- il y a 6 semaines
Après la réunion sur l'Ukraine à Washington, Grand entretien sur France Inter, mardi 19 août, avec Claude Blanchemaison, ancien ambassadeur de France à Moscou, Élie Tenenbaum, directeur du Centre des études de sécurité de l’IFRI et Sylvie Kauffmann, éditorialiste au "Monde", spécialiste des questions internationales.
Retrouvez « L'invité de 8h20 » sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien
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00:00Peut-on croire à une rencontre prochaine entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky ?
00:12La fin de la guerre s'imagine-t-elle ce matin en Ukraine, trois ans et demi après le début de l'invasion russe ?
00:20C'est ce qu'esquisse Donald Trump sans garantie aucune à l'issue des réunions de la nuit à la Maison Blanche.
00:25Mais la mobilisation s'intensifie, l'Ukraine, l'Europe, l'OTAN et les Etats-Unis réunis autour d'une même table.
00:32Assaut d'amabilité affiché pour effacer le tapis rouge déroulé en Alaska à Vladimir Poutine.
00:39Et quels résultats concrets ce matin ? Nous attendons vos questions, chers auditeurs, au standard 01 45 24 7000.
00:47Et on tente d'y répondre avec trois invités en studio.
00:51Claude Blanche-Maison, bonjour. Diplomate, ancienne ambassadeur de France en Russie, merci d'être avec nous ce matin.
00:58A vos côtés, Sylvie Kaufman, bonjour.
01:00Journaliste, éditorialiste au journal Le Monde, spécialiste des questions internationales, vous êtes aussi ancienne correspondante à Moscou.
01:07Et bonjour Elie Tenenbaum, vous êtes chercheure et directeur du Centre des études de sécurité de l'IFRI, spécialiste des questions de sécurité européenne.
01:16Merci donc à tous les trois d'être là. Un mot d'abord que je voudrais de votre part à tous les trois pour qualifier ce moment.
01:24Cette séquence diplomatique inédite, pour le moins, c'est ce qu'on peut dire, Claude Blanche-Maison ?
01:32La première impression, c'est celle d'une extraordinaire accélération, peut-être aussi d'une certaine confusion, depuis le sommet d'Uncourage, en fait.
01:41En Alaska, le président Trump est arrivé avec ce dont il nous avait convaincu, à savoir, je vais demander un cessez-le-feu, point, un cessez-le-feu sec, sans condition, inconditionnel.
01:57Et puis, de façon encore relativement inexpliquée, Poutine l'a retourné, en lui expliquant qu'un cessez-le-feu, c'était pas forcément une bonne idée, que, dans le fond, ça ne marcherait pas.
02:12Peut-être a-t-il utilisé des arguments techniques, puisque ce cessez-le-feu n'aurait pas été préparé par des militaires pour désimbriquer les troupes là où elles étaient imbriquées,
02:21que ce cessez-le-feu n'aurait pas été administré par une force neutre, par conséquent, ça aurait été un cessez-le-feu purement politique, violé tous les matins et tous les soirs.
02:31Alors, je ne sais pas quel argument il a utilisé, je ne sais pas si c'était dans les dix minutes qu'ils ont passé dans The Beast, la voiture,
02:39ou si c'était dans les deux heures et demie, deux heures trois quarts de négociation entre les deux délégations.
02:44Toujours est-il que le président américain, à la suite de cela, poursuit désormais un accord de paix et puis un cessez-le-feu immédiat.
02:50Passons directement à la négociation de la substance vers un accord de paix, ce qui était la position de Poutine.
02:56Alors, effectivement, ça a semé un certain désarroi, peut-être même une panique chez les Européens,
03:00qui aussitôt se sont mobilisés. Aussitôt, bien entendu.
03:05Et on a vu ces réunions se tenir et puis ça a abouti, en effet, à la réunion à la Maison-Blanche,
03:12avec ce sommet qu'on estimait être un sommet de tous les dangers entre Trump et Zelensky,
03:18compte tenu de l'épisode du 28 février. Mais pas du tout, ça s'est plutôt bien passé, finalement.
03:25Et les Européens ont été invités.
03:29C'est donc que les Européens sont revenus à la table, d'une certaine manière, en insistant surtout sur le rôle qu'ils pourraient jouer
03:38pour offrir des garanties de sécurité à l'Ukraine après la cessation des combats.
