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  • il y a 4 semaines
Quatre français sur 10 se disent mal informés sur le changement climatique et ses effets, salon un sondage Harris Interactive. Pour permettre une meilleure connaissance de ces enjeux, l’Office For Climate Education (OCE) intègre le savoir scientifique lié au changement climatique dans les écoles de différents pays.

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Transcription
00:00L'invité de ce Smart Impact, c'est Éric Guilliardi, bonjour.
00:09Bonjour.
00:10Bienvenue, vous êtes le président de l'Office for Climate Education,
00:13organisé en 2018 par la fondation La Main à la Pâte et la communauté scientifique.
00:19Déjà, c'est une initiative française, si je comprends bien,
00:22mais une organisation internationale, comment on peut présenter cet office ?
00:26En fait, suite à l'accord de Paris en 2021, on s'est dit qu'il y avait un enjeu international d'éducation au climat.
00:33Aujourd'hui, très peu de jeunes ont une formation de qualité aux enjeux climatiques,
00:37et en particulier dans les pays en développement, les pays du Sud.
00:41Et donc, l'OCE est née tout de suite avec une vocation internationale,
00:45même si c'est effectivement une initiative qui est née de la communauté française,
00:48mais un lien avec la communauté scientifique climatologue, dont je fais partie, internationale.
00:53Oui, vous, vous êtes scientifique du climat, c'est ça ?
00:55Voilà, tout à fait. J'ai contribué aux travaux du GIEC il y a une dizaine d'années.
00:59Et donc, c'est vrai qu'en est climatologue, on se pose la question
01:02où est-ce qu'on peut avoir un impact au-delà de faire avancer la connaissance.
01:05Et très clairement, l'éducation aux enjeux climatiques,
01:08à la fois le côté scientifique, dont des connaissances,
01:11mais aussi les attitudes, les aptitudes pour devenir un citoyen éclairé,
01:14qui va pouvoir s'emparer de ces défis, me semble essentiel.
01:17Est-ce qu'il n'y a pas un peu de lassitude quand on est scientifique
01:20et qu'on alerte depuis aussi longtemps et qu'on voit les politiques,
01:25parfois les milieux économiques aussi,
01:27tarder à prendre conscience de l'urgence du virage ?
01:30Non, moi je pense que c'est un tel défi que c'est normal que ça prenne du temps.
01:34Oui.
01:34Peut-être aussi réfléchir dans les discours et la façon d'amener ces défis.
01:37On est vraiment dans une période de transition
01:39où peut-être l'alerte initiale avec des discours qui ont voulu frapper
01:44se termine maintenant et on passe maintenant à comment on s'en empare sérieusement.
01:49Donc bien sûr dans les industries, au niveau politique,
01:51alors là on pourrait débattre longtemps si effectivement,
01:54mais à la fin ce sont les citoyens qui vont pousser les actions
01:58et pour ça l'éducation est fondamentale.
02:00Il faut comprendre les enjeux et de voir comment les replacer
02:02dans l'ensemble des enjeux de la société.
02:04Oui, avec ces chiffres par exemple, c'est un sondage Harris Interactive
02:08qui date du début de l'année 2024.
02:11Quatre Français sur dix se disent mal informés sur le changement climatique
02:14et ses effets.
02:15Alors évidemment, vous allez me dire, c'est pour ça qu'on veut former,
02:19former notamment les enseignants,
02:20mais comment vous expliquez les lacunes actuelles ?
02:23Moi je me souviens d'une séquence où il y avait eu une proposition
02:26pour former les parlementaires par exemple.
02:30Tout à fait.
02:31Alors il y a une part de connaissance, c'est d'abord de l'éducation à la science,
02:34et donc beaucoup de nos concitoyens n'ont pas une mémoire,
02:39forcément une expérience extraordinaire de l'apprentissage des sciences à l'école.
02:43Donc c'est pour ça qu'il y a vraiment un enjeu d'apprentissage des sciences à l'école,
02:47et la main, la pâte a vraiment transformé le paysage depuis 30 ans.
02:50Donc c'est pour ça que notre ADN vient de cette magnifique initiative.
02:53Et ensuite, ce n'est pas juste des connaissances,
02:57c'est aussi ce qu'on appelle les attitudes, les aptitudes,
02:59savoir collaborer, s'écouter, débattre,
03:03qui sont des qualités et des savoirs, des connaissances essentielles
03:07pour pouvoir agir en société.
