00:00Yves, vous avez vécu quelques jours dingues, un week-end de folie en Australie, et dans
00:08la folie, tirage, quart du final contre la France, elle est aussi folle la vie de capitaine
00:13de Coupe Davis ?
00:15Oui c'est sûr, en Australie on partait pas du tout favori, mais on s'est accroché
00:22du premier dernier poids, et au final ça a tourné en faveur avec quelques exploits
00:28à la clé, et puis voilà, le tirage contre la France, deux nations qui sont très proches,
00:36qui se retrouvent, ça va être un chouette moment, et je pense que ce sera une belle rencontre
00:41qui pour moi, même si elle sera très compliquée pour nous, même si on n'est pas favori, je
00:46pense qu'on a quand même, la rencontre risque d'être assez ouverte.
00:51Oui, ce tirage il a été coquin, mais je pense qu'on est tous contents d'avoir finalement
00:57ce duel France-Belgique, ça vous évoque quoi pour vous un France-Belgique en Coupe
01:03Davis ?
01:05Forcément des mauvais souvenirs pour ma part, maintenant je crois qu'il faut mettre ça
01:10de côté, on a eu des très belles rencontres contre la France, c'est une équipe incroyable
01:15avec un nombre de joueurs exceptionnel, donc ce sera compliqué, ils vont avoir beaucoup
01:21de possibilités, nous on en aura un peu moins, mais en tout cas ce qui est sûr c'est que
01:26je sais que je peux compter sur des joueurs qui sont archi motivés, qui ont un potentiel
01:32de dingue, qui ont une énorme envie, et ça c'est important quand tu joues en équipe,
01:37c'est d'être lié, d'être soudé, et ça je peux dire à 200% qu'on l'est.
01:42Donc vous, vous étiez acteur en 2017, est-ce que le levier revanche, il est à balayer
01:48avec les joueurs qui sont présents, qui n'ont pas connu ? Est-ce que vous, vous êtes
01:53capitaine, ce n'est pas la même chose que se retrouver à nouveau sur le cours, est-ce
01:58que ce levier-là, pour vous, il est pas vraiment, il est utilisable ou non ?
02:03Non, je pense qu'il est pas utilisable, parce qu'il n'y a aucun des joueurs qui étaient
02:07présents à ce moment-là, les deux seuls qui ont été présents, c'est Ruben qui est
02:12mon adjoint et moi. Donc voilà, je pense que ça ne va pas compter. La seule chose qui
02:19va compter, c'est de savoir que nous, on a une énorme envie, pas de revanche, une énorme
02:25envie de donner du premier au dernier point jusqu'au bout. Et comme je leur dis toujours,
02:30je veux juste qu'on aille dormir le soir en se disant que peu importe, on a perdu,
02:34gagné, mais on peut se regarder dans le miroir et dire qu'on a tout donné.
02:38Alors 2017, est-ce que déjà, est-ce qu'avec le temps, c'est un souvenir un peu moins
02:45douloureux ? Est-ce qu'on comprend des choses ou alors ça reste quand même quelque chose
02:50qui vous marquera toujours ?
02:55Ça marquera parce que voilà, je crois que jouer dans le stade Pierre Moroy, ça restait
02:59un moment magique pour tout le monde. Ça reste quand même une finale de Coupe
03:05Davis où il a failli gagner des matchs avant. Donc c'était une campagne quand même assez
03:10exceptionnelle de nouveau pour nous. Forcément, la finale était un peu catastrophique en termes
03:19de résultats. Mais quand on voit la manière dont David a joué tout le week-end, c'était
03:27de la magie. Franchement, moi, j'ai rarement vu un mec jouer aussi bien. Dommage qu'il
03:33n'y avait personne pour l'aider ce week-end-là. Mais non, ça restera un moment très dur à
03:42digérer parce qu'on a le sentiment qu'on aurait pu faire mieux. Et en même temps, un moment
03:48magique de la Coupe Davis, une finale, ça reste magique.
03:54Vous, vous avez aussi fait don de votre corps un peu parce que vous étiez blessé au coude.
04:00Vous aviez accéléré les protocoles, on va dire. Normalement, ça nécessitait plus
04:05de repos. Ça a été un tournant dans votre carrière, objectivement, cette rencontre de
04:11la Coupe Davis ? La Coupe Davis, en général, m'a pris beaucoup de temps, beaucoup d'énergie
04:18et m'a fait perdre énormément de semaines en termes de tournois. Après la France, je
04:23n'ai plus joué pendant un an. Donc, ce n'est pas une excuse. J'ai joué, il n'y a aucun
04:30problème. C'est juste que oui, ça m'a fait du tort parce que je n'ai joué pas dans les
04:36meilleures conditions. Et voilà, après cette rencontre-là, je n'ai plus fait un seul tournant
04:41pendant une année complète. Et forcément, ça marque un petit peu parce que c'est long.
