Bachir Baddou (Fédération Marocaine de l’Assurance): «Au Maroc, l’assurance paramétrique a été une solution»

Lopinion.fr

06/02/2025

Camille George reçoit Bachir Baddou, vice-président délégué de la Fédération Marocaine de l’Assurance

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00:00Bonjour à toutes et à tous, de retour sur le plateau de l'Opinion La Géphi au cœur

00:13des 32e rencontres de l'AMRAI, ici à Deauville.

00:16J'ai le plaisir d'être avec Bachir Baddou.

00:20Bonjour Bachir.

00:21Bonjour.

00:22Merci d'être avec nous.

00:23Alors vous êtes, je vais essayer de ne pas me mélanger, Directeur Général de la Société

00:27d'Assurance Marocaine, CAT Assurance et Réassurance, Vice-président délégué de la FMA, la Fédération

00:34Marocaine d'Assurance, et Vice-président de la Global Federation of Insurance Association.

00:40Tout à fait.

00:41Que de casquettes.

00:42Alors, racontez-moi un petit peu comment ça se passe au Maroc, comment sont perçus

00:51les catastrophes naturelles.

00:52Vous avez eu quand même à faire face à un certain nombre de catastrophes naturelles

00:56ces dernières années.

00:57Tout à fait.

00:58D'abord, le Maroc, historiquement, est un pays qui a connu, en termes de catastrophes

01:03naturelles, quelques épisodes de tremblement de terre, dans son histoire, dont un épisode

01:08assez malheureux, qui a eu lieu au tout début des années 60, qui est le tremblement de terre

01:15d'Agadir, qui avait détruit toute une ville.

01:17Agadir a été pratiquement rasé durant ce tremblement de terre, et donc on a eu d'autres

01:24épisodes au fil des années de beaucoup plus faible ampleur, notamment au nord du

01:28Maroc.

01:29Mais le pays a pris conscience depuis longtemps que ce phénomène pouvait revenir de manière

01:34violente et qu'il fallait mettre en place des dispositifs de couverture et de couverture

01:38d'assurance.

01:39Et j'y reviendrai.

01:40À côté de ça, le Maroc est dans une zone qui devient de plus en plus aride.

01:45Au Maroc, il a toujours beaucoup plu, il neige, il neige même beaucoup dans certaines régions.

01:51Et là, depuis six ans, on a une sécheresse qui frappe le pays depuis six années consécutives,

01:58avec des phénomènes assez particuliers.

02:00Il pleut moins, mais quand il pleut, il pleut beaucoup, d'où le risque d'inondation.

02:04Et les fameuses flash floods.

02:06Exactement.

02:07Ce type d'épisodes de flash floods qui, en quelques minutes, en moins d'une heure, inondent

02:17une ville.

02:18Vous connaissez ce phénomène en Europe.

02:19On l'a vu à Valence il n'y a pas très longtemps.

02:22Donc, on a pris conscience au Maroc, avec les pouvoirs publics, qu'il fallait mettre

02:26en place un dispositif de couverture contre ce type de risque.

02:29Et on a lancé, en janvier 2020, une couverture d'assurance obligatoire.

02:32Et publique, donc ?

02:34Oui.

02:35C'est une loi.

02:36Donc, on a travaillé avec les pouvoirs publics longtemps pour mettre en place ce type de

02:40couverture.

02:41C'est des années de travail avec les pouvoirs publics parce qu'on ne peut pas tout couvrir.

02:45Bien sûr.

02:46Il y a la limite de l'assurable.

02:48Et puis, dans des pays tels que le mien, il y a quand même une partie importante de la

02:53population qui n'est pas assurée.

02:55Et pour cela, on ne peut pas les laisser en marge de toute couverture.

02:58Donc, on a lancé en janvier 2020 un dispositif de couverture d'assurance obligatoire.

03:02Et pour les personnes qui ne sont pas assurées, un fonds public qui s'appelle le Fonds de

03:07solidarité des événements catastrophiques.

03:08Alors, on couvre essentiellement trois périls, trois momentaires.

03:13Inondation, tsunami.

03:15Alors, tsunami, dans l'histoire du Maroc, alors ça remonte à il y a bien longtemps,

03:19en 1750, il y a eu un très grand tsunami sur le Maroc suite au tremblement de terre

03:24de Lisbonne.

03:25Le tremblement de terre de Lisbonne est l'un des tremblements de terre cités en exemple

03:28en Europe, en Afrique, dans cette région du monde.

03:31Et donc, on couvre trois périls plus les risques liés aux faits de l'homme et on

03:37couvre essentiellement le terrorisme dans cette partie-là.

