Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 2 ans
Ancien ambassadeur de la Palestine auprès de l'Unesco, Elias Sanbar est le commissaire de l'exposition "Ce que la Palestine apporte au monde", présentée à l'Institut du Monde Arabe jusqu'à l'automne prochain. Il est l'invité de 9H10.

Retrouvez "L'invité de Sonia Devillers" sur
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00 Le 7 9 30 sur France Inter.
00:06 Il est 9h09, Sonia De Villers, votre invitée préside à la destinée d'un musée en exil.
00:12 C'est beau, c'est fort et c'est puissant un musée en exil.
00:15 Bonjour Elias Samber.
00:16 Bonjour.
00:17 Dans l'histoire des conflits tout autour du monde, il y en a eu plusieurs des musées
00:22 en exil.
00:23 Il y a eu un musée chilien en exil.
00:25 Il y a eu un musée d'Afrique du Sud en exil.
00:28 Il y a eu un musée de Sarajevo en exil.
00:31 Il y a donc un musée de la Palestine en exil.
00:34 Effectivement, c'est notre lignage extrêmement honorable et c'est un projet qui est pour
00:40 nous extrêmement émouvant, il faut le dire.
00:43 Mais c'est surtout un projet qui dit que souvent les ambitions, les paris qui apparaissent
00:51 comme relevant d'une forme de rêverie sympathique, mais une rêverie, sont ceux qui aboutissent.
00:56 Le musée de Chili, le musée Salvador Allende n'a abouti que grâce à la solidarité des
01:04 artistes puisque vous savez, ces musées sont basés sur un principe, tout artiste solidaire
01:08 d'une cause.
01:09 Là-bas c'était contre la dictature, en Afrique du Sud contre l'apartheid, en Palestine
01:13 contre l'occupation.
01:14 Ces musées apparaissent toujours au début parce qu'ils sont lancés au moment où la
01:21 dictature est omniprésente, au moment où Mandela est en prison et nous sommes toujours
01:25 sous occupation.
01:26 Tout le monde s'est dit "vous êtes très très sympathique" mais bon, eh bien, ils
01:30 aboutissent.
01:31 - Donc des artistes donnent des œuvres, vous les collectez et ensuite il faut un musée
01:39 qui vous accueille, vous le musée imaginaire, vous le musée qui n'êtes pas implanté sur
01:44 votre terre.
01:45 - Là je dois dire une chose qui est fondamentale.
01:47 Dans chaque cas, il y a eu des miracles, des miracles d'hospitalité.
01:53 Le musée palestinien n'aurait pas existé sans l'accueil de Jacques Lang.
01:58 - A l'Institut du monde arabe à Paris.
02:01 - Absolument, nous a accueilli de façon formidable.
02:03 C'est là que les collections sont entreposées.
02:05 Nous sommes à plus de 420 pièces.
02:08 Depuis que nous avons lancé le projet de cette exposition, j'ai 28 nouvelles donations
02:12 qui viennent d'arriver.
02:13 Ça n'arrête pas.
02:14 Et vraiment, il y a eu un accueil fantastique et qui s'est prolongé après avec cette idée
02:20 de faire cette exposition.
02:21 Alors, ce que la Palestine apporte au monde, ce n'est pas une exposition, c'est quatre
02:28 expositions et une très grosse revue, presque un livre qui est publié en coédition avec
02:36 les éditions du Seuil.
02:38 Quatre expositions.
02:39 On dit tous les jours ce qu'on enlève à la Palestine, ce que la Palestine endure,
02:50 ce qui fait souffrir la Palestine, ce qu'on lui retire de son territoire et de sa vivacité.
02:55 Et là, vous dites l'inverse.
02:56 C'est une sorte de renversement.
02:58 Ce que la Palestine apporte au monde.
03:00 - Vous savez, nous ne sommes pas dans le "où" mais dans le "et", dans le "et".
03:04 Tout ce que vous dites est la réalité, hélas.
03:08 Mais nous abordons un autre aspect qui est fondamental, que nous n'avons pas toujours
03:13 eu l'occasion de montrer.
03:15 Il faut à tout prix que les gens sachent que parallèlement à ce conflit qui noie
03:19 tout, qui couvre tout, qui désespère, il y a une obsession culturelle palestinienne
03:26 qui n'a jamais arrêté de se manifester.
03:29 Elle ne date pas du drame de 48.
03:31 Elle commence bien avant.
03:33 C'est un des attributs de la Terre Sainte dont nous sommes les enfants.
