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  • il y a 1 jour
Avec Jacques Attali, économiste et essayiste, directeur de l’ouvrage collectif « France 2040, Fragments d’avenir » (Flammarion). Et Antoine Buéno, essayiste, prospectiviste, auteur notamment de « Futur. Notre avenir de A à 7 » (Flammarion). Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-debat-de-la-grande-matinale/le-debat-du-7-10-du-jeudi-06-novembre-2025-7241144

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Transcription
00:00Et pour ouvrir ces pages magazine, je vous propose un débat sur notre capacité à prédire l'avenir.
00:06Alors, point de boule de cristal ou de Madame Irma, mais une question très sérieuse, très profonde,
00:12face à un monde que l'on dit de plus en plus fou, face à des crises et des ruptures qui semblent s'accélérer,
00:17Covid, Ukraine, 7 octobre, élection de Donald Trump, révolution de l'intelligence artificielle,
00:22Peut-on encore faire des projections ? Peut-on anticiper, même à horizon de 5 ans, de 10 ans, de 15 ans ?
00:32Je vais vous présenter mes invités. D'abord, je vous propose un petit quiz.
00:35Vous avez quelques minutes pour chercher la réponse.
00:38Qui a dit gouverner, c'est prévoir ? Il sourit mes invités.
00:42Jacques Attali, soyez le bienvenu.
00:44Merci, je suis remis d'être avec vous.
00:46Économiste et séiste, vous dirigez cet ouvrage collectif qui paraît chez Flammarion, France 2040.
00:52Fragments d'avenir.
00:54Et face à vous, Antoine Bueno, essayiste et prospectiviste.
00:58Vous nous expliquerez ce que c'est que le prospectivisme.
01:01Bonjour Sonia.
01:02Vous y avez consacré de nombreux ouvrages, fiction et essais, c'est ça qui est intéressant.
01:07C'est ce mélange des genres.
01:09Jacques Attali, France 2040.
01:12Pourquoi 2040 ? Pourquoi cette ligne d'horizon fixée à 15 ans ?
01:16C'est un ouvrage collectif organisé par le groupe de travail que je dirige,
01:22qui s'appelle France Positive, où nous essayons justement d'aider la société française,
01:26avec un très grand nombre d'experts, à penser l'avenir.
01:29Et nous essayons à chaque échéance de proposer un programme présidentiel transpartisan
01:34pour le mettre à la disposition de la classe politique,
01:37en espérant qu'on sorte des petits débats de personnes pour aller sur un débat d'idées.
01:41Et nous avons pensé utile de cadrer l'ensemble dans une vision à moyen terme
01:49pour que le programme sur cinq ans qui viendra un peu plus tard s'inscrive dans un horizon.
01:55Donc 15 ans, c'est du moyen terme.
01:56Alors 15 ans, c'est du moyen terme, mais c'est demain matin.
01:5915 ans, comme vous l'avez dit vous-même.
02:00Si on regarde 15 ans derrière nous, ça nous remet à 2010, c'est-à-dire hier.
02:04Donc, mais 15 ans, c'est quelque chose dans lequel on peut s'inscrire de façon réaliste
02:10et dans lequel on peut voir des choses utiles.
02:14C'est ça que je voudrais comprendre.
02:15Antoine Bueno, vous qui avez l'habitude justement de manier la prospective,
02:19la projection dans l'avenir, 15 ans, ça signifie quoi de nos jours ?
02:22Eh bien, le paradoxe, c'est que Jacques Attali, mais on le connaît pour ça,
02:25n'a pas choisi la solution de facilité.
02:28C'est beaucoup plus difficile, paradoxalement, de parler de la France en 2040
02:32que, par exemple, de l'Europe en 2050.
02:35Pourquoi ? Parce que ce sont des focales relativement étroites,
02:38à la fois géographiquement et temporellement.
02:40La France, dans le monde actuel, c'est tout petit.
02:43Donc, c'est très, très difficile d'imaginer à 15 ans, surtout, des changements.
02:47Et 2040, il l'a dit, c'est demain matin.
02:49Et on peut se dire du coup que c'est aussi hier après-midi.
02:51Et se projeter dans la France d'il y a 15 ans et se demander si les changements sont visibles.
02:56C'est ça. Je vous permets de rebondir, Jacques Attali.
03:00C'est-à-dire que dans un monde ultra connecté et mondialisé, est-ce qu'on peut encore penser la France ?
03:05Oui, on peut penser la France parce que la France a une identité, elle doit la préserver.
03:09Ne serait-ce que sa langue, sa culture, ses valeurs, la laïcité, la démocratie telle que nous la concevons.
03:15Oui, bien sûr.
03:17Mais en même temps, il faut penser l'Europe et penser le monde.
03:24Donc, on ne peut pas penser la France sans penser l'Europe et sans penser le monde.
