Skip to playerSkip to main content
  • 2 months ago

Category

🗞
News
Transcript
00:0020h30 à Paris, la suite de l'essentiel. Dans un instant, on va plus loin. Avec ce soir, Marc Semo, bonsoir, collaborateur au Monde et chroniqueur à Chalange.
00:11Gauthier Rybinski, éditeur de Politique Internationale, ici à France 24.
00:15Les avoirs russes gelés par l'Union Européenne peuvent-ils être saisis pour aider l'Ukraine ? La question agite les 27 et est au cœur du sommet européen de Bruxelles.
00:24Le président ukrainien Volodymyr Zelensky espère que les Européens vont sauter le pas.
00:28D'un côté, les partisans de Viktor Orban, le Premier ministre hongrois. De l'autre, ceux de son plus sérieux opposant, Peter Maguiar.
00:36Deux marches concurrentes dans les rues de Budapest en ce jour de fête nationale. Chaque camp entend mobiliser à six mois des législatives.
00:43Financer le coup de la guerre en Ukraine à l'aide des avoirs russes gelés, c'est le sujet qui occupe le sommet européen de Bruxelles ce jeudi et divise les 27.
01:06Au total, quelques 140 milliards d'euros, particulièrement réticentes. La Belgique où se trouve l'essentiel de ses actifs.
01:13Le président ukrainien Volodymyr Zelensky espère toutefois que l'UE va franchir le pas.
01:17Jean Barère.
01:17Ce sont des milliards de dollars d'actifs russes gelés par l'Occident qui sommeillent. Seuls les intérêts qu'ils génèrent sont pour l'heure utilisés.
01:28Volodymyr Zelensky voudrait que ses avoirs reviennent à l'Ukraine.
01:31La Russie a apporté la guerre sur notre terre et elle doit payer pour ça. En ce moment, il y a une réunion entre dirigeants européens et j'espère qu'ils prendront une décision politique, une décision positive, d'une manière ou d'une autre, pour aider l'Ukraine avec ses fonds provenant d'avoirs russes.
01:52Lors de son déplacement à Bruxelles, en marge d'un sommet du Conseil européen, le président ukrainien a plaidé pour le déblocage de ses fonds via un prêt de réparation de 140 milliards d'euros,
02:04qui pourraient être utilisés non seulement pour l'achat d'armes de fabrication européenne et américaine, mais aussi pour développer la production nationale, notamment de missiles à longue portée comme les Tomahawk.
02:16Ce mécanisme légal et équitable, selon Zelensky, ne fait pas l'unanimité.
02:20Le Premier ministre belge, pays où se trouvent la plupart de ses actifs, veut être prudent et estime qu'il y a des risques légaux à leur utilisation.
02:28Nous voulons des garanties. Si l'argent doit être remboursé, chaque État membre contribuera et les conséquences ne pourront pas être limitées à la Belgique.
02:38Moscou affirme que toute confiscation d'actifs russes constituerait un vol et pourrait avoir des répercussions.
02:44« Toute initiative confiscatoire de Bruxelles entraînera inévitablement une réponse douloureuse. »
02:51Les Européens ont aussi adopté un nouveau train de sanctions contre la Russie le 19e.
02:56Il prévoit notamment la fin des importations de gaz naturel liquéfié d'ici à 2026.
03:01Une décision qui intervient au lendemain de lourdes sanctions américaines contre le secteur pétrolier russe.
03:06– Marc, c'est un mécanisme assez inédit, mais c'est un mécanisme qui n'est pas sans risque tout de même.
03:12– Les risques sont très limités parce qu'au début, l'idée était de les saisir.
03:17Mais ce qui posait effectivement le problème d'un précédent juridique,
03:20ce qui pouvait décourager un certain nombre de pays de déposer les avoirs en Europe,
03:27notamment en Belgique, auprès de cet institut Euroclear,
03:30avec aussi pour conséquence d'affaiblir l'euro.
03:33Et donc il y avait cette grande réticence.
03:34D'où cette idée qui juridiquement est assez habile et brillante,
03:39qui est celle de dire voilà, ce n'est pas une saisie,
03:41c'est simplement une avance, une sorte d'avance sur les réparations
03:45que devra nécessairement payer la Russie après la guerre,
03:49puisque c'est elle qui est l'agresseur, etc.
03:51Et plutôt que d'attendre 10 ans que la justice internationale tranche en la matière,
03:56et bien voilà, on prend cet argent, ça garantit l'argent qu'on va donner aux Ukrainiens.
04:00Alors il y en a 200 milliards en Europe.
