00:00Et tout de suite, comme chaque jour, 16h45, un expert de marché vient déconstruire quand même ce consensus,
00:05toutes ces idées reçues un peu faciles là qu'on est en train d'agiter.
00:07Il n'est pas content du tout, il veut mettre les choses au clair cet après-midi.
00:10Jean-François Robin nous rejoint, directeur de la recherche de Natixis.
00:13Bonjour Jean-François.
00:14Bonjour à tous.
00:15Wall Street est au plus haut, l'économie américaine semble résister, la Fed va baisser ses taux.
00:20Bref, Donald Trump avait raison sur tout.
00:23Certains le pensent, mais pas vous, poudite bullshit.
00:25Oui, vous foudroyez cette idée que Donald Trump aurait eu raison sur tout.
00:30Enfin, il a quand même raison sur presque tout pour l'instant.
00:32Oui, ce qui est très intéressant en ce moment, dans la petite séquence du moment,
00:35c'est qu'on a d'un côté les actions qui sont plus hauts, avec des perspectives de bénéfices qui ne cessent d'augmenter.
00:41Donc, record absolu du S&P, du Nasdaq qui reviennent sur des plus hauts.
00:45Puis de l'autre côté, vous avez le marché obligataire qui s'attend à des baisses de taux,
00:48150 points de base de taux d'ici la fin de l'année prochaine, donc qui s'attend à une récession.
00:52Et donc, qui a raison là-dedans ?
00:54Mais on a vraiment une dichotomie, une schizophrénie entre les marchés de taux et les marchés d'action.
01:00Et donc, quand on regarde l'économie, qu'est-ce qui se passe ?
01:03Si vous regardez l'économie, il y a plein d'indicateurs qui sont les pires à l'exception de tous les autres.
01:07Il y a le PIB, donc la croissance américaine, qu'est-ce qui se passe ?
01:11Ça tient.
01:11La croissance américaine, tient.
01:13Mais si on compare, par exemple, la croissance avant Donald Trump, elle était de 2,8% l'année dernière.
01:18On prévoyait 2,7% cette année.
01:20Finalement, là, avant nous, on prévoit chez Natixis 1,6%.
01:22Sur les six premiers mois de l'année, la croissance américaine, elle est de 1,3%.
01:26Donc, c'est quand même pas la fête.
01:28C'est-à-dire qu'on parle de 2,8%, on est à 1,3% pour l'instant.
01:31Donc, quand même une croissance qui est un très fort ralentissement.
01:34De l'autre côté, quand on regarde l'inflation, qu'est-ce qui se passe ?
01:36L'inflation, elle, monte.
01:38On est aujourd'hui à 2,9% dans le corps PCE que regarde la fête ce soir.
01:41La fête ce soir, si on était dans un monde normal, elle pourrait tout à fait monter les taux.
01:44Ce n'est pas du tout ce qu'elle va faire, on pourra en reparler.
01:46Mais clairement, l'inflation est en train de remonter.
01:48Donc, c'est-à-dire que le pouvoir d'achat des ménages américains est en train d'être assez impacté.
01:53Vous avez peut-être vu, les 10% les plus riches ont un pouvoir d'achat qui est en train de s'écrouler aux États-Unis.
01:58Les 10% les plus pauvres, pardon, en train de s'écrouler,
02:01le pouvoir d'achat des 10% les plus riches, lui, augmente très fortement.
02:03Aujourd'hui, la consommation, à 50% de la consommation américaine, c'est pour les 10% les plus riches.
02:10On est à 30% il y a encore quelques décennies.
02:12Et aujourd'hui, le gros des Américains souffre.
02:15Donc, vous avez deux pas de croissance, de l'inflation.
02:18Qu'est-ce qui se passe sur l'emploi ? C'est ça quand même le pire.
02:20Autre indicateur de la force de l'économie américaine
02:22et sans doute quand même un thermomètre pour une prochaine élection.
02:26Vous avez la plus forte révision à la baisse des créations d'emplois aux États-Unis
02:30de l'histoire des statistiques du BLS.
02:31Bon, on a viré la baisse du BLS parce que le thermomètre n'était pas le bon,
02:35donc on a fini par la virer, mais la réalité des chiffres qui ont été révisés,
02:38alors c'est sur un an jusqu'en mars 2025.
02:40Donc évidemment, ce n'est pas que Trump, mais quand même,
02:43on passe dans une économie américaine qui a créé 900 000 emplois de moins,
02:46et donc en moyenne depuis le début de l'année.
02:48Mais ça, c'était avant Donald Trump.
02:49Oui, mais quand même, cette année, si je puis me permettre, Guillaume,
02:52cette année, ça veut dire que si on applique juste ça sur les trois mois et mois de l'année,
02:55ça veut dire que l'économie américaine, en fait, si on fait un peu des projections,
02:58elle est sans doute en train de créer autour de 30 000 emplois par an,
03:0030 000 emplois par mois, pardon, et il faut, on dit toujours, 80 000, 90 000 emplois
03:05pour équilibrer le marché.
03:06Alors évidemment, si vous virez tous les immigrés, ce qu'ils essaient de faire,
03:09le taux de chômage n'est pas si élevé que ça,
03:10mais si vous projetez la révision à la baisse, il n'y a pas de raison de ne pas le faire,
03:14l'économie américaine est détruite des emplois.
03:16Et ça se retrouve dans quoi ?
