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  • 25/09/2023
Luc Besson était l'invité de Sonia Devillers ce lundi pour la sortie de son dernier film, "Dogman". Accusé de viol, le réalisateur a été mis hors de cause cette année par la justice française. Elle "n'a pas été de mon côté, elle a fait son travail", indique-t-il. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-lundi-25-septembre-2023-2127980

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Transcription
00:00 7h48, Sonia De Villere, votre invitée signe un nouveau long-métrage en salle mercredi.
00:05 Dogman !
00:06 Histoire captivante d'un enfant sadisé par son père, enfermé dans une cage avec des
00:11 chiens, il grandira en marge de la société entouré d'une meute de clébards à la fois
00:17 baroque et menaçante.
00:19 Bonjour Luc Besson.
00:20 Bonjour.
00:21 Douglas, un homme qui se sent mieux avec les chiens qu'avec les hommes.
00:24 Comme il y a 40 ans, vous tourniez l'histoire de Jacques qui se sentait mieux avec les dauphins
00:28 qu'avec les hommes.
00:29 Retour aux sources ?
00:30 Oui.
00:31 Il y a ça dans vos films, l'idée que l'humanité abîme, qu'elle fracasse et qu'à défaut
00:38 de ne pas pouvoir s'en protéger, il vaut mieux s'en extraire ?
00:41 Non, pas forcément s'en extraire mais il faut survivre.
00:44 Ce n'est pas tellement l'envie de s'en extraire.
00:49 Je pense que mes personnages, Douglas en premier, il aimerait bien être aimé.
00:51 Ce n'est pas tout à fait de sa faute si personne ne l'aime autour de lui.
00:57 Il va trouver l'amour là où il est.
01:01 C'est-à-dire ses chiens qui ont un amour inconditionnel.
01:04 Quand un chien vous aime, c'est pour la vie.
01:09 Vous allez chercher le pain, vous revenez, il vous fait la fête.
01:11 Il y a l'idée que les coups et les peurs d'un enfant, que de ces blessures-là, on
01:17 ne cicatrise jamais ?
01:19 Je pense qu'on ne cicatrise jamais, effectivement.
01:23 Mais la douleur s'éloigne avec le temps.
01:25 Vous savez quand vous avez des petites cicatrices l'hiver, ça fait un peu mal l'hiver, vous
01:30 sentez que ça revient ?
01:31 Je pense oui, effectivement.
01:33 Et en même temps, c'est un peu votre valise.
01:38 Vous mettez tous ces souvenirs, toutes ces douleurs dans une valise et c'est cette valise
01:42 que vous ouvrez de temps en temps pour créer des choses aussi.
01:45 Il faut apprendre par contre à la refermer.
01:47 On ne peut pas la laisser ouverte tout le temps parce que là sinon on est vraiment
01:50 mal.
01:51 Il y a dans Dog Man une scène éblouissante dans un cabaret transformiste où Douglas
01:57 grimait en Edith Piaf, Caleb Landry Jones, il faut citer le nom de ce comédien magnifique,
02:04 chancelant sur scène à sur un playback d'Edith Piaf.
02:08 Et cette affiche où cet homme en perruque, rimmel et rouge à lèvres qui coule frappe
02:17 le regard, l'art du drague, l'art du travestissement comme ultime lieu de liberté.
02:23 En partie, il ne sait pas qui il est ce jeune garçon.
02:27 C'est un arbre à qui on a coupé les racines.
02:29 Il trouve cette prof de théâtre à l'âge de 12 ans qui lui dit si tu n'aimes pas ton
02:35 reflet, change-le.
02:36 Et l'acting permet d'être quelqu'un d'autre pendant quelques minutes et c'est
02:43 ce qui lui sauve la vie.
02:44 Il a le droit d'exister, il a le droit d'être heureux pendant quelques minutes,
02:49 une fois par semaine et il en profite.
02:53 Mais il est très très heureux dans ces minutes-là.
02:55 Avec quand même l'idée que vos personnages depuis très longtemps, Luc Besson, ne sont
03:01 pas vraiment genrés.
03:03 Le héros du Grand Bleu, celui de Subway, Nikita, Léon, Mila Jovovich dans le cinquième
03:08 élément, Jeanne d'Arc, Lucie à sa manière, ils sont tous à la fois féminin et masculin.