03:27C'est pourquoi nous pensons dans ce livre beaucoup de choses qui sont globales.
03:31Globales.
03:31Sur la santé, sur l'environnement, qui sont des sujets européens, puis il y a des choses planétaires.
03:36Nous avons appris depuis quelques années, avec la pandémie, avec la prise de conscience écologique, que bien des sujets sont globaux.
03:42Il n'empêche que la France est un pays important, un pays qui a beaucoup de degrés de liberté,
03:48et que la démocratie, les choix ne sont pas vains.
03:51Je voudrais juste prendre une métaphore simple pour comprendre pourquoi c'est utile.
03:55Vous êtes dans une voiture, de nuit, la voiture va vite.
03:58Vous ne savez pas si à gauche, il y a un ravin, si à droite, il y a une montagne,
04:02s'il y a des rochers qui sont devant vous sur la route, s'il y a des virages.
04:06Est-ce que vous allumez le phare ?
04:07Oui, bien sûr, vous allumez les phares.
04:09Mais ça ne veut pas dire qu'avec les phares, vous allez voir tous les obstacles.
04:13En avançant, vous allez en voir de nouveau.
04:15Mais la moelle des choses, c'est d'allumer les phares.
04:17Donc ce que nous avons fait ici, c'est allumer le phare, essayer de voir,
04:21et ça ne préjuge pas d'autres dangers qui peuvent apparaître.
04:24Chaque homme en sa nuit va vers sa lumière.
04:26Antoine Buenaud ?
04:27Je vais apporter de l'eau au moulin de Jacques Atteli.
04:30En fait, pour moi, c'est la règle des trois jamais.
04:33Le trois jamais, la question que vous posez.
04:35C'est-à-dire, est-ce qu'il faut anticiper ? Est-ce qu'on peut anticiper ?
04:39Il n'a jamais été aussi nécessaire de le faire, Jacques Atteli l'a dit,
04:42parce que l'accélération est vertigineuse.
04:44En l'an 1000, vous pouviez conseiller à vos enfants, les yeux fermés, des métiers.
04:50Aujourd'hui, moi j'ai des enfants petits, c'est très très compliqué.
04:53Vous vous rendez compte de l'accélération ?
04:55Donc, on est obligé d'anticiper.
04:57En même temps, le deuxième jamais, c'est qu'il n'a jamais été aussi compliqué de le faire.
05:01Justement, parce que le nombre de paramètres à prendre en compte et la rapidité du changement
05:06sont vertigineux également.
05:08Et le troisième jamais, c'est celui qui porte de l'espoir,
05:10c'est que nous n'avons jamais eu autant de moyens pour le faire,
05:14de moyens efficaces, de moyens humains.
05:16Il n'y a jamais eu autant de gens qui se posaient des questions sur l'avenir,
05:19ne serait-ce que dans la fiction.
05:20Les scénaristes, les auteurs de science-fiction, etc.
05:22Et des moyens, pardon, je termine là-dessus, des moyens techniques, technologiques.
05:25Le big data, l'IA, et je peux vous donner des exemples qui font froid dans le dos
05:29ou donnent de l'espoir, c'est selon.
05:31Par exemple, l'université de Bourgogne-Franche-Comté a utilisé le big data et l'IA
05:35pour modéliser les heures d'affluence aux urgences hospitalières.
05:40Et ça fonctionne, c'est-à-dire qu'on applique les méthodes de la météorologie
05:44aux phénomènes sociaux.
05:46Ce qui fait un peu plus peur, c'est par exemple la police prédictive.
05:50Il y a quelques mois, je ne sais pas si vous avez vu ça,
05:51mais le Royaume-Uni a eu un petit scandale
05:53parce que le ministère de la Justice élaborait un algorithme
05:56pour prévoir à partir de fichiers de repris de justice
05:59de futurs criminels.
06:01Ça c'est maintenant de presque une banalité,
06:04ce que vous venez de dire est parfaitement exact sur tous les points.
06:07C'est rien d'autre que l'intelligence artificielle.
06:09L'intelligence artificielle, c'est une intelligence en fait rétroactive
06:12qui consiste à regarder à partir des données, c'est-à-dire du passé,
06:15ce qu'on peut voir de récurrent pour l'avenir.
06:18Et on peut en effet prédire d'une façon assez sérieuse
06:22les pannes, les crimes, les maladies.
06:26Et c'est d'ailleurs toute une série de choses qu'on a essayé de faire dans ce livre
06:29en demandant à un grand nombre d'experts de tout domaine
06:33de nous dire comment à partir des leçons du passé,
06:36on peut prévoir ce qui va se passer.
06:38Mais vous n'excluz pas ni l'un ni l'autre qu'il puisse y avoir des accidents.
