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  • il y a 11 heures
Emmanuel Macron a fustigé "les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants". Qui sont les usagers de drogue en France et faut-il les traiter en malades ou en coupables ? Amine Benyamina les reçoit tous les jours en consultation : l'addictologue et psychiatre, président de la Fédération française d'addictologie, est l'invité de RTL Matin.
Regardez L'invité RTL de 7h40 avec Thomas Sotto du 20 novembre 2025.

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Transcription
00:00Thomas Soto, RTL Matin.
00:03Il est psychiatre et addictologue, président de la Fédération Française d'Addictologie.
00:07Il a publié il y a quelques mois Addiction, manuel de premier secours aux éditions Marabou.
00:11Le professeur Amin Benyamina est l'invité d'RTL Matin.
00:14Bonjour et bienvenue sur RTL, professeur Benyamina.
00:16Bonjour.
00:17Quand vous avez entendu hier Emmanuel Macron fustiger les bourgeois des centres-villes
00:21qui financent les narcotrafiquants, vous vous êtes dit
00:23« Ah enfin ! » on dit les choses clairement ou alors le président est complètement à côté de la plaque.
00:28C'est vrai et fois à la fois. Il y a les petits bourgeois, mais il n'y a pas qu'eux. C'est ça le problème.
00:32Et merci de m'inviter parce que ce bon mot permet de dire la réalité.
00:36Toutes les campagnes, toutes les villes, toutes les contrées de France et de Navarre sont concernées par la drogue.
00:39Tout le monde est concerné ?
00:40Tout le monde, tout le monde, tout le monde, y compris le petit village
00:42où vous n'avez peut-être pas la poste mais vous avez le dealer qui vient,
00:46qui est plus présent que les services publics de l'État.
00:49La drogue est partout et pas n'importe laquelle.
00:51Il n'y a pas de portrait type du consommateur aujourd'hui ?
00:53Il n'y en a plus. Il n'y en a plus.
00:54Et d'ailleurs, quand on parle des points de deal, c'est très exactement ce qui fait l'objet
00:58très souvent de vos chroniques et de votre information.
01:01On pense à un point physique. Les points de deal sont derrière l'écran.
01:04Donc là, là-dessus, il va falloir vraiment aller loin sur le caractère de diffusion de la drogue
01:12et de l'amener avec la drogue.
01:14Ça veut dire qu'aujourd'hui, on commande sa drogue sur le téléphone
01:15comme on commande sa pizza chez Deliveroo, c'est ça ?
01:18On peut commander, on peut marchander, on les livrer.
01:22Mais le phénomène est un phénomène qui s'est insinué dans toutes les interstices de la société.
01:28Le président dit vrai, mais le problème est d'ailleurs, il le sait.
01:31Ça peut toucher le haut du paillet de la société, mais pas que.
01:33Tout le monde.
01:34La cocaïne, il y a quelques années, dans les années 80,
01:37on se glossait en disant que ceux qui consomment de la cocaïne, ils ont de l'argent,
01:41ils ne feront jamais de prison, on sait qui c'est.
01:42C'est des journalistes, c'est des...
01:44C'est plus le cas.
01:47Vous avez des consommateurs de cocaïne qui ne sont pas majeurs.
01:49Ça, c'est la réalité de notre pays.
01:51Des consommateurs de cocaïne qui ne sont pas majeurs.
01:53Des enfants qui prennent de la cocaïne aujourd'hui ?
01:54Je ne dis pas que ce sont des consommateurs itératifs,
01:56mais ils ont expérimenté un produit qui, dans l'imaginaire de nous tous,
02:01concerne les personnes d'âge mûr plutôt bien installées dans la vie.
02:04Ce n'est pas le cas.
02:05Moi, j'avais dans l'idée, une idée reçue,
02:07que le consommateur de drogue, il était plutôt urbain et masculin.
02:10Donc ça, aujourd'hui, c'est une idée reçue.
02:12C'est faux, de toutes les façons.
02:13Des filles aussi ?
02:14Tout le monde.
02:14Il y a une espèce de rattrapage au niveau des différences sexuelles qui est réelle.
02:19Il reste quand même quelques différences, mais elles sont vraiment à la marge.
02:25Professeur Benyamina, vos patients, ils consomment quoi aujourd'hui ?
02:28Pourquoi ils viennent vous voir ?
02:29Tout.
02:29Premier cours à la fac de médecine, c'est que le produit ne définit plus la couche sociale
02:37ou bien finalement...