03:45Sylvie Kaufmann, comment on le qualifie le moment qu'on vient de vivre cette nuit ?
03:49Moi, je dirais que le pire a été évité. Le pire étant la rupture du front transatlantique qu'on pouvait craindre après le fiasco de l'Alaska, finalement.
03:57Parce que c'est ça qui s'est passé. C'est qu'on a vu à Anchorage le président américain s'aligner sur les positions du président russe.
04:05Et donc, ça, ça a été un grand choc pour les Européens qui ont décidé, qui ont pris cette initiative, en effet, tout à fait exceptionnelle,
04:13d'aller en groupe, en bloc, à 7, derrière Zelensky, à Washington.
04:19Et l'image qu'on a vue aujourd'hui, c'est l'image de l'Europe face à Donald Trump ou avec Donald Trump ?
04:26Je pense qu'elle n'est pas totalement claire, cette image, justement. Elle est encore floue.
04:30C'est-à-dire, vous voyez, le président Macron a parlé, ça m'a beaucoup frappée dans son compte-rendu devant la presse après la réunion.
04:37Il a dit, nous avons une convergence entre les États-Unis et les Européens.
04:44Mais il a parlé d'unité entre l'Ukraine et l'Europe.
04:48C'est-à-dire que cette unité qui existe entre Zelensky et les dirigeants européens,
04:54elle n'existe pas encore entre les États-Unis et l'Europe sur cette question de l'Ukraine.
04:58Donc, on n'y est pas. C'est pour ça que je dis que le pire a été évité.
05:03Mais les Européens sont très, très loin d'avoir obtenu ce qu'ils voulaient en allant à Washington ensemble.
05:11C'est tout de même une photo d'allié, pour ne pas dire, une photo de famille.
05:17Lieutenant Baum qu'on a vu cette nuit, Donald Trump, Volodymyr Zelensky, les Européens ensemble.
05:23Oui, mais je pense là aussi, comme Sylvie Kopenhauer vient de le dire,
05:28et ça a été dit par le président finlandais, Alexandre Stubb, qui était là,
05:33il a dit que c'est Team Europe et Team États-Unis aux côtés de l'Ukraine.
05:38Et donc, c'est vraiment ce sentiment. Il reste deux côtés de l'Atlantique.
05:43Ce n'est pas un front euro-atlantique commun ou euro-américain.
05:48Il y a la position américaine, qui est sensiblement plus à l'écoute des demandes russes
05:55que ne l'est la position européenne relativement unie dans le format qu'on a vu,
06:01ce qui n'était pas gagné.
06:03On a des dirigeants comme Madame Mélanie, par exemple,
06:05qui ont pu hésiter à certains moments.
06:09Et sur ce format de la question des garanties de sécurité,
06:12de la coalition des volontaires, on se souvient d'une Mélanie qui était très réticente.
06:18Là, on a effectivement sept Européens avec des profils différents
06:23qui apparaissent unis dans leur soutien à l'Ukraine aux côtés de Zelensky,
06:28qui viennent raffermir la main de Zelensky.
06:33Mais ils viennent bien dans une autre séquence que celle que les États-Unis ont enclenchée
06:38avec la Russie et chargent à Donald Trump d'essayer de rapprocher les positions
06:43ukraino-européennes d'un côté et russes, j'ose pas dire russes ou américaines de l'autre.
06:50On évite le pire, Claude Blanchemaison.
06:52Mais est-ce que les Européens ont obtenu ce qu'ils étaient venus chercher cette nuit à Washington ?
06:58On n'a pas parlé des territoires, ça n'a pas été abordé.
07:01D'éventuelles concessions territoriales de l'Ukraine
07:04dans la perspective d'un éventuel accord de paix,
07:07il a été question des garanties de sécurité hier soir.
07:11Et là encore, sans annonce très concrète ce matin.
07:13Tout s'est focalisé sur les garanties de sécurité à apporter à l'Ukraine
07:17après, encore une fois, la cessation du feu, du feu des canons,
07:23donc après un cessé le feu.
07:24Encore très hypothétique.
07:25Effectivement, il est exclu que des troupes françaises ou britanniques
07:29se trouvent confrontées à des troupes russes,
07:32en tout cas dans la conception que la France et la Grande-Bretagne ont
07:38de ces forces de réassurance qui sont faites uniquement pour dissuader la Russie,
07:43de lancer une attaque massive contre l'Ukraine après l'établissement de la paix.