03:15 C'est-à-dire que vos personnages de femmes sont éminemment masculines, vos personnages
03:19 d'hommes sont très féminins.
03:20 C'est assez naturel chez moi.
03:24 Je pense que l'artiste joue dans son intérieur avec sa féminité et sa masculinité depuis
03:30 tout le temps.
03:31 Ça a toujours été un petit peu naturel.
03:34 J'ai toujours été attiré par la force des femmes et la faiblesse des hommes.
03:38 C'est ça qui est amusant à jouer.
03:40 Si c'est pour faire Schwarzenegger qui dit "Alastair, Alastair, Alastair, baby" ça
03:45 m'intéresse moins.
03:46 Par contre le jour où Terminator me dira "Ma mère me manque", voilà, là ça commence
03:54 à m'intéresser.
03:55 Et tous ces personnages, ils n'ont pas vraiment de sexualité ?
03:57 Oui, c'est vrai.
03:59 Ils sont tous restés quelque part coincés à un âge un peu prépubère ?
04:03 C'est vrai.
04:05 Mais ils ont des gros flingues ?
04:08 Bah oui, c'est l'extension.
04:11 Mais même les femmes d'ailleurs dans mes films.
04:13 C'est elles qui ont généralement les plus gros.
04:15 Donc le fusil à pompe c'est un phallus chez Luc Besson ?
04:18 Oui, ou chez les femmes.
04:20 Pourquoi les justiciers solitaires vous fascinent-ils autant Luc Besson ? Nikita, Léon, Lucie,
04:28 ce sont des justiciers solitaires comme Douglas, votre dogman, qui vole les riches pour donner
04:34 aux pauvres, qui flinguent les méchants pour protéger les faibles ?
04:37 Je pense que pour dérégler une machine, il faut juste un petit grain de sable.
04:42 Donc je m'intéresse aux petits grains de sable.
04:44 L'individu ?
04:45 Oui, l'individu.
04:46 Et tous les grands mouvements, que ce soit artistique, politique ou économique, c'est
04:54 toujours un petit grain de sable qui vient et qui n'est pas d'accord et qui trouve qu'on
04:57 souffre.
04:58 Un homme seul contre tous ?
05:00 Un homme ou une femme ?
05:01 Seul contre tous.
05:03 Jeanne Souci était une femme qui a bouleversé pas mal de choses.
05:08 Jeanne d'Arc.
05:09 Je trouve ça intéressant parce que vous êtes vous-même accusé de viol par une actrice
05:15 qui a porté plainte contre vous en 2018.
05:17 Sans son suivi.
05:18 J'étais.
05:19 Cinq années de procédure.
05:21 Elle continue de vous accuser parce qu'elle va porter l'affaire en justice en Belgique.
05:26 Mais en France, cinq années de procédure qui sont aujourd'hui clauses, puisqu'il
05:31 y a eu non lieu prononcé, non lieu confirmé en appel et qu'au mois de juin, la Cour
05:35 de cassation a définitivement rejeté le pourvoi de votre accusatrice.
05:39 Donc l'institution, elle a été de votre côté.
05:42 Pourquoi on ne retrouve pas ça dans votre film ?
05:45 Dans vos films ?
05:46 Pourquoi l'individu seul contre tous qui doit sa survie qu'à lui-même ?
05:50 Jamais à la police, jamais à la justice, jamais à l'État, jamais à la société ?
05:55 En fait, la justice a fait son travail seulement.
06:00 Elle n'a pas été de mon côté.
06:02 Elle a fait son travail comme elle doit le faire.
06:04 On peut en avoir peur des fois parce que c'est vrai qu'elle n'est sûrement pas
06:09 parfaite mais elle est irremplaçable.
06:11 On ne peut pas remplacer la justice.
06:13 Donc il faut la laisser faire.
06:14 Et moi, je fais du cinéma.
06:17 Donc ce qui m'intéresse, c'est justement de montrer que ce soit dans Léon, dans Nikita
06:22 ou dans plein de films, il y a cette confrontation parce qu'ils ne sont pas au rendez-vous.
06:26 Dans Léon, il y a cette petite fille, où sont les services sociaux ?
06:30 Où sont la police ?
06:31 Qu'est-ce qu'ils font ?