06:41Vous n'excluz pas ni l'un ni l'autre
06:43et qu'il puisse y avoir ce que vous appelez des signes noirs.
06:46J'aimerais que vous nous disiez comment on épèle le mot signe
06:48et ce que ça signifie.
06:50Les signes noirs, c'est signe au sens C-Y-G-N-E-S,
06:54c'est-à-dire le...
06:55C'est l'oiseau.
06:55C'est l'oiseau de mauvaise augure.
06:58Non, c'est l'oiseau improbable.
07:00C'est-à-dire que dans une portée, il est rare, très rare qu'il y ait un signe noir.
07:04C'est un mot qui a été utilisé en particulier par un très grand probabiliste
07:07et mathématicien de mes amis américains,
07:10Nassine Taleb.
07:11Le signe noir, ça peut être une bonne nouvelle.
07:13Pour moi, c'était aussi l'oiseau de mauvaise augure.
07:15C'était l'accident, c'était la catastrophe, c'était le collapse.
07:18Non, pas forcément. C'est l'improbable.
07:20C'est l'improbable.
07:21Ça a été en effet très souvent repris comme l'idée d'une mauvaise nouvelle,
07:28mais pas forcément.
07:29Pas forcément, Antoine.
07:30Petit bémol sémantique, on parle de plus en plus de signe blanc.
07:33Sans doute à tort, mais pour distinguer les deux,
07:35le signe noir étant la mauvaise nouvelle,
07:37le signe blanc étant l'accident, mais heureux, qu'on n'attendait pas.
07:39Oui, ça c'est quand on pense que la mauvaise nouvelle est le plus probable
07:43avec la bonne nouvelle.
07:43C'est ça. Mais vous, Jacques Attali, vous n'excluez pas une catastrophe.
07:48Vous ne l'excluez pas dans un texte de votre main.
07:50Oui.
07:52D'abord, le mot principal de ce travail collectif,
07:56où il y a de grands intellectuels, des politiques, des sociologues,
07:59des scientifiques, des médecins, des universitaires de toute nature,
08:03il y a 50 personnes.
08:04Le maître mot, c'est la prévention.
08:07On ne peut rien faire sans essayer de comprendre ce qu'il faut faire à l'avance
08:11pour éviter les risques et pour créer les conditions d'un meilleur avenir.
08:16Ce qui signifie que prévoir, ça n'est pas subir.
08:19Non.
08:19Prévoir, c'est agir.
08:20C'est agir pour prévenir.
08:21En matière de santé, on sait très bien, même si on ne le fait pas assez,
08:26que faire une diète de 15 ou 16 heures par jour, marcher une heure par jour,
08:32ça réduit systématiquement, massivement, les dépenses de santé.
08:35Parce qu'on est en meilleure santé.
08:38Que former des jeunes, très jeunes, un très grand nombre d'activités,
08:44de curiosité, de volonté, de ce qu'on appelle l'Agnac,
08:48ça leur donne les moyens d'être prêts à tous les métiers possibles.
08:51Et en effet, les métiers vont être très différents.
08:53Donc, dans tous les domaines, c'est la prévention qui est déterminante
08:56et la prévention est la conséquence de la prévision.
08:58Et ce qui est intéressant, Antoine Bueno, c'est que la prospective fonctionne
09:02même quand elle se trompe.
09:03Et parfois, presque, surtout quand elle se trompe.
09:06Quand elle prévoit le pire et que le pire n'arrive pas,
09:09parce que le pire a été prévu précisément.
09:11Oui, c'est très juste.
09:13Il faut bien comprendre que la prospective, elle a deux enjeux.
09:16Je vais donner deux métaphores.
09:17C'est à la fois une longue vue et un gouvernail.
09:20Une longue vue parce qu'effectivement, on essaye d'anticiper et d'imaginer,
09:23mais presque de manière passive, ce que sont les choses.
09:25C'est très compliqué.
09:26Et pour ça, il faut élaborer de nombreux scénarios pour diminuer les marges d'erreur.
09:31Mais c'est en même temps un gouvernail.
09:33Parce que le futur, il n'existe pas.
09:35Et le futur, il faut être assez volontariste et dire que, d'une certaine manière,
09:40nous le faisons, nous le façonnons.
09:42Et nous sommes capables, en utilisant ce gouvernail,
09:45à la fois d'énoncer des repoussoirs.
09:47Tout le courant, par exemple, de la dystopie.
09:50Ce sont des repoussoirs.
09:51C'est ce dont nous ne voulons pas.
09:51Jean-Jean Houelle, 1984.
09:53Exactement.
09:54C'est une dystopie, c'est un repoussoir.
09:56C'est un échec.
09:57C'est une alerte qui est à la fois un échec sur le plan de la longue vue,
10:02c'est-à-dire sur le plan de l'anticipation.
