00:00L'heure de votre chronique signée Anne Rosencher. Bonjour Anne.
00:04Bonjour.
00:05C'était hier les 5 ans de Anne. Vous vouliez parler des pompiers aujourd'hui, des pompiers volontaires qui ont été très mobilisés avec la tempête, Benjamin.
00:14Oui, au loin, une sirène retentit, aiguë et lancinante. L'homme, il peut être à table, sur son balcon ou dans un canapé, se lève, sort de la pièce et revient quelques minutes plus tard en tenue d'intervention.
00:27Qu'il soit fatigué, que ce soit le week-end, qu'il rentre tout juste d'une journée de travail, il se lève et il y va.
00:34Qui a grandi à la campagne a sûrement vécu un jour une scène de pompiers volontaires, pompiers hommes ou pompiers femmes.
00:41Celui que j'ai connu, moi, était maçon, s'appelait Louis Olivero. Je vois encore comme si c'était hier le bleu marine couturé de rouge de sa tenue d'intervention.
00:50« On est de son enfance comme on est d'un pays », a écrit Saint-Exupéry. Pour beaucoup de Français, je crois, la figure du pompier volontaire fait partie de ses admirations de jeunesse.
01:00Vous savez, ses ressorts qui constitueront plus tard un rapport à la société.
01:05Mais comme beaucoup d'autres services, ce service-là traverse aujourd'hui de grandes difficultés, surtout dans les campagnes.
01:12Je ne vous accable pas de chiffres. Sachez qu'il y a aujourd'hui 200 000 volontaires en France, que ces derniers représentent 80% de l'effectif global des pompiers.
01:22Et ces dernières années, donc, le nombre de casernes n'a cessé de s'étioler. Moins 10% en 10 ans au dernier pointage.
01:31Un coup d'œil à la presse régionale suffit à prendre la mesure du malaise. Isère, Ariège, Haute-Garonne, Maine-et-Loire, Aveyron, etc.
01:38La liste est longue des endroits où l'on manque de volontaires et où les temps d'intervention ne cessent de s'allonger.
01:46Et à quoi est-elle due cette crise, Anne ?
01:47Eh bien, à plusieurs facteurs. L'accroissement du nombre d'interventions, la charge qui va avec, la question de la reconnaissance, la crise des solidarités.
01:55Et puis, il y a autre chose.
01:57Le sociologue Jean-Gustave Padiolo, qui avait suivi de près la réforme des services d'incendie et de secours,
02:04avait averti, dès le départ, de certains effets pervers.
02:09Elle a eu lieu à la fin des années 90.
02:11Jusque-là, le service était piloté par les maires en lien avec les préfets.
02:16Le passage à sa gestion par les départements a brouillé beaucoup de choses.
02:20La prise de décision, d'abord, a été répartie en des structures hiérarchiques fragmentées et bureaucratiques.
02:26Par ailleurs, les cartes ont été brouillées au sens premier du terme.
02:29Les territoires d'intervention ayant été découpés en des zonages abstraits, dont je vous épargne les acronymes.
02:35La géographie, c'est aussi de l'identification sociale et civique.
02:39On n'y touche jamais impunément, surtout quand on parle de volontariat.
02:43Encore une fois, cette réforme n'explique pas tout.
02:45D'autres facteurs tendanciels jouent dans cette crise.
02:48Mais à l'heure où on reparle beaucoup de réformes nécessaires de l'État,
02:52cet exemple, parmi d'autres, nous incite à garder une chose en tête,
02:56parfois sous prétexte d'efficacité, on fabrique du contre-productif.
03:01Merci Anne Rosanchère, directrice déléguée de la rédaction à l'Express et à vendredi prochain.