02:39C'est plus un marqueur.
02:40Dans les années 70, c'était un marqueur.
02:41Vous avez les réunomanes, vous avez celui qui consommait du cannabis,
02:44celui qui prenait de l'alcool,
02:46et il y avait quelque part une sorte de message sociologique
02:48que l'on renvoyait à travers le produit qu'on consommait.
02:50C'est fini.
02:51On consomme pour consommer, on freine et on accélère.
02:54On prend des psychostimulants, on prend des psychocédatifs.
02:57Finalement, il n'y a pas de message particulier.
03:00C'est ce qui rend d'ailleurs plus compliquée la définition
03:03à la fois du profil de ceux qui consomment
03:05et la mise en place à la fois des politiques de soins
03:08et peut-être même des politiques de repression.
03:11Professeur Benyamina, pour vous, les toxicomanes,
03:14sont-ils des coupables ou des victimes ?
03:16Alors les usagers de drogue.
03:18Les termes sont importants.
03:19Vous dites usagers de drogue et pas toxicomanes ?
03:21Non, parce que moi je ne veux pas, mes patients,
03:23je ne vais pas les définir parce qu'ils deviennent un fardeau pour eux.
03:28Je ne vais pas leur donner une identité sociale.
03:32Alors les usagers de drogue, pas de victimes ?
03:33Non, mais vous avez raison.
03:35Je fais de pédagogie à travers vous, Thomas.
03:37Écoutez, il y a tout.
03:38Je pense que lorsque les personnes sont dépendantes,
03:41vous pouvez toujours leur faire la morale,
03:42elles sont dépendantes.
03:43Elles ont une force qui a pour définition
03:46de leur retirer leur liberté de s'abstenir.
03:49Donc évidemment, je ne dis pas que derrière tout consommateur,
03:52il y a des malades.
03:53En revanche, on ne peut pas tout mélanger,
03:55je l'avais dit auparavant,
03:57mais il est utile aussi de ne pas être non plus naïf.
04:01Une grande politique de lutte contre la drogue,
04:04elle lutte de manière claire avec la force des pauvres républicains.
04:08Évidemment, ce qu'a fait le président, il faut le saluer.
04:11Il manque un bras ou un pied, c'est rien du tout.
04:14Il manque un bras ou un pied,
04:17qui me semble utile de mettre en place.
04:19C'est la partie sanitaire.
04:20Elle existe, mais il faut en parler.
04:21C'est de la prévention qui manque ?
04:23C'est quoi ?
04:24C'est des moyens pour les traitements ?
04:25C'est quoi ?
04:26Alors, de l'information,
04:27de la prévention primaire, secondaire, tertiaire,
04:30on le voit, c'est extrêmement important.
04:33Donner les moyens pour soigner partout,
04:35puisqu'on a dit que partout en France,
04:37il y a de la drogue,
04:39il faut un tissu sanitaire déployé,
04:42il faut des moyens pour la recherche,
04:43et il faut dire les choses.
04:44Ce n'est pas parce qu'un produit est interdit
04:46qu'on ne va pas communiquer autour du produit.
04:48C'est très important.
04:49Il y a une espèce de tabou.
04:50On ne communique pas parce que c'est interdit,
04:52et si on communique,
04:52ça veut dire qu'on légitime le truc ?
04:55Un peu.
04:55Il faut le dire.
04:56Lorsque mes associations,
04:58les associations dans lesquelles j'évolue,
05:00font de la réduction des risques,
05:02on va clairement dire que,
05:04si tu veux ne pas mourir,
05:05drogue-toi mieux,
05:06d'une certaine manière.
05:07Parce que l'urgence,
05:08c'est de ne pas mourir dans un coin.
05:10C'est extrêmement important.
05:11Et je pense que là,
05:12c'est de la responsabilité des pouvoirs publics.
05:14Vous entendez certains qui disent
05:15qu'acheter du cannabis,
05:16de la cocaïne ou autre,
05:17c'est tenir la kalachnikov
05:18qui sert à tuer des innocents
05:19comme Médic et Sassi.
05:21Est-ce que vous en parlez avec vos patients ?
05:22Est-ce que ça peut faire partie
05:23de la thérapie ou pas du tout ?
05:25C'est compliqué.
05:26Moi, je veux rester dans mon couloir.
05:27Ça ne m'empêche pas d'être un citoyen,
05:29de voir les choses.