06:32 La police, ils sont tous véreux dans le film.
06:34 Après, c'est ça qui m'intéresse.
06:35 Je mets le doigt sur des petits trucs qui font mal mais ça reste du cinéma.
06:41 C'est une façon gentille et agréable de réveiller un peu les gens.
06:45 Et c'est votre vision du monde ou c'est profondément inspiré par le cinéma américain
06:49 par exemple ?
06:50 Non, ce n'est pas inspiré par le cinéma.
06:52 J'ai été élevé par des parents moniteurs de plongée, j'ai été élevé dans plein
06:56 de pays.
06:57 J'ai une culture très très diverse.
07:00 Je fais partie des gens qui pensent qu'on peut manger des sushis en écoutant du reggae
07:05 par exemple.
07:06 Et je vois cette confrontation partout, tout le temps, avec la société, l'administration.
07:16 Je l'ai dit, Luc Besson, votre accusatrice va porter l'affaire en justice en Belgique
07:23 et peut-être à la Cour européenne de justice, à voir si le droit s'est appliqué correctement
07:28 en France.
07:29 Est-ce que ça vous empêche de dormir ?
07:30 Non, pas du tout.
07:33 Comme cette affaire ne vous a jamais empêché de dormir ?
07:36 Non, parce que je ne suis pas coupable, je n'ai pas fait ce dont on m'accuse.
07:40 Après, on rentre dans des tempêtes médiatiques et tout le monde s'en sert pour ses propres
07:47 intérêts.
07:48 Je serais incapable, ça c'est mon éducation, j'ai été élevé par ma mère et ma grand-mère,
07:54 je serais incapable de garder un mensonge comme ça pendant des années.
08:01 Je suis juste incapable.
08:02 Si j'avais fait une bêtise, une connerie, je lèverais la main et je dis "bah oui, c'est
08:06 moi qui ai fait une connerie" et j'en paierais les conséquences.
08:10 Allons plus loin, puisque la justice française vous met hors de cause, définitivement hors
08:16 de cause, est-ce que maintenant vous allez porter plainte contre cette femme pour dénonciation
08:22 calomnieuse ?
08:23 Il y a une phrase dans le film, dans Dogmean, qui dit que les plaintes sont des prières
08:29 au diable.
08:30 Donc, si Mediapart n'a publié que des mensonges, vous n'allez pas non plus porter plainte
08:39 contre Mediapart pour diffamation ?
08:41 Je n'ai pas lu les articles de Mediapart, c'est mon avocat qui s'en occupe, moi ça
08:46 ne m'intéresse pas.
08:47 Ce qui m'intéresse c'est de faire des films, j'ai 64 ans, il doit m'en rester
08:50 2-3, si je pouvais les faire tranquillement ça m'arrangerait.
08:53 Donc terminé.
08:54 Fin de l'histoire.
08:55 Le film le plus cher de toute l'histoire du cinéma français, c'est vous qui l'avez
09:01 tourné Luc Besson.
09:02 Ah bon ?
09:03 Valérien.
09:04 Incroyable.
09:05 Même de l'histoire du cinéma européen.
09:06 On apprend des choses sur France Inter.
09:08 Financier cuisant, une quasi faillite ?
09:11 Pas du tout, c'est complètement faux, je suis désolé.
09:14 Le film a fait 250 millions de dollars box office dans le monde, je souhaite à tous
09:18 les films français de le faire.
09:19 Et le film est, je crois, rentable depuis quelques mois.
09:24 Parce que vous savez, il y a deux vies dans un film.
09:26 Il y a la première, celle où tout le monde crie.
09:28 Et ça a crié très fort à l'époque.
09:32 Et puis il y a la deuxième, qui est ce qu'on appelle sa deuxième vie, sa longue vie, c'est
09:37 quand il passe tous les ans à la télé dans tous les pays du monde.
09:40 A l'époque, vous rêviez d'une suite à Valérien.
09:44 Est-ce que vous imaginez toujours une suite à Valérien ?
09:47 Bah non.
09:48 C'est dommage.
09:49 Mais je l'ai dans la tête, elle est vachement bien.
09:51 C'est dommage.
09:53 Dogman, en salle mercredi.
09:55 Merci Luc Besson.
09:56 C'est moi.

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