un petit peu intellectuelles,
18:32je parle de la littérature.
18:33Et donc, pour moi, il y a très très peu d'écrivains…
18:37– Ça me surprend, ça me surprend ce que vous dites,
18:38parce que ça ravage d'art…
18:40– Ce langage droitier, on le retrouve par exemple
18:43chez un Philippe de Vidier,
18:45il est en tête des ventes avec Populicide,
18:47il est numéro un des ventes, il bat qu'une folette.
18:50– Oui, lui-même ne se revendiquerait pas écrivain.
18:52– Bien sûr, mais ce langage droitier,
18:54c'est quand même bien aussi Philippe de Vidier,
18:56donc il y a bien un espace qui pourrait se…
18:58– C'est un langage droitier,
18:59mais ça ne se traduit pas dans une littérature,
19:02pas plus que Rix Zemmour est écrivain,
19:04enfin je veux dire, vous comprenez ce que je veux dire,
19:05c'est pour moi d'abord un essayiste,
19:07c'est pas un romancier, je crois qu'il a fait un roman.
19:10Même chose pour Nolo,
19:11on ne peut pas dire que Nolo soit romancier,
19:13j'espère qu'il ne m'en voudra pas,
19:14mais c'est la réalité, ce sont d'abord…
19:17– Et après, les quelques romanciers,
19:19je pense à Pierre Jourde,
19:20qui ne veut absolument pas être cité dans ma bouche,
19:24tant pis pour lui,
19:27ils sont incapables de s'extraire,
19:29c'était le cas d'Aussard,
19:30arriver à s'extraire,
19:31se foutait de savoir si c'était droite ou de gauche,
19:33parce qu'on ne les a pas cités,
19:35ils avaient des amis ensuite de gauche,
19:38que j'appelle un peu avec ironie
19:40les chevaux légers progressistes de l'époque,
19:43que sont Roger Vaillant,
19:45que sont Claude Roy et donc Bernard Franck
19:48dont on a parlé.
19:48Et si je dois répondre à ce que vous dites,
19:51même, pardon, puisqu'on en revient à la gauche,
19:54même, à mon avis, Roger Vaillant,
19:56qu'est-ce qui reste de l'œuvre de Roger Vaillant ?
19:58Un, ça a vieilli,
20:00et à part drôle de jeu
20:02et éventuellement 325 000 euros,
20:04tout le reste, ce n'est pas bon du tout.
20:06Peut-être que déjà à l'époque, ce n'était pas bon.
20:08– C'est surtout très pessimiste.
20:09– Oui, il y a des écriveurs.
20:10– Mais vous l'enviez déjà.
20:11– Patrice Jean, formidable Patrice Jean.
20:13– Alors, vous avez raison,
20:15avec son complice dont le nom...
20:17– Une œuvre, une roman ?
20:17– Vous avez raison, vous avez raison.
20:19Vous avez raison.
20:20– Voilà, je pourrais vous en trouver d'autres.
20:22– Ah bon, mais c'est pour des jeunes romanciers,
20:24je crois que Patrice Jean,
20:25il doit avoir deux ans de moins que moi
20:26ou quelque chose comme ça.
20:27– Oui, je ne me délige jamais.
20:27– Allez, votre essai revendique
20:29une écriture subjective, parfois, enflammée.
20:32Est-ce que c'est un choix volontaire ?
20:34Pour vous inscrire, vous aussi,
20:35dans la façon dont vous avez rédigé cet ouvrage,
20:37dans cet esprit même des Hussards ?
20:38– Alors, je vous dirais bien oui,
20:39mais c'est pas à moi d'en juger.
20:42– Bon, moi j'en juge,
20:44je crois que c'est dans cet même esprit.
20:46Ce livre est finalement un manifeste
20:47de droits littéraires.
20:48– Oui.
20:49– Vous acceptez le terme ?
20:50– Oui, oui.
20:51– Vous n'avez pas peur ?
20:52– Non, quelque chose d'entre l'anarchisme de droite,
20:55parce qu'il y avait quelque chose de rebelle,
20:57donc pour un ancien flic anarchiste de droite,
21:00c'est mal parti pour la retraite.
21:02Et puis, oui, l'irrévérence,
21:06et je crois que l'irrévérence est plutôt à droite qu'à gauche.
21:09Définitivement, j'allais vous dire.
21:10– Avec une très belle, on va terminer par cela,
21:12une très belle citation sur Nimier,
21:14l'écuille est en chef du cadre noir des belles lettres.
21:16– Oui, c'est beau.
21:17– C'est vrai ?
21:18– Ben oui, même s'il n'y a pas école,
21:20il y avait quelque chose,
21:21ça a été le patron de plusieurs,
21:23y compris de, vous voyez, on le sait peu,
21:25il avait fait une revue qui n'a pas duré longtemps,
21:27qui s'appelait la comédie humaine,
21:31comme quoi, vous voyez, le diable se niche dans les détails.
21:34Il aimait d'ailleurs, il préférait Malraux à Maurras,
21:38alors qu'il avait toute la culture maurassienne.
21:40Mais il avait trouvé quelque chose en Malraux, pourquoi pas ?
21:43– Si on avait aujourd'hui, parce qu'il nous reste deux minutes,
21:47si on avait aujourd'hui à dire à nos téléspectateurs,
21:50ben voilà, je vais me lancer dans les hussards,
21:53on nous a cité quatre, on va rester sur ces quatre-là.
21:55– D'accord.
21:56– Et de ces quatre-là, quel est l'ouvrage que je…
21:58– Je vais vous y attendir, parce que je vais vous dire,
22:01– C'est très prévisible, vous savez.
22:02– Oui, parce qu'on n'est pas forcément d'accord,
22:06ce que je lirais, moi, n'est pas forcément ce que je conseillerais.
22:09– C'est votre choix, à vous, je demande.
22:10– Ah bon, alors d'accord.
22:12Donc, le hussard bleu pour Nimier,
22:15qui est vraisemblablement le plus connu,
22:17mais il faut lire avant les épées,
22:18puisqu'en réalité, c'est presque un diptyque, si je puis dire.
22:22Blondin, j'hésiterais entre Un singe en hiver,
22:29parce que je trouve ça truculent,
22:30mais peut-être qu'on serait alors trop proche de Gabin Belmondo,
22:35donc je dirais L'humeur vagabonde, qui est un très, très beau roman.
22:38– Les bêtises de Jacques Laurent,
22:42et peut-être les déons, je vous ai dit que j'avais un rapport particulier à déons,
22:47parce que je suis allé vraiment sur les sentiers vécinaux avec déons,
22:51peut-être les poneys sauvages pour déons.
22:54– Bon, écoutez, on est à 3 sur 4, vous voyez, on n'est pas si mal.
22:57– Oui, pas si mal, merci beaucoup Philippe Pichon.
22:59Je vous invite à découvrir tous ces écrivains,
23:02premièrement aussi à découvrir l'écrivain Philippe Pichon,
23:05à travers cette découverte des hussards.
23:08– Il est bien modeste, pardon, je vous interromps,
23:10vis-à-vis de mes aînés, qui vraiment avaient,
23:12je le dis aux téléspectateurs, d'immenses talents.
23:16– D'immenses talents à retrouver dans cette édition du Verbe O.
23:19Merci Philippe Pichon.
23:20– Merci à vous, Marcia.
23:21– Merci à vous.
23:22– Merci à vous.
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