03:40Il est doté à hauteur de combien ?

03:43Alors, le fonds est doté par une taxe parafiscale qui est payée par les assurés parce que

03:49l'obligation d'assurance, comment on a réussi à la mettre en place ? C'est une

03:52inclusion obligatoire dans tous les contrats d'hommage.

03:55Alors, dommage aux biens et les contrats de responsabilité.

03:58Et donc, ça a permis tout de suite de dire toute personne qui s'assure et toute entreprise

04:03qui s'assure est couverte pour ces périls.

04:05Et ceux qui ne sont pas assurés, il y a un fonds de solidarité qui est alimenté par

04:08une taxe parafiscale, mais qui lui-même va se couvrir par des dispositifs et on reviendra

04:13sur le paramétrique parce que lui-même a mis en place une couverture de type paramétrique.

04:18On l'a lancé en 2020, septembre 2023, on a eu le fameux tremblement de terre à Marrakech.

04:24Alors, au Maroc, on l'appelait le Hauz.

04:26Le Hauz est une région montagneuse juste à côté de Marrakech et donc l'épicentre

04:33a été dans cette zone et en fait, les gros dégâts ont eu lieu dans les montagnes, dans

04:38des zones finalement très peu assurées.

04:39Mais Marrakech a été quand même touché, les villes avoisinantes ont été touchées

04:43et le mécanisme a joué à quelque chose de malheureux et bon.

04:46Ça a été pour nous une occasion de tester le système, le régime, l'évaluation, l'estimation,

04:53l'indemnisation.

04:54Alors, j'ai aussi la chance, la compagnie que je dirige, Cat Assurance et Réassurance,

04:58c'est le réassureur, l'agrégateur national pour cette garantie particulièrement.

05:03Donc, je la connais bien, je l'ai managée et gérée avec les équipes et en parallèle,

05:08les pouvoirs publics, au-delà du Fonds de solidarité des événements catastrophiques,

05:13l'État marocain était très proactif et a mobilisé les fonds nécessaires, un, pour

05:18indemniser les gens dans l'urgence, c'est plus de deux milliards et demi d'euros qui

05:23ont été tout de suite mobilisés pour venir en urgence aux personnes qui ont subi des

05:27dommages et puis, il y a tout un plan sur les cinq années à venir qui a démarré déjà

05:32il y a une année derrière et donc, il reste encore quatre années de déploiement pour

05:35mobiliser l'équivalent de douze milliards d'euros pour reconstruire la région, remettre

05:40à niveau les infrastructures et aider les populations à reconstruire leur maison.

05:46Donc voilà, c'est l'exemple type d'un partenariat public-privé où le secteur de l'assurance

05:52joue un rôle.

05:53Une obligation d'assurance avec bien entendu des limites, quelqu'un dont la maison vaut

05:59deux millions d'euros ne reçoit pas les deux millions d'euros, d'accord ?

06:02Donc, il y a des capitaux qui sont capés mais avec des limites quand même importantes

06:07et pour vous dire, à Marrakech, aucune maison n'a atteint la limite réglementaire dans

06:11les dégâts.

06:12Ce qui n'a pas eu de, disons, d'effondrement total, il y a eu des fissures, il y a eu quelques

06:17murs effondrés et donc, il y a des maisons qui ont subi des pertes mais on n'a rarement

06:23vu des pertes aller supérieures à cent cinquante mille euros ou deux cent mille euros.

06:27Donc, tout le monde était dans le cadre-figure de cet événement pour la partie assurée

06:33était largement dans les limites.

06:35Maintenant, il y a eu des industries qui, elles, ont été sinistrées, donc des unités

06:39industrielles pour certaines de manière assez importante, elles ont bénéficié du dispositif

06:44assurantiel et souvent, les industries, au-delà de la limite réglementaire, ils ont des couvertures

06:50facultatives complémentaires qui permettent de couvrir.

06:53Donc, voilà.

06:54Le monde agricole n'est pas en reste, donc il y a un dispositif de couverture pour les

06:58agriculteurs à travers une multirisque climatique qui est née d'un partenariat public-privé

07:02qui remonte à déjà il y a des années en arrière et en fait, cette couverture d'assurance

07:08couvre plusieurs périls, alors elle couvre la sécheresse, l'excès d'eau, la grêle,

07:15les vents violents et les vents de sable.

07:17Ça couvre aussi bien la partie céréale que la partie arbroculture.

07:22Alors, il faut savoir que le Maroc est un pays agricole important et juste pour vous

07:27donner deux ou trois exemples, troisième exportateur mondial d'olive, troisième exportateur

07:32mondial de framboises, gros exportateur mondial de tomates, d'ailleurs la plupart des tomates

07:38que vous consommez en France viennent de chez nous et j'en passe les pastèques, différents

07:43types de légumes, etc.

