00:00L'impact de la crise politique sur notre économie, on en parle ce matin avec Guillaume Martineau, le patron d'Orpy.
00:05Bonjour, merci d'être avec nous ce matin en face de vous, Daniel Ball pour la Fédération bancaire française et pour le Crédit Mutuel.
00:13Bonjour, vous êtes les deux personnes et douanes pour parler justement de ces retentissements.
00:17Qu'est-ce que vous voyez dans vos boîtes ? Daniel Ball, vous avez donné une interview aux Echos.
00:22Je vous ai senti quand même très inquiet sur la situation politique actuelle.
00:25Je suis inquiet parce que cette situation aujourd'hui est très clairement préjudiciable à l'économie et quand elle est préjudiciable à l'économie, elle est préjudiciable aux citoyens.
00:35On est dans une situation où cette incertitude de plus en plus forte, et on arrive aujourd'hui à un paroxysme, enfin on n'a jamais vu ça,
00:43aujourd'hui enlève de la confiance et dès lors que vous enlevez la confiance, que ce soit aux ménages ou aux entreprises, il n'y a plus d'investissement.
00:50Il n'y a plus d'investissement qui vont demain être des producteurs de richesse et qui dit produire des richesses permet de partager la richesse, y compris avec l'État en matière d'impôts.
01:01Et en faisant ça, finalement on ne fait qu'aggraver la situation financière déjà extrêmement grave de la France.
01:08Moins de recettes parce que moins de richesse.
01:10Donc c'est vraiment grave.
01:11Moi je considère vraiment, et je l'ai dit dans cette interview aux Echos, il faut qu'on arrête de jouer avec l'économie.
01:18Il faut qu'on arrête de jouer avec les Français, il faut que les responsables politiques prennent maintenant des décisions pour qu'on retrouve un mode de fonctionnement dans ce pays qui permet d'avancer.
01:29Les entreprises continuent, continuent elles à œuvrer, continuent à être un champ de dialogue, de cohésion, de création et de partage de richesse.
01:37Et à côté de ça, on a un État, et notamment depuis juin 2024, qui est vraiment un poids.
01:43Je pense que les décisions qui ont été prises ces derniers temps, enfin je ne sais pas ce que je pense, c'est une certitude.
01:49Ces décisions ont un impact aujourd'hui sur la croissance dans ce pays et ralentir la croissance pour des raisons purement politiques.
01:56C'est moins d'entrée fiscale.
01:58Pardon ?
01:58C'est moins d'entrée fiscale.
01:59C'est-à-dire que c'est le serpent qui se prend la queue.
02:01C'est moins de richesse à partager entre eux et les citoyens.
02:04C'est juste terrible que ça dure maintenant depuis juin 2024.
02:07Mais franchement, on est dans une situation qui aujourd'hui ne peut plus durer, parce que sinon, on parle aujourd'hui de crise politique.
02:16Mais on va avoir une crise économique et peut-être une crise financière.
02:20Pour l'instant, l'euro nous protège.
02:21Et alors là, il y aura de vrais dégâts.
02:22Mais quand vous voyez ce matin que la dernière digue a lâché sur la réforme des retraites, que même Elisabeth Borne dit « Bon bah suspendons-la ».
02:29Elle est en place, la réforme des retraites.
02:31Qu'est-ce que ça vous inspire ?
02:32Je crois. La loi a été promulguée. Les décrets ont été mis en œuvre. Les entreprises l'ont mis en œuvre. Dans une entreprise comme la nôtre, je me souviens même qu'à un moment, il a fallu faire revenir des collaborateurs qui étaient en congé de fin de carrière pour qu'ils fassent encore deux ou trois mois pour avoir leurs annuités.
02:48Suspendre, qu'est-ce que ça veut dire ? J'aimerais bien savoir.
02:52Ensuite, ça veut dire qu'on va se retrouver à rediscuter.