05:30Et à la marge,
05:31lorsque le sujet vient,
05:32évidemment,
05:33derrière un addictologue que je suis,
05:34je le dis tout le temps,
05:35il y a quelque part un militant.
05:37Je milite d'abord pour la santé.
05:39Je milite aussi pour rappeler
05:41que tous ceux qui consomment
05:42ne sont pas pour autant des coupables,
05:44mais qu'ils sont en illégalité.
05:46La subtilité est importante.
05:48On est loi,
05:49intelligence et la loi 70,
05:50qui permet aux gens malades
05:51de se soigner de manière anonyme et gratuite
05:54et qui ne sont pas attendus
05:56à la sortie des structures
05:57par le policier.
05:58C'est extrêmement important.
06:00Pour autant,
06:01un pays sans loi,
06:02sans règles et sans ordre
06:03n'est pas un pays gouvernable.
06:05Oui, mais quand même, professeur,
06:06il y a quelque chose qui frappe.
06:07Je ne sais pas si vous avez entendu
06:07le RTL événement tout à l'heure
06:08à 7h15.
06:09Maura Djabarit allait rencontrer
06:10des consommateurs
06:11sur un point de deal
06:12qui allaient faire leur course.
06:14On est frappé par l'absence
06:15de prise de conscience.
06:16On évoquait aussi tout à l'heure
06:17le baromètre AXA Prévention
06:19qui nous apprend ce matin
06:20que 12% des 18-34 ans
06:22ont déjà conduit
06:23sous l'emprise de stupéfiants
06:24et 43% de ceux-là
06:26pensent que ces substances
06:28peuvent avoir un effet bénéfique
06:30sur leur conduite
06:31ou leur vigilance au volant.
06:32Mais c'est à tomber par terre
06:33d'entendre ça.
06:34Absolument.
06:34D'éducation, de prévention,
06:36de conneries humaines,
06:37pardon, mais c'est quoi ?
06:38Mais vous avez raison Thomas,
06:39c'est là où l'État
06:40doit de nouveau reprendre
06:41son bâton d'information.
06:43Il doit se faire où ?
06:43Par des affiches dans le métro,
06:45à l'école,
06:45chez les petits,
06:46chez les grands,
06:47comment il faut faire ?
06:47D'abord il faut commencer
06:48par donner une information
06:49et par entre guillemets
06:51éduquer sur ce que c'est
06:53que la drogue.
06:54Tout le monde,
06:55la presse,
06:55les parents,
06:56les enseignants,
06:57et ce n'est pas quelque chose
06:58de manichéen.
06:59C'est blanc,
07:00c'est noir,
07:00c'est bon,
07:01c'est pas bon.
07:01Il va falloir rappeler
07:02que ces produits sont interdits,
07:04pas pour ennuyer les français,
07:05c'est parce qu'ils sont nocifs
07:07et ça c'est extrêmement important.
07:09Ils sont déjà dangereux
07:09pour ceux qui les consomment.
07:11Il y a des phénomènes
07:11qui à mon avis
07:12sont déjà installés,
07:14il faut les accompagner
07:15pour pouvoir les maîtriser.
07:17J'ai toujours cette image,
07:18lorsque un véhicule est fou,
07:20on ne freine pas,
07:22sinon on se prend un mur,
07:23on saute sur le volant
07:24et on essaye de prendre
07:25une bonne trajectoire.
07:26Le contrôle,
07:27c'est ce qui se passe par exemple
07:28avec le cannabis,
07:29c'est ce qui se passe
07:29avec un certain nombre de produits
07:31qui sont déjà,
07:33on ne va pas déployer l'armée
07:34et encore,
07:34combien même,
07:35c'est terminé.
07:36Il faut accompagner
07:37pour pouvoir remaîtriser les choses.
07:39Donc il faut d'abord
07:40faire passer les messages
07:41et il faut d'abord soigner,
07:42c'est ce que vous nous dites ce matin.
07:44On a eu longtemps,
07:45dans ce pays,
07:45l'image du petit joint sympa
07:47que fumaient peut-être nos parents,
07:48celui des Babacool 68a.
07:50On avait dans l'idée,
07:51bon,
07:52ça ne pouvait pas faire de mal.
07:53Qu'est-ce qui a changé ?
07:54Est-ce qu'aujourd'hui,
07:54les matières,
07:55les substances elles-mêmes
07:56ont changé ?
07:57Vous avez la réponse
07:57dans la question.