07:49Donc ce n'est pas pour tout de suite.
07:51Et l'idée était en effet, ensuite, et je crois que c'est ça que Trump a utilisé,
07:57de dire à Zelensky, voilà, il y aura ces forces,
08:02cette garantie de sécurité donnée par un certain nombre de pays européens
08:05avec, dans le fond, une surgarantie américaine.
08:10C'était ça l'élément nouveau qui est apparu aussi au cours des derniers jours.
08:14Et ça va faire bouger d'autres Européens qui pourraient rejoindre l'idée d'une force de sécurité
08:19parce qu'ils attendaient qu'il y ait effectivement cette réassurance américaine.
08:24Donc ça, c'est très important.
08:26Mais c'était aussi dans l'esprit de Trump le moyen de faire accepter,
08:32peu ou prou, à Zelensky, l'idée du sacrifice sur les territoires.
08:37Bien sûr, pas la reconnaissance de l'annexion par la Russie
08:41parce que Trump avait largement entretenu quand même la confusion.
08:46Donc annexion, jamais, pas question de la reconnaître.
08:50D'ailleurs, même la Chine n'a pas reconnu l'annexion de la Crimée.
08:52Je ne vois pas pourquoi les Européens reconnaîtraient des annexions quelconques.
08:56Mais par contre, en effet, reconnaître la réalité militaire,
09:00c'est-à-dire que la Russie occupe et administre un certain nombre de territoires
09:04et qu'il va falloir le reconnaître dans un accord de cessez-le-feu
09:07et pas dans un accord de paix à ce stade.
09:09C'est une bonne ou une mauvaise chose que les territoires d'éventuelles concessions territoriales
09:14n'aient pas été évoqués cette nuit à Washington, Sylvie Kaufmann.
09:18Ça aurait pu mettre, vous le disiez bien, Zelensky, sous pression d'une certaine manière ?
09:23Oui, si c'était pour les évoquer de la manière dont Steve Witkoff, l'envoyé spécial de Trump,
09:29les a évoqués précédemment, et notamment après son entretien avec Poutine à Moscou,
09:34c'est une bonne chose parce que c'était vraiment un scénario catastrophique
09:38où l'Ukraine était totalement perdante.
09:41Après, je pense que...
09:42Abandonne le Donbass, si on les rappelle.
09:44Voilà, se retirer d'une partie du Donbass qui n'est pas encore occupée par la Russie.
09:50C'est vraiment assez absurde.
09:53Est-ce que vous pouvez nous remettre en tête la carte de l'Ukraine, de l'Est de l'Ukraine ?
09:56Oui, à la radio, c'est difficile, mais bon...
09:58Il faut imaginer dans l'Est...
09:59Voilà, il y a quatre régions de ce qu'on appelle les oblastes en Russie.
10:06Quatre régions frontalières dans lesquelles les forces russes avancent.
10:13L'une est pratiquement totalement occupée, c'est Luhansk.
10:17L'une est occupée... Donetsk est occupée à peu près aux trois quarts.
10:22Là, on parle du Donbass.
10:23Voilà, c'est le Donbass.
10:24Et c'est dans cette province, dans cette région de Donetsk,
10:27que Witkow proposait que les Ukrainiens se retirent de la partie
10:32qui n'est pas encore occupée par la Russie.
10:34Et puis, il y en a deux autres, Kherson et Zabrydja,
10:37qui sont aussi en partie occupés.
10:39Et donc, c'est une bonne chose.
10:41Je pense qu'on n'en ait pas parlé à ce stade-là.
10:43En même temps, ça veut dire aussi qu'on est vraiment tout à fait au juste au début du processus.
10:48Il y a deux choses, je voudrais souligner, que les Européens n'ont pas obtenues.
10:51La première chose, c'est le cessez-le-feu.
10:54Enfin, c'est la priorité d'un cessez-le-feu.
10:56Parce que le chancelier Merz et le président Macron l'ont dit très clairement devant Trump.
11:01Nous, les Européens et les Ukrainiens, on continue à considérer
11:04que c'est indispensable d'avoir un cessez-le-feu
11:07parce qu'on ne discute pas sous les bombes.
