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00:00La place centrale des Omeyades, épicentre des festivités ce lundi en Syrie.
00:04Cette place si emblématique où les Syriens avaient laissé éclater leur joie il y a pile un an.
00:08On apprenait médusé le départ précipité du clan Assad.
00:1250 ans de règne de terreur, emporté par l'ancien djihadiste Mohamed Al-Joulani.
00:18Cet homme est aujourd'hui au pouvoir, on l'appelle Al-Shara.
00:22Il prêche en faveur de l'unité du pays.
00:25C'est sûrement le principal défi pour la Syrie post-Assad,
00:28notamment après les massacres des Alawites en mars dernier.
00:31Le vivre ensemble, mais aussi la justice transitionnelle,
00:34les dérives religieuses, la reconstruction du pays.
00:37La Syrie tente de se relever, mais son vernis reste fragile.
00:41Bonjour Arthur Kenney et merci de nous rejoindre en Directure France 24.
00:45Vous êtes en Syrie, vous êtes à Damas, vous êtes docteur en sciences politiques de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
00:50Un an après le départ d'Assad,
00:54qu'est-ce qui a véritablement changé concrètement dans la vie des Syriens ?
00:59C'est quoi le principal acquis par exemple ?
01:00La liberté d'expression, la fin de la terreur ?
01:02Définitivement oui, la fin de la terreur, c'est une chose.
01:08Plus cette peur d'être arrêté dans la rue,
01:10de manière arbitraire pour rejoindre les rangs de l'armée,
01:13ou même, comme vous parliez de la liberté d'expression,
01:16donc les Syriens critiquent actuellement, critiquent beaucoup le nouveau gouvernement,
01:19la situation économique, les ratés, les actes de massacre communautaire
01:24qui a pu avoir lieu contre Sueda ou la côte alaouite,
01:27tout cela est évoqué,
01:28et les gens peuvent librement parler et aborder l'ensemble des sujets qu'ils veulent.
01:33Ça, c'est la grande nouveauté.
01:35On a vu ce matin, lors de ce défilé militaire,
01:38dont vous montrez les images actuellement,
01:41en fait une foule en liesse qui accompagnait les rangs des soldats.
01:44Les soldats étaient bien moins nombreux que la foule qui était présente.
01:48Il y avait une forme à la fois de silence,
01:51silence amer, de ces 13 ans de conflits
01:54qui ont brisé des millions de vies dans le pays,
01:58et à la fois une joie, la joie d'être un an après,
02:01finalement, dans un pays plutôt stable, bien sécurisé,
02:04et avec un futur à nouveau possible.
02:07Le principal problème étant la situation économique.
02:10On y reviendra.
02:12Allons-y sur la situation économique.
02:13Qu'est-ce qui est reproché au président Al-Shara,
02:16qui obtient petit à petit la levée des sanctions,
02:18que ce soit américaine ou européenne ?
02:21Alors, le président Al-Shara et son équipe diplomatique menée par Chabani
02:26ont mené un marathon diplomatique qui a été un véritable succès,
02:30qui a amené à ce jour, donc, à le lever du César Act, aujourd'hui,
02:34et à lever l'ensemble des sanctions sur la Syrie.
02:36Également, la Syrie a renoué avec l'ensemble des pays internationaux,
02:42aussi bien que ce soit les pays occidentaux,
02:43avec lesquels la Syrie était en froid,
02:45mais seulement renoué avec la Russie,
02:47comme on voit actuellement sur ces images,
02:49donc la rencontre avec Poutine,
02:51et un voyage bientôt prévu également en Chine.
02:53Donc, la Syrie se repositionne comme un pays parlant à tout le monde,
02:58et de fait, a réussi à deux choses.
03:01A neutraliser des pays qui pouvaient tenter le coup de force
03:05contre le nouveau gouvernement, que ce soit l'Iran, la Russie.
03:08Actuellement, tout le monde veut renouer le dialogue avec le pays
03:10et vise à la stabilité du pays.
03:12Et l'autre coup de force, c'est donc la levée des sanctions
03:14et la promesse d'arriver de fonds internationaux
03:17pour essayer de relever le pays.
03:18Évidemment, cela ne va pas aller de soi.
03:20Pour l'instant, surtout des promesses
03:22et très très peu de fonds sont arrivés
03:24pour assurer une reconstruction.
03:26Cependant, on est un an après la chute du régime.
03:29Le pays était dans une situation économique
03:31et une situation de niveau de destruction massif.
03:35Évidemment, il y a beaucoup à faire,
03:36les Syriens en sont conscients,
03:38même s'ils ont beaucoup d'attentes dans ce sens-là.
03:40Ça veut dire, Arthur Kenick, pour l'instant,
03:42la levée des sanctions américaines et européennes,
03:44et notamment le César Act,
03:46qui étranglait littéralement l'économie syrienne,
03:50n'ont pas d'effet sur le quotidien de la population ?
03:54Non, pas encore.