03:36 Et je dis les enfants, quelles que soient nos religions ou même quand nous n'avons
03:41 pas de religion, c'est notre lieu.
03:43 Nous sommes les enfants de cette terre qui est très particulière, qui a toujours été
03:46 plurielle et qui a toujours été avide de connaissances.
03:50 - Un petit mot justement parce que dans cette revue, vous écrivez un long texte sur l'identité
03:55 palestinienne.
03:56 Et précisément, vous expliquez très bien en quoi la Palestine est une terre de connaissances
04:00 et de savoirs, une terre de cultures depuis le XIXe siècle.
04:05 - Et vous savez, nous n'avons pas de trésors au sens matériel.
04:09 Nous n'avons pas de sous-sol pétrolier, nous n'avons pas d'agriculture gigantesque.
04:13 Notre démographie est minime.
04:16 En 1948, quand le pays est englouti, nous sommes 1,4 million de personnes.
04:21 Et pourtant, il y a une résonance planétaire.
04:24 - Parce qu'il y a l'histoire de ces missions étrangères.
04:27 - Entre autres, les missions étrangères ont développé le plurilinguisme.
04:32 Parce que vous savez, chaque fois que des curés arrivaient ou des religieuses, ils
04:36 fondaient une école, mais dans leur langue.
04:38 C'est comme ça que vous avez des Palestiniens qui très tôt, on parlait espagnol, russe,
04:43 allemand, anglais, français et ainsi de suite, et italien.
04:48 Toutes ces missions étaient là.
04:49 Mais ce n'est pas tout.
04:50 Il y a une obsession culturelle.
04:52 Vous savez, tout le monde, quand vous parlez des Palestiniens, vous dira "c'est l'élite
04:57 culturelle arabe".
04:58 Mais personne ne dira en quoi.
05:00 En quoi c'est l'élite culturelle arabe ? Et tout le monde entend ces mots comme une
05:05 forme de compétition, qui a plus de savoir.
05:10 C'est une obsession.
05:11 C'est une obsession réelle.
05:13 Et on me dit toujours "arrête de parler d'obsession, c'est pathologique".
05:16 Ça n'est pas une pathologie, c'est une obsession formidable.
05:19 * Extrait de la chanson * On va se promener très rapidement dans ces quatre expositions.
05:40 Au contraire, j'ai envie que vous nous racontiez, parce qu'on fait de la radio et qu'on ne peut
05:46 pas donner à voir.
05:47 Alors on n'a que des mots.
05:48 Alors les mots, il ne faut pas hésiter à les utiliser.
05:50 Il y a quelque chose d'absolument passionnant, c'est ce dialogue photographique.
05:55 Je précise qu'il y a 100 bars que vous êtes nés en Palestine, que vous avez étudié
05:59 au Liban, que vous avez enseigné en France, en Angleterre, aux Etats-Unis, que vous avez
06:04 publié plusieurs ouvrages sur la photographie.
06:07 Ce dialogue entre les photos de la fin du 19e, du début du 20e et les photos d'aujourd'hui
06:13 est absolument passionnant.
06:14 Et ces textes que vous produisez sur le danger d'un âge d'or palestinien, le danger d'un
06:24 passé idéalisé, le danger de ces polychromes magnifiques, de ces paysages d'antan et de
06:31 la nostalgie qui va avec.
06:33 J'ai toujours eu une grande méfiance vis-à-vis des origines pures et magnifiques.
06:40 Sans blague.
06:41 Et j'ai toujours eu la conviction, et je peux vous montrer en quoi elle est fondée,
06:47 sur le fait que toutes ces idées des origines font le lit des dictatures et de l'exclusion.
06:55 Cette recherche d'une pureté originelle qui n'a jamais existé pour personne et qui
07:01 est toujours brandie comme la justification pour nettoyer dans le temps présent, pour
07:06 retrouver soi-disant un état antérieur qui était idyllique.
07:10 - C'est ça, une archéologie dévoyée, écrivez-vous.
07:13 Et si on ramène cette question-là, qui est pour le coup universelle, qui est mondiale,
07:22 si on la ramène à l'histoire de la Palestine, on voit bien aussi dans quoi cela peut entraîner
07:28 les Juifs et dans quoi cela peut entraîner les Arabes.
07:31 C'est-à-dire les Palestiniens, nous étions là avant.
07:34 Il y a cette folie de l'antériorité qui n'est pas simplement une quête archéologique.
07:41 D'ailleurs, le pi a toujours été pluriel, même au temps les plus reculé.