11:10Et on sait que Poutine a cette habitude de continuer à bombarder
11:14ou à avancer militairement tout en prétendant négocier.
11:17La deuxième chose qu'ils n'ont pas obtenue,
11:19c'est la participation des Européens à une négociation.
11:22C'est-à-dire qu'on continue à parler d'abord d'un sommet bilatéral,
11:26Zelensky-Poutine,
11:28et puis d'un sommet éventuellement trilatéral avec Trump.
11:32Mais le président Macron a bien dit qu'il souhaitait que ça se fasse à quatre,
11:38c'est-à-dire avec une représentation européenne.
11:40Et sur ce point-là, je n'ai pas l'impression qu'il y ait eu satisfaction.
11:43C'est sans doute ce qui ressort de plus concret dans cet échange élite.
11:46Oui, sur ce point, cessez-le-feu contre accord de paix, c'est très important.
11:50Et c'est la ligne de Poutine qui l'a emporté,
11:52de dire je veux aborder les causes profondes du conflit,
11:55je veux un accord de paix durable,
11:57et ça ne m'intéresse pas de faire un cessez-le-feu tout de suite.
12:00Derrière ça, ce qui se cache, c'est la volonté de la Russie de gagner du temps,
12:04de faire traîner en longueur effectivement le processus,
12:07et de pouvoir continuer à batailler,
12:10et à bénéficier de ce qu'il considère être un avantage militaire sur le terrain,
12:15au moins jusqu'à la fin de l'année 2025,
12:19où il voit l'Ukraine en position d'infériorité numérique,
12:23et c'est le cas depuis longtemps avec une crise des effectifs qu'il y a en Ukraine,
12:28qui n'a pas d'équivalent côté russe.
12:31La Russie a réussi à recruter 400 000 soldats sur la seule année 2024,
12:38et 2025 s'annonce tout aussi bien,
12:41avec un grand fort de primes et de recrutement,
12:47avec donc une supériorité numérique,
12:48quasiment 600 000 soldats russes aujourd'hui sur le territoire ukrainien,
12:53face à peut-être la moitié seulement du côté ukrainien,
12:59avec des frappes systématiques sur toute la profondeur du territoire ukrainien,
13:04à un moment où la défense antiaérienne de l'Ukraine est en pénurie,
13:09en pénurie d'armes, en pénurie de missiles d'interception,
13:12et donc Poutine identifie une fenêtre de supériorité pour son armée,
13:19et tout ce qui est pris, est pris, n'est plus à prendre si je puis dire,
13:23le reste est négociable pour Poutine,
13:25et donc finalement faire basculer la discussion du cessez-le-feu
13:28à une discussion sur un hypothétique accord de paix,
13:31avec des clauses totalement inacceptables aujourd'hui politiquement,
13:34comme la cession de territoire,
13:36en fait ça veut dire,
13:37je ne suis pas intéressé à cesser le combat maintenant,
13:40je veux continuer à utiliser ma supériorité, mon avantage,
13:45à pousser mon avantage,
13:46et on verra où on en sera peut-être cet hiver ou plus tard.
13:49Alors est-ce qu'il faut croire à cette rencontre
13:52dont on nous dit qu'elle est actée,
13:55c'est ce qu'a laissé entendre Emmanuel Macron,
13:58le chancelier allemand aussi cette nuit,
14:01Friedrich Merz,
14:01entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky,
14:05d'ici à deux semaines,
14:07Claude Blanchemaison ce serait...
14:08C'est vrai, Trump semble y croire,
14:11et il est à peu près le seul,
14:13effectivement,
14:15puisqu'on a toutes les raisons de penser
14:17que Poutine n'acceptera pas de rencontrer Zelensky
14:20tant qu'il n'a pas obtenu des concessions de substances
14:24sur le fond,
14:25et notamment sur la question territoriale.
14:29Alors c'est là où, effectivement,
14:31dans ces discussions d'hier,
14:33il y a peut-être en partie un jeu de dupe,
14:35parce que Trump, qui est sorti pour appeler son ami Poutine,
14:39effectivement,
14:40à chaque fois revient en disant
14:42« Moi, je suis persuadé qu'il veut négocier
14:46et qu'il est d'accord pour négocier vers la paix,
14:49et les Européens sont d'un grand scepticisme. »
14:51Emmanuel Macron a dit
14:53« Je suis persuadé que Poutine veut la guerre et pas la paix. »
14:57Donc il y a une contradiction, effectivement.