04:03Là, c'est 140 milliards qui sont les avoirs de la Banque d'État,
04:06qui vont être divisés en trois tranches, qu'on donne à l'Ukraine,
04:09qui lui permet effectivement d'acheter des armes,
04:12d'acheter aux Européens comme aux Américains,
04:14de développer sa propre industrie d'armement.
04:17Et une fois que la guerre s'arrête,
04:20si la Russie paye les réparations,
04:21et bien l'Ukraine rembourse ses avoirs qui sont rendus à la Russie.
04:28Si la Russie se refuse à payer les réparations,
04:32et bien voilà, ses avoirs resteront saisis.
04:35Ce sera le montant des réparations sur lesquelles on aura mis la main.
04:41Donc juridiquement, c'est beaucoup plus habile.
04:45Le seul pays qui s'y oppose, c'est la Hongrie de Viktor Orban.
04:48On en reparlera tout à l'heure.
04:51Mais même la Belgique, qui est évidemment la plus prudente,
04:53puisque c'est elle qui héberge Euroclear sur son sol
04:56et qui risque de subir en premier chef les représailles de la Russie.
04:59Mais même petit à petit, la Belgique,
05:01avec ce nouveau mécanisme, a l'air de s'être laissé convaincre.
05:04Gauthier, on est à presque quatre ans de guerre en Ukraine.
05:08Ce mécanisme, il est devenu indispensable pour Kiev, pour l'Union Européenne ?
05:14Il est effectivement brillant pour une raison simple.
05:17C'est qu'il a un côté très franchement moral.
05:23C'est-à-dire que s'il n'y avait pas ce mécanisme,
05:25on pourrait se dire, bon, il y a une contradiction.
05:27Effectivement, on réclame le droit pour le droit international,
05:31le droit à l'inviolabilité des frontières,
05:33le droit à ne pas crever en Ukraine par les bombes russes.
05:36Et d'un autre côté, on dirait,
05:38ah oui, mais alors l'argent, on peut le percevoir.
05:41Non, le mécanisme est brillant en ce sens-là.
05:42C'est-à-dire qu'il permet de tourner la chose, de contourner la chose,
05:46mais avec une priorité terrible, cette priorité.
05:49C'est que si vous dites, si vous mettez les deux à côté,
05:52quand on doit sauver le capital,
05:54et combien de centaines de milliers de morts ukrainiennes et russes ?
06:00Souvenez-vous, les petits soldats russes aux bottes en plastique
06:03qui appellent maman en disant, il n'y a pas de nazis à Kiev.
06:05Il faut les sauver, ceux-là aussi.
06:07Et là, il n'y a pas de discussion possible.
06:09Alors que les Européens aient trouvé ce biais,
06:11c'est intéressant parce qu'on en reparlera effectivement tout à l'heure,
06:15Orban, ça peut le faire réfléchir,
06:17parce qu'on sait que dans certaines négociations,
06:19Orban a parfois lâché son morceau pour dire,
06:21bah si moi aussi je peux en croquer un peu, je le ferai.
06:24C'est intéressant aussi parce que la réticence de la Belgique,
06:27dans un moindre effet, est aussi bien sûr due au fait
06:31qu'elle concentre un certain nombre de problèmes,
06:33mais que son Premier ministre que vous voyez là,
06:35Bart de Wever, est un nationaliste flamand
06:38qui dans le passé a eu de bonnes relations avec la Russie
06:42et ça lui permettrait de ne pas être lui non plus complètement coincé
06:46et donc d'avancer globalement dans le bon sens.
06:48Les Européens qui avancent,
06:49alors il y a ces discussions actuellement qui peuvent durer,
06:52on le sait, lors d'un sommet européen.
06:54Peut durer la nuit en général,
06:55une petite heure de l'aube, à l'heure du laitier,
06:57on arrive au résultat.
06:58On sait quand est-ce que ça commence,
06:58on ne sait jamais quand est-ce que ça finit,
07:00mais avant cela, il y a quand même ce 19ème train de sanctions,
07:03Marc, qui a été voté par...
07:04C'était une formalité finalement ?
07:05Ce n'est pas une formalité,
07:07mais bon, les sanctions marchent jusqu'à un certain point,
07:10elles sont en grande partie contournées,
07:11elles ont malgré tout un effet,
07:13on voit que l'économie russe,
07:14à part l'économie de guerre,
07:15ce qui n'est pas rien,
07:16c'est quand même aujourd'hui en Russie,
07:1740% du budget de l'État passe directement ou indirectement
07:22à l'économie de guerre,
07:23le reste de l'économie russe commence quand même
07:27à montrer de sérieux signes de fatigue
07:29et donc, quelque part,
07:32ça devient une évidence,
07:34même pour Poutine,
07:36que l'OTAN ne joue pas nécessairement pour lui
07:38et ça, c'est important.