07:44Et on ne peut pas, avec les épisodes de sécheresse, laisser ce monde agricole, je dirais, seul

07:52face aux aléas climatiques.

07:54Donc, il y a un dispositif assez intéressant qui a fait ses preuves, mais qui arrive dans

07:59certaines régions au seuil de l'inassurable et les réassureurs ne veulent plus couvrir

08:05certaines régions du Maroc.

08:06Donc, les parties qui, au renouvellement en janvier 2025, ont été exclues du dispositif

08:12assurantiel, on a mis en place, en fait, les pouvoirs publics avec la mutuelle d'assurance

08:17qui gère ce dispositif, ont mis en place un dispositif dans lequel la mutuelle gère

08:22un fonds pour le compte de l'État, mais in fine pour les assurer, rien n'a changé.

08:28Donc, eux, ils sont indemnisés, mais au lieu que ce soit un mécanisme assurantiel pour

08:33ces zones-là, c'est plus un fonds, des fonds publics qui permettent à la mutuelle d'assurance

08:40d'indemniser les personnes qui subissent des sinistres dans cette zone-là.

08:44Et qui viennent pallier, effectivement, l'exclusion, enfin le manque, le déficit.

08:48Tout à fait, mais bon, tout le nord du Maroc, allez, pour faire simple, si vous connaissez

08:52un peu le Maroc, de Casablanca vers le nord et l'ouest, c'est des zones qui continuent

08:58à recevoir des pluies et qui connaissent pas le même problème que si vous allez au

09:05sud de Casablanca en descendant vers Marrakech, Agadir et le sud du Maroc.

09:09Donc, ça, c'est des régions qui réellement pâtissent d'un manque de pluie et qui souffrent.

09:14Et donc, il y a eu une grande politique nationale de mobilisation des eaux, quelle que soit

09:20leur nature.

09:21Donc, dessalement, retraitement des eaux.

09:24Il y a, je vois, beaucoup d'initiatives, effectivement, l'État a fait beaucoup de

09:28choses.

09:29Beaucoup d'initiatives.

09:30Beaucoup de choses et de travail.

09:31La dernière initiative qui est assez originale, c'est ce qu'on appelle chez nous les autoroutes

09:35de l'eau.

09:36C'est aller capter l'eau au moment où le fleuve, un fleuve va se jeter dans la mer.

09:41On récupère l'eau avant que l'eau n'aille se jeter dans la mer et on la remonte pour

09:45aller alimenter des barrages qui sont en manque d'eau.

09:48Et vous parliez, oui, de solutions alternatives comme le paramétrique.

09:52Oui, tout à fait.

09:53Alors, ce fameux fonds de solidarité contre les événements catastrophiques avait eu

09:57la bonne idée d'aller chercher à l'international, au-delà des subventions qu'il reçoit, de

10:02la taxe parafiscale qui alimente le fonds.

10:04Le fonds, il est jeune.

10:05Il a été créé en 2020.

10:07Il n'avait pas encore accumulé beaucoup d'argent, mais il avait eu la bonne idée

10:11d'acheter une couverture paramétrique auprès de la Réassurance internationale pour un montant

10:17de, alors 3 milliards d'Iran, c'est 300 millions d'euros, pour un montant de 300

10:22millions d'euros.

10:23Et ce système se déclenche dès lors qu'on atteint un certain paramètre et ce paramètre

10:31est adossé pour les tremblement de terre sur le degré, sur l'échelle de Richter.

10:37Et donc, comme le tremblement de terre a dépassé le trigger, donc les 300 millions d'euros

10:42ont été débloqués les premiers jours du tremblement de terre, avant même qu'on commence

10:46à effectuer les expertises.

10:49C'est l'avantage du paramétrique.

10:50Voilà, c'est l'avantage du paramétrique et c'est formidable, c'est fantastique.

10:53Et même le gouvernement et les pouvoirs publics ont posé la question.

10:56Mais c'est quoi ce truc-là, 300 millions d'euros qui arrivent ? On leur a expliqué

10:59ce que c'était que l'assurance paramétrique et donc voilà, il faut aller chercher ce

11:06type de solution.

11:07Oui, pour avoir un mix et avoir des solutions tout à fait complètes.

11:11Merci beaucoup.

11:12Merci à vous.

11:13Je suis contente d'avoir été avec vous.

11:14C'est gentil.

11:15Pour toutes ces précisions.

11:16Écoutez, merci bien.

11:17Merci.

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