14:58« Les faits disent les intentions »,
15:00a dit le président français hier soir.
15:03La Russie, d'ailleurs, continue de bombarder dans le pays.
15:05Sylvie Kaufmann, vous y croyez,
15:07à cette rencontre entre les deux dirigeants ?
15:09Alors d'abord, je note que dans le compte-rendu
15:11de l'entretien téléphonique Trump-Poutine,
15:14Moscou n'a pas fait état de ce sommet,
15:17de la possibilité de ce sommet.
15:19Ils ont dit qu'ils allaient élever les entretiens
15:23à un niveau supérieur,
15:25mais ils n'ont pas parlé d'une rencontre Zelensky-Poutine.
15:30On sait que Poutine est très réticent
15:33à rencontrer Zelensky depuis longtemps.
15:35Il ne l'a vu qu'une seule fois, en réalité.
15:38C'est en 2019, à Paris,
15:40dans le cadre de ce format normandique qui n'existe plus.
15:43Et la rencontre s'est mal passée.
15:44C'était avec Angela Merkel et François Hollande à l'époque.
15:47Et ça s'est mal passé.
15:48Zelensky ne s'est pas comporté comme c'était prévu
15:51vis-à-vis de Poutine.
15:53Et Poutine était furieux.
15:56Par ailleurs, il conteste la légitimité de Zelensky.
16:00De toute façon, il conteste même la légitimité de l'Ukraine.
16:02Donc, ça peut se produire.
16:05Mais à ce stade-là, franchement,
16:07j'aurais du mal à être très optimiste.
16:10Et dans les délais qu'il nous annonce,
16:12d'ici deux semaines, Elitenenborg ?
16:14Ça semble très improbable.
16:16Même si ça arrivait,
16:19parce que pression américaine énorme pour avoir cette rencontre.
16:24Tout est possible pour faire plaisir aux Américains d'une certaine manière.
16:28Mais le résultat, à mon avis,
16:30il a très peu de chances de déboucher.
16:33Donc, une rencontre pour rien.
16:34On en a eu beaucoup ces derniers temps autour de l'Ukraine.
16:37Plusieurs questions déjà au standard.
16:41Marie vous demande, et c'est une question peut-être que je vous adresserai à Elitenenborg,
16:45avec l'argent demandé par Donald Trump pour les armes de défense de l'Ukraine,
16:49est-ce qu'on ne pourrait pas assurer la sécurité de l'Ukraine avec des armes européennes ?
16:53Eh bien, c'est le sujet qui se pose depuis très longtemps.
16:56Si, mais pas tout de suite.
16:58C'est une question de tempo, de timing.
17:00C'est-à-dire qu'aujourd'hui, vous avez une base industrielle et technologique de défense en Europe,
17:06qui produit, qui aide beaucoup l'Ukraine.
17:08notamment, si vous regardez du côté de l'Allemagne,
17:13du côté même de ce qui est produit sur d'autres territoires,
17:17y compris même un peu en France.
17:20Mais, sur un certain nombre de segments d'armement,
17:24la capacité de production européenne est faible ou inexistante.
17:29Je pense du côté des missiles de défense sol-air, justement, par exemple.
17:34Aujourd'hui, on n'a pas la capacité en Europe de répondre aux besoins ukrainiens.
17:42C'est très clair.
17:43Ou, en tout cas, pas tout de suite.
17:45Si on investissait aujourd'hui, il faut produire, comme toujours.
17:48Le constat, il est le même que depuis 2022.
17:51Simplement, l'investissement en capital n'a pas été fait.
17:55Il a été fait sur quelques segments.
17:56Je pense aux munitions d'artillerie, par exemple,
17:58où ça a été fait.
17:59Aujourd'hui, globalement, l'Europe devrait être à peu près capable
18:04de soutenir le besoin ukrainien,
18:07mais sur d'autres segments, des munitions complexes.
18:09Aujourd'hui, il n'y a pas d'autres solutions, malheureusement,
18:12mais parce que les investissements n'ont pas été faits à la hauteur.
18:15Et pourtant, ce n'est pas faute de l'avoir dit depuis trois ans,
18:18trois ans et demi.