02:56Moi, je veux bien qu'on discute. Mais le vrai problème, c'est quand même la manière dont tout cela a été fait.
03:02Aujourd'hui, j'entends Mme Borne dire « il va falloir dialoguer ». Mais est-ce qu'il n'aurait pas fallu dialoguer avant de faire voter cette loi ?
03:09Le vrai problème qu'on a dans ce pays, c'est outre évidemment cette dissolution complètement ratée, c'est quand même cette absence de dialogue qui caractérise la vie, la vie politique notamment,
03:20depuis deux ou trois ans, qui aujourd'hui nous met dans cette impasse.
03:25Et je le redis, il faut en sortir. J'en appelle vraiment à la responsabilité des politiques en ce sens.
03:30Guillaume Martineau, Orpi, c'est le plus gros réseau d'agences en France.
03:33On avait une reprise de l'immobilier sur l'ancien. On voyait les transactions qui reprenaient.
03:39Est-ce que vous avez peur sur le marché ? Est-ce qu'il pourrait y avoir une hausse des taux qui pénalise ?
03:43Alors, on a toujours une reprise. C'est-à-dire que jusqu'à fin septembre, on est mieux que l'année dernière.
03:48Donc, il y a une forme de résilience des Français. C'est-à-dire qu'on se rend compte que tout ce qui se passe, pour le moment, n'a pas eu d'impact.
03:53Depuis septembre l'année dernière, c'est bien reparti. On craignait début septembre cette année avec la démission de Bayrou qui est un ralentissement très marqué.
04:00Ça n'a pas été le cas. Je dis ça n'a pas été le cas. Il y a une inflexion positive de la courbe, c'est-à-dire que ça diminue un peu.
04:06Mais là, je partage tout à fait. Vous vivez en fait ce que nous, on vit depuis des années dans le secteur immobilier.
04:11Il n'y a pas de cap, il n'y a pas de direction. On ne sait pas où on va. C'est une politique de petits pas. On n'y comprend plus rien.
04:16Donc, ce qu'on craint, évidemment, c'est la hausse des taux. Parce que s'il y a une hausse des taux, on va repartir.
04:21C'est ce qui s'est passé en 2022. Vous avez eu la hausse des taux et puis la crise de l'énergie.
04:25Et ça a provoqué cette crise quand même assez conséquente, 23 et 24.
04:29Donc, ce n'est même plus de la circonspection. On ne sait plus, en fait. On attend la réforme des retraites, effectivement.
04:35Mais est-ce que vous voyez des ménages qui reportent l'acte d'achat ou pas encore ?
04:39Très honnêtement, jusqu'à fin septembre, ça reste positif. En tout cas, dans le réseau, on fait mieux que l'année dernière.
04:44Donc, c'est quand même... Ça tient. En fait, c'est comme une ligue. Pour le moment, ça tient.
04:48Mais j'entends ce que vous dites. C'est que là, on vit des choses tellement incroyables qu'on ne sait pas ce qui va se passer.
04:53Si les taux augmentent pour ma profession, c'est compliqué. On n'a pas de politique sur l'investissement, sur le bailleur privé.
05:01Ah oui, très attendu.
05:02Mais oui, on l'attendait. On pensait vraiment qu'au début septembre, que François Bayrou avait un plan qui était bon pour les investisseurs,
05:09mais aussi pour les locataires. Et finalement, tout ça est parti et on ne sait pas où. Et là, l'investissement privé s'écroule. Enfin, c'est compliqué.
05:17Daniel Bache, on parle de la santé des banques parce qu'on a vu les titres s'effondrer le jour où le cornu...
05:22En fait, les banques vont bien. C'est-à-dire que ce n'est pas la santé des banques qui est mise en perspective.
05:27La santé des banques n'est pas liée à leur cours de bourse.
05:29Non. Le système bancaire français se porte bien.
