00:00Il y a deux ans, jour pour jour, l'armée malienne faisait une entrée triomphale à Kidal
00:06après près d'une décennie de contrôle par la rébellion de Touareg.
00:09Une victoire symbolique pour Bamako, rendue possible grâce au soutien notamment du groupe Wagner.
00:15Mais aujourd'hui, le contexte sécuritaire s'est à nouveau dégradé.
00:19Les groupes djihadistes gagnent du terrain, les tensions ressurgissent dans le nord
00:23et même l'armée malienne connaît des dissensions internes.
00:27Pour comprendre les enjeux de cette situation, on retrouve Serge Daniel, notre correspondant dans la région.
00:34Bonsoir Serge.
00:36Il y a deux ans, deux ans après la reprise de Kidal, peut-on parler d'une victoire à la Pyrrhus pour l'armée malienne ?
00:43Quel a été l'impact réel de cette reconquête au vu de la dégradation sécuritaire dans le nord ?
00:50Alors ce qu'il faut commencer par dire, c'est quand même une victoire parce que pendant une décennie,
00:54l'armée malienne n'allait pas à Kidal, l'administration malienne n'était pas Kidal.
00:59Kidal était dans les mains des ex-rebelles de la rébellion Touareg.
01:03Donc c'est une victoire quand même la prise de Kidal.
01:05Mais quand on voit le développement, on peut se poser la question de savoir
01:10s'il n'y a pas eu des impacts négatifs.
01:16Par exemple, aujourd'hui, Kidal est vidé de ses habitants, disons les choses clairement.
01:20Ensuite, la sécurité n'est pas revenue dans la région.
01:24La région, c'est 151 000 kilomètres carrés.
01:27Ça fait deux fois la taille d'un pays comme le Togo.
01:30Il y a encore deux groupes djihadistes sur le terrain dans le nord du Mali quand même.
01:34Vous avez le Jnime et puis vous avez l'État islamique.
01:36Donc, victoire plutôt relative.
01:38Pendant près d'une décennie, vous l'avez dit, Kidal était contrôlé par la rébellion Touareg.
01:44Qu'est-ce qui différencie et distingue fondamentalement ces groupes Touareg des djihadistes ?
01:49Justement, dont vous avez parlé, dont le Jnime, qui occupe d'autres zones dans le nord.
01:55Alors, il faut savoir que le Jnime, le groupe de soutien à l'islam et aux musulmans, est affilié à Al-Qaïda.
02:00Donc, c'est un groupe djihadiste qui souhaite l'instauration de la charia dans tout le Mali.
02:07Ça, c'est très important.
02:09Mais en revanche, si vous prenez les groupes rebelles, les groupes rebelles sont devenus de plus en plus indépendantistes.
02:15Ils souhaitent, eux, l'indépendance d'une région du nord du Mali qu'ils appellent l'Azawat.
02:20Mais disons-le clairement, il n'y a aucun doute, entre les deux mouvements, il y a des passerelles.
02:26Serge, vous nous avez dit, tout à l'heure, on le disait en introduction, cette victoire, elle a aussi été rendue possible grâce à l'aide des mercenaires russes.
02:35On a cité le groupe Wagner, dont on n'entend pratiquement plus parler.
02:40Que sont-ils devenus ?
02:42Alors, c'est très important.
02:43Sans Wagner, il n'y aurait pas eu prise de la ville de Kidal.
02:46C'est évident, tout le monde est d'accord là-dessus aujourd'hui.
02:49Wagner, avec la mort de son chef Prigogine, a plié Bagage du Mali.
02:54Et Wagner a été remplacé par une autre structure russe qui s'appelle Afrika Korps, qui dépend directement du ministère de la Défense de la Russie.
03:03D'ailleurs, le vice-ministre de la Russie était récemment à Bamako.
03:07Et ce qu'on constate quand même, c'est que l'Afrika Korps est moins robuste sur le terrain, en tout cas, que Wagner.
03:15Et donc, ça ne fait pas le boulot de Wagner.
03:18C'est moins fort que Wagner.
03:19Serge, on a vu que malgré cette victoire symbolique, vous l'avez signé, vous avez bien fait de le signer au départ, pour la reprise de Kidal.
03:28On assiste néanmoins à une perte de terrain de l'armée malienne face aux djihadistes.
03:32On a vu plusieurs groupes.
03:34D'un autre côté, plusieurs militaires ont été arrêtés pour tentative de déstabilisation.
03:40Comment comprendre la fragilisation, justement, progressive du pouvoir militaire à Bamako ?
03:45D'abord, parce que, vous savez, la guerre, c'est aussi une affaire de stratégie.
03:49Les djihadistes se sont rendus compte qu'une guerre économique, un blocus économique, portait des fruits.
03:54C'est-à-dire que le Mali est un pays enclavé, il n'a pas accès à la mer.
03:57Les deux façades maritimes sont essentiellement au Sénégal et en Côte d'Ivoire.
04:02Donc, les djihadistes ont bloqué ces axes routiers au sud,
04:05en recrutant des djihadistes au sud, parmi les populations du sud.
04:10Et ça a produit des effets que, vous savez, la capitalité est bloquée.
04:14Il y a du mieux dans la desserte en carburant, mais les problèmes demeurent.
04:19Ensuite, il faut ressouder forcément l'unité au sein de l'armée,
04:22parce que, vous l'avez dit tout à l'heure, des officiers, des militaires ont été arrêtés
04:26pour tentative de coup d'État.
04:28Ce qui le démente, d'ailleurs, puisque deux généraux ont été récemment entendus.
04:33Merci beaucoup pour ce décryptage, Serge Daniel, notre correspondant régional.
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