00:00Conséquence de l'instabilité politique, cette question, la France risque-t-elle d'être placée sous la tutelle du FMI ?
00:08La menace a été brandie par le ministre de l'économie, Eric Lombard, qui a refusé dans un premier temps hier matin
00:13d'écarter l'hypothèse d'une intervention dans notre pays, du FMI, avant de rétro-pédaler.
00:19Dans l'après-midi sur Twitter, nous ne sommes aujourd'hui, écrit-il, sous la menace d'aucune intervention ni du FMI,
00:24ni de la BCE, ni d'aucune organisation internationale, on a besoin de comprendre, et on va comprendre grâce à vous, Christian de Boissieu, bonjour.
00:32Bonjour.
00:32Et un grand merci d'être avec nous ce matin sur Sud Radio, vous êtes professeur émérite à l'université Paris 1, vice-président du cercle des économistes.
00:39J'évoquais à l'instant le rétro-pédalage d'Eric Lombard, mais il y en a une au gouvernement qui assume véritablement de brandir cette menace, c'est Elisabeth Borne.
00:46Elle le dit dans Le Parisien ce matin, soit on redresse les finances publiques, soit on remet son destin dans les mains du FMI et de la Banque mondiale.
00:54Alors, oui ou non, Christian de Boissieu, la France court-t-elle réellement le risque d'être placée sous la tutelle du FMI ?
01:00Il y a toujours cette comparaison avec la Grèce, entre la France et la Grèce de 2010.
01:05Vous vous souvenez des débuts de la crise grecque qui a duré à l'époque 2-3 ans, et qui a vu le sauvetage de la Grèce par le FMI.
01:14Ça n'est pas la Banque mondiale, Mme Borne, à mon avis, fait une erreur, c'est la Banque centrale européenne qui interviendrait.
01:20En ce qui concerne la Grèce à l'époque, il y avait une Troïka, il y avait une troisième intervention, telle de la Commission européenne.
01:28Moi je dirais, aujourd'hui la France n'est pas la Grèce de 2010, mais il faut tout faire pour éviter qu'elle l'autre vienne.
01:34C'est ça le sujet.
01:35Donc je ne crois pas que le FMI soit aux portes de Paris, si vous voulez.
01:39Je dis simplement que les choses pourraient arriver plus vite que prévu, parce qu'en matière de finances, on voit bien avec la chute actuelle des bourses,
01:50en matière de finances, ça peut aller plus vite que prévu, plus vite que la musique, si vous voulez.
01:56Et attention aussi aux propos des uns des autres, on l'a vu avec le discours dramatisant, on peut le dire comme ça, de François Bayrou,
02:06ça a des conséquences sur le marché, finalement.
02:08Ah bah écoutez, l'économie, c'est quand même beaucoup de la psychologie.
02:13Bon, il n'y a pas besoin de faire de dessin pour le comprendre.
02:16Et donc, moi je n'ai pas bien compris d'ailleurs, pourquoi cette dramatisation, à la fois du côté de Bayrou et du côté du ministre des Finances, Éric Lombard.
02:25C'est-à-dire, certes, le problème central de la France, c'est le surendettement, mais ce n'est pas nouveau.
02:30Et Bayrou, François Bayrou, ça fait des années qu'il le dit.
02:33Simplement, je n'ai pas bien compris pourquoi cette échéance du 8 septembre, sinon peut-être pour essayer de contrer le mouvement tout cassé, tout bloqué du 10 septembre, en quelque sorte.
02:47Si vous regardez le calendrier. Pourquoi ? Parce qu'en fait, il y a deux sujets différents.
02:54Est-ce que l'entêtement excessif de la France est le problème numéro un ou un des problèmes majeurs ?
03:00La réponse est oui. Il n'y a pas de débat. Et je pense qu'il y a une majorité de partis politiques pour voter oui sur ce sujet.
03:08Le surendettement est un des problèmes ou le problème majeur.
03:12Deuxième question qui est différente, c'est, une fois qu'on a dit ça, comment on s'y prend pour aborder le sujet ?
03:18Donc c'est le débat sur le budget. François Bayrou, il n'avait qu'à laisser venir le débat budgétaire devant le Parlement,
03:27quand il est devant l'Assemblée nationale, à partir du début octobre.
03:30Là, c'est une opération kamikaze, donc un suicide individuel et collectif.
03:38Je n'ai pas bien compris pourquoi...
03:40En tout cas, vous l'avez dit Christian de Boissieu, la France d'aujourd'hui n'est pas la Grèce de 2010.
03:47Sous quel motif, qu'est-ce qui pourrait faire qu'on se rapproche de la Grèce de 2010 ?
03:53Et qu'on risque cette intervention éventuelle du FMI ?
03:56Ce qu'il pourrait le faire, c'est la crise politique.
04:00Le 10 septembre ou dans les jours qui suivent, avec l'incertitude que vous évoquiez en début du journal,
04:05la crise politique peut très bien provoquer une crise financière.
04:11Ce n'est pas la première fois que ça s'est vu dans l'histoire de France ou d'autres pays.
04:16Donc, c'est ça qui peut se passer.
04:17C'est-à-dire que si vous avez une crise politique majeure qui s'ouvre le 10 septembre,
04:22qu'est-ce qui va se passer ?
04:23Les taux d'intérêt payés par la France ont monté.
04:26Les agences de notation, qui jusqu'à présent ne sont pas méchantes avec nous,
04:32je veux dire, la note de la France reste encore, globalement parlant, une bonne note
04:37par rapport à des pays d'Europe qui, aujourd'hui, payent pourtant, sur le 10 ans,
04:43des taux d'intérêt moins élevés que nous.
04:45Je pense à l'Espagne, je pense au Portugal, je pense même à la Grèce,
04:50qui ont des notes moins bonnes que nous du point de vue des grandes agences de notation
04:54et qui, pourtant, payent des taux d'intérêt plus faibles que la France.
04:59Donc, ce qui peut se passer, c'est une sorte de rupture due à des phénomènes psychologiques,
05:05c'est-à-dire le fait que les investisseurs internationaux vendraient la dette française qu'ils ont,
05:13le fait qu'ils viendraient moins facilement aux échéances d'endettement de la France
05:21lorsque le Trésor doit renouveler sa dette.
05:25C'est ça qui peut se passer, c'est-à-dire qu'en matière de finances,
05:28les choses peuvent bouger beaucoup plus vite qu'on le croit.
05:32Merci, merci beaucoup à Christian de Boissieu d'avoir été avec nous ce matin sur Sud Radio.
05:36Je rappelle que vous êtes professeur à mérite à l'Université Paris 1
05:39et vice-président du Cercle des économistes.
05:41Merci pour vos explications et très bonne journée à vous.
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