07:39En même temps, il y a un paquet de sanctions,
07:41voilà, c'est un nouveau paquet de sanctions.
07:43De ce point de vue-là,
07:43les sanctions qu'a finalement décidées Donald Trump,
07:46c'est-à-dire sur les blocages
07:49de blocage de toutes les opérations à l'export
07:52des deux principales compagnies,
07:54Rosneft et Lukoil,
07:55d'État et Lukoil privés,
07:58qui n'auront plus le droit,
08:00notamment d'utiliser le dollar,
08:02etc., etc.,
08:03a un effet beaucoup plus rapide,
08:05beaucoup plus précis,
08:06beaucoup plus dévastateur,
08:07parce que malgré tout,
08:08c'était à l'2,
08:09à entre 50 et 55% des exportations russes d'hydrocarbures.
08:13Alors, on va justement écouter à ce sujet
08:14le président des Etats-Unis,
08:16c'était hier soir.
08:18Si je suis honnête,
08:20la seule chose que je peux dire,
08:22c'est qu'à chaque fois que je parle avec Vladimir,
08:24j'ai des conversations intéressantes,
08:26mais elles ne mènent nulle part.
08:28Nous avons annulé la rencontre de Budapest
08:30avec le président Poutine.
08:31Je ne le sentais pas,
08:32je n'avais pas l'impression
08:33que nous allions atteindre notre objectif.
08:35J'ai donc annulé,
08:36mais nous le ferons à l'avenir.
08:38Alors, confiant quoi que,
08:40on le sent un petit peu,
08:41une demi-mesure de la part du président des Etats-Unis,
08:43mais vous le disiez,
08:44ces sanctions,
08:45c'est finalement Donald Trump
08:45qui passe à la vitesse supérieure, ça y est.
08:47C'est la première fois
08:48qu'il prend des sanctions concrètes,
08:51qu'on l'administration Biden avant avait prises,
08:54contre la Russie,
08:55donc c'est symboliquement important.
08:57Il a renoncé à livrer les tomahawks à l'Ukraine,
09:00comme lui demandait Volodymyr Zelensky,
09:03en partie pour de bonnes raisons.
09:05Il avait d'abord la crainte de l'escalade,
09:07mais c'est surtout le fait
09:08que les tomahawks sont extrêmement complexes à utiliser.
09:11nécessitent du temps pour former les gens,
09:13ne peuvent être tirés que,
09:16sinon par un certain nombre d'avions
09:17que seuls possèdent les Américains.
09:19Donc ça posait d'énormes problèmes
09:21de fait d'un engagement plus direct des Etats-Unis.
09:26C'est pour ça que Washington ne veut pas franchir ce cap-là.
09:28Voilà. En revanche, les Ukrainiens vont continuer
09:31à développer leur propre programme de missiles.
09:32Ils ont actuellement le Flamingo,
09:34qui a une portée quasiment équivalente.
09:36On est toujours au-dessus de 1 000 km,
09:39et proche de 2 000.
09:41Bon, voilà.
09:44Donc il fallait pour Trump marquer le coup,
09:47et il l'a fait avec ses sanctions
09:49contre les géants pétroliers russes.
09:51Ça peut avoir un impact réel sur la Russie,
09:54sur l'économie russe,
09:56que ça vienne notamment des Etats-Unis ?
09:58Oui, parce que d'abord,
10:01interdire à ces sociétés d'utiliser le dollar,
10:06c'est quand même, ça se les paralyse réellement.
10:08Ça bloque donc le commerce,
10:11l'exportation des hydrocarbures.
10:14En plus, ça oblige la Russie à baisser les prix.
10:15C'est quand même toute une partie du budget de l'État
10:18qui est déjà à l'accord du 40%
10:20et bouffé par tout ce qui est lié plus ou moins à la défense,
10:23qui, le budget de l'État,
10:25va devenir de plus en plus difficile.
10:26Gauthier, on entend un Donald Trump
10:28qui dit à chaque fois que je parle avec Vladimir Poutine,
10:32c'est intéressant,
10:33mais finalement, ça n'aboutit à rien.
10:35Qu'est-ce qu'il faut comprendre de cela,
10:36que Donald Trump a été naïf,
10:38naïf de penser que le président russe
10:39pouvait l'entendre, l'écouter ?
10:41D'abord, il est patient finalement, Donald Trump,
10:44parce que si vous et moi, nous avons des conversations
10:46avec quelqu'un dont on dit que ça ne mène à rien,
10:48en général, on les abrège rapidement.