05:31Oui, le système bancaire français est très solide. C'est un système qui est en proximité, qui est sur les territoires et qui accompagne les clients dans leurs projets.
05:44Aujourd'hui, effectivement, le risque de hausse des taux est un sujet.
05:48Si, effectivement, la dette de la France voit encore ses taux augmenter, indirectement, il y aura également une répercussion sur les taux auxquels les banques vont emprunter.
05:59Et ça risque de se répercuter, plus ou moins, sur les prêts accordés aux ménages et aux entreprises.
06:05Donc, les banques sont solides et cette solidité est un atout.
06:09Mais j'ai envie de dire, et on en parlait tout à l'heure, la résilience aujourd'hui des entreprises est un atout dans ce pays.
06:16Mais arrêtons parce que sinon, à un moment, on va avoir des défaillances en série.
06:21Et là, ça sera grave. Je ne parle pas de défaillance des banques, mais des entreprises.
06:24Et ça sera terrible, y compris pour l'emploi.
06:27Aujourd'hui, on a une situation d'emploi qui résiste bien.
06:30Enfin, évitons que la situation de l'emploi ne se dégrade à cause d'une crise économique.
06:35Guillaume Martineau ?
06:36C'est pour ça que les taux, même une légère augmentation des taux, psychologiquement, c'est toujours très mauvais.
06:40Parce que les gens s'inquiètent, n'ont pas la culture économique forcément.
06:44Donc, ils entendent augmentation, donc on ralentit les projets.
06:46C'est pour ça qu'on essaye de mettre en place, nous, tous les systèmes d'élargissement de nos offres
06:50pour pouvoir accompagner nos clients et les aider à trouver des financements bancaires.
06:53Parce que c'est aussi une des difficultés.
06:55Mais ce qu'on vit là, ce que vivent les Français, les entreprises sont résilientes.
06:59Le système bancaire est résilient, mais on sent bien que ça pèse sur le moral des gens.
07:03Et quand il y a une... On sent bien que cette instabilité, ce mal-être, finalement,
07:07quand vous êtes mal logé, ça vous le payez aussi dans la rue.
07:10On voit bien, ça touche tout le monde.
07:12Donc, il est temps que ça s'arrête.
07:14Je ne sais pas si c'est le moment de faire le bilan de l'époque Macron,
07:16mais si on regarde quand même les sept dernières années,
07:18le logement, ce n'est quand même pas une réussite.
07:20On n'a jamais eu de cap.
07:22C'est considéré par le président de la République comme une rente.
07:24Il ne s'est jamais intéressé au problème en disant, là aussi, ça fait des rentes fiscales.
07:27Cinq ministres du logement, et je ne parle pas du dernier qui a battu le record du monde de vitesse,
07:30mais cinq ministres du logement.
07:32J'ai été à mon poste plus longtemps que les ministres du logement.
07:35J'en ai connu cinq en quatre ans.
07:36C'est incroyable.
07:38Mais je pense que c'est...
07:39Alors, le président Macron et puis son gouvernement,
07:42enfin, tous ceux qui l'ont soutenu,
07:43le logement n'est pas pour eux une priorité.
07:45On n'en parle, mais on ne fait rien.
07:47Il faut des actes.
07:48On ne doit pas jouer avec l'économie,
07:50mais on ne doit encore moins jouer avec l'immobilier.
07:53On a aujourd'hui dans ce pays un besoin de logement considérable,
07:57et on a des freins multiples,
07:59et les projets qui sont dans les tuyaux n'aboutissent pas.
08:02Là, vraiment, une fois de plus,
08:04c'est la démonstration que lorsque le politique ne va pas,
08:08ça a des conséquences sur le fonctionnement du pays,
08:11sur le fonctionnement de l'économie.
08:13Il est temps de réagir.
08:14Daniel Ball, vous me dites, le secteur bancaire va bien.
08:16Il y a des propositions de dérégulation qui montent,
08:19notamment en référence aux États-Unis,
08:22qui, eux, dérégulent leur système bancaire.