10:04Ça ne s'est pas produit.
10:05Ça ne s'est pas produit.
10:05Le totalitarisme stalinien, heureusement, ne s'est pas rependu à la surface du monde,
10:09comme il le décrit dans son livre.
10:10Et en même temps, il a magnifiquement réussi, quand on voit la prospective,
10:14comme un gouvernail, parce que par son succès, le retentissement qu'il a eu,
10:18il a contribué à éloigner cette possibilité dystopique.
10:23Nous lui devons une partie de notre présent.
10:24Jacques Attali ?
10:25Le rôle de la prévision et de l'anticipation, aussi romanesque,
10:30qui m'anime aussi, c'est de créer les conditions pour avoir tort.
10:34Et donc de prévoir le pire.
10:35C'est de créer les conditions pour avoir tort ?
10:37Oui, de créer les conditions pour avoir tort en prévoyant une possibilité catastrophique
10:42pour participer de l'effort qui consistera à se révéler et à l'éviter.
10:47Aujourd'hui, on voit très bien les catastrophes qui sont possibles.
10:51Lesquelles ?
10:52Une catastrophe écologique, épidémiologique, idéologique.
10:57On voit, ne serait-ce que pour la France, par exemple,
11:00si on en reste à la France, on voit s'inscrire un avenir
11:03où un des totalitarismes qui nous menacent prendrait le pouvoir
11:07pendant que nous serions victimes d'une catastrophe écologique
11:13qui mettrait le pays en situation d'être ingérable.
11:16On voit aussi s'annoncer une catastrophe financière.
11:19Un pays qui serait en faillite
11:21et qui serait incapable de payer les fins de mois de ses fonctionnaires.
11:26Tout ça est presque écrit, comme va arriver si on ne fait rien.
11:31C'est écrit, le totalitarisme en faillite financière,
11:36c'est l'hypothèse la plus probable de notre avenir.
11:39Et c'est pour éviter qu'il ait lieu qu'on essaye d'alerte.
11:42Antoine Brénaud.
11:42Et soyons aussi positifs, parce que fixer un cap,
11:45c'est à la fois énoncer des repoussoirs et des risques
11:48pour essayer de les éviter,
11:49mais c'est aussi donner à voir des images d'un futur souhaitable.
11:54Et donc là, aujourd'hui, on est dans une véritable guerre des imaginations
11:57qui est extrêmement politique.
11:59Aujourd'hui, je dirais que la fiction, elle est au pouvoir.
12:02Si Elon Musk veut conquérir Mars,
12:04c'est parce qu'il a été biberonné par des tas d'auteurs de science-fiction.
12:07C'est que pour lui, ça incarne un futur.
12:08Pour lui, ça incarne un futur, absolument un futur positif.
12:12Et donc, il y a malheureusement trop peu,
12:13mais elles sont amenées, j'espère, à se développer,
12:15d'œuvres qui nous donnent à voir des choses dont on a envie.
12:18Donc, vous diriez, l'un et l'autre,
12:20qu'il y a une guerre des prédictions, en réalité,
12:21une guerre des interactions, une guerre des récits.
12:23Il faut à la fois prédire, tant d'ailleurs par la fiction qui est très importante,
12:29que par la réflexion savante.
12:34Et ce qu'on a essayé ici, c'est de rassembler un maximum d'expertise majeure,
12:37en particulier en matière d'agriculture, de santé, d'éducation,
12:43et dans tous les domaines.
12:44Plus d'une trentaine d'auteurs, Dominique Méda, Éric Orsena,
12:47un ancien président de la République,
12:50des philosophes, des économistes, des...
12:53Je vous laisse le voir, il paraît, c'est un petit livre orange,
12:56il paraît chez Flammarion.
12:57Voilà.
12:58Et on a essayé de mettre sur la table tout ce qu'on pouvait savoir
13:01sur la France de 2040,
13:04pour essayer de faire en sorte qu'on puisse en déduire une action.
13:07Or, le drame de la politique aujourd'hui,
13:10c'est qu'on ne s'occupe que de l'anecdote,
13:12alors que même dans les anecdotes,
13:15on peut voir des enjeux de long terme.
13:16On pourrait reprendre des nouvelles de la matinée aujourd'hui
13:18pour voir beaucoup d'enjeux de long terme qui pourraient surgir.
13:21Alors, qui a dit gouverner, c'est prévoir ?
13:23Émile de Girardin,
13:25homme politique et essayiste du XIXe siècle.
13:28Et je crois même que la citation complète,
13:31si je vous la retrouve,
13:32c'est gouverner, c'est prévoir,
13:33ne rien prévoir, c'est courir à sa perte.
13:35Et c'est exactement ce que vous venez de nous démontrer,
13:37et l'un et l'autre.
13:38Merci à tous les deux.
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