07:45 Il n'y a jamais eu une seule couleur dans ce pays.
07:47 Mais c'est surtout le fait qu'en se fondant sur de pseudo-antériorité, arrive un deuxième
07:53 postulat.
07:54 Puisque j'étais là avant toi, c'est que tu n'as pas le droit d'être là aujourd'hui.
07:57 Et donc ça justifie un peu l'expulsion.
07:59 Mais ce qui est très important dans le cas de la Palestine, c'est que nous sommes dans
08:06 une situation, et c'est le propre de cette Terre Sainte, y compris pour les gens qui
08:09 sont palestiniens et pas croyants.
08:11 Ça existe aussi.
08:12 Donc ce n'est pas une question de théologie, de dogme religieux.
08:16 C'est une question de nature plurielle d'un lieu.
08:19 Ce lieu ne peut pas exister s'il n'est pas pluriel.
08:21 La Terre restera là.
08:23 Mais s'il devient monochrome, cette Palestine que nous connaissons depuis des siècles disparaîtra.
08:29 Il y aura toujours un lieu qui s'appellera Palestine ou Israël ou ce que vous voulez.
08:32 Mais c'est d'autant plus complexe, Elia Sambar, de vouloir montrer une Palestine d'aujourd'hui,
08:37 une Palestine plurielle, une Palestine vivante et non pas une Palestine enquistée dans son
08:42 passé idéalisé, que la Palestine est une Terre Sainte.
08:46 Et ça c'est un poids très lourd à porter.
08:48 Et vous le dites bien, il ne suffit pas d'avoir comme en France ou au Portugal des lieux saints
08:52 pour être décrété Terre Sainte.
08:54 Il faut que l'intégralité de la Terre soit sainte, qu'elle soit le dépositaire des
08:58 trois monothéismes.
08:59 C'est le seul lieu au monde.
09:00 C'est très lourd à porter.
09:02 C'est très lourd à porter, mais ça peut être une formidable passerelle de dépassement
09:07 de soi.
09:08 Si vous comprenez bien que vous êtes, quelle que soit votre religion, ou même si vous
09:13 n'en avez pas, mais que vous vous relevez d'une pluralité, non pas du chose monolithique,
09:18 à ce moment vous êtes dans une ère culturelle magnifique, l'ouverture, une renaissance,
09:24 la renaissance au plein sens du terme.
09:26 Et c'est ce que j'ai essayé de montrer un peu.
09:28 Vous savez ce projet de musée, Lang me le demande depuis des années.
09:33 Quand est-ce qu'on va faire un événement sur la Palestine ?
09:35 Mais je dois lui reconnaître, moi j'étais noyé et je continue dans le conflit.
09:39 Mais c'est vrai que cette obsession que lui a eue d'aborder maintenant cette sphère
09:46 de la culture, le fait d'avoir mis à disposition quatre espaces de l'Institut du Monde Arabe,
09:51 les équipes culturelles, toute l'équipe du musée, sans lesquelles on n'aurait pas
09:55 pu réaliser ce travail, m'a permis maintenant d'aller sur quatre territoires que d'habitude
10:01 que je connais, dont je peux parler, mais que je n'ai jamais pu montrer.
10:04 Et quand on me dit c'est quoi ce titre, ce que la Palestine apporte, je dis "Venez
10:09 voir, je peux vous en parler, mais venez voir ce que j'apporte".
10:12 - Venez voir.
10:13 Et pour ceux qui n'auraient pas la chance de passer par Paris, je précise que la revue
10:18 très épaisse dont je viens de parler avec des contributions d'intellectuels du monde
10:21 entier, des Français, des Américains, des Palestiniens, etc.
10:25 Cette revue s'appelle "Araborama" et qu'elle est coéditée par l'IMA et par Le Seuil.
10:31 - Vous savez ce qui est intéressant dans cette revue ?
10:34 Puisqu'on parlait de pluriculturel, il y a beaucoup de textes contradictoires dans la
10:40 revue.
10:41 - Absolument.
10:42 - Et le sommaire n'est pas monolithique non plus.
10:44 - Aucun non.
10:45 - Et ça c'est très très bien.
10:47 Ça nous change de ces discours absolus qui sont en train d'empoisonner le monde.
10:54 Ces histoires de pureté, de cohésion factice, de tribu.
10:58 - À qui dites-vous nos hommes politiques vont se prosterner devant le Mont-Saint-Michel
11:03 à la recherche de la France des cathédrales ?