03:09Donc je pense que c'est à la fois ces connaissances scientifiques,
03:11qui ne sont pas simples, il y a besoin de comprendre,
03:14mais aussi comment on vit ensemble,
03:16quelle société on veut, comment on veut avancer.
03:18Donc ce n'est pas facile, c'est normal qu'il faille un petit peu de temps.
03:22Est-ce que c'est d'autant plus difficile qu'il y a un contre-discours ?
03:27Il y a un complotisme qui s'empare notamment de toutes les questions climatiques
03:33à chaque fois qu'il y a une catastrophe naturelle,
03:35une catastrophe climatique, quand on peut faire le lien avec le réchauffement climatique,
03:40on a un discours complotiste qui naît.
03:42En fait, je pense qu'il faut distinguer la science du climat,
03:46où il n'y a pas vraiment de débat, de qu'est-ce qu'on fait.
03:48Et s'il vous plaît, il y a une confusion entre les deux.
03:51Donc des gens vont transformer le constat scientifique en « ça nous dit ce qu'il faut faire ».
03:57Mais en fait, c'est un débat de société de savoir ce qu'il faut faire.
04:00Donc il y a parfois un risque de dépolitiser les enjeux.
04:04Et donc si on dit « les scientifiques savent ce qu'il faut faire,
04:06la science nous dit qu'il faut faire »,
04:07les gens disent « mais non, c'est ma vie, c'est des choix en société,
04:11donc il peut y avoir un rejet ».
04:12Donc je pense que dans le discours des scientifiques, de la société en général,
04:16il y a besoin de replacer ça dans le contexte plus large des enjeux sociétaux.
04:21On parle bien de risque pour nos sociétés, on sait gérer le risque,
04:25mais il ne faut pas forcément le placer du côté moral où on sait ce qu'il faut faire.
04:29C'est vraiment « en part à nous » de ce défi.
04:32Donc je pense que c'est de replacer le débat au bon niveau.
04:35Et là, peut-être qu'on verra moins de ces rejets, on va dire.
04:39Oui, parce qu'il y a quand même un discours qui consiste à dire
04:42« non, non, les changements climatiques, il y en a toujours eu,
04:45le réchauffement climatique n'est pas lié à l'activité eux-mêmes,
04:47on est, moi, ça m'arrive encore de récupérer sur certains réseaux
04:52des contenus qui affirment ça. »
04:54Bien sûr, mais c'est plus une vision du monde,
04:57un constat scientifique, c'est-à-dire qu'on n'a pas envie de changer.
05:00Oui, alors ça, je suis d'accord avec vous.
05:01Évidemment, ce défi environnemental qu'on a, au-delà du climat d'ailleurs,
05:04les diversités, les pollutions, supposent certains changements,
05:08certaines visions du monde aussi, certaines philosophies.
05:11C'est un vrai débat de société.
05:14Donc je comprends qu'il y ait des résistances, qu'on soit inquiet,
05:18qu'on ait l'impression que certains nous disent comment on devrait vivre.
05:21Et c'est pour ça qu'à l'école, il faut bien comprendre ces différents registres.
05:24Il y a le registre scientifique, mais il y a aussi le registre de la vie ensemble,
05:28des croyances, des valeurs, des opinions.
05:30Il ne s'agit pas d'en dire qu'une est plus importante que d'autre,
05:33mais de comprendre la différence entre ces différents registres pour faire société.
05:36Alors le 2 octobre prochain, c'est dans quelques jours, vous lancez le Climasco.
05:41Alors c'est quoi le Climasco ?
05:42Alors Climasco, c'est notre premier projet d'ampleur en France.
05:45Donc on est très excités, qui va à la fois consister à former les enseignants,
05:51apporter vraiment les outils pour que les enseignants puissent enseigner
05:55de façon en qualité et en quantité le climat à l'école.
06:00Aujourd'hui, c'est dans les programmes scolaires depuis 2019,
06:03mais il n'y a que quelques pourcents d'élèves qui ont une éducation au climat de qualité.
06:07Et ça vient essentiellement des enseignants qui nous disent
06:10c'est un problème scientifique compliqué, j'ai besoin d'être formé,
06:13je ne veux pas apporter d'angoisse et d'anxiété auprès de mes jeunes,
06:17ou je ne veux pas passer pour militants.