10:51Là, ce qui est intéressant encore une fois,
10:53mais avec un appendice qui est un peu plus compliqué,
10:56c'est que dans ce que disait Marc,
10:59la complexité du maniement du Tomahawk
11:01fait qu'on a recours donc à d'autres sanctions financières,
11:05mais qui, pour la première fois,
11:06c'est ça qui est important,
11:08donnent l'impression, je dis bien l'impression,
11:10on verra, non pas que l'Ukraine puisse gagner,
11:13la guerre, mais qu'elle soit en position militaire
11:16d'aborder d'éventuelles négociations
11:18avec une meilleure santé,
11:21peut-être un léger ascendant,
11:23si vous voyez, si ces négociations ont lieu,
11:25par exemple, au moment où il y a un reflux
11:27de certaines troupes russes,
11:29ça peut être totalement autre chose,
11:31et c'est ça qui est important.
11:32Maintenant, quelle est la fiabilité de Trump ?
11:35Dans ce cas-là, on voit bien qu'effectivement,
11:38il y a la question, et ça c'est censé,
11:39la question des Tomahawks,
11:40mais la suite, qu'est-ce que c'est Trump ?
11:43C'est ça, c'est ce qu'il dit, il dit,
11:45bon, j'ai des négociations,
11:46j'ai des conversations intéressantes,
11:48mais le jour où ça ne m'intéresse pas,
11:50j'en vois tout balader.
11:51Et souvenez-vous aussi de ce qu'avait déclaré
11:53Jerry Vance, le vice-président américain,
11:56qui avait dit,
11:57c'était d'un infantilisme désarmant,
12:00si les choses deviennent trop compliquées,
12:02nous, on va voir ailleurs.
12:03Ben oui, elles sont compliquées.
12:05Donc on n'est jamais complètement à l'abri
12:08de cette espèce de désertion courage-fuyon américaine,
12:12en même temps, avec, dans un mouvement de balancier,
12:17l'idée que Donald Trump ne pourra pas accepter
12:20d'être trop ouvertement berné et roulé dans la farine,
12:24par Vladimir Poutine,
12:26qui lui ne change pas.
12:27Et dernière question qui découle de ce qu'a dit tout à l'heure,
12:30enfin, oui, dernière réflexion qui découle de ce qu'a dit Marc tout à l'heure,
12:33c'est vrai que l'économie russe subit,
12:35l'économie russe, sa partie, disons, civile, on va dire,
12:38subit de graves atteintes,
12:41mais est-ce que Vladimir Poutine en a curé ?
12:44Ça, je ne sais pas, je n'ai pas la réponse à cette question.
12:46Mais dans une dérive de type totalitaire,
12:49il se peut que Vladimir Poutine n'en ait cure.
12:51Marc ?
12:52Oui, alors là-dessus,
12:54on ne sait pas exactement,
12:55les sondages sont quand même
12:57plutôt sujets à caution à propos de la Russie,
13:00mais ce qui est sûr, c'est que de plus en plus maintenant,
13:03la population russe commence à subir les conséquences de la guerre,
13:06ce qui n'était pas le cas pendant longtemps.
13:08D'abord au niveau de l'essence,
13:09tout le monde,
13:11on décrit les queues devant les stations d'essence,
13:13parce que c'est une guerre de l'énergie aussi
13:15que mènent la Russie et l'Ukraine.
13:17Les Russes détruisent tous les réseaux électriques
13:20pour obliger les Ukrainiens à passer l'hiver dans le froid.
13:23Les Ukrainiens détruisent à peu près tout ce qu'ils peuvent
13:25comme raffinerie
13:26pour priver la Russie d'essence.
13:29Donc les gens font la queue des heures pour avoir un peu d'essence.
13:32Donc ça alimente la grogne.
13:33Les aéroports sont de plus en plus souvent fermés
13:35à cause des drones ukrainiens.
13:37C'est probablement une des raisons pour lesquelles
13:39les Russes ont lancé des drones,
13:41y compris contre les aéroports de Copenhague et autres.
13:45Donc il y a tous ces signaux qui s'accumulent
13:47et qui, quand même, font douter la population,
13:52même s'il y a une massive injection d'argent public
13:56dans l'économie russe et vis-à-vis de la population russe,
13:59il ne faut pas oublier que, pour les soldats qui signent un engagement,
14:02la paie, c'est 2 000 dollars,
14:03ou plus ou moins de 2 000 euros,
14:05ce qui est 4 fois le salaire moyen en Russie.
14:08Alors c'est vrai qu'on n'est pas payé longtemps
14:10vu le taux de mortalité sur les fronts.
14:12Mais malgré tout, il y a tout cet argent investi.
14:15Donc il y a à la fois une partie de la Russie
14:16qui continue à vivre et à profiter de l'économie de guerre,
14:19ce qui fait que le régime peut continuer.