08:24Est-ce que c'est une bonne chose,
08:25parce qu'à un moment donné, on a besoin d'être compétitifs,
08:27ou est-ce qu'il vaut mieux rester avec nos propres règles,
08:30qui nous protègent aussi des crises financières ?
08:32Le système de régulation et de supervision,
08:34tel qu'il a été mis en place en Europe,
08:36sous l'égide de la Banque Centrale Européenne,
08:38a apporté des effets extrêmement positifs,
08:41et le système bancaire français,
08:42le système bancaire européen,
08:44aujourd'hui, est d'une grande solidité.
08:45Aujourd'hui, je ne parle pas de déréguler,
08:49mais je dis simplement qu'il faut avoir
08:50une approche un peu différente.
08:52Aujourd'hui, on est uniquement sur les sujets
08:54de solidité, de solvabilité.
08:57Aux États-Unis, aujourd'hui,
08:58le superviseur regarde également
09:00la compétitivité et l'innovation.
09:03Et favoriser la compétitivité et l'innovation,
09:07c'est favoriser le progrès,
09:08c'est favoriser encore une plus forte solidité,
09:11une plus forte résilience,
09:12un plus fort dynamisme de l'économie et des banques.
09:16Je vous tiens, je voudrais qu'on dise un mot
09:17de Laurent Berger.
09:18Laurent Berger, qui est cité à nouveau ce matin
09:20dans l'actualité pour être négociateur
09:22dans la vie politique.
09:24Il a été approché plusieurs fois pour être Premier ministre.
09:26Il travaille chez vous,
09:27Laurent Berger, au Crédit Mutuel.
09:29Absolument, j'en ai parlé avec Laurent Berger hier soir.
09:32Il me dit que c'est insupportable pour lui
09:34d'avoir constamment ses annonces
09:36alors que Laurent est heureux là où il est
09:39en tant que directeur de l'Institut Mutualiste
09:41pour l'Environnement et la Solidarité
09:43chez Crédit Mutuel et l'Alliance Fédérale.
09:45Il a fait ce choix de venir nous rejoindre.
09:47Il y mène aujourd'hui une action absolument remarquable
09:51qui est reconnue partout
09:52et il a vraiment envie de rester chez nous.
09:54Il ne veut plus faire de politique.
09:55Mais c'est ce qu'il m'a encore dit hier soir.
09:57et je ne pense pas que cette nuit ça aurait changé
10:00et je fais totalement confiance à Laurent Berger
10:02qui est un homme d'engagement.
10:04Il s'est engagé à nos côtés
10:05et il a vraiment envie de mener le cap
10:08que nous lui avons proposé.
10:09Bon, donc c'est non pour Laurent Berger.
10:11Guillaume, un dernier mot.
10:12Qu'est-ce que vous voulez dire aux politiques ce matin ?
10:14Qu'ils arrêtent et qu'ils ont enfin un cap fiscal
10:17sur les lois, sur l'investissement privé
10:20parce que le marché tient encore.
10:22Ça, il ne faut quand même pas faire de catastrophisme.
10:23Ça serait malhonnête de dire que ça s'est cassé la figure.
10:26Donc, fin septembre, on est bon.
10:29Mais ce que j'ai envie de leur dire,
10:30c'est que ça concerne tout le monde.
10:31Quels que soient leurs électeurs, ça les concerne
10:33et qu'on donne enfin du long terme,
10:36qu'on loge les gens avec une politique fiscale stable,
10:39qu'on arrête de changer.
10:40C'est une boussole, vous savez, ça tourne sans arrêt.
10:42Parlons logement peut-être au lieu de parler
10:43de la réforme des retraites toute la journée.
10:45Pour le pouvoir d'achat, ça sera peut-être plus utile.
10:47Merci beaucoup à tous les deux d'être venus ce matin
10:49dans la matinale de l'économie.