00:00Depuis qu'on évoque cette éventualité de reculer sur la réforme des retraites, certains s'agitent, Horizon LR pour eux c'est une ligne rouge, ils le répètent depuis ce matin,
00:09et il y a aussi ceux qui agitent les risques, la menace pour l'économie française, quel serait le coût d'une telle marche arrière ?
00:16On va en parler avec vous, Johanna Citruc, on évoque de plus en plus possible cette suspension, ça ne serait pas sans conséquence pour l'économie française, c'est ce que vous nous dites aujourd'hui.
00:25Oui, parce que souvenez-vous, l'objectif de la réforme des retraites qui est passée en 2023, c'était de faire des économies pour pouvoir préserver notre système français,
00:34notre système par répartition, où ce sont les travailleurs, donc les actifs, qui financent les pensions des retraités.
00:40Parce qu'aujourd'hui, on le sait, on a une population qui est de plus en plus vieillissante, il fallait donc trouver des moyens de préserver cet équilibre.
00:47Là, en l'occurrence, le moyen qui a été choisi, c'est de faire travailler les Français plus longtemps.
00:50Donc forcément, si on décide de revenir sur cette réforme, eh bien ça va peser sur nos finances publiques, ces mécaniques, on ne pourra pas suspendre,
00:59la suspendre sans aller chercher de l'argent ailleurs. On ne peut pas ajouter des dépenses sans en parallèle ajouter des recettes.
01:06C'est logique, c'est en fait comme ça que ça se passe, sinon l'équation finit par s'effondrer.
01:10Et c'est ce qu'expliquait justement Roland Liscure, le ministre très rapide, ministre démissionnaire de l'économie et des finances.
01:17Il était ce matin sur France Inter, écoutez-le.
01:20Modifier la réforme des retraites, ça va coûter des centaines de millions en 2026 et des milliards en 2027.
01:30Est-ce que la France peut se permettre une telle suspension ?
01:33C'est facile de mettre des plus dans l'atmosphère. Face à des plus, il va falloir des moins.
01:37Et ça, c'est des choses qu'on va devoir négocier.
01:39Donc ce que je vous dis, c'est que moi je suis prêt à faire des concessions.
01:41Ce que je vous dis aussi, c'est qu'elles ont toutes un prix et qu'il va falloir les financer.
01:46Voilà, on entend Roland Liscure parler de milliards d'euros en 2027.
01:51Est-ce qu'on a une idée de ce que pourrait coûter une suspension de la réforme des retraites au final ?
01:56Alors, avant de vous donner un chiffre, je vais revenir sur un terme qui est très important à prendre en compte.
02:00C'est le terme de suspension.
02:01Parce qu'il faut bien comprendre que la réforme des retraites qui est rentrée en vigueur, donc à partir de septembre 2023, elle s'applique de manière progressive.
02:10L'objectif, c'était que l'âge légal de départ à la retraite passe petit à petit de 62 ans en 2023 à 64 ans, mais seulement en 2030.
02:19Ce qui veut dire qu'aujourd'hui, on en est encore au début de la réforme à l'heure actuelle, en octobre 2025.
02:25Les Français qui ont suffisamment cotisé peuvent partir à la retraite au plus tôt, à 62 ans et 9 mois.
02:32Autrement dit, on s'approche des 63 ans.
02:35Et ça tombe bien parce qu'il y a quelques mois, justement, la Cour des comptes a réalisé un rapport qui donne justement une estimation de ce que coûterait la suspension de la réforme des retraites si on s'arrête justement à 63 ans.
02:45Regardez l'infographie qui s'est affichée à l'écran. Le coût augmenterait d'année en année et il finirait par atteindre 13 milliards d'euros en 2035.
02:55Dans le détail, on aurait 5,8 milliards d'euros en moins pour le système des retraites parce que les retraités seraient plus nombreux à recevoir des pensions.
03:05Et on aurait également 7,2 milliards d'euros de pertes de recettes publiques parce qu'à l'inverse, les travailleurs seront moins nombreux.
03:11Et qui dit moins de travailleurs dit forcément moins d'impôts qui rentrent dans les caisses de l'État.
03:16Avec un tel coût, est-ce que ça ne serait pas dangereux de suspendre la réforme des retraites demain ?
03:21Alors oui et non. Le problème, c'est qu'à l'heure actuelle, cette suspension pourrait certes coûter beaucoup d'argent.
03:27Mais la crise politique qu'on traverse depuis plusieurs semaines, même plusieurs mois, elle coûte aussi très cher.
03:33Elle ne coûte très cher. Pourquoi ? Parce qu'à chaque nouveau rebondissement, à chaque fois qu'un gouvernement chute,
03:37à chaque fois qu'il y a un nouveau signe d'instabilité, les taux d'emprunt de la France augmentent.
03:42Globalement, depuis la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024, on paye des intérêts de plus en plus élevés pour emprunter sur les marchés financiers.
03:51Et tout cet argent qu'on débourse, ça vient aussi peser sur nos finances publiques.
03:54Donc aujourd'hui, on peut se poser la question, est-ce que ce ne serait pas préférable de supporter le coût d'une suspension de la réforme des retraites ?
04:02Surtout si ça permet aux partis politiques de s'entendre, de s'entendre pour former un gouvernement et aussi de trouver un budget 2026,
04:09ce qui est très important, plutôt que de laisser la crise politique se poursuivre et prendre le risque que ça nous coûte, au final, beaucoup plus cher.
04:17C'est peut-être l'option qui est en train de se dessiner actuellement.
04:21Surtout qu'à l'heure actuelle, nos finances publiques ne vont déjà pas très bien.
04:24Nos voisins nous regardent à ce sujet.
04:26Oui, on parle même depuis un petit moment de dérapage de nos finances publiques.
04:29On va regarder quelques chiffres. Notre déficit, vous allez le voir, est passé en 2019 de 2,4% du PIB à 5,8% l'an dernier.
04:41A priori, on se dirige vers 5,4% pour cette année. C'est considérable.
04:46Idem du côté de la dette, on a atteint un record en valeur à plus de 3 416 milliards d'euros.
04:52Ça représente plus de 115% du PIB.
04:56Donc oui, il y a urgence à agir pour redresser nos finances publiques, en tout cas, dans un premier temps, pour ne pas aggraver la situation.
05:05Merci beaucoup, Johanna, pour l'explication et donc ces chiffres qu'il est toujours bon de rappeler.
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