07:58Le petit joint Babacool,
07:59c'était 5% THC,
08:01tétrahydrocannabinol,
08:02c'est le principe actif.
08:03L'actuel petit joint,
08:05il est à 12%.
08:05Et le joint qui fait mal,
08:07le PET en crâne,
08:08c'est du synthétique,
08:09il est à 20-25%.
08:11Lorsque je vous dis que,
08:13finalement,
08:14la nocivité
08:14et l'importance de l'effet
08:16et des effets
08:17après chroniques
08:18liés au cannabis,
08:19si on prend cet exemple
08:21sans lier à la teneur,
08:22vous avez tout compris.
08:23Évidemment,
08:23on n'a plus affaire à ça.
08:25On a affaire à quelque chose
08:25d'extrêmement plus...
08:26Donc, il faut arrêter
08:26avec une vision un peu romantique
08:28parfois de ça.
08:29Ça n'existe plus.
08:30Tout est dangereux,
08:30tout est potentiellement mortel
08:31aujourd'hui ?
08:32Tout est potentiellement mortel,
08:33y compris le petit verre de vin.
08:35Pardon de le dire,
08:36y compris le petit verre de vin.
08:37Donc, il faudrait faire
08:38la même chose, en fait ?
08:39Alors, je ne suis pas
08:40un hygiéniste,
08:40que les choses soient claires.
08:41Je fais mon travail,
08:42entre guillemets,
08:43de médecins qui informent.
08:45Ensuite,
08:45les Français sont libres.
08:46Ils ont un espace
08:47dans lequel ils ont
08:48leur liberté,
08:48encore une fois,
08:49dans leur foyer
08:49ou dans leur espace privé.
08:52Mais il est important,
08:53je pense que ce qui est important,
08:54c'est de donner l'information,
08:57valider.
08:57Je voudrais juste
08:58qu'on se dise quelques mots
08:58quand même sur le protoxyde d'azote,
09:00le gaz hilarant.
09:00C'est un nouveau sujet,
09:01un nouveau problème pour vous ?
09:02Dans quelle proportion ?
09:03Alors, ce n'est pas
09:04un nouveau sujet pour nous.
09:05J'étais venu vous voir ici
09:06il y a une dizaine d'années.
09:08On était venus,
09:08il y a cinq ans on est venus.
09:09Là, on a l'impression
09:10que ça prend des proportions.
09:11C'était un phénomène
09:11qui commence à arriver
09:12et comme la plupart des drogues
09:14arrivent souvent dans des milieux
09:15un peu fermés,
09:17un peu désignés.
09:18Le protoxyde d'azote
09:23avec du gaz.
09:24Ce phénomène s'est installé,
09:26je ne dis pas qu'on l'a laissé,
09:28mais on a essayé finalement
09:29de le bloquer
09:29parce que le protoxyde d'azote
09:31c'est d'abord un produit
09:31pour l'anesthésie,
09:33un produit pour l'industrie
09:34qui a été détourné
09:35et qui maintenant s'est installé,
09:37qui est mesuré
09:38et qui commence à produire
09:39des effets.
09:39C'est une drogue comme les autres aujourd'hui ?
09:40C'est une drogue redoutable.
09:42Elle est pire que les drogues.
09:42Pire que les autres.
09:43Parce qu'elle entraîne
09:44des handicaps à vie
09:45pour des jeunes
09:46qui arrivent avec des chaises roulantes
09:48à 17-18 ans dans nos services.
09:49Professeur,
09:50on est beaucoup de parents
09:50à vous écouter ce matin
09:51à être très inquiets.
09:52Qu'est-ce qu'il faut dire
09:53en quelques mots
09:54à nos gamins,
09:55à nos ados ?
09:55Qu'est-ce qu'on leur dit là ?
09:56Un ado,
09:57c'est quelqu'un
09:58qui expérimente le danger.
10:01On leur dit
10:01tu peux l'expérimenter,
10:03je ne suis pas toujours avec toi,
10:04mais attention,
10:04il y a des dangers
10:05que tu n'expérimentes
10:06qu'une seule fois.
10:07Et donc là,
10:08pour qu'ils comprennent cela,
10:09il faut lui faire de la pédagogie
10:10sur la nocivité,
10:11sur la problématique des drogues
10:13et le caractère illégal
10:14qui n'est pas un caractère
10:15disons anodin.
10:17Merci beaucoup
10:17professeur Benyamina
10:18d'être venu sur RTL ce matin.
10:19Restez avec nous dans un instant.
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