14:21Et en même temps, on sent quand même monter déjà
14:24toute une partie de l'opinion
14:26qui commence à être un peu pénalisée
14:28avec les crevasses qui s'ouvrent, etc.
14:30C'est un ressort important, ça, effectivement.
14:32Parce que, dans ce que vous disiez, Marc, tout à l'heure,
14:34sur le fait que les Russes pouvaient en avoir assez
14:38et se rebeller, en quelque sorte,
14:40quelle que soit la manière,
14:41ça ne fonctionne pas forcément dans le cas
14:43où tout le monde est au même niveau,
14:46si vous voulez, dans un état de guerre,
14:48dans un pays en guerre,
14:49et avec une direction de type poutinienne,
14:51appelons-la totalitaire ou comme vous voulez,
14:53si tout le monde est au même niveau,
14:54on résiste en disant, justement,
14:56c'est les autres qui nous mettent dans la panale.
14:58Là, comme dit Marc,
14:59s'il y a une distinction, un décalage
15:01qui s'accentue entre une caste russe
15:04qui profite de cette guerre
15:06et ceux qui en font les frais,
15:07il peut y avoir quelque chose d'intéressant
15:09en termes, justement, d'opposition politique.
15:13Je ne sais pas comment, bien sûr,
15:14parce que c'est compliqué.
15:15Et puis c'est grand, la Russie.
15:17Quand vous voulez faire même une petite association,
15:19on a bien vu, Navalny, ce que c'était.
15:22Poutine a dit que c'était un réseau.
15:23Non, non, Navalny, c'était des gens volontaires,
15:26mais ce n'était pas un réseau,
15:28ce n'était même pas un parti.
15:30Donc c'est ça qui est compliqué,
15:31mais en même temps, ce décalage,
15:33si la direction russe n'y prend pas garde,
15:36effectivement, elle est de nature
15:37à mettre du sable dans les engrenages.
15:39– Dernier mot peut-être avant, non ?
15:41On va venir à un deuxième sujet.
15:43En l'occurrence, la Hongrie,
15:44c'est aujourd'hui fête nationale,
15:46l'occasion pour les partisans du Premier ministre,
15:49Victor Orban, et ses opposants,
15:51également, de se donner rendez-vous dans les rues,
15:53deux marches séparées pour faire entendre leur voix
15:55à six mois de législatives,
15:57qui s'annoncent d'ores et déjà très disputées.
16:00Florence Labrouillère,
16:01vous êtes à Budapest pour France 24.
16:04Bonsoir à vous.
16:06Alors, Victor Orban, c'est vrai,
16:07est un habitué de ces rassemblements.
16:09Est-ce qu'aujourd'hui,
16:10il a toutefois réussi à mobiliser ses troupes ?
16:13– Eh bien, écoutez, Victor Orban
16:15peut encore compter sur le noyau dur de ses fidèles.
16:19Alors, l'événement était quand même très organisé
16:21par le parti du Premier ministre,
16:22qui avait fait affrêter des bus
16:24pour faire venir des Hongrois
16:25vivant en province et à l'étranger.
16:28Et le Premier ministre a tenu le même discours
16:30qu'il tient depuis trois ans.
16:32Il a accusé Bruxelles,
16:33c'est-à-dire les technocrates de Bruxelles,
16:34de vouloir le renverser
16:36pour installer un gouvernement fantoche à Budapest,
16:39un gouvernement qui augmenterait les impôts
16:41et qui entraînerait la Hongrie dans la guerre.
16:44Un argument qui ne convainc plus
16:45que ce noyau dur de fidèles
16:48qui représente environ un million et demi de personnes.
16:51Alors, sur la place, aujourd'hui,
16:52il n'était que quelques dizaines de milliers.
16:55À l'autre bout de la ville,
16:56l'opposant, Peter Magyar,
16:58a, lui, rassemblé vraiment beaucoup de monde
17:00sur la place des héros.
17:01La place a une capacité d'environ 200 000 personnes
17:04et la foule débordait sur les avenues alentours.
17:06Et contrairement au meeting d'Orban,
17:08où les plus de 60 ans sont en majorité,
17:11eh bien là, il y avait aujourd'hui
17:12toutes les générations.
17:14Et on sent dans cette foule,
17:16qui est attirée par l'opposant Peter Magyar,
17:19un énorme ras-le-bol.
17:21Tous les trois mois,
17:22le gouvernement Orban lance une nouvelle campagne de haine
17:24contre un ennemi.
17:26Il y a trois mois,
17:26c'était le président ukrainien Zelensky.
17:29En ce moment, il y a des affiches géantes
17:31dans les rues contre Ursula von der Leyen.