18:19Et donc, oui, il y a cette nécessité, malheureusement, américaine.
18:24Le tout est d'être capable de l'échelonner,
18:27de façon à croiser, pour qu'au bout d'un certain temps,
18:30parce qu'on en a encore pour, malheureusement, très longtemps,
18:32sans doute, sous une forme ou une autre de situation de belligérance,
18:37que l'Europe soit capable d'assurer, non pas la sécurité de l'Ukraine,
18:40mais sa sécurité, Ukraine incluse,
18:43sans avoir une dépendance excessive vis-à-vis des Etats-Unis.
18:46Sur cette question cruciale des garanties de sécurité,
18:49Pierre a une question à vous poser au Standard.
18:52Bonjour, Pierre.
18:53Oui, bonjour.
18:55Alors, comment est-ce qu'on peut imaginer
18:56que des troupes européennes puissent garantir la sécurité de l'Ukraine,
19:00alors que ces troupes passives, style Monuc en Afrique centrale, par exemple,
19:06auront devant elles des forces guerrières dans les zones occupées
19:09et qui seront évidemment surarmées ?
19:11C'est de l'utopie.
19:13Qu'est-ce que vous en pensez ?
19:14La question que pose Pierre, c'est sur cette force de réassurance.
19:17Comment ces garanties de sécurité seraient mises en place ?
19:20Selon quelle modalité ?
19:21C'est toute la discussion, pour l'instant,
19:24c'est sur quoi travaille cette fameuse coalition des volontaires
19:27qui a été mise sur pied par Londres et Paris.
19:31On n'y est pas.
19:33On aurait pu espérer un engagement plus fort sur cette question, cette nuit.
19:38Oui, enfin, ça c'est d'abord une initiative européenne.
19:41Et donc, toute l'idée, toute cette discussion sur les garanties de sécurité
19:45qu'apporterait cette coalition des volontaires,
19:47c'est justement sur quel appui américain les Européens peuvent compter.
19:53Sur lequel Trump a été un peu plus optimiste dans ces dernières prises de parole qu'avant.
19:58Oui, ça aussi, il y a aussi une ambiguïté.
19:59C'est-à-dire que dans un premier temps, Trump, y compris à Anchorage d'ailleurs,
20:04Trump a dit « Nous sommes prêts à participer à ces garanties de sécurité »,
20:11ce qui était nouveau, ce qui était donc un progrès.
20:14Hier, dans le bureau Oval, avant le début des discussions à huis clos,
20:19il a aussi été assez positif là-dessus.
20:21Et puis après, sur son réseau social, il a dit
20:24« On envisage des garanties de sécurité européennes en coordination avec les États-Unis ».
20:32Alors voilà, qu'est-ce que ça veut dire « en coordination » ?
20:34Et sur la question des troupes que pose Pierre, Elie Tenenbaum ?
20:37Oui, moi je ne pense pas qu'il faille dévaloriser les forces militaires européennes
20:42qui pourraient éventuellement être déployées.
20:45Des pays comme la France, comme le Royaume-Uni et même d'autres pays européens,
20:52on pourrait tout à fait déployer des forces mobiles, des capacités de défense aérienne.
20:59Jusque sur la ligne de front ?
21:00Pas forcément jusque sur la ligne de front.
21:02Si le but est de dissuader la Russie, de refaire une grande percée,
21:07on pourrait tout à fait, ceux qui vont tenir la ligne de front, ça restera les Ukrainiens.
21:11Et vous avez aujourd'hui une armée ukrainienne qui seule arrive malgré tout à tenir tête à la Russie.
21:16C'est une question très sensible.
21:17Et donc finalement, en déployant une force de réassurance dissuasive vis-à-vis de la Russie,
21:23avec des règles d'engagement qui permettent tout à fait de faire face et de combler une éventuelle rupture du front,
21:30je ne pense pas qu'il faille dévaloriser les capacités militaires européennes.
21:34Question très sensible que celle-ci, Claude Blanche-Maison.
21:36L'idée, c'est que cette force de réassurance serait exclusivement dissuasive.
21:42C'est-à-dire qu'elle serait très en arrière du front.
21:45Elle défendrait par exemple des sites urbains ou des sites stratégiques.
21:49Par exemple Odessa, par exemple la ville d'Odessa.