06:18Et donc on comprend leur position, c'est comment leur apporter les éléments
06:23pour passer outre ces trois freins.
06:27Donc c'est un projet qui a pour objectif d'expérimenter dans trois académies,
06:31Créteil, Bretagne et La Réunion, pour voir,
06:34et on travaille étroitement avec le ministère de l'Éducation nationale,
06:38les rectorats et un certain nombre de laboratoires scientifiques
06:40en sciences humaines et sociales, sciences de l'éducation,
06:43pour pouvoir voir comment on passe ces barrières,
06:46comment on expérimente dans des collèges, dans des lycées.
06:50Alors collèges et lycées, donc pas pour les plus jeunes.
06:53Les primaires aussi.
06:53Les primaires aussi, d'accord.
06:55Parce que j'avais posé la question de quels profs s'enchargent ?
06:58Est-ce que c'est forcément les profs qui enseignent les matières scientifiques ou pas ?
07:04Alors aux primaires c'est simple puisqu'il n'y a qu'un seul enseignant.
07:06Il y a déjà cette vision systémique, globale, à travers toutes les disciplines.
07:10Bien sûr le défi au collège et au lycée qui fonctionne beaucoup par silo
07:14et le temps pour pouvoir faire des projets entre disciplines est limité.
07:18Donc on va expérimenter, on va voir comment on peut développer ça.
07:22Donc oui effectivement, traditionnellement ces sujets, c'est en SVT qu'on les voit,
07:27un petit peu en physique.
07:29Maintenant avec l'enseignement scientifique en première terminale,
07:32on voit ces sujets qui sont développés.
07:34Et l'enjeu c'est d'apporter une vision systémique.
07:36C'est toutes les disciplines qui sont concernées où ça, ça peut se faire à travers des projets.
07:42Donc ça on va aussi expérimenter, de voir le type de projet dont les enseignants peuvent s'emparer
07:47pour le bénéfice des élèves.
07:50Pourquoi pas avant en France ?
07:53Vous voyez ce que je veux dire ?
07:54Parce que l'OCE existe depuis 2018.
07:59Alors on a bien compris que l'objectif c'était un objectif international.
08:01Mais bon, cette lacune ou cette demande des enseignants, il existait déjà en France.
08:06Oui, alors la France a été pionnière dans l'éducation et le développement durable.
08:09D'accord.
08:09C'est fait depuis 25 ans.
08:11Donc un certain nombre de choses qui se font.
08:12Sauf qu'aujourd'hui ça se traduit par des éco-gestes à l'école,
08:15apprendre à trier, ce qui est important,
08:18ou d'aller voir la mare dans la cour ou à côté.
08:21Donc un manque de vision scientifique, de base scientifique et de vision systémique.
08:25Et c'est vraiment ça qu'on apporte en plus.
08:27Il s'agit de renforcer avec l'éducation au climat.
08:31Et pourquoi la France maintenant ?
08:32Puisque quand on a créé l'OCE, on s'est dit que le besoin était vraiment dans les pays du Sud,
08:37qui n'ont pas forcément le même tissu scientifique associatif.
08:41Et ce qui est vrai, l'essentiel de l'activité de l'OCE se fait en Amérique latine,
08:46en Afrique et bientôt en Asie du Sud-Est.
08:49Mais en fait le besoin il est partout, et dont la France.
08:52Et donc c'est pour ça qu'on lance aujourd'hui ce projet main dans la main avec de nombreux acteurs,
08:57en particulier le ministère de l'Éducation nationale.
08:59Alors ma question elle va être trop générale, mais c'est pas grave, je l'assume.
09:02Est-ce qu'il y a des pays réfractaires ?
09:05Alors...
09:06Et notamment je rajoute quelque chose.
09:08En fonction de celui ou celle qui dirige le pays,
09:13et de sa couleur politique, et de son engagement...
09:16Oui, vous pensez aux États-Unis en ce moment par exemple.
09:17Oui, mais il n'y a pas que les États-Unis.
09:19Alors en fait ce qui est intéressant, c'est que l'éducation au climat a besoin d'être contextualisée.
09:24C'est d'abord une éducation scientifique.
09:25Donc des pays qui n'ont pas de tradition d'éducation scientifique de qualité vont avoir plus de mal.
09:29D'accord.
09:30Ils vont être plus ou moins dans les cultures.