11:04 Allez, il est 9h20, vous écoutez France Inter, Elias Sambar est mon invité.
11:08 On va partir avec vous à la rencontre d'un très grand écrivain français, Jean Genet.
11:13 - Je suis un peu en retard.
11:22 - C'est bon, on va y arriver.
11:33 - C'est bon, on va y arriver.
11:41 - C'est bon, on va y arriver.
11:52 - C'est bon, on va y arriver.
12:05 - C'est bon, on va y arriver.
12:32 - C'est bon, on va y arriver.
12:46 - C'est bon, on va y arriver.
13:01 - C'est bon, on va y arriver.
13:14 - C'est bon, on va y arriver.
13:27 - Oliver Syme chante "Idius" et face à moi il y a Elias Sambar, intellectuel palestinien,
13:41 ancien représentant de la Palestine auprès de l'UNESCO.
13:44 Il y a quatre salles à l'Institut du Monde Arabe.
13:47 On met un pied dans chacune d'elles et ensuite on fonce rencontrer Jean Genet.
13:53 Première salle.
13:54 La première salle est consacrée aux arts plastiques.
13:57 Elle expose une partie de la collection du futur musée national.
14:01 Très peu, 20%.
14:03 La collection devient énorme comme je vous le disais.
14:06 C'est un principe qui est permanent dans toutes les salles.
14:11 En vis-à-vis avec des éléments de la collection de l'Institut du Monde Arabe qui portent sur
14:16 la Palestine.
14:17 Donc on est tout le temps dans l'idée du rapport.
14:19 Deuxième salle.
14:20 La deuxième salle est consacrée au poème et à la poésie à sa place.
14:25 Mais plutôt que de montrer des couvertures de recueils comme on fait d'habitude ou des
14:30 manuscrits, je projette un récital de Mahmoud Darwish qui déclame un poème épique.
14:36 - Mahmoud Darwish c'est un immense poète palestinien qui est mort il y a quelques années,
14:40 que vous avez traduit en français.
14:42 Et le poème en question, il fait presque 60 pages.
14:46 - Le poème est un poème épique et nous projetons la déclamation de Darwish intégrale.
14:52 Il est en état second.
14:53 Nous sommes à quelques semaines après le massacre de Sabra et Châtilla.
14:58 Et là encore je vous parlais des rapports.
15:00 - C'est le massacre des camps de réfugiés palestiniens au Liban.
15:03 - Et ce poème résonne en écho avec le texte dont nous allons parler de Jean Genet, "Quatre
15:09 heures à Châtilla", sur le même drame.
15:10 Et là on est en présence d'une voix.
15:13 C'est-à-dire la beauté de la voix du poème.
15:16 Troisième espace, l'image photographique.
15:19 Une Palestine fantasmée, celle de la photographie du 19ème qui est complètement orientalisante.
15:27 Et en face, de nouveau en vis-à-vis, l'incroyable créativité actuelle d'une jeune génération
15:34 de photographes palestiniens qui font des merveilles.
15:36 Des photos très belles, très drôles, avec beaucoup d'autodérision.
15:40 Et vous savez, c'est une forme supérieure de l'humour, l'autodérision.
15:43 Et la quatrième, c'est Jean Genet.
15:46 - Jean Genet.
15:47 - Politique et engagement.
15:48 - Jean Genet, avant de mourir, a donné à son avocat Roland Dumas deux valises.
15:53 Je les ai vues, je ne m'attendais pas à ça.
15:55 Elles sont toutes petites, les valises.
15:57 Jean Genet avait décidé qu'il n'écrierait plus.
15:59 Et puis il a été rattrapé par une folie, par une fièvre, par une obsession d'écriture.
16:05 Il s'est mis à gribouiller sur des petits morceaux de journaux, sur des tickets de caisse,
16:11 sur n'importe quoi, sur ce qu'il vit.
16:13 Et là, il y a quelque chose qui est né.
16:15 Il y a plusieurs textes qui sont nés.
16:18 On écoute l'extrait d'un texte très important qui s'appelle « Quatre heures à Châtilla »
16:23 que vous avez publié il y a 100 bars.
16:25 « J'avais passé quatre heures à Châtilla.
16:28 Il restait dans ma mémoire environ quarante cadavres.
16:31 Tous, je dis bien tous, avaient été torturés probablement dans l'ivresse, dans les chants,
16:41 les rites, l'odeur de la poudre et déjà de la charogne.