04:50Ça vous rend plus conciliant en tant que capitaine ? Est-ce que vous comprenez parfois certains
04:55joueurs qui peuvent vous dire « Écoute, je ne suis pas trop chaud pour venir parce que
04:59physiquement, j'ai ce problème. Je sens que ça va handicaper ma saison ». Est-ce que
05:03ça joue sur votre management ? Honnêtement, non. Je peux comprendre dans un
05:13certain sens certains joueurs qui disent que la saison est longue, que c'est
05:17compliqué. Mais de mon point de vue à moi, je ne comprends pas comment on ne veut
05:24pas jouer en Coupe Davis ou qu'on refuse de jouer en Coupe Davis. Ça, c'est personnel.
05:28Bien sûr, si je mets mon avis personnel de côté, la saison, elle est très longue.
05:34Je le sais. Il y a des petits papas physiques. Il y a des moments où on a besoin de souffler,
05:40d'être en famille. Tout ça, je peux évidemment très, très bien le comprendre parce que j'ai
05:46aussi été joueur et je sais à quel point c'est difficile et long de faire une année.
05:51mais la Coupe Davis, quand je vois certains pays comme l'Australie, la France, tous ces
05:57pays-là, il n'y a quasiment aucun joueur qui refuse une sélection et je trouve ça bien.
06:06France Basique, c'est un derby, on peut le dire de cette manière. On a l'impression
06:11que les joueurs, on sait, que les joueurs se connaissent bien. Les rencontres sont souvent
06:16intenses, c'est électrique. Vous pensez qu'on va être encore dans le même registre
06:21dans ce quart de Final Eight ?
06:24J'espère. J'espère que ce sera un gros match. Après, c'est sûr qu'on ne va plus vivre
06:30comme on a eu à l'époque, des 5-7, des matchs exceptionnels. Ça restera 2-7 gagnants,
06:38ça restera toujours un peu plus triste malgré tout parce que même si on appelle toujours
06:43ça la Coupe Davis, pour moi, c'est quand même un autre format et c'est quand même
06:46un peu différent. Mais je pense qu'il y aura de la tension parce que forcément, on est
06:50dans les 8 meilleures équipes du monde. On a envie d'aller plus loin, on a envie d'aller
06:55jouer l'Italie ou l'Autriche. On a envie de montrer aussi qu'on n'est pas mauvais
07:01tennistiquement dans notre petit pays. Donc évidemment qu'on va tout faire et que la France
07:06va tout faire aussi. Donc ça risque d'être chaud, ça risque d'être tendu. Mais ça va être
07:13chouette parce que de nouveau, on se connaît tous très bien et que l'ambiance, je suis
07:17sûr, sera très bonne.
07:20Pour vous, c'est une frustration d'être capitaine dans ce format de Coupe Davis, de
07:25ne pas avoir pu avoir le capitana dans le format que vous avez connu en tant que joueur ?
07:30Je ne dirais pas frustrant, mais triste, très triste parce qu'on peut dire tout ce qu'on
07:36veut. Ça me fait mourir de rire, mais la Coupe Davis, elle est morte. Ce n'est plus la
07:40Coupe Davis, c'est la Coupe du Monde, c'est tout ce qu'on veut. On peut choisir n'importe
07:46quel mot, mais la Coupe Davis, elle n'existe plus vraiment. La Coupe Davis, c'était les
07:52rencontres à 2-2, les 5e set décisif, les matchs qui duraient pendant 5 heures. Donc
08:01oui, pour moi, c'est complètement différent. Frustrant, non, ça ne l'est pas parce que
08:04c'est comme ça et qu'on ne peut rien y changer. C'est une décision qui était peut-être
08:10inévitable ou est-ce qu'on aurait pu l'éviter, je n'en sais rien. En tout cas, c'est comme
08:14ça. Ça restera comme ça, en tout cas pour l'instant. C'est déjà bien qu'ils aient
08:19pu remettre deux rencontres home away. Je pense que c'était important pour les supporters
08:24de pouvoir voir leur équipe un peu jouer à la maison. Mais oui, je trouve ça un peu triste.
08:34Et on parlait tout à l'heure d'intensité d'électricité. Est-ce que c'est une crainte
08:38de vous retrouver avec un France-Belgique, avec peu de monde dans les tribus ?
08:45C'est le risque. C'est probablement ce qui va se passer. On peut faire ce qu'on veut.