03:56En effet, le problème des sanctions,
03:58c'est ce qu'on appelle l'overcompliance,
04:00c'est-à-dire l'effet indirect qu'ont les sanctions.
04:04Même si vous levez des sanctions,
04:05si vous les levez sur une courte durée,
04:07comme ce qui était le cas,
04:08le César Act avait été levé sur six mois
04:09et puis ensuite sur un an,
04:11actuellement, il est levé définitivement.
04:13C'est-à-dire que la confiance d'entreprises,
04:16mais aussi d'États prêts à prêter de l'argent à la Syrie,
04:19cette confiance va pouvoir se recréer.
04:22De son côté, le gouvernement a dû, pendant un an,
04:27rendre plus transparent le fonctionnement de la Banque Centrale,
04:30des différentes institutions de l'État,
04:32du ministère des Finances,
04:33assurer le paiement des salaires à la population.
04:37Tout cela est encore en train de se remettre en place.
04:39Pour l'instant, le problème, c'est ce qu'on voit,
04:41c'est finalement l'arrivée des élites économiques
04:44qui étaient présentes à Idlib,
04:46donc dans le fief d'Ayatari Ratcham,
04:48ce groupe qui a pris le pouvoir en décembre dernier.
04:51Ces élites économiques sont actuellement
04:53en train de reprendre le contrôle de l'économie d'un pays.
04:57Et donc, il y a un jeu d'équilibre qui doit se faire
04:59entre une normalisation de l'économie
05:00et du système financier syrien.
05:02Et donc, pour ça, il y a une standardisation internationale.
05:10Mais c'est sûr que le pays a encore
05:12beaucoup, beaucoup de chemin à faire dans ce sens-là.
05:14Et on vous a montré, il y a quelques instants,
05:16ces images de liesse sur la place des Omeyades.
05:19Ils sont des centaines de milliers de personnes,
05:22des Syriens, qui célèbrent en ce moment même
05:26la chute des Assad.
05:28C'était il y a pile un an.
05:30Ils attendent beaucoup du nouveau gouvernement
05:33qui est installé depuis le 8 octobre 2024.
05:37Arthur Kenney, l'autre défi du régime Al-Shara,
05:40c'est le vivre ensemble des communautés.
05:43On a tous en tête ce traumatisme de mars dernier
05:47où 1300 personnes, majoritairement des Alaouites,
05:51avaient été massacrées dans le fief des Assad.
05:55D'outre les promesses d'Al-Shara, est-ce que la justice peut être rendue ?
06:01Oui, donc la cohésion sociale, le rapport aux différentes communautés du pays
06:05est essentiel.
06:06Vous avez évoqué le massacre contre les Alaouites en mars dernier.
06:09Il faut ajouter un massacre assez similaire
06:11contre la communauté Druze dans le sud du pays en juillet dernier.
06:15Et actuellement, des négociations en cours
06:16qui sont plutôt mal embouties
06:19avec les Kurdes dans le nord-est du pays.
06:24Donc de nombreux défis sont encore à relever.
06:26Et également, sur un autre plan,
06:28tout ce qui est de l'ordre de la justice transitionnelle.
06:30C'est-à-dire que pour l'instant,
06:31le système judiciaire est encore très faible
06:32en cours de reconstruction.
06:34Et les Syriens, beaucoup de Syriens,
06:35se font justice eux-mêmes en rentrant,
06:37en chassant les anciens cassis du régime.
06:40Et donc on a des assassinats à peu près toutes les semaines.
06:43Un peu comme si c'était passé en France
06:45lors de la libération 44-45,
06:47avec plusieurs dizaines de milliers de morts
06:49dans le pays.
06:52Parce que, excusez-moi,
06:54c'est encore trop tôt pour le faire
06:56ou est-ce qu'il y a un manque de volonté politique ?
07:00Non, il y a une vraie volonté politique.
07:02Le problème, c'est que reconstruire un système judiciaire
07:04depuis zéro,
07:05puisque l'ensemble des juges,
07:07la plupart ont été démis de leur fonction
07:08et les tribunaux tournent actuellement au ralenti.
07:11Et un véritable défi pour ce gouvernement.
07:14Donc ils y travaillent.
07:16Mais le comité de justice national est nommé,
07:18travaille actuellement.
07:20Mais c'est possible que ça mette des années
07:21avant de pouvoir réellement poursuivre
07:24les anciens cadres du régime.
07:27Vous le dites, Arthur Kenney,
07:29le président Al-Shara a rapporté
07:30de la stabilité en Syrie.
07:34On l'a vu à l'Elysée.
07:35On l'a vu à la Maison-Blanche.
07:37C'est le seul président syrien à être reçu
07:39à la Maison-Blanche
07:41par Donald Trump.
07:44Al-Shara a reçu une légitimité internationale.
07:48Vous diriez au-delà de ses espérances à lui ?
07:50Alors, c'était son plan,
07:54c'était son objectif
07:55dès la chute du régime.