17:33Et cette communication,
17:35qui coûte des millions d'euros,
17:36est payée par l'État,
17:38donc par le contribuable,
17:40alors que les hôpitaux et les écoles publiques
17:41sont démunis.
17:42Donc il y a une vraie exaspération
17:44dans la population.
17:46Alors le parti Tissa de Peter Magyar
17:48mène actuellement dans les sondages
17:50d'environ 5%.
17:51On pourrait penser qu'avec cette avance,
17:55il pourrait gagner les prochaines élections.
17:57Mais 5%, ce n'est pas suffisant,
17:59car le système électoral est très inéquitable,
18:01et notamment le découpage des circonscriptions
18:04avantage beaucoup le parti de Victor Orban.
18:07Merci beaucoup Florence Labrouillère
18:09depuis Budapest pour France 24.
18:12Marc, 15 ans, si je ne me trompe pas,
18:14que Victor Orban est le premier ministre.
18:16– On a aussi ce passage de 1998 à 2002,
18:20mine de rien.
18:22Si on regarde les intentions de vote
18:23qu'évoquait Florence avant les législatives,
18:27est-ce qu'Orban est vraiment en danger ?
18:2933% pour le FIDES,
18:3026% pour le TITSA,
18:33c'est une enquête publicus
18:34qui est parue du 3,
18:36enfin les sondages ont été réalisés du 3 au 10 octobre.
18:38– C'est la première fois que l'opposition
18:39est aussi forte, elle est devant.
18:41Péter Maguiar, d'une certaine façon,
18:44coche toutes les cases.
18:45C'est un ancien du FIDES, du parti d'Orban.
18:47– Oui, c'est un ancien allié d'Orban.
18:48– Voilà, c'est un ancien allié d'Orban,
18:50donc il sait parler aux électeurs d'Orban,
18:54il a parcouru tout le pays
18:56pour mobiliser cet électorat,
18:58donc voilà, il y a un risque réel.
19:00Ensuite, c'est compliqué,
19:02parce qu'Orban correspond à quelque chose
19:04de très profond en Hongrie.
19:06Ce n'est pas non plus un hasard
19:07qu'il est au pouvoir depuis 15 ans,
19:08au-delà de ces manipulations autoritaristes,
19:11au-delà de cette démocratie illibérale
19:15dont il s'est fait le chantre.
19:17Orban joue sur une chose,
19:18qui est la peur de la guerre.
19:19On en parlait dans le sujet.
19:21C'est-à-dire, à la différence des Polonais
19:23ou des Etabaltes,
19:24ils sont convaincus que la menace russe est là,
19:26qu'il faudra se battre, etc.
19:28Les Hongrois, comme les Slovaques,
19:30comme les Bulgares,
19:31sont d'idée,
19:32bon, la menace russe est là,
19:35il faut composer.
19:35C'était quand même la Hongrie,
19:39après la révolte héroïque de 1956,
19:42écrasée dans le sang,
19:43il y a eu Yann Oskalar,
19:44ce qu'on appelait le socialisme du goulache,
19:46on ne fait plus rien,
19:49on est tranquille,
19:51on est la baraque la plus gaie du camp socialiste.
19:53Et donc,
19:55Orban,
19:55qui en plus à l'origine est un dissident,
19:57c'était un des...
19:58Quand il était tout jeune en politique,
20:00il était grimpé sur un char,
20:02c'était juste après l'effondrement du mur,
20:04pour demander le départ des derniers soldats soviétiques de Hongrie.
20:08Donc,
20:08il est devenu toujours plus réactionnaire,
20:10toujours plus conservateur, etc.
20:11Mais il sait saisir cette humeur,
20:14et donc,
20:15il joue de ses peurs
20:16sur le fait que s'il n'est plus là,
20:17eh bien voilà,
20:18la Hongrie sera à paix,
20:20parce que la Hongrie,
20:21il est mitrophe de l'Ukraine,
20:23mais il n'y a pas d'armes qui passent par la Hongrie.
20:25En même temps,
20:26je t'enchaînerai juste là-dessus,
20:27Orban n'est plus compliqué,
20:28c'est pas que donc,
20:29qu'à cheval de Troie de la Russie,
20:31parce que les sanctions,
20:34il n'a jamais mis son véto.
20:36Il allait aux toilettes au moment du vote,
20:38ou il n'était pas à Bruxelles,
20:40ou, enfin, etc.
20:41Mais il n'a jamais bloqué la machine,
20:43surtout si en échange du fait qu'il ne la bloquait pas,
20:46il touchait des subventions.
20:47Voilà.
20:47Comme le disait tout à l'heure, Gauthier, effectivement.