16:45 Sans doute, j'étais seul, je veux dire seul Européen, avec quelques vieilles femmes
16:51 palestiniennes s'accrochant encore à un chiffon blanc déchiré, avec quelques jeunes
16:56 fédahines sans armes.
16:57 Mais si ces cinq ou six êtres humains n'avaient pas été là et que j'ai découvert cette
17:02 ville abattue, les Palestiniens horizontaux, noirs et gonflés, je serais devenu fou.
17:09 Où l'ai-je été ? »
17:11 Alors ce n'est pas la voix de Jean Genet, c'est une lecture d'un acteur qui s'appelle
17:17 Michel Hermont.
17:18 Jean Genet, c'est un grand dramaturge, un grand romancier français, auteur de Notre-Dame
17:23 des Fleurs, auteur des Bonnes par exemple, cette pièce de théâtre célèbre.
17:27 Jean Genet rencontre la cause palestinienne quand et comment ?
17:31 Jean Genet rencontre la cause palestinienne par une relation exceptionnelle avec une femme
17:38 qui est une femme exceptionnelle qui est Leïla Chahide.
17:41 Leïla faisait partie de la rédaction de la revue palestinienne que j'animais à l'époque.
17:46 Leïla Chahide est palestinienne aussi.
17:48 Leïla a été ensuite une très grande diplomate palestinienne.
17:52 Il y a une relation magnifique qui a fait que… Il y avait une relation vis-à-vis de
17:59 la Palestine chez Genet, mais là elle a été concrétisée dans cette relation et Leïla
18:05 l'a accompagnée jusqu'à sa mort.
18:07 Ce qui est très beau dans cet espace de Genet, vous avez d'une part l'immense écrivain
18:14 et ça ce n'est pas la Palestine qui a fait de Genet l'immense écrivain.
18:18 Mais vous avez également avec cet immense un autre volet de cet homme qui est une indéfectible
18:25 amitié.
18:26 Et cette indéfectible amitié se résume en quelques mots.
18:29 À sa mort, Albert Dichy qui est le commissaire de l'espace Genet, m'avait envoyé un
18:38 papier déchiré dans un petit carnet à ressorts comme on les élève dans les écoles sur lequel
18:45 Jean avait écrit, je connaissais son écriture, « On me dit que j'aide les Palestiniens,
18:50 quelles sottises ils m'ont aidé à vivre ».
18:52 Et il y a un autre passage où cet homme qui était, Rimbaud était très important
19:00 aussi dans sa tête, c'est-à-dire cet éternel vagabond, dit que quand il arrive en janvier
19:08 71 à Arman, c'est son premier séjour avec les Palestiniens dans les camps de réfugiés,
19:15 ils disent en substance « je ne saurais pas l'expliquer, mais je me suis immédiatement
19:22 senti chez moi ».
19:23 Alors c'est ce chez moi qui a été une chose très très forte dans la relation.
19:29 Et d'ailleurs il me disait souvent « tu sais quand vous aurez un Etat, que vous serez
19:32 un peuple norma, vous ne m'intéresserez plus ».
19:35 C'était un lieu de lutte, c'était un lieu de résistance.
19:39 C'est surtout un lieu qui est hors du temps.
19:42 Et je pense que toute sa vie il a essayé d'aller vers ce lieu et tout d'un coup
19:47 il l'a trouvé avec un lieu anonyme.
19:50 Parce que anonyme pas pour nous, mais personne ne savait qui était Jean Genet.
19:54 Moi je me souviens, il l'appelait « le vieux qui dort très tôt ».
19:56 Il dormait toujours très très tôt.
19:58 Il n'a jamais été abordé comme un immense écrivain qu'il est.
20:03 Et ce qui est très beau, ce qui est le plus émouvant dans cette histoire, et là on va
20:07 voir énormément d'éléments de documents, de manuscrits.
20:10 C'est la Palestine, non pas qui fait de lui un écrivain, mais qui le sort de son
20:17 long silence d'écriture.
20:18 C'est ça, il avait promis qu'il n'écrirait plus et puis ça l'a rattrapé.
20:22 Et ça se déclenche là, dans une tragédie, et elle fait écho au très beau poème de
20:27 Darwish qui s'appelle « Éloge de l'ombre haute ».
20:30 Et les deux sont secoués, mais bouleversés par la même tragédie.
20:35 Sabra et Chatila.
20:36 Merci Elias Sambar.
20:38 Merci beaucoup.
20:39 La Palestine apporte au monde, c'est donc à l'Institut du monde arabe.
20:42 Vous êtes sur France Inter, il est presque 9h30.
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations