- il y a 5 jours
Jeudi 25 septembre 2025, retrouvez Frédéric Leroux (Gérant global et responsable de l'équipe Cross Asset, Carmignac) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.
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00:00Générique
00:00Parlons à présent des enjeux de marché avec Frédéric Leroux à mes côtés de Carmignac,
00:12gérant global et responsable de l'équipe Cross Asset de Carmignac.
00:15Frédéric, bonjour.
00:16Bonjour.
00:17Merci d'être avec nous depuis cette convention patrimonia à Lyon pour évoquer le monde selon Trump.
00:22C'est le dernier petit édito que vous avez écrit il y a quelques semaines à peine, Frédéric.
00:27Donc on a huit mois de recul sur la stratégie, la mise en place de la stratégie de l'administration Trump
00:34depuis son installation à la Maison Blanche le 20 janvier dernier.
00:37Qu'est-ce que vous en retenez entre le bruit permanent et les tendances de fond qui s'installent ?
00:43J'ai tendance à dire qu'il fait ce qu'il a dit qu'il ferait.
00:46Je crois que c'est extrêmement clair sur l'aspect des droits de douane.
00:50Tout le monde s'est amusé, s'est gaussé en disant « Trump's always chickens out ».
00:56On m'a dit « il se dégonfle toujours ».
00:58Il ne s'est pas dégonflé, il a commencé à 60 pour arriver à 15.
01:02C'est sa méthode, c'est dans son livre.
01:04C'est le playbook.
01:06Il commence par sidérer, comme ça après 15% ça devient acceptable.
01:10Et on a vu comment c'était devenu acceptable pour l'Europe par exemple.
01:12Donc il met en œuvre son programme.
01:16Il a été extrêmement fort sur l'immigration, probablement un peu trop.
01:24Mais donc pareil, c'était une promesse, elle est tenue.
01:27Il va un petit peu au-delà même de ses promesses avec la Fed, peut-être qu'on en parlera après,
01:32en essayant d'en prendre plus ou moins le contrôle.
01:34Et puis alors ce qu'on peut dire, c'est là où il s'est un petit peu planté,
01:39c'est 24 heures pour régler la guerre en Ukraine.
01:43Bon là c'est plus compliqué.
01:44Il a essayé, il n'y est pas arrivé.
01:46Mais j'ai envie de dire en tout cas sur le programme économique, il délivre complètement.
01:51Et je pense que derrière ça, contrairement quand même à ce que beaucoup d'observateurs estiment,
01:57il y a une vraie stratégie derrière avec une vraie finalité.
02:00Même si on a le sentiment que c'est des allers-retours, des contradictions, des négations,
02:06je crois qu'on va vraiment vers quelque chose de très précis concernant la politique de France.
02:10Oui, et donc si on reste dans la dimension macro, mais on peut élargir ce qu'on appelle la géoéconomie aujourd'hui,
02:18Frédéric, la finalité c'est quoi ?
02:20C'est obtenir une croissance nominale plus forte aux Etats-Unis que ce qu'on a pu avoir au cours des cycles précédents ?
02:25Exactement. C'est-à-dire qu'on a connu plein de belles années de désinflation, de taux très bas,
02:33qui auraient probablement pu théoriquement conduire à une baisse de l'endettement, notamment d'Etat.
02:39On a eu l'inverse partout dans le monde.
02:41Je pense qu'aujourd'hui, Trump est en train exactement de donner les conditions d'une croissance nominale forte,
02:48croissance réelle plus inflation, pour réduire le ratio d'aides sur PIB.
02:53C'est une vision personnelle. Il faudra un peu de temps quand même pour confirmer que c'est bien l'intention de Trump
03:01et des gens quelquefois très intelligents qu'il a autour de lui, pas le cas de tout le monde,
03:05mais certains d'entre eux le sont vraiment, réduire l'endettement pour redonner de la liberté finalement.
03:11C'est un petit peu ça sur le plan économique.
03:14Et donc ça veut dire quoi ? Ça veut dire que Trump travaille pour les gens qui ont voté pour lui.
03:18Il travaille pour la classe moyenne. Il travaille, ce qu'on va dire, pour Main Street.
03:24Et probablement, on va découvrir progressivement qu'il travaille moins que ce qu'on pense pour Wall Street.