07:57En janvier dernier,
07:58lors de rencontres
07:59qu'on avait pu avoir avec Ahmed Chara,
08:02il évoquait donc trois choses.
08:04La stabilité institutionnelle du pays,
08:06une transition politique
08:07avec lui comme président
08:09et puis l'élection d'un parlement
08:10dans les mois suivant
08:11la chute du régime précédent,
08:16ce qui a eu lieu.
08:17Et également,
08:18un tour du monde diplomatique
08:21en vue de lever les sanctions.
08:23Il est tout à fait parvenu
08:24à ses trois objectifs
08:25au bout d'un an,
08:27ce qui est tout à fait remarquable.
08:29Maintenant,
08:29restent les problèmes communautaires
08:31dans le pays
08:32et la justice transitionnelle
08:33qu'on évoquait précédemment.
08:34Il a été reçu également
08:35par Poutine à Moscou
08:37parce que la Russie
08:39garde des intérêts en Syrie encore ?
08:41Tout à fait.
08:44La politique étrangère
08:45de la nouvelle Syrie,
08:46c'est zéro problème
08:47à l'international
08:48et avec ses voisins.
08:49Donc la Russie
08:50a encore des bases militaires
08:52dans le pays.
08:53Donc la base de M&M,
08:56qui est un aéroport militaire,
08:57plus à Tartus,
08:57un port
08:58et quelques autres points d'appui
09:00comme à Camichely
09:01où un aéroport militaire
09:02dans l'or est syrien
09:03est encore présent.
09:04La Russie, surtout,
09:06finance l'économie syrienne,
09:09d'autre part,
09:09en fait,
09:09l'impression des billets
09:10et les billets syriens
09:13sont encore imprimés
09:14à Moscou
09:15et également
09:16l'envoi de pétrole
09:17et de blé
09:19sans lesquels
09:20il est difficile
09:21pour l'économie syrienne
09:22de fonctionner.
09:23Il faut savoir
09:23que le salaire moyen
09:26en Syrie
09:26est de 30 à 50 dollars.
09:2880% de la population syrienne
09:30vit sous le seuil
09:31de pauvreté
09:31sachant que le seuil
09:34de pauvreté
09:34est fixé
09:34à un revenu
09:35de 2 dollars par jour.
09:37Donc le pouvoir syrien
09:38n'a pas les moyens
09:39de rompre diplomatiquement
09:40avec la Syrie
09:41et c'est pour ça
09:42qu'on voit une forme
09:42de continuité
09:43avec l'ancien régime
09:44sur ses relations diplomatiques.
09:45Par contre,
09:46l'ensemble des contrats
09:46avec les entreprises russes
09:49qui existaient précédemment,
09:50par exemple,
09:51on pense au phosphate
09:52où les mines de phosphate
09:52étaient gérées
09:53par des entreprises russes
09:55qui prenaient
09:55plus de 70% de bénéfices.
09:58Ces contrats
09:58ont été renégociés
09:59et évidemment,
10:01maintenant,
10:01le gouvernement syrien
10:02engrange des bénéfices
10:03qui leur permettront
10:04progressivement
10:05peut-être de stabiliser
10:06son économie.
10:07Toujours est-il
10:07qu'il n'a pas le luxe
10:08de se mettre à dos
10:09la seconde puissance mondiale
10:11qu'est la Russie.
10:12La Russie
10:13qui continue
10:14d'accueillir
10:15et de protéger
10:16l'ancien dictateur
10:17Bachar al-Assad
10:18et sa famille
10:19qui ont fui à Moscou
10:21dès sa chute.
10:26Ça veut dire
10:26que Bachar al-Assad
10:27ne sera jamais jugé,
10:28il restera protégé
10:29par Poutine ?
10:31Les Syriens
10:32espèrent
10:32l'extradition
10:33de Bachar al-Assad.
10:36Peut-être finiront-ils
10:36par l'obtenir.
10:37Peut-être la Russie
10:38se débarrassera
10:40de Bachar al-Assad
10:41en voyant
10:41dans un autre pays.
10:43Tout ça
10:43est encore très flou.
10:44On est trop tôt,
10:45je pense,
10:45pour aborder ce sujet.
10:47En tout cas,
10:48les officiers
10:50de Bachar al-Assad
10:51continuent à être
10:52poursuivis
10:52dans le pays
10:53et arrêtés.
10:54Il y a des arrestations
10:55toutes les semaines
10:55d'officiers passés
10:57dans la clandestinité
10:58qui sont arrêtés.
10:59Également,
11:00des officiers réfugiés
11:01à l'étranger
11:01dans les pays du Golfe
11:03sont sous pression
11:04des autorités syriennes
11:06qui demandent
11:06leur extradition.
11:08Merci infiniment,
11:08Arthur Kenney,
11:09d'avoir répondu
11:09en direct
11:10de Damas
11:11à France 24
11:12pour les un an
11:13de la chute
11:13de Bachar al-Assad.
11:15Merci.
11:16Merci.
11:17Merci.
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