20:48On appelle un intérêt bien composé,
20:50un win-win solution pour tout le monde.
20:52Mais, voilà,
20:53donc,
20:53c'est pour ça que c'est un phénomène complexe,
20:55il est pragmatique,
20:57et donc,
20:57six mois,
20:58c'est long,
20:58il peut se passer beaucoup de choses en six mois.
21:00– Précisément, Gauthier,
21:01c'est sur cette peur que Victor Orban capitalise
21:05pour essayer de gagner,
21:06là où son adversaire,
21:08Peter Magard,
21:09fait campagne essentiellement contre la corruption.
21:11Est-ce que ça peut suffire ?
21:12– Alors,
21:13là où il a une chance,
21:15Peter Magard,
21:16c'est qu'il arrive parfaitement
21:18à incarner à la fois cette sécurité
21:20que Orban a incarnée souvent,
21:23tout en étant pour le changement.
21:26Si vous voulez dire,
21:27si vous voulez qu'on reprenne l'image de tout à l'heure,
21:30c'est quelque chose qui permet de changer Orban
21:32tout en restant dans l'archipel du Goulash.
21:36C'est-à-dire que le bonhomme Magard
21:38n'est pas forcément quelqu'un
21:40auquel on peut confier sa chemise
21:42sans réticence.
21:44Simplement,
21:45je crois que les Hongrois
21:48sont arrivés à un point
21:49où le système Orban,
21:51pas forcément ce qu'il veut dire,
21:53le système Orban,
21:54mais son existence,
21:56est devenu insupportable.
21:57Pour ce que disait Florent Brouillard tout à l'heure
21:59à propos de l'éducation,
22:01des hôpitaux, etc.
22:02Et que là,
22:03il y a une sorte de relève
22:04qui s'annonce
22:05avec finalement pas mal d'ambiguïté.
22:08Et toujours en rapport,
22:09et c'est ça qui est intéressant aussi,
22:11c'est de souligner l'histoire
22:12et la manière dont les différents peuples
22:13ont perçu cette histoire.
22:15C'est vrai que la révolte de 1956 en Hongrie,
22:17c'est quelque chose
22:18dont on aurait pu penser
22:19que les Hongrois ne l'oublieraient jamais
22:21dans leur rapport avec le grand frère.
22:24Et aujourd'hui,
22:25on commence à peine à voir des slogans
22:28qui consistent à dire
22:29« Ruski krosa »,
22:31c'est-à-dire « les Russes rentrent à la maison ».
22:33C'est assez nouveau
22:34par rapport à ce qu'a été la Hongrie d'Orban,
22:37alors qu'effectivement,
22:38d'autres pays,
22:39comme la Pologne,
22:41c'est d'ailleurs assez comique
22:43ce que vous disiez tout à l'heure
22:44à propos du barraquement
22:45le plus joyeux
22:46du camp de concentration soviétique.
22:48Pendant longtemps,
22:48ce sont les Polonais
22:49qui ont dit « nous sommes
22:50le barraquement le plus joyeux
22:51du camp de concentration soviétique »,
22:53alors que chacun, finalement,
22:54aurait pu dire autant
22:55de sa propre maison.
22:57Mais encore une fois,
22:58le renouvellement,
23:00il est peut-être,
23:01alors au niveau des institutions européennes,
23:03et puis la pratique
23:04qu'avait adoptée Orban,
23:05qui consistait à aller aux toilettes
23:06au moment des votes,
23:07on va l'appeler pudiquement comme ça,
23:08il n'est pas impossible
23:10qu'un modeur
23:11qui aurait gagné
23:11la reprenne à son compte.
23:13– C'est une montée en puissance,
23:15là,
23:15à laquelle on assiste
23:15de l'opposition
23:16avec ces manifestations
23:17qui ont rassemblé,
23:18où finalement,
23:20il n'y a pas assez de place
23:20pour accueillir les supporters ?
23:22– Oui, mais dans ce genre
23:23de situation,
23:24l'opposition est toujours
23:25celle qui se mobilise le plus,
23:26qui occupe la rue,
23:27ce sont les jeunes,
23:27ils sont beaucoup plus disponibles,
23:29les partisans
23:30que l'on fait venir
23:31des campagnes
23:32sont en général âgés,
23:34c'est des exagénaires
23:34boire plus,
23:35ils viennent dans ce bus,
23:36il y a moins de monde,
23:37mais au moment du vote,
23:39c'est parfois plus compliqué,
23:41parce qu'il y a toute
23:41une majorité silencieuse
23:43dans le genre de situation
23:44qui ne va pas nécessairement
23:46dans la rue
23:46pour manifester
23:47pour l'autocrate au pouvoir,
23:51mais qui,
23:51au moment de mettre
23:52le bulletin dans l'ourne,
23:54vote avec la trouille,
23:55c'est-à-dire avec Orban,
23:56on sait où on va.