03:30Qu'est-ce qu'il voit, Trump ? Il voit des gens qui ont envie qu'on s'occupe d'eux,
03:34qui ont certes le plein emploi, parce qu'aux États-Unis, on n'est pas loin et ça fait quelques années que ça dure.
03:40Et bravo sur ce plan-là pour toutes les politiques qui ont été menées avant.
03:44Mais ce plein emploi n'a pas du tout mené à des gains de pouvoir d'achat.
03:48C'est au contraire un déclassement progressif de la classe moyenne américaine, mais pas seulement américaine d'ailleurs.
03:54En Europe, je crois qu'on peut dire ça dans beaucoup de pays.
03:57C'est la mondialisation malheureuse.
03:59D'où cette volonté d'un nouvel isolationnisme, qui est une tendance historique américaine.
04:07Et là, ça revient, j'ai envie de dire, à la demande du peuple.
04:10Donc, travailler pour que le peuple ait le plein emploi est probablement aussi une vie un peu meilleure,
04:16qu'on sorte de ce déclassement.
04:18Si ça passe par une croissance nominale plus forte, ça veut dire que ça passe aussi par plus d'inflation,
04:24donc par des taux d'intérêt plus élevés, donc à terme, par des valeurs d'actifs chèrement valorisés,
04:31qui souffrent un peu, au profit de Main Street.
04:34Donc, un grand retournement, une grande rotation.
04:38C'est ça.
04:39C'est une idée, c'est peut-être qu'aujourd'hui...
04:40Il y a quand même une contrepartie ou un prix à payer à cibler une croissance nominale plus importante,
04:46et notamment avec la partie inflation, qui sera sans doute plus élevée que 2% en moyenne désormais.
04:51Frédéric, c'est une conviction forte chez vous ?
04:54Alors, c'est une conviction au moins personnelle, qui a justifié d'ailleurs qu'on monte un fonds exactement sur cette solution...
05:02Dédié à ce thème-là.
05:03Dédié à l'inflation pour les 10 ans qui viennent.
05:05Ce n'est pas consensuel, mais à la limite, ça me satisfait, ça me réconforte.
05:12C'est une position qui ne vous dérange pas.
05:13Et ce ne soit pas encore consensuel.
05:15Donc, oui, ça veut dire qu'il y aura des taux d'intérêt plus élevés, c'est clair.
05:19Donc, effectivement, une économie qui ne va plus fonctionner de la même façon.
05:22Avant, on arrivait au plein emploi en augmentant la valorisation des actifs,
05:27en créant donc un effet richesse positif pour les détenteurs d'actifs
05:31qui pouvaient se matérialiser en consommation additionnelle,
05:34qui créaient justement la demande et l'emploi.
05:36Aujourd'hui, je pense que progressivement, on va aller davantage en ciblant ce qu'on veut traiter,
05:41à savoir le pouvoir d'achat.
05:43Et c'est très paradoxal parce qu'aujourd'hui, ce qu'on entend souvent, c'est
05:47« Oh, s'il y a de l'inflation, la première victime, c'est la classe moyenne. »
05:50Or, si on réfléchit bien à des périodes de l'histoire pas si lointaines que ça,
05:56prenons par exemple les 30 glorieuses en France.
05:59Les 30 glorieuses se sont faites pour une bonne part dans une période inflationniste
06:03pendant laquelle la classe moyenne a émergé et pendant laquelle on pouvait acheter sa maison
06:07avec des taux d'intérêt à 15%.
06:09Aujourd'hui, avec des taux à zéro, nos enfants ne peuvent plus acheter une maison
06:12parce que la valeur est trop chère.
06:14Et donc, je pense qu'il faut...
06:16Je ne dis pas que c'est le schéma de base qu'il faut absolument intégrer dans sa gestion et dans sa vie,
06:20mais il faut être prêt à quelque chose qui ressemble un petit peu à ça,
06:23c'est-à-dire qu'une remise en cause importante de tout ce qu'on pense avoir appris des deux dernières décennies.
06:28Et ça passe par une mise au pas de la réserve fédérale américaine, Frédéric ?
06:31Forcément, parce qu'une réserve fédérale américaine complètement indépendante
06:36ne laisserait jamais se développer ce programme d'une croissance économique nominale forte
06:42avec une inflation qui monte.
06:43Et donc là, il faut au moins, dans l'esprit de Trump et des gens qui le conseillent,
06:48que la fête ne soit pas un ennemi complètement orthogonal de cette politique
06:52qui vise à faire de la croissance nominale forte.