08:50Oui, il y a des Français, il y a des Belges qui ont envie de venir voir. Mais c'est loin,
08:54ça coûte cher. Il faut prendre l'avion. Donc, il faut prendre un hôtel. Donc, évidemment,
09:01ça change la donne. Moi, je m'attends à ce qu'il n'y ait pas grand monde dans le stade.
09:07Il y aura du monde pour l'Italie. Et puis, ce sera basta, comme à chaque fois.
09:11Oui, ça aussi, ça enlève de son charme. Et puis, même pour vous, c'est aussi peut-être
09:16plus difficile à gérer en tant que capitaine. Un joueur qui est dans le dur,
09:20sans le soutien du public, sans une électricité, ça change quand même beaucoup de choses.
09:28Ça change. Ça change beaucoup de choses. Maintenant, on sait que c'est une grande,
09:33grande possibilité. C'est qu'il n'y ait pas grand monde. Ce qui est sûr, c'est que le peu
09:37de supporters qu'on aura, ou peut-être qu'on aura une agréable surprise, il y aura énormément
09:40de monde. Mais les supporters qui seront là, en tout cas, feront du bruit. Et puis, en tant
09:49que joueur, je veux dire, on a quand même un banc, on a quand même un capitaine, on
09:53a quand même des gens qui sont juste à côté, qui se lèvent, qui regardent, qui
09:57encouragent. Et s'il n'y a pas beaucoup de monde, il va falloir se servir de la petite
10:03énergie qu'on va pouvoir mettre sur le banc.
10:05Vous savez à quoi remonte la dernière victoire belge contre la France ?
10:09Non, il me semble que j'ai dû lire ce matin, sans le vouloir, que c'était 7-3 pour la
10:14France, mais je ne suis même pas sûr.
10:16Alors, 97, Christophe Van Gars qui bat Lionel Roux en match 5.
10:21Voilà. Grand monsieur Coupe Davis, Christophe. Voilà. Fabuleux.
10:26Il y avait une victoire par le passé. C'était vraiment à l'ancienne, 1919-1952. C'est les
10:32trois victoires belges. Finalement, vous, si vous gagnez, d'une certaine manière, vous marquez
10:37aussi l'histoire de la Belgique parce que ça fait 30 ans que la Belgique n'a pas battu
10:43la France. Il y a aussi ce charme-là de se dire qu'on peut faire quelque chose d'historique.
10:51Je rêve de battre la France, vraiment. Je rêve de battre la France. Je n'en peux plus
10:55de me faire chambrer tout le temps. Je n'en peux plus, que ce soit au football, n'importe
11:00quel sport. Je n'en peux plus que tous les Français prennent leur téléphone et m'envoient
11:05des WhatsApp, des messages. Je veux vraiment casser ça. On va faire tout pour empêcher
11:13que ça se reproduise.
11:15En 2017, tout à l'heure, vous disiez que David Gauvin avait été énorme. Mais face
11:19à lui, il faut aussi rappeler qu'il y avait une équipe monstrueuse. Il y avait Tsonga,
11:24Pouille, Gasquet, Herbert. À l'époque, les trois en simple étaient au très haut niveau.
11:29Est-ce que vous avez l'impression, objectivement, que la France est plus prenable cette fois
11:36et qu'il y a des meilleures cartouches peut-être cette fois ? Et qui plus est dans le format ?
11:45Le format change la donne. Ça, c'est inévitable. Donne plus de chance aux petites équipes.
11:52Ça, c'est certain. La France, oui, ils n'ont plus, comme à l'époque, trois mecs
12:00dans les quinze où ils sont complètement injouables. Mais c'est une équipe qui a des
12:05joueurs exceptionnels, que ce soit sur le circuit et peut-être même encore plus en
12:10Coupe Davis. Ils jouent pour leur pays avec une envie monstrueuse. Ils sont hyper homogènes.
12:17Ils ont plein de solutions. Donc non, c'est une équipe qui est peut-être sur papier,
12:23ne fait peut-être pas autant rêver que celle de l'époque. Mais sur le terrain, je pense
12:29qu'elle fait rêver quand même beaucoup de monde.
12:32En conclusion, la Belgique, ça crée à Bologne. On y croit ? C'est possible ?
12:38Compliqué, mais tout est possible. Je crois qu'on ne doit pas se mettre de limites.
12:42En tout cas, on est une équipe en construction qui avance petit à petit, qui suit les étapes.
12:51Peut-être que cette année, la marche est trop grande de parler de victoire. Je pense qu'elle
12:55l'est. Mais nous, on va jouer match par match, point par point. Et qui sait jusqu'où on peut
13:03aller. En tout cas, je sais que moi, j'ai des joueurs qui sont au taquet et qui ont une énorme
13:08envie. Et je sais qu'ils vont répondre présent. Et ça, c'est le principal.
13:12Merci.
13:13Merci.