03:17Dans l'évolution des salaires, qui est en train de ralentir très fortement aux US,
03:21et le turnover, c'est-à-dire que les gens aux Etats-Unis ne démissionnent plus,
03:24parce qu'ils ont sans doute peur de retrouver du job,
03:26et quand on demande, est-ce que vous êtes confiants dans votre capster de retrouver votre job ?
03:29Ben, ce n'est plus du tout le cas.
03:30Donc, quand vous regardez les indicateurs macroéconomiques,
03:32ce n'est pas du tout la même histoire,
03:34c'est plutôt l'histoire du marché obligataire que l'histoire du marché action.
03:37– Alors Jean-François, moi j'ai une question.
03:39Bon, sauf surprise, la Fed va baisser ses taux,
03:42on est bien d'accord, il n'y a pas de récession à l'horizon,
03:44donc c'est un cocktail idéal pour faire remonter les indices américains.
03:48– Oui, alors simplement, la Fed, elle est en train de dire qu'elle est en train,
03:51c'est ce qu'a dit Jerome Powell à Jackson Hole,
03:53elle est en train de dire qu'elle va baisser les taux,
03:56parce qu'il y a de l'inflation, mais ça ne l'inquiète pas trop,
03:58mais il y a quand même de l'inflation,
04:00mais la raison pour laquelle elle baisse les taux,
04:02c'est parce qu'il y a un vrai problème sur le marché de l'emploi que je viens de décrire.
04:04Et bon, a priori, la Fed pense un petit peu la même chose, quoi.
04:08Et donc on a ce dual mandate, ce double mandat de la Fed,
04:12qui n'est pas du tout celui de la BCE,
04:13qui est de maximiser l'emploi,
04:15et c'est pour ça qu'elle va baisser les taux.
04:17Et encore une fois, si c'était que l'inflation,
04:21la Fed, sans doute qu'elle ne baisserait même pas les taux.
04:23Donc si le marché anticipe 150 points de base de baisse des taux
04:26jusqu'à 3% l'année prochaine,
04:28c'est quand même qu'il y a un sujet,
04:29et il y a vraiment une dichotomie qui est difficilement compréhensible.
04:31– Bon, est-ce qu'il y a quand même un point sur lequel vous vous dites
04:35« Bon, Donald Trump, il n'y avait pas forcément tort ».
04:38– Alors, je ne sais pas s'il y a un point où je suis d'accord avec Donald Trump,
04:41ce qui est clair pour aller dans votre sens, messieurs.
04:43– Non, non.
04:44– Non, non, mais c'est vrai que Donald Trump,
04:46là où il y a un truc qu'il obtient,
04:47c'était son thermomètre de son premier mandat,
04:49c'est-à-dire que c'était le S&P.
04:52Probablement, mais souvenez-vous que c'était un énorme débat,
04:53est-ce que l'administration Trump,
04:55ils veulent faire monter ou baisser le dollar ?
04:56Là, tout le monde s'accorde à dire, maintenant qu'il baisse,
04:58est-ce que c'est ça qu'il voulait ?
04:59Mais il y a encore trois mois, on vous disait que Trump,
05:01ce n'était pas du tout évident, que G. Devins,
05:03que notamment Scott Bessent, lui, voulait plutôt un dollar fort.
05:05– Le savait-il eux-mêmes ?
05:07– Voilà, c'est un petit peu la question.
05:08En tout cas, c'est clair que s'ils voulaient faire baisser le dollar,
05:11ils font tout ce qu'il faut pour.
05:12– Oui.
05:13Enfin, on pourrait aussi voir les choses de la façon suivante,
05:15à savoir qu'on a des actions Wall Street au plus haut,
05:17un dollar qui baisse, c'est ce que voulait Donald Trump,
05:19et une Fed aussi qui va baisser ses taux,
05:20et toujours pas de récession.
05:21On peut aussi le dire comme ça, et présenter comme ça,
05:23on se dit que la ligne de crête est plutôt sympa.
05:25– Oui, on peut…
05:26– Fragile, fragile.
05:26– Oui, c'est fragile, parce qu'encore une fois,
05:28la baisse des taux, elle est bonne pour les actions,
05:30c'est bon pour les actions technologiques les plus lèvredgées,
05:33dont les profits futurs seront les plus impactés
05:36par la baisse des taux d'intérêt.
05:37Simplement, ne pas oublier quand même
05:39que la valorisation des actions américaines,
05:41elle est extrêmement concentrée justement sur les valeurs de la tech.
05:44On est sur des concentrations qu'on n'a jamais vues,
05:47même pendant la dot-com bubble de 2000,
05:49et donc évidemment, ça va favoriser des actions
05:51qui sont déjà hyper, hyper chères historiquement.
05:54Est-ce que c'est justifié ?
05:56On peut avoir tous les débats qu'on veut,
05:57mais clairement, on est sur des valorisations
05:59qui sont un peu tendues.
06:00Ce n'est pas sûr que ce soit une très bonne nouvelle
06:02si on pense que c'est les taux qui sont maintenant
06:04le relais de croissance de la valo des actions américaines.
06:06– Cette mise en garde à quelques heures,
06:08trois heures et neuf minutes maintenant
06:09de l'annonce de la Fed,
06:10elle devrait tout à l'heure proclamer une baisse de taux
06:12à la réserve fédérale américaine.
06:14Jean-François Robin, directeur de la recherche de Nantix 6,
06:16on vous retrouvera dans quelques minutes, Jean-François,
06:17au cœur du club, à suivre bien évidemment.