06:56Et donc, il faut au moins que la fête soit un petit peu en retard
06:58dans ses réactions de resserrage monétaire
07:02et un petit peu à l'avance dans le cas inverse
07:04où, au contraire, il faut libérer un petit peu la liquidité.
07:07C'était d'ailleurs une position que défendait une Janet Yellen à l'époque,
07:10mais dans un autre monde, celui où on se battait contre la désinflation permanente,
07:15la grande modération salariale.
07:17Le monde a changé depuis, Frédéric.
07:19C'est un jeu dangereux.
07:21Il y a un risque quand même lié à cette perte,
07:25ce sentiment de perte d'indépendance de la réserve fédérale américaine.
07:28C'est-à-dire que comment est-ce qu'on va mesurer le succès de la politique économique de Trump ?
07:33Est-ce qu'on va se faire peur à certains moments
07:35avec une croissance qui pourrait être peut-être pas toujours au rendez-vous
07:39au moment où on l'attend, par exemple ?
07:40Oui. Non, c'est sûr que je pense que le pari, si c'est celui-là,
07:43il est quand même un peu dangereux.
07:45Mais dans le monde actuel, avec les excès qu'on a sur tout, sur la dette, etc.,
07:49j'ai envie de dire que tout est dangereux.
07:51Ne rien faire, trop en faire, tout est dangereux.
07:53Pour moi, le juge de paix, ou en tout cas la jauge qui dira ça marche, ça marche pas,
08:00c'est le ratio d'aide sur PIB, plus que la santé de Wall Street
08:05ou le prix du mètre carré américain de l'immobilier.
08:09Parce que justement, la cible, c'est Main Street, c'est plus Wall Street.
08:15Et d'ailleurs, Scott Besant l'a dit lui-même, il a dit, le focus de Trump, c'est Main Street,
08:22Wall Street s'en sortira très bien toute seule.
08:24Et donc, on n'est plus là pour faire monter Wall Street.
08:26Ça peut monter très bien en conséquence, ça peut ne pas.
08:29Si les taux montent très fort, il y a des secteurs qui en souffriront plus que d'autres.
08:33Notamment ceux sur lesquels tout le monde est très largement positionné.
08:37Voilà, il faut réfléchir à tout ça.
08:38Mais le juge de paix, la jauge du succès ou de l'échec, c'est le ratio d'aide sur PIB.
08:43Et je pense qu'effectivement, si les Américains, par cette volonté politique, économique,
08:48arrivent à le faire baisser, on aura probablement tous la solution
08:50pour régler la dérive qu'on a observée depuis 10 ou 20 ans.
08:56Ça implique une baisse continue du dollar, partant de la baisse déjà consommée,
09:02j'ai envie de dire, sur les 6-8 premiers mois de l'année, là, Frédéric ?
09:04Alors, il y aurait deux facteurs structurels de dépréciation du dollar.
09:09Mais il y en a un troisième facteur structurel qui pourrait peut-être inverser la donne
09:12ou en tout cas la ralentir.
09:14La première raison d'une poursuite de dépréciation du dollar,
09:17ce serait une Fed tellement dovish, donc favorable à des taux plus bas,
09:22qui fait que comparativement aux autres régions du monde,
09:24les taux américains seraient très bas et donc ferait baisser le dollar par rapport aux autres devis.
09:28Phénomène classique.
09:29Le deuxième facteur qui est un petit peu moins évident,
09:32mais qui historiquement se montre très bien,
09:34c'est si les taux montent aux Etats-Unis aussi à cause de l'inflation,
09:39il n'est pas impossible que les valeurs de croissance souffrent un petit peu plus que les autres
09:43parce qu'elles sont plus chèrement valorisées.
09:46Donc, ce sont elles qui ont un price earnings plus élevé,
09:49qui seraient la victime principale d'une hausse des taux durables.
09:52Donc, on vendrait une partie de nos actifs américains.
09:55Ce faisant, on vendrait du dollar pour aller dans les autres régions du monde,
09:58plus cycliques, puisque là, on retrouverait des opportunités très value, bon marché.
10:04Des deux facteurs qui sont baissiers de l'art.
10:05Je vends mes actions américaines, donc je vends le dollar.
10:07Et le troisième facteur qui est dans l'autre sens,
10:10il est intéressant aussi, c'est-à-dire si jamais cette politique marche,
10:14eh bien, à un terme, ça veut dire qu'il y a vraiment plus de croissance.