21:52On aurait peut-être une division française, qui sait, mais qui serait destinée à dissuader en effet d'une nouvelle attaque massive de la part des Russes.
22:02Mais en aucun cas, sa mission ne serait de gérer le cessez-le-feu et d'intervenir auprès de la ligne de cessez-le-feu.
22:08Et il y a toujours cette lacune dans toutes les réflexions.
22:11Moi, à mon sens, depuis le début, c'est qu'on ne veut pas s'occuper de ce sujet.
22:15C'est un cessez-le-feu politique, mythique.
22:18Et on dit, mais c'est effectivement les Ukrainiens qui se défendront du côté ukrainien.
22:24Et effectivement, un cessez-le-feu, c'est déjà suffisamment difficile à faire fonctionner.
22:29Comment le faire fonctionner s'il n'y a pas de force neutre pour le gérer, pour l'administrer ?
22:35Surtout qu'il a une... le front a une longueur de 1200 kilomètres.
22:39En plus, personne ne dit que se passera-t-il sur la mer Noire, qu'actuellement, les Ukrainiens contrôlent.
22:45Alors, comment avancer ce matin, Sylvie Kaufmann ?
22:48Que retient-on de la nuit et que dit-on pour les jours, les semaines qui viennent ?
22:54La mobilisation, la diplomatie, peut-elle faire quelque chose ?
22:59Alors, je pense que les Européens, d'abord, doivent continuer à travailler de la manière dont ils l'ont fait.
23:04Ça, c'est vrai, c'est très important.
23:05C'est bien qu'ils soient allés à Washington, même si les résultats ne sont pas spectaculaires, c'est le moins qu'on puisse dire.
23:13C'est tout de même un moment important du conflit.
23:15Oui, je pense que c'est important qu'ils y soient allés et qu'ils y soient allés en groupe, comme ça.
23:20Je crois que ça, c'est une initiative qui sera marquante.
23:24Après, vraiment, la balle est dans le camp des Américains aussi et des Russes, bien entendu.
23:31Voir, est-ce que ce sommet, est-ce que cette rencontre Zelensky-Poutine va se produire ou non ?
23:36Est-ce que les États-Unis sont prêts à faire usage de sanctions à nouveau ?
23:41Enfin, c'est ces sanctions dont Trump menace la Russie depuis des mois et qui ne se produisent pas.
23:48Des sanctions américaines.
23:49Américaines, voilà.
23:50Est-ce que cette pression des États-Unis peut se produire ou non ?
23:53Ça, c'est très important.
23:54L'enjeu des sanctions, Claude Blanche-Maison, en un mot.
23:57Écoutez, les sanctions européennes commencent à avoir de l'effet.
24:03Bruxelles a préparé un 19e paquet de sanctions.
24:08La question, d'ailleurs, va se poser.
24:10Est-ce qu'on les met en œuvre ou pas ?
24:14Et de futures menaces de sanctions américaines.
24:16Je pense qu'il faudrait les mettre en œuvre parce qu'il faut continuer à exercer une pression sur la Russie.
24:20Et les milieux économiques de Russie commencent à être très gênés par les sanctions.
24:25Alors, ils ne peuvent pas le dire parce que Poutine ne veut pas qu'on le dise.
24:29Mais c'est vrai que dans un pays où le taux d'intérêt est supérieur à 20%, plus rien ne se passe.
24:34Vladimir Poutine n'est pas en situation si favorable dans son pays.
24:38Elit et Nangom, un dernier mot.
24:39Juste pour terminer la question de la prise de risque des Européens.
24:43Les Européens ne parviendront pas à sécuriser l'Ukraine s'il n'y a pas un minimum de risque politique qui est assumé de leur côté.
24:55Et pour l'instant, ils ont été quand même très pusillanimes.
24:57Merci beaucoup à tous les trois d'avoir été avec nous ce matin.
25:00Elie Tenenbaum avec nous en studio.
25:05Sylvie Kaufmann, journaliste et éditorialiste au Monde.
25:07Claude Blanche, maison ancienne ambassadeur de France en Russie.
25:11Je rappelle votre dernier livre, Parcours d'un fragment aventureux.
25:14C'est paru aux éditions Temporis.
25:16Merci à tous les trois d'avoir été ce matin sur Inter.
25:18Merci à tous les trois d'avoir été ce matin.
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