09:31Ensuite, il y a besoin d'adapter aux réalités éducatives et au contexte social, culturel, local.
09:39Donc ça c'est ce travail que fait l'OCE qui va partir à le rapport du GIEC, la base scientifique,
09:44mais les adapter localement.
09:45C'est des projets qui vont durer plusieurs années, travailler avec des acteurs locaux,
09:49donc je ne dirais pas qu'il y a des pays réfractaires, mais chaque pays a sa tradition,
09:55ses cultures, sa pratique de l'éducation en sciences dans laquelle il faut s'intégrer.
10:02Et je repose la question parce que vous disiez tout à l'heure qu'il y a certains profs ici en France
10:08qui disent « Ah mais j'ai peur d'y aller parce qu'on va m'accuser d'être de parti pris ».
10:12Tout entendu, tu votes pour tel parti, vous votez pour tel parti, c'est pour ça que vous voulez nous faire ce cours sur le...
10:17Donc ça peut être une critique qui a été exprimée déjà auparavant dans certains pays, j'imagine.
10:21Ah ben tout à fait.
10:22Le premier exemple, c'est évidemment les États-Unis, où le climat est devenu extrêmement politisé.
10:27Qui antagonise le pays, oui.
10:30Voilà, qui antagonise.
10:32Je ne connais pas d'autres pays où ça sera à ce point.
10:35D'accord.
10:36Alors je ne les connais pas tous, mais c'est vrai que les pays dans lesquels on intervient,
10:39il y a moins, c'est plus une méconnaissance des enjeux.
10:43Il y a une appétence, très clairement.
10:45Aujourd'hui, au niveau des Nations Unies, il y a à peu près la moitié des pays qui ont dans leur programme scolaire le mot climat,
10:51ce qui est nouveau, avant c'était 20%, ça augmente.
10:53Et tout l'enjeu, c'est de transformer ce mot dans le programme scolaire, en pratique, dans la classe de qualité.
10:59Et ça, c'est pour justement éviter que les enseignants aient l'impression d'être militants.
11:04C'est un vrai enjeu.
11:05Avec une dernière question, il va nous rester une minute.
11:09Effectivement, vous l'avez évoqué, et on se pose souvent dans ce Smart Impact la question du discours collectif,
11:16qu'est-ce qu'on a loupé, comment on peut le faire évoluer.
11:18On a d'abord, et il y en avait sans doute besoin, été très anxiogène au moment du constat.
11:24Comment ça peut devenir un projet collectif ? Parce que c'est un projet potentiellement exaltant de réussir ce défi.
11:31Comment on réussit à faire évoluer ce discours ? Ça doit être une de vos questions principales.
11:35Bien sûr, on travaille beaucoup sur l'éco-anxiété.
11:37Là, c'est comment justement ne pas en générer ou la limiter.
11:40Et en fait, aujourd'hui, on travaille sur trois plans.
11:42D'abord, enseigner ce que c'est.
11:45Quand on ne connaît pas quelque chose, c'est angoissant.
11:47Alors quand on se dit, le changement climatique fonctionne comme ça, ah ok, je comprends.
11:50Donc ça, c'est une première chose.
11:51Ensuite, permettre l'expression des émotions.
11:54C'est essentiel que les jeunes puissent exprimer.
11:56Est-ce que je suis en colère ? Est-ce que je suis inquiet ?
11:59Qu'ils puissent s'exprimer collectivement déjà.
12:01Et puis ça permet d'aller au-delà des émotions.
12:03Et ensuite, apprendre à agir.
12:05Faire des projets en classe.
12:06Apprendre de la gentilité, on va dire.
12:09C'est-à-dire se transformer en acteur.
12:10Et je vous rejoins complètement.
12:11Je pense que ce défi environnemental est terriblement excitant.
12:15C'est une période incroyable qu'on vit.
12:16Il faut transmettre cet enthousiasme aux jeunes
12:19plutôt que les discours qu'on entend souvent de faim du monde
12:23ou d'angoisse générée.
12:25Il fallait peut-être passer par là, mais aujourd'hui, on est passé à autre chose.
12:28Merci beaucoup, Éric Guilliardy.
12:29A bientôt sur Bsmart for Change.
12:31On va suivre ce climasco avec intérêt.
12:34C'est l'heure du Zoom, de ce Smart Impact.
12:36Le recyclage des emballages pro au menu.
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