23:57Parce que cette réalité
23:58de la guerre
23:59aux portes de l'Europe,
24:00elle est très perceptive
24:02dans plein de pays
24:03où le même mécanisme joue.
24:05En Géorgie,
24:05par exemple,
24:06où le parti pro-Rousse
24:09au pouvoir
24:09a joué de ça
24:10pour gagner,
24:11en affichant des photos
24:13de ce qui se passe
24:13en Ukraine.
24:14Donc,
24:14ce sont quand même
24:15des peurs très profondes,
24:17donc ça dépend aussi
24:18d'un peu
24:19de ce qui va se passer,
24:20et si effectivement
24:21il y avait eu
24:21un sommet de Budapest
24:22ou s'il y a,
24:24ou s'il y aura
24:24un sommet de Budapest,
24:25c'est quand même
24:26une consécration
24:28pour Victor Orban.
24:31Alors,
24:31c'est techniquement difficile
24:32pour l'avion de Poutine
24:33d'arriver jusqu'en Hongrie.
24:35Il y a beaucoup
24:35de problèmes qui se posent,
24:36mais en même temps,
24:37voilà,
24:37il est au centre du jeu,
24:39il accueille les deux grands,
24:40et lui,
24:41il n'a cessé de répéter,
24:42grâce à nous,
24:43Budapest,
24:44la Hongrie est un îlot
24:45de paix
24:45au milieu d'une Europe
24:46où montent les tourmentes.
24:48Vous voulez réagir ?
24:48Oui,
24:49c'est complété,
24:50n'oublions pas une chose,
24:51je ne suis pas sûr
24:52que vous soyez d'accord
24:52avec moi,
24:53mais n'oublions pas une chose,
24:54c'est que le jour du scrutin
24:56en Hongrie,
24:57comme ça l'est,
24:57mais très très fréquemment
24:58en Russie,
24:59pour des gens
25:00qui vivent un peu reclus,
25:01avec des retraites
25:03pas très faciles,
25:04dans des endroits
25:05un peu tristounés,
25:06c'est un jour de fête.
25:07On prend le bus,
25:09on va chercher
25:09les électeurs,
25:11on leur dit
25:11venez,
25:12il y aura des sandwiches,
25:13de la bière
25:14et des brochettes,
25:15mais je vous assure,
25:16je vous assure
25:16comment ça marche,
25:17et vous voyez des gens
25:18qui ont des visages tristes,
25:20des visages,
25:21parce que ce sont des gens
25:21qui ont travaillé
25:22toute leur vie
25:23et qui ont une retraite
25:24minable,
25:25et qui tout d'un coup
25:25se disent
25:26mais j'appartiens,
25:27j'appartiens à ce truc-là,
25:28je ne suis pas considéré
25:29comme n'importe qui,
25:30je ne suis pas invisible.
25:31Et ça,
25:31malheureusement,
25:32c'est vieux comme le monde,
25:33mais quand vous voyez
25:34l'impact que ça peut avoir,
25:36notamment en Russie,
25:37dans un pays plus petit,
25:39alors certes à un niveau
25:40de vie un peu plus élevé,
25:41mais dans un pays plus petit,
25:42avec quand même
25:43de gros problèmes,
25:44justement,
25:44de discrimination sociale,
25:46on va dire,
25:47ça peut fonctionner.
25:47Et puis un dernier point
25:48que soulevé a raison
25:49Florence Labrouillard,
25:50le système est extrêmement compliqué,
25:51donc une avance
25:52de 5-6%,
25:53comme celle qui actuellement
25:55ne suffit pas
25:56à garantir une victoire
25:57au Parlement.
25:59Il s'agit de l'élection législative,
26:00Victor Orban,
26:01on l'oublie trop souvent,
26:02c'est l'homme fort de la Hongrie,
26:04mais il n'est qu'au Premier ministre.
26:06Effectivement.
26:07Merci à tous les deux,
26:08Gauthier Rybinski,
26:09Marc Semo,
26:10pour cette On va plus loin,
26:11à retrouver sur
26:12france24.com,
26:14la suite de l'Essentiel
26:15dans un instant,
26:16à 21h.
26:16Sous-titrage Société Radio-Canada,
26:18Sous-titrage Société Radio-Canada,
26:20Sous-titrage Société Radio-Canada,
26:21Sous-titrage Société Radio-Canada,
26:21Sous-titrage Société Radio-Canada,
Be the first to comment
Add your comment

Recommended