10:16Or, la relation la plus claire à long terme sur la valorisation du dollar,
10:23elle se fait avec le différentiel de croissance américain par rapport au reste du monde.
10:28Donc, si la politique réussit, finalement, le dollar pourra devenir plus fort.
10:31Bon, je n'ai pas envie de faire le pari.
10:33Je ne sais pas du tout ce qui se passera.
10:35Ce que j'ai envie de dire, c'est qu'à moyen terme,
10:36on est plutôt dans cette dynamique des taux qui montent,
10:39peut-être un petit peu de rattrapage des autres marchés mondiaux,
10:42qui conduiraient à une poursuite de la dépréciation du dollar,
10:45qui serait extrêmement favorable à l'univers émergent,
10:48et potentiellement aussi aux matières premières,
10:50donc à des thématiques qu'on a oubliées dans nos portefeuilles.
10:52Et donc, ce qu'on voit se développer,
10:53alors qu'on a oublié pendant très longtemps,
10:55mais ce qu'on voit se développer sur les marchés depuis le début de l'année,
10:59les marchés globaux, actions, par exemple,
11:01c'est que certes, le Nasdaq est en hausse,
11:03mais corriger le dollar, la hausse est déjà beaucoup moins importante,
11:07alors qu'on a des performances, par exemple, impressionnantes
11:10pour des marchés d'action en Chine, aujourd'hui.
11:12La Chine a démarré son bon quand elle a...
11:15Et l'Europe aussi tient bien, de ce point de vue-là.
11:17Elle a bien tenu, elle a un petit peu plus de mal maintenant,
11:19mais c'est vrai qu'entre la fin de l'année dernière,
11:21une bonne partie de cette année,
11:22elle a connu un rattrapage à l'égard des US,
11:25qui était d'une ampleur rarement vue.
11:28Probablement lié au positionnement très négatif sur l'Europe au départ,
11:31très positif sur les Etats-Unis,
11:32et donc cette rotation qui s'est un peu faite.
11:35La Chine, parce qu'on en parle,
11:36mais ce n'est même pas le marché le plus fort, d'ailleurs c'est la Corée.
11:39Oui, bien sûr.
11:40Mais la Chine a commencé son rebond
11:43quand certains ont commencé à la déclarer ininvestissable.
11:47À ce moment-là, quand on déclare un pays ininvestissable,
11:50c'est franchement tout le monde a vendu.
11:51Oui, c'est ça.
11:52Et donc à la moindre bonne petite nouvelle,
11:53il faut revenir dessus.
11:55Mais ce qui est très impressionnant,
11:57c'est que ce rebond chinois très fort
11:59se fait malgré des données macroéconomiques
12:01qui continuent à être extrêmement mauvaises.
12:03Et donc c'est bien une question de positionnement
12:06et simultanément peut-être d'anticipation à plus long terme
12:09d'une Chine qui finalement parvienne à trouver le moyen
12:13d'arrêter le ralentissement,
12:14redonner confiance à ses ménages,
12:16probablement en traitant définitivement la question immobilière,
12:19et à partir de là transformer l'économie chinoise
12:22en économie consommatrice.
12:24Ça peut être un tournant structurel quand même.
12:25Pour moi, ça fait partie de cette grande rotation inflation
12:28où les Chinois, après avoir imprimé la déflation
12:31depuis qu'ils sont dans l'OMC,
12:34vont devenir au contraire consommateurs,
12:35donc vont imprimer de l'inflation au reste du monde.
12:40Donc vous voyez la Chine qui pourrait devenir inflationniste,
12:42l'Allemagne qui maintenant va dépenser des milliards
12:43dans l'armement, dans l'infrastructure,
12:46qui va enfin participer positivement à la croissance mondiale,
12:49et les Etats-Unis qui vont s'occuper de la classe moyenne
12:51qui va consommer 100% de ce qu'elle va gagner en plus.
12:54S'il n'y a pas d'inflation avec ça,
12:55je ne sais pas ce qu'on aura.
12:56Bon, sur Assa, avec vous,
12:58Frédéric, merci beaucoup pour vos convictions
13:00et pour être venu les exposer sur Be Smart for Change,
13:03évidemment, dans Smart Bourse,
13:05à l'occasion de cette convention patrimonia à Lyon
13:07qui se tient cette semaine.
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